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Lâcher prise

mercredi, mars 21st, 2012

 » Mon Dieu, donne moi le courage de changer les choses que je peux changer, la sérénité d’accepter celles que je ne peux pas changer, et la sagesse de distinguer entre les deux. »

C’est grâce à la rédaction de ce billet que j’ai découvert que cette prière de la sérénité généralement attribuée à l’empereur Marc-Aurèle serait en réalité l’oeuvre d’un médecin américain des années 30 (ce qui ne stoppera pas sa diffusion généralisée par fichier pps avec arc-en-ciels, chatons et photo du Dalaï Lama) ; elle est souvent utilisée par les Alcooliques anonymes. Mais revenons au sujet qui nous intéresse plutôt que de pousser plus avant sur cette question d’éthylisme et d’anonymat.

A mon humble avis, les enfants entrent dans la deuxième catégorie de choses. Toute la (bonne) volonté du monde n’y changera rien, on ne maîtrise pas grand-chose. Et s’il y a quelque chose que ces quelques années avec mes enfants m’ont appris, c’est bien que les choses sont infiniment plus simples et un poil moins épuisantes une fois qu’on l’a compris et accepté. Cette acceptation en particulier est loin d’être évidente mais honnêtement je trouve que mieux vaut consacrer le peu d’énergie qu’il nous reste à cela que s’échiner à tenter de maîtriser des choses plus incoercibles que Katrina ou Xynthia.

D’autant plus que le lâcher prise n’est pas une valeur très en vogue dans nos sociétés où la conjugaison de l’hyper technologie et de l’assurance tous risques nous donnent l’illusion d’avoir n’importe quelle situation bien en main. C’est simple, il suffit de bien travailler à l’école, ensuite on pourra faire de bonnes études et avoir un bon travail qui paiera le trois pièces, la purée de butternut bio quotidienne et l’iphone 4S. En cas de pépin de santé, la médecine et la sécu sont là, si quelqu’un vient nous embêter, la police et la justice sont là, en cas d’autre problème on sera dédommagé et/ou pris en charge. Evidemment dans la vraie vie ça ne marche pas toujours aussi bien, mais l’idée générale est là. Ce n’est pas un regret ou une critique, juste une constatation.

Mais pour les enfants

D’abord vous avez beau avoir suivi le régime « fille », pris consciencieusement vos omégas 3 et votre acide folique, programmé des séances de galipettes à J14/au pic de température et fait le poirier 15 minutes après, rien ne garantit que ça marche. Et –à quelques rares et douloureuses exceptions près- vous ne pouvez vous retourner contre personne pour protester. Les méthodes médicalisées n’offrent pas non plus 100% de succès, bien loin s’en faut. La grossesse vous montre ensuite que la maîtrise totale du corps est une belle utopie, et l’accouchement refuse tout aussi obstinément de rentrer dans les cases que les obstétriciens ont pourtant passé la plus grande partie du siècle dernier à peaufiner. On ne sait pas l’arrêter, pas plus qu’on ne sait le déclencher à coup sûr (même s’il reste toujours la césarienne).

Quant au bébé… il n’a pas lu les manuels de puériculture, il n’a aucune notion de savoir vivre et d’étiquette sociale, et ne semble en manifester aucune honte. Il refuse de reconnaître les règles qui encadrent le travail de nuit, ainsi que le droit à une pause syndicale à intervalles réguliers. Il ne sait pas que ça ne se fait pas d’élever la voix comme ça (et le tapage nocturne malheureux ?). Je crois que c’est finalement une des choses les plus dérangeantes pour les parents : être confronté à un être aussi primaire, aussi indifférent aux conventions sociales, qui piétine nos règles et notre cadre si minutieusement construits. On n’en a tout simplement plus l’habitude. N’importe quel adulte se comportant de cette façon serait immédiatement neutralisé, au minimum par une ordonnance restrictive. Mais là il n’est non seulement pas envisageable de s’en débarrasser mais en plus il faut s’en réjouir. Cela n’enlève rien au fait qu’il soit adorable, qu’on fonde devant ses ongles minuscules, qu’on se shoote à sa bonne odeur de bébé, qu’on soit profondément touché par son sourire. Juste qu’on n’a pas l’habitude.

Concrètement, une fois qu’on a intégré qu’on ne maîtrise ni le sommeil, ni l’alimentation, ni plus généralement le comportement de son enfant, on peut souffler un coup. Ca ne veut pas dire qu’il faut laisser tomber ou que les parents n’ont aucun rôle à jouer ni rien à transmettre, lâcher prise n’est pas laisser faire. Mais au final c’est l’enfant qui a le dernier mot : à moins de le droguer vous ne pourrez pas le forcer à dormir, à moins de le gaver vous ne pourrez pas le forcer à manger, à moins de le bâillonner/assommer vous ne pourrez pas le forcer à arrêter de crier. Je me souviens être tombée de ma chaise en lisant à la fin de Parents efficaces que les parents ne peuvent pas empêcher leurs enfants de fumer par exemple (là on parle d’adolescents, pas de nouveaux nés bien sûr). Ils peuvent bien sûr les décourager, les informer, ils peuvent même interdire, mais ils ne peuvent pas empêcher. Nous devons en être conscients.

Au quotidien, cela veut dire encore et toujours de définir ses priorités à un moment donné (car la plupart de ces priorités fluctuent au cours du temps sans que ce soit gênant) : je préfère que bébé dorme le plus vite possible ou qu’il dorme dans son lit ? je préfère que mon enfant apprenne à patienter et à gérer sa frustration ou qu’il se taise tout de suite ? Plus facile à dire qu’à faire, j’en fais chaque jour l’expérience, mais salutaire pour toute la famille. Je ne vais pas redévelopper ici, mais plutôt vous inviter à (re)lire ces deux billets sur l’éducation sans punition en cliquant ici et .

Ségolène en parlait aussi dans ce billet, avec une approche un peu complémentaire : Devenir parent : entre contrôle et confiance ?. J’ai bien aimé la métaphore proposée par une commentatrice, Marie, qui compare les parents à des jardiniers et les enfants à des plantes. Notre rôle est de leur procurer de bonnes conditions pour grandir (et on se doute que selon la plante et selon l’endroit -on ne cultive pas le blé en Italie de la même façon qu’aux Pays-Bas- ces conditions vont varier). Mais chacun sait que ce n’est pas en tirant sur la plante qu’on la fera pousser plus vite (bon je dis ça mais vu mon passif en termes d’orchidées crevées je ne suis peut-être pas la personne à écouter sur le sujet).

Je finirai sur une réflexion un peu (mais pas trop) hors sujet. Le besoin que nous avons de nous comparer sans cesse les uns aux autres est bien humain, et je crois que cela nous offre des possibilités d’amélioration et d’ouverture immenses. Mais vraiment, il me semble que nous aurons tous beaucoup à gagner quand nous aurons réalisé que « bien » ne se définit pas forcément par « mieux que le voisin », et qu’il peut même y avoir plusieurs choses différentes de « bien » sans que l’une soit mieux que l’autre. Que la justification et la validation de notre choix, de notre état, n’a pas obligatoirement à se faire en critiquant ceux des autres. Là encore un bel exercice de lâcher prise

Image : oui, c’est une blague pourrie, et oui, j’assume (même si elle n’est pas de moi).

Eduquer sans punition (2)

mercredi, mai 18th, 2011

Après avoir vu les généralités dans l’épisode 1, passons maintenant à la partie la plus intéressante : c’est bien beau tout cela, mais au jour le jour, on fait comment ? Autant vous le dire tout de suite, ce n’est pas simple. Moi je vois ça comme un investissement à long terme, et à défaut de savoir quel résultat cela aura sur mes enfants dans quinze ou vingt ans, je me dis qu’au moins moi j’aurai essayé d’avancer. Voilà donc quelques idées, à partager et à améliorer :

  • Choisir ses combats. Est-ce que ce comportement/cette action me dérange ? Est-ce que ça me dérange maintenant ou est-ce que j’anticipe que ça pourrait dans d’autres circonstances me déranger ? Est-ce que ça aurait dérangé ma mère/mon grand-père/la voisine ? Accepter que l’enfant n’a pas un comportement parfait à tout moment, et qu’il ne deviendra pas pour autant un délinquant multi-récidiviste. Avoir un enfant prêt à l’heure et en ayant tout fait comme Papa et Maman voulaient, ça relève parfois (souvent ?) de la science fiction. Par exemple accepter sans s’énerver que poussin change trois fois de t-shirt le matin est souvent plus efficace que de faire toute une scène pour qu’il mette le premier qu’il avait choisi. C’est énervant (et ça sent le vécu ?). Mais vous êtes (à peu près) à l’heure pour partir. Les exigences trop nombreuses de notre rythme de vie occidental sont à mon avis intenables par des enfants, surtout en bas âge.
  • S’adapter aux circonstances. En ce qui me concerne, je n’ai pas les mêmes attentes à la maison et ailleurs (chez des amis, dans un lieu public…). Cela demande beaucoup d’énergie de tout le monde d’obtenir un comportement adéquat aux exigences du lieu. Les enfants comprennent bien que la plupart des règles ne sont pas gravées dans le marbre (de la même façon qu’ils s’adaptent à la nounou, la crèche, l’école… qui ont tous des règles différentes). Savoir s’adapter à toute situation me semble une compétence plus utile que suivre les règles aveuglément.
  • Considérer l’enfant comme un handicapé. J’espère que cela ne heurte personne, je veux dire par là qu’il ne faut pas oublier qu’il n’a pas les mêmes capacités psychiques et émotionnelles qu’un adulte. Aménagez au maximum l’espace et l’emploi du temps pour ne pas avoir à surveiller et à interdire en permanence. N’ayez pas honte si votre enfant fait LA crise en public, la fameuse où il se roule par terre en hurlant. Si vous ressentez le besoin de vous justifier auprès de passants indignés, vous pouvez user de pieux mensonges : « Il n’a pas fait sa sieste » « Il fait ses dents » « Il a mangé trop de sucre » « Il est malade » ; si vous êtes un peu joueuse « L’exorcisme n’a pas bien fonctionné » « J’aurais du arrêter le crack pendant la grossesse » « Je ne sais pas pourquoi cet enfant croit que je suis sa mère ». Et puis n’oubliez pas que l’enfant a sa propre échelle de valeurs qui peut vous paraître incongrue (Pouss1 peut se mettre dans des états pas possibles parce qu’une goutte d’eau est tombée sur sa chaussette). Et que la vôtre lui semble probablement tout aussi étrange. Il n’y a pas de raison qu’il soit le seul à faire des efforts pour intégrer la vôtre, et il sera probablement plus enclin à le faire si vous montrez le bon exemple.
  • La sécurité physique. C’est souvent brandi comme l’argument ultime pour justifier la tape : « il doit arrêter de mettre ses doigts dans la prise » « il a failli se faire écraser » etc. Malheureusement les petits enfants ont besoin d’explorer et d’expérimenter, et il leur faut du temps pour apprendre à maîtriser ces pulsions. En attendant, il faut répéter et retirer physiquement l’enfant du danger, autant de fois que nécessaire. La différence de stature physique permet généralement à l’adulte d’effectuer ce geste sans avoir à infliger volontairement de douleur à l’enfant. Taper ou punir fait comprendre à l’enfant qu’il ne faut pas se faire prendre, mais ne l’empêchera pas de recommencer quand le parent a le dos tourné. Je ne dis pas que c’est facile et agréable, mais cela fait partie du job de parent, comme se lever la nuit et changer des couches Erika-style.
  • Des conséquences plutôt que des punitions. Nous ne pratiquons pas la punition, si on la définit comme la privation d’une chose agréable (ou l’obligation d’une autre désagréable) sans lien avec le « délit ». Par contre il y a des conséquences, expliquées à l’avance. Les nuances sont subtiles mais importantes. Pas de « tu n’as pas obéi donc tu vas au coin/dans ta chambre », mais il peut y avoir « je suis tellement fâchée contre toi que je ne veux pas te voir maintenant ». Pas de « tu n’as pas été sage donc tu es privé de télé », mais « si tu traînes trop pour te brosser les dents nous n’aurons pas le temps de raconter une histoire ». Et lorsque c’est possible, privilégier la réparation : si l’enfant a cassé ou renversé, il peut nettoyer ou au moins participer au nettoyage, en fonction de son âge. Avec un petit, il peut suffire de commencer à nettoyer en l’enjoignant de participer pour qu’il vienne ramasser. La capacité d’anticiper les conséquences de ses actions est très longue à acquérir (jusqu’à l’adolescence, et je ne serais pas surprise qu’une proportion non négligeable d’adultes ne l’aient pas), donc il n’est pas forcément justifié d’être très strict sur l’application des conséquences.
  • Le morceau de sucre aide la médecine à couler. La récompense est le pendant de la punition et est à manier avec précaution. Il vaut mieux éviter de s’embarquer dans des deals du style « Si tu mets la table tu auras un bonbon/un jouet », sous peine de devoir rémunérer toute participation de l’enfant à la vie familiale (sans parler des augmentations). Mais les jours de crise, quand rien ne se passe comme prévu, quand alors que vous avez déjà 10 minutes de retard le poussin ne veut pas mettre ses chaussures, qu’en plus vous êtes malade et crevée, un peu d’huile dans les rouages ne peut pas faire de mal. Et pour cumuler les péchés, vous pouvez même corrompre avec des sucreries. Une fois n’est pas coutume.
  • On peut toujours consoler. Accepter la tristesse, la colère, le refus de l’enfant ne veut pas dire céder (mot qu’il vaut d’ailleurs mieux éviter, tant il positionne d’emblée un rapport de force qui n’a pas lieu d’être). Si l’enfant pleure parce que vous vous êtes mis en colère, ou que ses actions ont finalement mené à une conséquence indésirable, je ne crois pas qu’il soit contre-productif de le consoler, même si ça n’empêche pas de réanalyser à froid ensuite : quand tu fais ça, cela me met en colère. Ce n’est pas accepter quelque chose que vous trouvez inacceptable, mais aider l’enfant à digérer ce fait. Inutile d’appliquer une double peine. Cependant, on peut être tellement en colère qu’on ne peut pas consoler l’enfant, mieux vaut ne pas se forcer et le dire à l’enfant.
  • Parler de ses émotions. On peut dire à son enfant qu’on est triste de le quitter le matin, même si on est en même temps content de travailler. Qu’on n’a pas envie de ranger la maison, même si après coup on est content d’avoir une maison propre. Qu’on aimerait bien passer la journée au lit à manger des chips en regardant la télé, même si on est heureux d’avoir un boulot. Les parents ont le droit d’être ambivalents et les enfants aussi. Et ils se sentent souvent mieux si on rêve un peu avec eux, sur ce jouet dont ils ont tant envie ou cette petite sœur qu’on aimerait renvoyer à l’expéditeur. Il est aussi important de faire le tri entre ses propres problèmes et ceux causés par l’enfant : il est tellement plus simple de se défouler sur un petit qui vient de faire une bêtise que de confronter un boss tyrannique. On peut déjà dire à l’enfant qu’on est de mauvaise humeur pour des raisons qui ne dépendent pas de lui.
  • Prendre du recul. Ce n’est pas parce que vous donnez un bonbon que vous vous faites bouffer. Réfléchissez deux minutes à tout ce que vous avez décidé pour l’enfant : l’endroit où vous habitez, l’école où il va, l’heure à laquelle il y va, les habits qu’il porte, la nourriture qu’il mange (même s’il peut donner son avis, c’est quand même vous qui faites les courses au final)… C’est bien vous le plus grand, le plus fort, le plus riche, le plus malin dans l’histoire. Pas la peine d’en rajouter. Pas la peine de dire non juste parce qu’il faut qu’ils apprennent la frustration/qu’ils sachent qui commande. La vie est pleine de frustrations, ne vous fatiguez pas à en créer pour le plaisir. Ce n’est pas un signe de faiblesse si vous reconsidérez une demande de l’enfant après que celui-ci l’a fortement exprimée (euphémisme pour « s’est mis à hurler en se roulant par terre »). Vous lui montrez que vous prenez en compte ses sentiments, vous lui apprenez à négocier et à faire le premier pas. Évidemment ça ne veut pas dire qu’il faut systématiquement accéder à ses demandes, mais qu’on n’est pas obligé de toujours refuser par principe. Pas plus que les adultes les enfants ne comprennent l’arbitraire. Et avec le temps ils apprennent à formuler des arguments moins bruyants.
  • Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. Ce n’est pas parce qu’une « leçon » n’est pas intégrée immédiatement qu’elle ne le sera jamais. Et les moments de crise sont rarement les plus propices pour cela. Mais à force de répétition certaines choses finissent par ressortir alors qu’on ne les attendait plus. Les enfants ont régulièrement des phases, où ils semblent bloqués dans un comportement potentiellement irritant pour nous (que ce soit l’obsession pour les prises électriques ou la peur du bain par exemple), et souvent le plus simple est d’accompagner comme on peut jusqu’à ce que ça finisse par passer.
  • Anticiper et prévenir (plutôt que menacer). Bien expliquer les règles, même les plus évidentes, en joignant le geste à la parole si approprié (« ici on parle tout doucement » « le bébé est fragile, voici comment on le touche »). Avertir des conséquences des différentes options que peut prendre l’enfant (« si tu continues à éclabousser partout, tu vas sortir du bain » « si on finit vite les courses on aura le temps de passer au parc avant de rentrer »). Attention aux menaces irréalistes (« je vais partir sans toi ») et au chantage émotionnel (« tu ne veux pas rendre Maman malheureuse » « tu ne m’aimes plus ») dont les conséquences peuvent être dévastatrices. Personnellement je refuse le chantage au père Noël (ou autre du même genre), je trouve que ça pollue la fête que j’aime et que dont je veux que les enfants profitent à fond.
  • Donner le bénéfice du doute. « Il me provoque. » « Il me cherche. » Quand vous venez de dire non et que votre poussin recommence la même bêtise en vous regardant droit dans les yeux… Selon Isabelle Filiozat, un tout petit qui fait exactement ce que vous venez de lui interdire en soutenant votre regard cherche en réalité à ce que vous lui confirmiez que oui, c’est bien cela qui est interdit. De façon générale, les bambins, en vrais scientifiques, ont besoin de vérifier que les mêmes causes donnent les mêmes effets. D’autant plus si l’effet en question est intéressant : un (ou deux) parent(s) qui se lève(nt) en faisant une drôle de tête et un drôle de bruit. C’est aussi un excellent moyen de dire : « Maman arrête de traîner sur les blogs et viens t’occuper de moi »… De façon générale, un petit qui a un comportement inapproprié : soit ne sait pas que c’est inapproprié, soit n’arrive pas à s’en empêcher, soit cherche l’attention parentale, soit tente d’exprimer ou de réagir à un problème, qu’il soit le sien ou celui d’un autre. Rien de tout cela ne justifie de s’en prendre une.

Ce sont là bien sûr des pistes, pas toujours faciles à mettre en pratique au jour le jour. Si seulement l’éducation se résumait à quelques trucs et astuces… Et n’allez surtout pas croire que parce que j’ai pondu ces jolis billets je suis SuperWonderMaman, « à peu de choses près, parfaite en tout point » comme Mary Poppins. Ça c’est la théorie, la pratique elle est plus hasardeuse. Il y a toujours et régulièrement des situations auxquelles on ne comprend rien, où tout le monde crie et pleure, où rien ne semble marcher, des cas où on se dit a posteriori qu’on a bien merdé. Mais bon an mal an, on avance. Et j’espère que vous partagerez aussi vos expériences sur ce qui a fonctionné ou pas.

D’autres lectures utiles (en plus de celles citées dans le 1er tome) -j’éditerai ce paragraphe au fur et à mesure des suggestions, en commentaire ou par mail à lapoulepondeuse @ gmail.com) :

Des livres dont on a parlé dans la basse-cour :

D’autres livres :

  • Isabelle Filiozat en a écrit plusieurs, outre ceux cités hier ; je n’ai pas tout lu mais d’autres les ont trouvés utiles. Toutes les infos sur son site internet.
  • Comment aimer un enfant de Janusz Korczak
  • L’enfant de Maria Montessori
  • Un enfant heureux de Margot Sunderland
  • Le hors série de Grandir autrement sur l’éducation sans violence

Des petits docs disponibles gratuitement sur le net :

D’autres blogs qui ont parlé du sujet :

Les suggestions de la basse-cour (cf commentaires) :

  • L’attachement : approche théorique, par Nicole et Antoine Guedeney
  • Sanctionner sans punir : dire les règles pour vivre ensemble, par Elisabeth Maheu
  • Poser des limites à son enfant et le respecter, par Catherine Dumonteil-Kremer
  • Apprivoiser la tendresse et Papa, Maman, écoutes-moi vraiment, par Jacques Salomé
  • Eduquer sans punir, par Thomas Gordon
  • Une émission de radio québécoise Une enfance pour la vie

Image : Quand vos enfants vous rendent chèvre, (re)lisez un petit Calvin et Hobbes pour vous détendre et relativiser un peu.

L’enfant et le couple

mardi, mai 3rd, 2011

D’un point de vue purement biologique, l’enfant est la principale raison d’être du couple. Socialement, c’est également souvent le cas, même si les sociétés occidentales voient l’émergence d’une proportion croissante de couples et d’individus revendiquant le désir d’une vie sans enfant. Sans compter que le schéma familial classique avec le couple parental et les enfants qui en sont issus coexiste maintenant avec d’autres formes de parentalités : familles recomposées, homoparentalité, etc. Sans vouloir ignorer la diversité des situations, je vais me concentrer sur la famille « traditionnelle » mais surtout n’hésitez pas à vous en éloigner dans les commentaires.

Avant même la venue de l’enfant, cela peut déjà être un sujet de discorde : l’un souhaite être parent et pas l’autre, et voilà un beau sujet de friction. Et même si les deux sont d’accord mais que l’enfant ne vient pas… Un désir d’enfant non satisfait est une blessure profonde, qui peut conduire à la rupture. Quant à un bébé surprise, c’est aussi souvent une sacrée zizanie : quand l’un veut le garder et pas l’autre, quelle que soit la décision finale, c’est un sacré coup porté au couple.

Et quand un enfant désiré par ses deux parents s’annonce… Comme déjà expliqué ici, beaucoup d’adultes ne réalisent pas vraiment ce qu’est un bébé et ce qu’il demande. Sans vouloir verser dans les clichés, il est relativement fréquent que la future mère, une fois le deuxième trait apparu sur le bâtonnet, commence à se documenter sur la question. En même temps, plus difficile de faire comme s’il ne se passait rien quand avant même d’avoir atteint le centimètre votre future progéniture vous transforme en marmotte vomissante. Le suivi de la grossesse et les choix faits pour l’accouchement sont des sources de débat : comment choisir quand on n’a pas la même hiérarchie des risques ? D’autant plus qu’autant la mère a évidemment le dernier mot sur ce qui concerne son propre corps, autant le père a un avis légitime sur ce qui a des conséquences pour l’enfant : comment concilier cela (même si légalement c’est l’avis de la mère qui l’emporte) ? Que faire si la mère veut accoucher à la maison (et qu’elle trouve une sage-femme pour l’accompagner…) et que le père trouve cela trop dangereux  ? Ou qu’elle ne veut pas de péridurale alors qu’il ne peut envisager de la voir souffrir ? A l’inverse, c’est le père qui peut être persuadé des bienfaits d’une naissance avec peu d’intervention tandis que la mère désire une césarienne.

Et même dans les cas où personne ne se posait trop de questions, la naissance -toujours pleine d’imprévus- peut être vécue de façon bien différente. Parfois c’est le père qui a vu ce qu’il n’aurait pas voulu voir : sa femme dans une situation peu glamour, sa femme en danger ou encore une équipe en train de s’affairer autour d’elle et du bébé tandis qu’il reste planté là habillé en schtroumpf sans pouvoir rien faire. Il y a des cas où c’est la mère qui vit très mal un accouchement, pourtant décrit par le classique « La mère et le bébé vont bien ». Mais ce n’est pas parce qu’on a un corps qui fonctionne qu’on va bien, même si bien sûr ça aide !

La période du post-partum est particulièrement délicate. La femme, si elle n’est pas Rachida Dati, n’est en général pas au top (et c’est un euphémisme). On oublie à tort l’adage de grand-mère « Neuf mois pour le faire, neuf mois pour le défaire », et on s’imagine qu’à peine le flan démoulé on va revenir instantanément à l’état pré-conceptionnel. Mais rien que pour le ventre, imaginez-vous un peu : l’utérus, qui en temps normal fait à peu près la taille d’une figue fraîche, pèse à terme près d’un kilo, pour une capacité de plusieurs litres. Les abdominaux s’allongent d’environ 20 cm. Et tout cela n’est que la partie émergée de l’iceberg (comme déjà dit ici). Bref, alors que la femme est molle (dans une société qui valorise la fermeté), a la foufoune en chou-fleur (alors qu’elle doit porter des garnitures périodiques ultra-super-plus), les cheveux qui tombent, les poils qui poussent, les seins en obus, les hormones qui font pleurer et j’en passe (notamment certaines difficultés courantes des débuts de l’allaitement), elle doit apprendre à vivre avec un bébé, qui en prime ne ressemble pas du tout à ce qu’elle avait lu dans Laurence Pernoud. Le père, qui a parfois du mal à s’investir dans la grossesse voit d’un seul coup les choses devenir extrêmement concrètes, ce qu’il peut trouver difficile à assimiler. En bref, c’est un moment très délicat pour le couple. Et si vous rajoutez un soupçon de belle-maman qui dit que votre nouveau-né vous manipule déjà et/ou d’un pédiatre un peu psycho-rigide pour qui vous ne faites rien comme il faut, c’est un miracle qu’il n’y ait pas plus de crimes passionnels pendant le post-partum (peut-être les gens sont-ils simplement trop épuisés ?).

Et puis très vite il faut prendre des décisions, faire des choix : sommeil, alimentation, réponse aux pleurs… autant de sources possibles de dissensions voire de franches disputes. C’est vrai : avant de décider de faire un bébé à deux, qui a vraiment vérifié la totale compatibilité de vision de la chose au sein du couple ? Qui s’est posé des questions dont il ignorait jusqu’à l’existence ? D’autant plus qu’à 4 heures du matin, après deux mois de nuits hachées, ce n’est pas vraiment le moment idéal pour débattre de sa conception philosophique de l’éducation. Vous pouvez penser être rodés pour le deuxième (troisième, etc), mais en réalité le problème se repose et de façon différente. Chaque parent a une relation différente avec chaque enfant, et cela change selon les périodes. Et bien sûr chaque enfant pose des problèmes différents.

Alors, après ce tableau quasi-apocalyptique, que peut-on proposer ? Bien sûr, et comme toujours, chacun doit trouver ses propres solutions, adaptées à sa situation, mais voici quelques pistes (rien de bien révolutionnaire hélas).

  • Définir ses priorités éducatives. Qu’est-ce qui n’est vraiment pas négociable pour chacun, et qu’est-ce que chacun fait à sa sauce ? Cela est utile de façon générale, quand on doit confier l’enfant, et pour l’éducation en général : choisir ses combats… Par exemple moi je me fiche bien de la façon dont on donne le bain (du moment que le résultat est à peu près satisfaisant), voire même que les enfants en prennent un, mais je suis intransigeante sur les tapes et fessées : j’en veux zéro.
  • Définir des priorités familiales et individuelles. Avec l’arrivée d’un enfant, il est illusoire de penser qu’on va mener la même vie qu’avant. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut plus rien faire mais qu’il faut choisir. Il peut être salutaire de se garder une activité à soi, pour soi, mais c’est maintenant quelque chose à négocier entre parents. Ça peut aussi être l’occasion de (re)discuter du partage des tâches ménagères…
  • Anticiper le pétage de plomb et passer le relai. Les enfants, dès la naissance, savent nous pousser à bout comme personne. Avant de leur hurler dessus, ou pire de les violenter, dire à l’autre qu’on n’en peut plus et aller se défouler plus loin. Et être aussi disponible que possible pour rendre la pareille.
  • Laisser l’autre s’occuper de l’enfant sans l’abreuver de conseils ni le surveiller. Particulièrement important à trois heures du matin : celui qui s’est levé agit et l’autre la boucle, à moins d’être sollicité (ou que l’autre franchisse une ligne rouge -cf premier point- ou craque). Et à mon avis c’est une clé importante pour que chacun construise SA relation avec l’enfant. Certaines femmes disent qu’étant comblées par leur bébé leur couple passe au second plan. Pas un problème en soi, mais à mon avis il faut laisser au père la possibilité d’être lui aussi comblé par bébé.
  • Rester à peu près solidaires en public. Les jeunes parents sont sous le feu de critiques constantes de l’entourage, et c’est vraiment plus facile à supporter à deux. Alors bien sûr on peut se moquer gentiment des petites manies de l’un ou de l’autre, mais quand une des grands-mères suggère que le lait maternel n’est pas assez nourrissant, ou qu’il ne faut pas céder aux caprices d’un petit de 15 jours qui veut toujours les bras, on fait bloc.
  • Prendre sur soi. Le manque de sommeil rend irritable, voire méchant. Chacun doit faire un effort pour ne pas en rajouter, en particulier quand c’est le dixième réveil à deux heures du matin. Remettre les critiques et les griefs à un moment plus serein, et à tête reposée, quand on est plus à même de faire le tri entre ce qui nous tient vraiment à cœur et ce qui n’est pas si grave. Éviter autant que possible de se disputer quand c’est déjà la crise avec bébé (qui hurle depuis une heure/ne veut pas se rendormir/etc). On gère ça d’abord et ensuite on en discute. De façon plus générale, il faut accepter que l’enfant absorbe beaucoup d’énergie et que dans un premier temps au moins le couple se met un peu entre parenthèses. Mais comme disait Chantal Birman dans une vidéo que je ne retrouve plus, il faut que l’enfant consomme équitablement l’énergie des deux parents pour résoudre les problèmes de décalage de libido entre père et mère.
  • Éviter les reproches culpabilisateurs. En matière d’éducation et de puériculture, il y a peu de relations de cause à effet vraiment établies, et surtout ce sont généralement de grandes tendances dont on ne sait pas à quel point elles sont valables pour le bébé qui vous intéresse. Donc inutile de rabâcher quinze fois que c’est parce que Chéri a oublié le bonnet que Junior a attrapé une bronchiolite. Ou que c’est parce qu’il est trop/pas assez porté qu’il pleure dès qu’on le pose. On fait des choix, on les assume, on change si ça ne convient pas/plus, et si bébé ne ressemble pas à un article de Famili c’est peut-être juste parce que c’est un vrai bébé.
  • Se permettre un peu de mauvaise foi de temps en temps. Quand vous voyez d’autres familles, accordez-vous le petit plaisir de constater entre vous à quel point votre enfant est vachement plus mieux et que c’est sans nul doute grâce à vos immenses talents parentaux. Bien sûr, c’est en contradiction complète avec le point précédent (qui vous oblige à rester second degré) mais c’est ça qui est bon. C’est aussi pour cela que cela doit rester entre vous, sous peine de manquement grave à l’étiquette parentale. [NB : à mes amis et famille qui lisent ce blog : le Coq et moi ne faisons jamais ça bien sûr, ayant de base une pleine confiance en nos capacités parentales…]
  • Respecter le timing de l’autre. Un bébé c’est plein de premières fois, certaines qu’il provoque lui-même (première dent, premiers pas…), d’autres que ses parents initient : première fois qu’on le laisse, première fois qu’on le laisse à un autre qu’un parent, première nuit dans son lit (s’il a commencé dans celui des parents)… Il me semble que c’est au parent qui est prêt en premier de ne pas faire violence à l’autre, mais aussi à l’autre d’entendre le désir de son conjoint de passer une étape, même si c’est pour la différer finalement.

Bien sûr, difficile de parler de couple sans parler de sexe, mais on l’a déjà fait ici et . Enfin ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, disent certains : si votre couple survit aux enfants, il n’en sera que plus soudé.

Photo : Le couple du moment. Même s’ils n’ont pas (encore) d’enfant, je suis sûre que ça pourrait les intéresser…

Le congé parental

mercredi, novembre 17th, 2010

sound-of-music_l1231807675 Prête à tout pour la basse-cour, j’ai testé pour vous… le congé parental !

D’abord le congé parental d’éducation, c’est quoi ? Il s’agit d’une disposition du droit du travail français, qui permet au parent qui le souhaite de prendre un congé total ou partiel jusqu’aux trois ans de l’enfant. Il suffit que le parent ait plus d’un an d’ancienneté à la naissance de l’enfant pour que le congé ne puisse être refusé par l’employeur, qui devra simplement en être averti par lettre recommandée un mois avant qu’il ne commence (le congé, pas l’employeur). Tous les détails sont sur le site du ministère ad hoc (je ne mets pas son nom complet, ça change à chaque remaniement). Ce congé parental peut ouvrir le droit à une allocation de la Caisse d’allocations familiales appelée complément de libre choix d’activité, sous certaines conditions (tout est expliqué sur le site de la CAF). Selon le revenu du parent qui prend cette option, cela peut avoir plus ou moins de conséquences sur le budget familial. Quoi qu’il en soit cela mérite d’être étudié soigneusement avant de prendre la décision.

Pour ma part, je ne suis pas vraiment desperate housewife dans l’âme, mais plusieurs éléments m’ont poussée à allonger mon congé maternité (dix semaines en post-natal) de six mois de congé parental. D’une part je trouve le congé post-natal vraiment trop court, tant pour moi que pour bébé, d’autant plus avec un projet d’allaitement (même si allaitement et travail ne sont nullement incompatibles, c’est tout de même plus simple à la source, surtout avec un tout petit). D’autre part, il se trouve que nous avons déménagé deux semaines après la naissance de Pouss2 (ce que je ne recommande à PERSONNE), la destination de notre déménagement n’ayant été connue que peu de temps avant. Donc avec un Pouss2 né en janvier et un Pouss1 qui devait commencer l’école en septembre, il m’a semblé plus simple d’éviter de chercher en panique un mode de garde pour deux enfants, qui en outre n’aurait duré que quelques mois pour l’un, et d’avoir un peu de temps pour accompagner la première rentrée de Pouss1.

Le hic c’est qu’avec un Coq qui cumulait un travail prenant (et à près d’une heure de chez nous) avec la prise en charge du déménagement et des travaux qui s’ensuivaient, je me suis retrouvée à m’occuper quasi-seule de mes deux poussins. Comme vous vous en doutez sûrement, ça n’a pas été facile tous les jours. Forte de cette expérience, voici quelques conseils à considérer si l’aventure vous tente (notez que ça peut aussi servir en congé maternité) :

  • Se faire aider. Autant que possible. S’occuper entièrement seul d’un (et a fortiori plusieurs) enfant(s) n’est pas un fonctionnement habituel pour l’être humain. Je ne suis pas spécialiste, mais il me semble qu’aucune société ne fonctionne de cette façon. Bien sûr c’est en général la mère qui s’occupe principalement de ses enfants, mais elle trouve toujours quelqu’un à qui les refiler de temps à autre (les « allomères » dont parle Sarah Blaffer Hrdy). Pour le cas qui nous intéresse, ce n’est pas parce que vous avez pris un CPE que vous devez vous occuper des enfants 24h/24 7j/7. Bien sûr il y a l’autre parent, et quand c’est possible la famille élargie, ainsi que les amis, voisins, etc. Il existe aussi des modes d’accueil collectifs pour ce type de situation : les haltes-garderies, qui ne prennent généralement les enfants que pour quelques demi-journées par semaine. J’ai d’ailleurs eu une place pour Pouss1, qui a plus servi à l’ouvrir sur d’autres horizons qu’à me libérer du temps puisqu’au final j’avais au mieux 2h30 avant de retourner le chercher (et -léger détail- Pouss2 sur les bras). Certaines crèches proposent aussi des créneaux à temps partiel pour boucher les trous. Bien entendu, l’aide ne s’arrête pas à la garde d’enfant. Congé parental d’éducation ne veut pas dire qu’en prime vous devez vous farcir toute la popote, le ménage, les courses etc. Nous sommes des fidèles d’Auchandirect et avons eu la chance de pouvoir garder notre femme de ménage pendant le congé. Honnêtement je pense que si j’avais du faire le ménage en prime l’issue aurait été soit un placement des enfants suite à une visite de notre domicile par les services sociaux soit mon internement en psychiatrie. Par contre je trouve que ce n’est vraiment pas évident de caser deux enfants, à tel point que je n’ai même pas pu profiter du congé pour faire ma rééducation périnéale (et je ne vous parle même pas d’activités un peu plus présentables dans les dîners mondains).
  • Voir du monde. L’idéal est d’avoir quelques amies (désolée pour les quelques hommes concernés…) dans la même situation et proches géographiquement, mais ça n’est pas toujours évident. A défaut, il y a de plus en plus d’initiatives pour les futurs et jeunes parents qui permettent de sortir un peu et de rencontrer du monde : réunions d’associations sur l’allaitement (voir ici l’article de Ségolène sur le sujet), ateliers de portage ou de massage de bébé, baby gym, maisons vertes, etc. Pour savoir ce qui se passe près de chez vous, vous pouvez par exemple contacter la PMI (qui ne sert pas qu’à culpabiliser les mères allaitantes). Ainsi on peut échanger sur les difficultés et découvrir qu’on n’est pas les seuls chez qui ça ne se passe pas comme chez Laurence Pernoud. Les bébés (même très jeunes) aiment bien aussi qu’il y ait un peu de mouvement et trouvent généralement nos activités (lire, être sur l’ordinateur, téléphoner…) ennuyeuses. Et puis vous allez découvrir les bébés des autres, qui d’une part sont tous moches par rapport au vôtre, et d’autre part font généralement un truc qui vous semble franchement insupportable et que le vôtre ne fait pas, ce qui vous le rendra d’autant plus aimable. Pour ma part, j’ai trouvé que le gros hic de beaucoup de ces activités est qu’elles se déroulent en début d’après-midi : LE moment de la (longue) sieste de Pouss1. Et bien sûr ce n’est pas parce que vous êtes en congé que la vie doit tourner autour des couches. Pourquoi pas voir une expo ? Faire une balade ? Du shopping ? Il peut aussi y avoir des concerts « adaptés », pas trop bruyants (évitez le pogo sur Rage against the machine), où on peut facilement aller et venir, par exemple un groupe de jazz dans un bar (maintenant qu’ils sont tous non fumeurs -les bars, pas les groupes de jazz)), ou un événement en plein air, où d’éventuels cris de bébé passeront plus facilement inaperçus. En ce qui me concerne j’ai fait un certain nombre de répétitions musicales (je chante) avec Pouss2 sous le bras, ça s’est plutôt bien passé. Si vous avez peur de sortir avec bébé, commencez facile : pas trop loin, un endroit d’où on peut partir facilement, avec des gens bienveillants… Le portage rend les choses vraiment plus pratiques, j’ai pu faire plein de choses seule avec les deux (métro, TGV, McDo, cafés, etc). Attention, autant internet est vraiment devenu un super lieu de rencontre pour les parents, autant ça n’est pas la même chose que de voir des gens en vrai. Ne serait-ce que parce que pour le poussin, se retrouver au milieu d’autres personnes, éventuellement dans un lieu inhabituel, c’est bien plus intéressant que d’être chez lui avec sa mère vissée à son ordinateur.
  • Connaître et respecter ses limites. Les enfants n’ont pas leur pareil pour nous pousser à bout, et plus loin encore. Avec le manque de sommeil qui est généralement le lot des parents d’enfants en bas âge, c’est un cocktail explosif. Encore une fois, c’est normal de n’avoir pas envie de s’occuper tout le temps de ses enfants, même (et surtout…) si on est en congé parental. Repérez les moments où la mayonnaise monte pour essayer si possible d’éviter les situations explosives. Acceptez qu’on ne peut pas toujours être disponible pour accompagner ses enfants, idéalement en passant le relai à quelqu’un, et si personne n’est disponible en vous isolant. Personnellement je pense qu’il vaut mieux dire à un enfant qu’on craque et le laisser hurler seul que de péter une durite devant lui (ou pire sur lui). Evidemment, parfois ce n’est pas possible, parce que même si le grand ne veut pas mettre ses chaussures vous avez quand même rendez-vous chez le médecin pour le bébé dans dix minutes (ah ça sent le vécu ?). J’ai testé pour vous, et je peux vous dire que de surenchérir dans les cris et l’énervement ne fonctionne pas, sans compter que c’est complètement contre-productif à moyen terme, l’enfant fonctionnant surtout par imitation. C’est plus efficace de rester calme et déterminé, même si c’est beaucoup plus difficile. On peut sortir momentanément évacuer sa rage en criant un bon coup et/ou en tapant sur un objet inanimé (avez-vous donc une âme ?), ou encore se promettre une « récompense » pour plus tard (un carré une tablette de chocolat, un bon bouquin/une bonne série, un coup de fil, un achat plaisir… enfin ce qui vous motive !). Dans une journée, essayez de ménager quelques plages pour vous (à commencer par une douche, et non bébé ne deviendra pas psychopathe parce qu’il a pleuré tout seul le temps que vous vous rinciez les cheveux).
  • Préparer l’après. Même si vous voulez vous consacrer à vos enfants, y compris après leurs trois ans, il y a bien un moment où vous aurez envie de faire autre chose. Personnellement ça ne me semble pas très sain de construire toute sa vie autour de ses enfants (ce qui ne veut pas dire qu’on ne peut pas s’y consacrer à 100% sur certaines périodes bien sûr). Si vous reprenez votre poste à l’issue du congé, « facile ». Il « suffit » de chercher un mode de garde dès que vous avez votre date de reprise et de vous tenir un peu au courant de ce qui se passe avant celle-ci. Si vous êtes dans un secteur où les choses bougent très vite, ça peut être utile de se remettre un peu dans le bain avant, par quelques lectures, ou en allant à un colloque par exemple. Si vous souhaitez vous réorienter, voir point 1 : il va être essentiel de trouver quelqu’un pour garder un peu votre poussin pendant vos diverses démarches pour mûrir votre projet (si vous n’en avez qu’un -de poussin, pas de projet- et qu’il fait de grandes siestes ça aide). Cette coupure peut vraiment être un bon moment pour réfléchir à autre chose. Enfin une autre option peut être de s’engager dans le secteur associatif, si vous n’avez pas de projet professionnel à court/moyen terme, afin de changer un peu d’air.

Pour ma part, le bilan est plutôt positif ; de toute façon je ne voyais pas vraiment de meilleure alternative, ce qui aide grandement à faire accepter la situation par tout le monde. D’ailleurs, lorsqu’est venu le moment de reprendre, je dois dire que j’étais un peu en overdose des poussins. J’étais donc parfaitement unifiée dans ma décision de les confier, l’un à l’école et l’autre à la crèche, ce qui a été un atout certain pour que les poussins s’adaptent à la nouvelle donne. Au niveau professionnel, n’en déplaise à Elisabeth, je n’ai pas l’impression de m’être trop tiré une balle dans le pied, ayant retrouvé à peu près ce que j’avais laissé, et l’interruption (un peu moins d’un an au total avec le congé maternité) ne se verra même pas sur mon CV puisque je n’ai pas quitté mon poste. A dire vrai, étant passée assez rapidement d’un extrême (m’occuper à plus de 95 % des enfants) à l’autre (travailler à temps complet à une heure de mon domicile), je crois que l’idéal serait sans doute une solution intermédiaire (qui n’est pas compatible avec mon poste actuel).

Au-delà des études, qui montrent tour à tour que les enfants qui ne sont pas gardés à temps plein par leurs parents (voire leur mère pour les plus réacs) deviennent ou pas des délinquants asociaux, je pense que c’est ça qui est vraiment important : un choix réfléchi et assumé, plutôt qu’une contrainte plaquée sur les parents.  Sans compter que dans la vraie vie tout ne se passe pas toujours comme on a envie, et certains choix auxquels nous aspirons peuvent nous être refusés par les circonstances (que ce soit de devoir travailler pour des raisons financières ou de devoir rester à la maison par absence de mode de garde -ce qui serait le cas d’environ un quart des congés parentaux, d’après le rapport Tabarot). Un enfant s’épanouira plus difficilement s’il passe ses journées avec une mère dépressive, qui ressent la situation comme un enfermement imposé. Et inversement, il aura plus de difficultés à s’adapter à la séparation si elle est très mal vécue par un de ses parents. Dans une société où les parents sont relativement isolés, le développement de modes de garde de qualité et répondant à la diversité des situations (temps partiel, accueil ponctuel…) est en tout cas une vraie nécessité. Enfin je sais que ce n’est pas le style de la basse-cour, mais par pitié finissons-en avec les « mommy wars » : la vie avec des enfants en bas âge est difficile et fatigante, qu’on travaille ou pas. Chaque situation a des avantages et des inconvénients, et surtout chaque famille a des contraintes et des envies différentes. La parentalité n’est pas un concours.

Photo : une scène prise sur le vif pendant mon congé, au pied de la montagne Sainte-Geneviève

Frères et soeurs : entre complicité et rivalité

mercredi, novembre 18th, 2009

freres_et_soeurs Les séances de yoga prénatal auxquelles je participe comportent en prime une sorte de bibliothèque de livres pour parents, j’en récupère donc un ou deux chaque semaine. Je ne vais pas vous faire des comptes-rendus de tous mais la rubrique Bibliothèque du blog risque de croître un peu plus rapidement que d’habitude.

Le livre du jour est un petit manuel, écrit par deux psychologues (Elisabeth et Jean-Pierre Darchis) pour la collection J’en parle avec mon enfant de Nathan. Il intéressera donc particulièrement ceux qui attendent un deuxième (ou plus). J’ai trouvé le contenu bien fait mais pas révolutionnaire. Disons que je n’ai pas appris grand chose (je n’ai pas la science infuse, loin de là, mais j’avais déjà lu ici et là d’autres choses sur le sujet), mais cela remet un certain nombre de choses au clair pour les parents d’une fratrie. Quelques uns de ces messages-clés :

  • Ce n’est pas à l’aîné de décider si ses parents doivent avoir ou pas un autre enfant, pas plus que de choisir le prénom ; la responsabilité serait trop lourde et cela doit rester exclusivement celle des parents.
  • L’amour parental ne se divise pas, il se multiplie, et il ne se mesure pas en temps passé avec l’un ou l’autre.
  • Traiter ses enfants de manière équitable ne veut pas dire tout faire pareil avec chacun mais autant que possible répondre à leurs besoins spécifiques (en fonction de l’âge et de la personnalité).
  • L’aîné a le droit d’être jaloux, de ne pas aimer le cadet, et de l’exprimer tant qu’il n’agresse pas le petit.
  • Il est normal que le grand ait un comportement perturbé à l’arrivée du bébé mais il ne faut pas renoncer à lui poser des limites pour autant : c’est au contraire un besoin important pour lui et une preuve d’amour parental.

Au niveau de la forme, le livre est assez bref (90 pages écrit gros), et écrit sous forme de questions-réponses, dans un style très clair et facile à lire. Bien qu’écrit par deux psys, il évite l’accumulation de clichés et poncifs psychanalytiques qui peuvent vite devenir pesants. Bref c’est une lecture rapide et agréable (en prime pas très chère, 7€ et des brouettes), qui pourrait même convenir aux coqs habituellement peu motivés par ce type de bouquin (j’avoue que le mien a passé son tour, sa réponse : « j’attends que tu fasses le résumé sur ton blog »…). Cependant si les quelques points que j’ai cités vous sont familiers, l’intérêt du livre semble moindre et vous risquez de rester un peu sur votre faim.

Un sociologue parle d’éducation

jeudi, octobre 1st, 2009

copieur Bon OK c’est un article de méga-flemmasse mais Clemys a eu la gentillesse de m’envoyer le lien et je trouve les observations de ce Monsieur très justes et pertinentes alors je ne peux que vous les faire passer.

Interview de François de Singly parue dans le journal Le Monde du 29 septembre 2009 (je fais un copier coller car après un certain temps les articles deviennent payants… bon ce n’est probablement pas super légal mais tant pis j’ose…) :

François de Singly, sociologue à l’université Paris-Descartes, a publié de nombreux livres sur la famille, la vie privée et l’adolescence. Dans son dernier ouvrage, Comment aider l’enfant à devenir lui-même ? (Armand Colin, 160 p., 16,50 euros), à paraître le 1er octobre, il s’inscrit en faux contre les discours sur « l’enfant roi » et décrypte nos nouvelles manières d’éduquer les enfants.

Qu’est-ce qui a changé, en un siècle, dans le regard porté sur l’enfance ?

Dans les sociétés dites de la première modernité, de la fin du XIXe siècle jusqu’au milieu du XXe, la socialisation se résumait à l’apprentissage des règles : le petit apprenait les usages de la vie en commun, les préceptes d’hygiène, les manières de table et, ce faisant, il apprenait l’autorité et l’obéissance. L’application des valeurs de la philosophie des Lumières, comme l’autonomie, était repoussée à l’âge adulte, et encore.

Le grand tournant, c’est la seconde modernité, c’est-à-dire les années 1960. Le regard sur les enfants se modifie profondément en raison, notamment, du discours des psychologues symbolisé, en France, par Françoise Dolto. Les adultes se mettent à considérer que l’enfant est singulier et que le but de l’éducation est de l’aider à devenir lui-même. L’enfant doit donc être respecté en tant qu’être unique, mais aussi en tant qu’être humain : il devient un sujet de droit, comme le proclame la Convention internationale sur les droits de l’enfant de 1989. Ce mouvement est contemporain de la scolarisation massive et de l’apparition d’une « culture jeune » : les enfants ont des goûts musicaux, des vêtements, des jeux propres à leur génération, ce qui était impensable il y a un siècle.

En quoi ce changement de regard sur l’enfant a-t-il transformé le rôle des parents ?

A la culture de la transmission et de l’obéissance succède peu à peu une culture de la découverte et de l’accompagnement. Le parent continue à se soucier de la transmission des valeurs familiales, mais il doit également prendre en compte la singularité de l’enfant, respecter ses droits et accepter la présence de la culture de ses pairs. Je dis souvent qu’il propose à l’enfant une boîte de briques – des activités culturelles, des traditions familiales, des moments de sport -, mais que la règle du jeu est plus ouverte : les parents, comme l’enfant, ignorent ce qui sera construit. Plusieurs modèles, identités, peuvent être bâtis à partir des mêmes briques !

Le « voyage » éducatif a donc profondément changé. Dans la logique de la transmission, le parent avait une autorité supérieure et il savait à tout moment ce qui était le mieux pour l’enfant : il était le guide sévère d’un voyage organisé qui passait par de « grandes » étapes imposées.

Dans la logique de la découverte, l’important n’est pas tant le but du voyage que le voyage en tant que tel : c’est en lui-même qu’il est formateur, car il permet à l’enfant d’accéder à l’autonomie et de développer un soi raisonnable.

Les détracteurs de ces nouvelles manières d’éduquer affirment que ces « parents-accompagnateurs » ont renoncé à tort à l’autorité et à la contrainte…

Quand on regarde de près, en sociologue, les familles d’aujourd’hui, on s’aperçoit que, contrairement à ce que dit, par exemple, le pédiatre Aldo Naouri, les parents fixent des cadres, et ils en fixent même beaucoup : les enfants choisissent très rarement leurs heures de coucher, ils doivent respecter les rythmes de la vie familiale, notamment pour les repas, et ils font l’objet d’une très grande exigence scolaire.

Il y a donc, dans la plupart des familles, un apprentissage continu de la vie collective et surtout, un suivi rigoureux de la scolarité, qui constitue l’élément central de ce qui reste de la transmission. Les enfants d’aujourd’hui ont sûrement plus de terrains d’expression personnelle qu’il y a cinquante ans mais pour l’immense majorité des parents, l’école est non négociable !

Dans le « voyage-découverte », la contrainte n’est évidemment pas absente. Elle prend deux formes : le parent impose à la fois l’explicitation des demandes et le respect du contrat. L’explicitation car , dans une société démocratique, il faut apprendre à discuter avec ses semblables autrement qu’en disant « J’ai envie de… » : l’enfant doit donc faire l’apprentissage de l’argumentation. Le respect du contrat car le parent est là pour imposer les règles du jeu : il peut, par exemple, accepter que l’enfant change de sport, mais à condition d’expérimenter le nouveau pendant un certain temps.

Vous parlez dans votre livre de la « fatigue » des parents. A quoi est due cette fatigue ?

Les principes directifs du modèle ancien étaient simples mais reposants : il fallait, par exemple, donner les biberons à heure fixe et, plus tard, imposer des règles sans argumenter. Le voyage-découverte, lui, est souvent épuisant : il faut décoder les pleurs du bébé, se poser des tas de questions que l’on ne se posait pas il y a cinquante ans, et plus tard, argumenter avec l’enfant et faire la part entre ce qui est légitime que l’enfant exprime et ce qu’il doit apprendre pour vivre en société.

Si l’enfant, en grandissant, joue honnêtement le jeu du voyage-découverte, le parent doit en outre accepter ce que l’enfant est en train de devenir, même si cela ne lui fait pas vraiment plaisir. Ce n’est pas toujours facile !

Propos recueillis par Anne Chemin
Je ne sais pas vous mais moi ça me donne envie de lire son bouquin !

(Image trouvée ici)

L’annonce faite à l’aîné

mercredi, juillet 29th, 2009

Sandro_Botticelli_080 Voilà un billet qui ne concerne qu’une petite partie de la basse-cour (mais probablement amenée à s’agrandir) : comment annoncer sa grossesse au futur aîné ?

Heureusement, le temps où on ne disait rien aux enfants jusqu’au moment où leur mère disparaissait une semaine pour revenir avec un nouveau-né est révolu. Ce qui nous amène à la première question : quand faut-il l’annoncer ? Vous trouverez probablement pléthore d’experts pour vous donner une série de dates (toutes différentes selon l’expert) avant lesquelles il ne faut rien dire ou au contraire après lesquelles il faut à tout prix avoir craché le morceau. En fait c’est très simple : vous additionnez les chiffres de la date de vos dernières règles, vous multipliez par le logarithme (népérien of course) de votre tour de poitrine (exprimé en pouces), à quoi vous ajoutez le cosinus de l’angle formé avec votre cher et tendre au moment crucial, lui-même divisé par l’âge du capitaine. Le chiffre obtenu vous donnera la date adéquate en jour julien (spéciale dédicace pour Blandine) ; sinon je fais des consultations spéciales sur rendez-vous et en cash uniquement. Bref. Voilà plutôt quelques questions à vous poser pour vous aider à vous décider si oui ou non c’est le moment de passer aux aveux.

Comment êtes-vous affectée par la grossesse ? Si vous êtes une grosse loque qui se traîne avec difficulté du canapé aux toilettes (toute ressemblance… blabla… purement fortuite… tout ça tout ça…), il peut être utile de fournir un minimum d’explications au poussin avant qu’il ne se fasse sa propre idée sur la question. Lorsqu’en prime on travaille, on doit déjà en général faire comme si de rien n’était toute la journée, c’est encore plus dur de faire ça le soir en rentrant. Si vous restez relativement fidèle à vous-même, il sera plus facile de différer.

Quelle est votre politique de dissémination de la nouvelle ? On ne peut pas exclure de gaffe dans un sens comme dans l’autre : un parent qui s’empresse d’en parler au poussin ou le poussin qui est ravi de partager la nouvelle avec la terre entière. Pour la discrétion du poussin, cela dépendra grandement de son âge : évidemment s’il ne parle pas ça limite les risques, ceci dit dans un commentaire sur un autre article, Amé nous signale que sa fille de 2 ans l’imitait en train de vomir… A vous de voir si vous pensez qu’il peut tenir sa langue.

Et si ça finit mal ? J’ai la chance de ne pas avoir (encore) été confrontée à ce cas de figure, mais il me semble impossible qu’un enfant, quel que soit son âge, puisse ne pas percevoir d’une façon ou d’une autre la douleur de ses parents dans cette situation. Il me semble que des explications simples mais honnêtes sont préférables à un mensonge ou à une absence totale de communication, mais je veux pas préjuger de situations complexes et terriblement éprouvantes.

Il faut enfin savoir que certains tout petits ont des facultés quasi extra-lucides pour repérer la grossesse et peuvent vous annoncer que vous êtes enceinte avant que vous ne le sachiez vous-même. Dans ce cas la question ne se pose plus trop… Et si vous allaitez encore l’aîné, la grossesse entraîne souvent un changement dans la composition et la quantité du lait, qui peut lui mettre la puce à l’oreille.

En bref il me semble que le choix de l’annoncer doit être fait en fonction de votre ressenti et de votre relation avec l’aîné, sans oublier ce que lui-même peut ressentir ou les doutes qu’il peut avoir (il est quand même préférable d’éviter de le laisser spéculer trop longtemps, les enfants sont prompts à prendre le blâme des problèmes de leurs parents).

Une fois la décision prise, comment amener le problème ? « Chéri, il faut qu’on parle… » Évidemment l’âge de l’enfant est un facteur clé du choix de la façon de procéder. A mon avis, mieux vaut rester simple et factuel, et répondre aux éventuelles questions plutôt que risquer de donner à l’enfant des informations qu’il n’est pas prêt à recevoir. Éviter de faire des promesses qu’on ne peut pas tenir (« Tout restera comme avant », « Tu vas avoir un super copain de jeu », « Le bébé t’aime déjà » etc) et rester honnête (le mensonge par omission est autorisé, voire recommandé dans certains cas : faut-il vraiment expliquer immédiatement à un enfant de 18 mois comment le bébé est arrivé là et comment il va en sortir ?). Le bébé est issu d’un désir et d’une décision du couple, les autres enfants n’ont pas à en porter les conséquences ou à en assumer le choix, même s’il est clair que cela va entraîner des changements importants dans leur vie.

Le concept du bébé dans le ventre de maman peut paraître assez abstrait à un tout petit, surtout tant que le ventre de maman ne paraît pas si différent de celui qu’elle a après un repas gastronomique. Il y a plein de livres pour enfants sur le sujet, personnellement j’en ai testé trois (dont deux recommandés par Fleur) :

  • Et dedans, il y a de Jeanne Ashbé : tout à fait charmant, pas gnangnan, plutôt drôle, et abordable par les plus jeunes (avec des petits rabats à soulever) ; permet de montrer ce qu’il y a dans le ventre de maman.
  • Et après, il y aura, toujours de Jeanne Ashbé : dans la même veine que le précédent, mais pour expliquer ce que va impliquer la venue du bébé (une fois sorti).
  • Il y a une maison dans ma maman, de Giles Andreae : celui-là je l’ai acheté parce qu’Amazon me le proposait avec les deux autres (comme quoi il y a des techniques marketing plus efficaces que d’autres sur moi… et ne parlons pas du club des créateurs de beauté ou je vais de voir fonder « CCB-oliques anonymes »…) ; je n’ai pas regretté du tout il est tout aussi charmant et un peu second degré (il y a une page où la maman s’endort toute habillée sur le canapé, une autre où elle dévalise le frigo, toute ressemblance… blabla… purement fortuite…). Il accorde aussi une place importante au père qui apparaît quasiment partout. Le Poussin l’adore, je ne sais pas pourquoi exactement mais pour le moment c’est son préféré des trois.

Pour celles qui y sont sensibles, je précise qu’aucun de ces livres ne fait de référence au mode d’alimentation du nouveau-né (en clair sein ou biberon) ou à son lieu de naissance (maternité ou maison).

Pour un aîné plus grand, certains livres peuvent aussi être très utile pour aborder les détails pratiques de comment le bébé est arrivé là et par où il va en sortir. Ici nous n’avons pas eu l’occasion de tester mais vous trouverez des idées sur le site de Fleur (et elle en aura sûrement à donner en commentaires).

Je ne connais pas de support vidéo intéressant mais n’hésitez pas à nous faire part de vos idées dans les commentaires.

Et pour finir voici une pub (comme quoi je ne suis définitivement pas insensible au marketing… pourtant c’est pour des couches jetables et j’utilise des lavables…) qui vous aidera à comprendre comment l’aîné perçoit l’arrivée du petit nouveau.

(Image : L’annonce à Marie de Sandro Boticelli, attention c’est culturé la basse-cour)

Au coeur des émotions de l’enfant

lundi, novembre 17th, 2008

La bibliothèque de mon quartier n’est pas très bien achalandée, donc quand j’ai vu qu’ils avaient Au coeur des émotions de l’enfant d’Isabelle Filliozat, j’ai sauté sur l’occasion. Il faut dire que ce livre a très bonne presse auprès des tenants de l’éducation non violente (dont je suis).

Quelques mots sur l’auteur d’abord : psychologue et psychothérapeute, Isabelle Filliozat est aussi mère de deux enfants. Elle a écrit un certain nombre de bouquins, et anime régulièrement conférences et formations. Elle exerce du côté d’Aix-en-Provence. Pour en savoir plus, voir son site web et notamment sa présentation.

Le livre est globalement facile et agréable à lire (beaucoup d’exemples), et les idées qui y sont développées tout à fait dans la lignée de mes lectures précédentes. En vrac :

– Les enfants sont de véritables buvards à émotions qui ont une forte tendance à prendre pour eux les problèmes et peurs de leurs parents, ce qui les conduit à des comportements bizarres et souvent inadéquats, voire franchement pénibles. La solution étant que le parent prenne conscience de son problème et en parle à l’enfant pour l’en délester.

– Si on ne répond pas aux besoins d’un enfant, il en déduit que c’est lui qui est indigne qu’on s’occupe de lui, plutôt que d’attribuer la responsabilité de son malheur à ses parents (ou à ceux qui s’occupent de lui). L’auteur fait bien sûr le distingo entre les besoins, physiques (nourriture, hygiène…) et moraux (réconfort…), et les désirs (bonbons, jouets…).

– La colère est une émotion saine qu’il convient d’exprimer (et d’accompagner chez l’enfant). Ce qui pose problème est différent : ce sont la violence et l’agressivité qui peuvent découler d’une colère mal gérée.

Je ne peux pas vous en dire plus car le Poussin s’est pris d’amour pour le livre et ne veut plus le lâcher.

Globalement un livre intéressant et agréable à lire, même si l’omniprésence d’exemples un peu psychomagiques, où l’enfant passe sans transition de petit démon à petit ange juste parce que maman lui a dit qu’elle était stressée parce que ses Manolo Blahnik lui font mal aux pieds (désolée j’ai regardé Sex and the City hier), peut parfois être un peu irritant. Bon je suis un peu de mauvaise foi (mais c’est ce qui fait mon charme… non ?), d’autant plus que l’auteur rappelle que le psy n’est pas la réponse à tout. En fait le vrai problème de ce livre c’est de l’avoir lu après Gordon Neufeld et Thomas Gordon. Parce que globalement ça ne m’a pas apporté grand chose de plus, et que j’ai trouvé la théorie de Neufeld beaucoup plus fouillée et riche, et les conseils de Gordon plus pragmatiques et mieux expliqués.

En bref j’ai trouvé ce livre intéressant, mais pas indispensable. Du coup j’hésite à me mettre en chasse du Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent de Adele Faber et Elaine Mazlish, qui est apparemment difficile à trouver. Quelqu’un l’a lu  ? ça vaut le coup ?

Une école différente

lundi, octobre 27th, 2008

 Si on s’intéresse à l’éducation non-violente, on finit fatalement par se poser des questions sur l’endroit où on va tôt ou tard envoyer nos enfants passer leurs journées : l’école. Même si les châtiments corporels sont heureusement bannis, l’ambiance à l’Education nationale n’est pas encore à la gordonisation généralisée. Alors que je commençais à réfléchir aux alternatives, je suis tombée sur ce livre : Montessori, Freinet, Steiner… une école différente pour mon enfant ? par Marie-Laure Viaud (docteur en sciences de l’éducation). Il dresse un panorama plus ou moins exhaustif des pédagogies alternatives, avec une description détaillée de chacune aux différents niveaux (de la maternelle au lycée). Il donne aussi une liste de tous les établissements concernés en France, avec de jolies cartes. Donc en (très) gros (je fais un résumé un peu grossier, j’espère que les gens qui s’y connaissent ne m’en voudront pas trop s’ils passent par là) :

  • Montessori
Basée sur les travaux de Maria Montessori au début du XXème siècle, cette pédagogie repose sur deux grands principes. D’une part, l’enfant passe régulièrement par des périodes sensibles pendant lesquelles il pourra apprendre très facilement. D’autre part, chaque enfant progresse à son propre rythme. Les classes Montessori regroupent donc des élèves d’âge différent et mettent à leur disposition un tas de matériel sophistiqué que l’enfant peut manipuler seul. Cette pédagogie insiste beaucoup sur l’apprentissage par le toucher. L’ambiance générale en est très studieuse et calme. Une grande importance y est accordée à la façon de se tenir, au rangement et à la propreté. Par ailleurs, les enfants y ont une grande autonomie. Toutes ces écoles sont privées hors contrat et il faut compter 4000 à 6000 euros de frais de scolarité par an.
En savoir plus : http://www.montessorienfrance.com, http://www.montessori-france.asso.fr
  • Steiner
Les écoles reposant sur les travaux de Rudolf Steiner sont également appelées écoles Waldorf (car développés pour les enfants du personnel de la fabrique de cigarettes Waldorf-Astoria). Cette pédagogie accorde une grande place à la créativité et à l’expression artistique. Il y a aussi beaucoup de chants, de rondes, et surtout une pratique très régulière de l’eurythmie, qui est une sorte de danse. On y insiste beaucoup sur le rythme des saisons, avec un lien quasiment spirituel avec la nature. Il faut savoir enfin que cette pédagogie est basée sur l’anthroposophie, qui est plus ou moins considérée comme une secte, même si bien sûr cette théorie n’est pas enseignée dans les écoles, qui ne sont pas elles-mêmes des mouvements sectaires. Ce sont des écoles privées hors contrat dont le coût varie de 1500 à 3800 euros l’année.
  • Freinet
Cette pédagogie, basée sur les travaux de Célestin Freinet, est appliquée à la fois dans des écoles entières (peu nombreuses), mais aussi dans certaines classes au sein d’écoles « classiques ». Les principes en sont :
– le travail à partir des intérêts des enfants, en menant des projets pour fonder les apprentissages sur des situations « vraies »
– l’importance accordée aux activités artistiques et d’expression libre
– la pratique de la démocratie à l’école, avec un conseil de classe/d’école mis en oeuvre par les élèves
Ces classes et écoles sont généralement publiques donc gratuites. 

 

Il y a d’autres initiatives présentées, comme la Pédagogie institutionnelle, les Calendretas, la méthode Decroly, etc. J’avoue qu’à l’instar de l’auteur je trouve la pédagogie Freinet la plus séduisante (et pas que pour les sous…), tandis que les écoles Steiner m’attirent moins. Manque de pot, en région parisienne il n’y a que deux maternelles Freinet, une à Bobigny (dans le 9-3) et l’autre à Saint-Ouen-l’Aumône (au fin fond du 95), et je me vois mal déménager juste pour ça (imaginez qu’en plus on finisse affectés à une autre école, parce qu’à mon avis ça doit se bousculer au portillon). 

 

Il est bien sûr extrêmement délicat d’estimer l’efficacité de ces méthodes, d’une part car elles ne concernent finalement qu’un petit nombre d’enfants, et d’autre part car les élèves à qui on les applique ne sont pas forcément représentatifs de la population générale (notamment dans les écoles à 6000 euros par an… ou au contraire dans certains lycées Freinet qui sont destinés aux jeunes en grande difficulté). Cependant, l’auteur présente un certain nombre d’études qui montrent globalement que :
– D’une part les élèves des écoles alternatives n’ont pas de moins bons résultats que les autres (voire en ont des meilleurs), mais qu’en parallèle ils sont beaucoup plus autonomes, avec un meilleur esprit critique et/ou artistique (selon la pédagogie).
– D’autre part, lorsque ces élèves rejoignent le système traditionnel, ils peuvent avoir quelques difficultés de transition mais s’adaptent finalement sans trop de problème.

 

La quatrième de couverture promettait de tout nous dire sur « Comment appliquer le meilleur de ces pédagogies à la maison ? », que je me réjouissais de découvrir. Plutôt décevant, en fait c’est un tableau des pratiques généralement associées au maternage (allaitement long, portage…) et des principes d’éducation non violente (à peu de choses près des sites, auteurs et livres que je connaissais déjà et dont j’ai déjà parlé sur ce blog). Non que ce ne soit pas intéressant, mais je n’ai pas appris grand chose et j’attendais des idées pédagogiques beaucoup plus concrètes (idées d’activités, de jeux, etc). Pour ça je n’aurai plus qu’à me retourner vers le grand internet mondial.

 

Il y a enfin quelques pages sur l’école à la maison, mais si l’aventure vous tente ce n’est pas ce bouquin qu’il vous faut. L’auteur mentionne quelques sites qui peuvent être utiles :
http://www.lesenfantsdabord.org/
http://laia.asso.free.fr/
http://www.cise.fr/

 

En conclusion, nous avons encore le temps, puisque le poussin n’ira normalement à l’école qu’en septembre 2010. Cependant, plutôt que de nous mettre bille en tête sur telle ou telle pédagogie, je pense que nous procèderons plutôt en enquêtant sur les écoles des environs, publiques et privées, pour trouver celle qui nous conviendra le mieux (comme le fait remarquer l’auteur, au-delà de la pédagogie théorique, il y a par exemple la personnalité de l’enseignant qui joue énormément). Il y a d’ailleurs dans le livre une liste de questions à poser pour en savoir plus, tant sur les détails très pratiques (nombre d’enfants par classe, organisation du déjeuner…) que sur les grandes questions (mode de résolution des conflits entre enfants, gestion des problèmes de comportement…). Je garderai aussi les idées de Gordon Neufeld dans un coin de ma tête. 

Hold on to your kids (2)

mardi, septembre 9th, 2008

 

Pour ceux qui l’auraient ratée, la première partie est ici.

Alors en pratique que faire ? Si on est convaincu par cette théorie, il devient évident que les modes de garde et de scolarisation de notre société sont organisés en dépit du bon sens, même s’il y a une prise de conscience réelle de ces enjeux par les professionnels. La faute en est notamment à l’importance grandissante accordée à l’indépendance, l’autonomie et la socialisation des enfants. Il faut accepter que les enfants sont des êtres dépendants, au moins jusqu’à l’adolescence (incluse). La question est : de qui veut-on qu’ils dépendent ? de leurs parents qui en assument la responsabilité ? ou d’enfants de 8 ans ? D’autre part, le concept de « socialisation » n’a pas de fondement tant que les enfants sont immatures. Ils doivent d’abord construire leur propre personnalité pour pouvoir se frotter aux autres sans perdre leur identité. Ils ne peuvent donc être ensemble que sous la supervision active d’un adulte, avec lequel ils ont au préalable établi un lien d’attachement (pas forcément aussi fort qu’avec leurs parents bien sûr). Petit à petit, ils acquièrent la capacité d’accueillir simultanément des sentiments contradictoires, et donc de se mettre à la place de l’autre. Ainsi seulement peuvent-ils montrer de vraies capacités de socialisation.

Les auteurs soulignent ainsi que les enfants qui sont orientés vers leurs pairs sont très à l’aise quand ils commencent l’école, ce qui à première vue provoque la joie des parents et des enseignants, tandis que ceux orientés vers les adultes y viennent d’abord avec réticence. Cependant cette facilité apparente cache un vrai problème : ces enfants aiment aller à l’école pour y retrouver leurs camarades, pas pour apprendre. Sans compter que les retards psychologiques causés par cette orientation contre nature ne vont pas aider leurs capacités d’apprentissage.

Cela ne veut pas dire qu’il faille bannir les crèches, garderies et écoles, mais plutôt les réorganiser pour donner une part plus importante au rôle de l’adulte, et diminuer celle dévolue aux interactions entre les enfants (cette fameuse « socialisation »). Il faut que l’enfant sente que ses parents passent une sorte de relais d’attachement à l’adulte référent (maîtresse, puéricultrice), et que celui-ci s’en saisisse.

Les conseils pratiques (que je n’ai pas trouvé très bien organisés dans le livre et vous retranscris tant bien que mal) pour cultiver l’attachement avec ses enfants (ou ceux dont on s’occupe)  :

  • Ne jamais oublier que c’est à l’adulte de prendre l’initiative et c’est à lui qu’incombe la responsabilité de maintenir le lien. Si la relation se délite, il ne peut en vouloir qu’à lui-même.
  • Interagir très fréquemment avec l’enfant et chercher son contact, au moins visuel, pour réactiver l’attachement : de la même façon que devant un nouveau-né on va tout faire pour attirer son attention et obtenir un sourire, il faut répéter ce rituel avec les enfants (évidemment de plus en plus subtilement au fur et à mesure qu’ils grandissent) aussi régulièrement que possible, et surtout avant toute autre interaction (notamment pour tout acte d’autorité).
  • Offrir aux enfants l’occasion de s’accrocher (psychologiquement) à nous et inviter leur dépendance : d’une façon ou d’une autre, il faut que l’enfant se sente bienvenu, qu’on lui donne envie de s’attacher. Il ne faut pas hésiter à donner de l’attention à l’enfant même quand il n’en réclame pas : celui-ci doit sentir que l’amour et l’attention du parent ne dépendent pas (entièrement…) de son comportement et de ses réalisations. Contrairement aux oisillons, les enfants n’ont pas besoin qu’on les pousse hors du nid : au contraire, plus on les pousse, plus ils s’accrochent (même si ce n’est plus forcément à nous).
  • Faire la boussole : guider l’enfant dans toute situation inconnue et prendre l’initiative à base de « Voici ce que nous allons faire », « Tu peux t’asseoir ici » etc. C’est pourquoi certains programmes envoient les enfants/ados difficiles passer une semaine dans un environnement naturel hostile, où ils n’ont pas d’autre choix que de se tourner vers l’adulte pour survivre.
  • Ne pas hésiter à réorienter l’attachement vers soi : cependant il faut être conscient que plus l’enfant est orienté vers les autres enfants, et plus c’est une tâche difficile qui demandera une patience et une motivation quasi-infinies. De plus il faut être bien prêt à en assumer la responsabilité : briser un attachement est une violence psychologique extrême qui ne doit pas être entreprise à la légère. Garder toujours à l’esprit que c’est la relation qui compte, et pas le comportement. Ce dernier ne pourra être réglé qu’une fois la relation restaurée.
  • Ne pas combler systématiquement l’ennui en invitant un copain : selon les auteurs, l’ennui provient d’un attachement déficient qui prévient l’émergence de la personnalité de l’enfant. Il faut donc au contraire renforcer cet attachement afin d’aider cette émergence. Un enfant qui s’ennuie souvent n’est en fait pas assez mature pour avoir de vraies interactions avec d’autres.
  • Privilégier les amitiés de l’enfant avec des enfants orientés vers les adultes : idéalement il faudrait avoir un minimum de lien avec leurs parents (frères et soeurs, cousins-cousines, enfants de vos amis etc).
  • Cultiver des petits rituels familiaux : dîner ensemble, faire une balade le dimanche… Il ne faut pas hésiter à les imposer aux enfants.
  • Eviter de prendre toutes ses vacances sans les enfants (ou de les laisser au Mickey club toute la journée) : moins on passe de temps avec, plus le lien d’attachement s’affaiblit, plus les enfants sont difficiles à gérer, et plus on veut passer ses vacances sans.
  • Etre très vigilant sur ces notions d’attachement lorsqu’on confie ses enfants : il faut que l’enfant comprenne qu’il est pris en charge par le nouvel adulte et ce avec la bénédiction de ses parents. Ne pas hésiter à laisser un petit souvenir (doudou, photo, tissu avec son parfum, etc). Et surtout s’assurer qu’un lien se crée bien entre l’enfant et l’adulte qui le garde. L’absence d’attachement crée en effet un vide immense que l’enfant remplira avec la première personne voulant remplir cet office, tel une oie de Lorenz.
Autre question qui doit maintenant vous tarauder : comment maintenir un semblant de discipline dans son foyer sans mettre en péril notre précieux lien d’attachement ? Car encore une fois, à nul moment les auteurs ne prônent la permissivité : au contraire, il est capital de mettre des limites à l’enfant et de ne pas douter de la « hiérarchie » naturelle. Les parents ont la responsabilité donc ce sont eux qui prennent les décisions : combler tous les besoins ne veut pas dire répondre à toutes les envies. La discipline exposée dans le livre tend à unir plutôt qu’à diviser, et a l’air du genre qui porte ses fruits à long terme, plus qu’en 15 jours. Personnellement, c’est trop tôt pour tester alors je vous laisse juger par vous-mêmes.
  • Pour rappeler un enfant à l’ordre, mieux vaut utiliser la connexion que la séparation (style « au coin pour 5 minutes »). La séparation peut être efficace à court terme justement car elle est basée sur le besoin de proximité provoqué par l’attachement, mais risque de dommager la relation à long terme. Lorsqu’un enfant a un comportement inadéquat, il faut commencer par activer le lien, en ramenant l’enfant vers soi, tant psychologiquement que physiquement : « Hé hé, tu as l’air de bien t’amuser. Viens voir par ici qu’on discute deux minutes ». Et ça plutôt que « File dans ta chambre, on en reparlera quand tu seras calmé ». Ensuite on peut donner des indications très claires de ce qu’on attend avec beaucoup plus de chances qu’elles soient reçues.
  • Mettre l’accent sur la relation, pas sur le comportement. De façon intéressante, les auteurs expliquent que le principe de réaction immédiate marche bien sur les animaux mais pas vraiment sur les enfants. Un gamin en pleine crise ne peut pas assimiler ce qu’on lui dit, autant pisser dans un violon. Surtout il ne faut pas laisser entendre qu’on ne peut pas gérer l’enfant, mais au contraire garder le contrôle de soi (à défaut de contrôler la situation). Il est plus profitable de « refaire le film » au calme après coup.
  • Aider l’enfant à s’adapter face à la frustration : d’abord rester très ferme sur l’objet de la frustration (typiquement « non on ne fera pas ça ») sans négocier ou tergiverser, puis ensuite amener l’enfant à verser les « larmes de la résignation » en le réconfortant (« tu espérais vraiment que ce serait différent », « c’est vrai que c’est difficile pour toi »), pour l’aider à accepter ce qu’il ne peut changer. Ce serait la meilleure conduite avec un bambin en crise d’opposition.
  • Solliciter une bonne intention plutôt qu’exiger un bon comportement. Ainsi l’enfant sent que l’accent est mis sur sa volonté (« crois-tu que tu pourrais mettre tes chaussures avant de partir ? ») plutôt que sur celle de l’adulte (« je veux que tu mettes tes chaussures »). Lorsque l’enfant malgré tout n’a pas le comportement attendu, ne pas hésiter à dire « je sais bien que tu ne l’as pas fait exprès » ou ce genre de phrase.
  • Essayer de tempérer un comportement impulsif plutôt que de l’arrêter. Du style « je sais bien que tu aimes ta petite soeur, tu ne voudrais pas lui faire de mal » plutôt que « Arrête de taper ta soeur ». Cela marche d’autant mieux quand les émotions ne sont pas encore trop intenses (ou après coup). Cependant cela demande de la part de l’enfant une maturité suffisante pour pouvoir ressentir des sentiments contradictoires simultanément. Dans ce cas, il faut essayer de séparer son comportement de sa personne : « tu as vraiment été emporté par ta colère/l’envie de taper ta soeur » pour l’aider à accomplir la maturation nécessaire.
  • Lorsque l’enfant est trop immature pour produire de lui-même le comportement requis, il faut le guider : « maintenant c’est au tour de ton frère » « ici il faut parler tout doucement » etc. La difficulté est de donner des instructions compréhensibles immédiatement par l’enfant.
  • Une autre piste lorsqu’un enfant est trop immature est de lui éviter de se retrouver dans une situation qui déclenche une crise. Tout le monde sera d’accord qu’on ne peut pas demander à un enfant de deux ans de rester parfaitement calme pendant 1h30 de concert classique. De la même façon, il faut essayer d’identifier les situations « à risque » en fonction de la maturité de l’enfant. Cependant il est inévitable et indispensable qu’il apprenne tôt ou tard à gérer la frustration, c’est donc un équilibre délicat à gérer.
Ah ça a l’air bien joli tout ça (surtout avec mon résumé à la hâche), mais évidemment pas toujours très réaliste (il y a notamment une description d’un petit village de Provence idyllique plein de gens parfaitement attachés, pourtant je ne crois pas qu’il y ait beaucoup de personnes qui pratiquent ce type de discipline, là ou ailleurs). Cependant ce sont des pistes intéressantes à explorer, et à mon avis des concepts essentiels à connaître.
Et rappelons-nous ceci : la priorité est la relation d’attachement. Tant qu’elle n’est pas bien établie, le reste ne marchera pas : on ne peut attendre ni comportement adapté, ni maturation psychologique. Elle doit rester notre priorité, même si c’est loin d’être facile tous les jours.