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Pour l’amour du risque

jeudi, janvier 13th, 2011

Nous sommes confrontés chaque jour à des choix, aux conséquences plus ou moins importantes. Une part majeure de notre décision est l’évaluation des risques associés à chacune des alternatives qui s’offrent à nous. En tant que parent, c’est d’autant plus difficile que nous sommes responsables d’une personne qui n’est pas encore en mesure de faire ses propres choix. Comme vous le savez si vous traînez depuis quelque temps dans la basse-cour, j’essaie de documenter et d’argumenter avec des faits les propositions que je fais ici, tentant à ma  mesure d’aider qui le souhaite à avoir un vrai choix éclairé. Cependant je ne peux que constater la logique pour le moins floue avec laquelle raisonne un certain nombre de mes concitoyens, y compris à des niveaux d’étude et de spécialisation auxquels l’esprit de Descartes est censé régner. Cela est particulièrement vrai pour tout ce qui touche aux enfants, la moindre remise en question de ce que nous avons fait ou projetons de faire étant souvent vécue comme une critique acerbe de notre compétence et même de notre bonne volonté  parentale (ou d’expert, pour le corps médical par exemple).

Prenons quelques exemples avec certaines pratiques, minoritaires sous nos latitudes et à notre époque. Le traitement des risques et des problèmes est très différent selon  l’alternative considérée. Intéressons-nous au sommeil de nos enfants, et aux décès qui peuvent y être associés, que ce soit par suffocation ou par mort subite du nourrisson. Si l’enfant meurt dans un berceau ou lit à barreaux, on cherchera à comprendre ce qui dans le couchage a pu causer son décès et si on ne trouve rien on blâmera le hasard. Si par contre son décès a lieu dans le lit parental, c’est forcément parce qu’il s’y trouvait et n’avait pas à y être. C’est du moins ce que diront certains des experts les plus écoutés, qui seront ensuite relayés par les médias puis par l’entourage des parents déjà durement éprouvés. Pourtant la logique voudrait qu’on conduise la même investigation dans les deux cas, afin de fournir des recommandations adéquates pour diminuer les risques. Par exemple, il est clair que nos lits d’adultes ne sont souvent pas conçus pour accueillir des tout petits, avec des risques de chute et de suffocation plus importants que dans les lits de bébés. Cependant, il est tout à fait possible de les aménager pour réduire ces risques. Mais on préfère dire que le cododo est dangereux. Sachant que la majorité de la population le pratique de toute façon à un moment ou un autre (quel parent ne s’est JAMAIS retrouvé avec un bébé dans son lit ?), ça ne me semble pas très productif. Ou alors il faudrait carrément interdire le sommeil des bébés, ça nous éviterait bien des prises de tête sur qui doit faire les nuits de qui, quand et surtout comment…

De la même façon, on ne parle que rarement des morts autour de la naissance à l’hôpital, qu’elles soient maternelles ou infantiles. Par contre, le moindre problème lors d’un accouchement à domicile est immédiatement relayé et imputé au choix du lieu de naissance. Ne doutons pas que si les maisons de naissance finissent par voir le jour, on ne leur fera pas de cadeau. On énumère toujours les risques inhérents à accoucher ailleurs qu’à l’hôpital, mais rarement de ceux qui découlent de ce lieu : accident sur la route (d’autant plus probable avec un conducteur stressé par la situation et d’autant plus grave que si le travail est avancé la femme risque de ne pas attacher sa ceinture pour mieux supporter les contractions pendant le trajet) et infections nosocomiales sont les plus évidents même s’il y en a d’autres. On peut ainsi trouver rassurant que le cœur du bébé soit écouté en continu par un appareil pendant l’accouchement (comme c’est généralement pratiqué dans les maternités) ; pourtant la Haute autorité de santé (HAS) nous informe que pour un accouchement non pathologique, lorsque cette écoute est faite de façon intermittente, il n’y a pas d’incidence sur la mortalité infantile et il y a moins d’interventions (césariennes ou extractions instrumentales, qui ne sont pas dénuées de risques : ainsi l’étude européenne Peristat –p. 100- nous apprend qu’en France une extraction instrumentale double le risque de mort maternelle tandis qu’une césarienne le multiplie par 8). Mais la pénurie de personnel (une sage-femme de garde doit suivre plusieurs femmes en travail en même temps) et le risque de procès (le monitoring continu constitue une trace tangible de la surveillance pendant l’accouchement qui pourra justifier pourquoi il y a eu ou pas une intervention) font qu’en pratique le monitoring continu tend à s’imposer dans les maternités.

Ainsi il est courant de ne présenter les risques que dans un seul sens. Prenons les examens prénataux : on vous parlera généralement des pathologies que ces tests visent à dépister, mais il est plus rare qu’on vous présente les problèmes qu’ils induisent. Le dépistage du diabète gestationnel est ainsi sujet à controverse.
Quelques extraits du rapport de la HAS sur le sujet :

La valeur prédictive positive du test de dépistage (O’Sullivan) est faible : moins de 20 % des femmes dépistées positives sont des vrais positifs en retenant un seuil de dépistage (test de O’Sullivan) à 1,40 g/l (7,8 mmol/l). [NB : Le test de O’Sullivan est recommandé par le CNGOF pour toutes les femmes enceintes, il s’agit de mesurer l’effet de l’ingestion d’une solution de glucose sur la glycémie.]

Il n’existe aucune preuve directe de l’efficacité d’un dépistage systématique ou ciblé du diabète gestationnel à partir de la 24e semaine de grossesse pour réduire la mortalité et la morbidité périnatales.

Par ailleurs, le diagnostic et la prise en charge du diabète gestationnel ne seraient pas dénués d’effets indésirables : anxiété, accroissement du nombre de consultations et d’examens complémentaires, accroissement des taux de césariennes même en l’absence de macrosomie foetale, accroissement du taux de déclenchement et du passage en réanimation néonatale des nouveau-nés. [NB : et je trouve fortement paternaliste l’idée que c’est une bonne excuse pour imposer aux femmes une meilleure hygiène alimentaire]

Petit test : parmi les lectrices de ce blog qui sont ou ont été enceintes, à qui a-t-on fait part de ces informations au moment de la prescription du test ? A qui a-t-on simplement dit
« Vous allez faire le test de O’Sullivan, voici l’ordonnance » ? Je ne veux absolument pas minimiser les risques liés au diabète gestationnel ou suggérer qu’on supprime ces tests, mais proposer que la décision de les faire ou pas revienne à la femme, après une discussion permettant la présentation complète des avantages et inconvénients avec le praticien qui suit la grossesse. En fait je propose simplement qu’on respecte la loi Kouchner sur le  consentement éclairé, révolutionnaire non ? Je sais bien qu’entre la démographie médicale déclinante et les restrictions budgétaires les soignants ont de moins en moins de temps à consacrer aux patients mais je ne crois pas qu’il faille pour autant baisser les bras. C’est à chacun de prendre le temps de s’informer (oui, internet est une source formidable de connaissances, pourvu qu’on ait un peu de discernement), de poser des questions et au final de prendre ses responsabilités. Les examens dits obligatoires doivent être proposés à toutes les femmes, mais celles-ci n’ont pas l’obligation de les faire. Et je trouve insultant de leur demander si elles n’ont pas à cœur la santé de leur bébé quand leur avis diffère de celui du praticien. Chacun a sa hiérarchie des risques ; certaines sont basées sur des idées reçues et il est important de s’assurer qu’une décision n’est pas prise à partir de faits biaisés ou incomplets, mais au final c’est aux parents de choisir quels risques ils souhaitent prendre. Je crois qu’au lieu de commencer par critiquer une décision qui nous paraît irresponsable (et je parle aussi entre parents, où nous sommes prompts à nous jeter la pierre) il serait bien plus constructif d’en demander les raisons. Nous pourrions soit apprendre des choses soit apporter d’autres informations, bref il n’est pas impossible que chacun reparte avec un nouveau point de vue, plus complet et plus ouvert sur la question. J’en profite pour vous signaler un nouveau blog, l’ordonnance ou la vie, tenu par une étudiante en médecine qui a des réflexions très intéressantes sur la question.

Mais le patient responsable doit l’être jusqu’au bout. Comme dirait Peter Parker (alias Spiderman), « With great power comes great responsibility. »  Tant que tout se passe bien, c’est facile. Le souci c’est quand les choses tournent en eau de boudin. Si le médecin a recommandé un acte que le patient n’a pas voulu effectuer, et que l’état du patient s’aggrave, jusqu’à quel point  ? Ainsi, certains obstétriciens s’opposent aux accouchements hors maternité (domicile ou maison de naissance) car ils craignent les transferts en urgence sous leur responsabilité d’un problème sur lequel ils n’avaient jusque là aucune prise. Il arrive alors que des femmes avec un projet d‘accouchement à domicile (AAD) qui vont se faire enregistrer en maternité pour préparer un éventuel transfert en urgence soient mal reçues par le personnel soignant, et c’est parfois pire lors d’un tel transfert (un peu comme les femmes qui avaient tenté de se faire avorter avant la légalisation de l’IVG et à qui certains médecins faisaient des curetages sans anesthésie pour les dissuader de recommencer). L’effet de telles pratiques étant que loin de décourager les femmes de recourir à l’AAD, cela les dissuade simplement d’ouvrir un dossier à l’hôpital, voire en cas de problème va parfois leur faire repousser le transfert au-delà du raisonnable. D’un côté il est clair qu’un soignant qui « fait payer » à un patient un choix différent de ce qu’il préconise est inacceptable, de l’autre on peut comprendre le ras-le-bol des blouses blanches face à des patients qui viennent faire leur shopping médical. Comme le dit cette sage-femme américaine, « You buy the hospital ticket, you go for the hospital ride » (difficile à bien traduire, quelque chose du genre « Si on prend un ticket pour l’hôpital, alors on va à l’hôpital », ou moins littéralement « N’attendez pas de l’hôpital ce qu’il ne peut pas vous donner »). Évidemment, entre la raréfaction des sages-femmes accompagnant les AAD, le peu de plateaux techniques ouverts aux sages-femmes libérales et les tergiversations autour des maisons de naissance (sans compter les aléas de la Sécu qui rembourse ou pas les accouchements dans des maisons de naissance à l’étranger), un nombre non négligeable de femmes se retrouve avec un suivi classique en maternité par défaut. On voit donc que la situation est complexe, et la conciliation des intérêts des parties pas toujours évidente.

C’est parfois si difficile qu’on en arrive au procès, dont la crainte est devenu un puissant moteur d’évolution des pratiques obstétricales. Les primes d’assurance des professionnels flambent, alors que les revenus fixés par la Sécu stagnent, rendant notamment l’exercice libéral de plus en plus difficile (voir ce billet de 10 lunes avec tous les chiffres, ainsi que les commentaires qui suivent pour d’autres éclairages). Là encore, la problématique n’est pas simple. D’une part on ne peut pas dire qu’il ne faudrait plus faire d’action en justice, ce qui reviendrait de facto à une immunité médicale, et d’autre part les patients peuvent se retrouver obligés de mener des actions en justice par des assurances qui ne veulent pas prendre en charge les coûts (notamment pour un enfant handicapé par exemple). Bref cela dépasse le cadre de la discussion et je ne me sens pas compétente pour réformer le système, même s’il me semble évident qu’il y a une bonne marge d’amélioration. Finalement, cela paraîtra sans doute évident mais je crois plus que jamais qu’il est indispensable de pouvoir établir un partenariat de confiance entre soignant et soigné (et ce d’autant plus quand le soigné n’est pas malade, comme c’est le cas d’une femme enceinte ou d’un jeune enfant qu’on emmène aux visites de contrôle). Commençons par écouter ce que l’autre a à nous dire avant de le juger, soyons prêts à examiner honnêtement nos raisons et nos motifs, pour assumer pleinement la responsabilité de nos décisions.

Je réalise que ce billet est un peu fourre-tout et décousu mais à ce stade j’avoue ne plus avoir le temps ni le courage de le remanier voire de le redécouper donc je le publie en l’état car je pense qu’il y a quand même quelques éléments intéressants dont j’aimerais discuter avec vous.

Photo : oui je sais c’est l’Agence tous risques, mais je n’ai jamais vu un seul épisode de Pour l’amour du risque alors… Et non, ça n’a pas grand rapport avec le schmilblick.

I have a dream

mercredi, décembre 8th, 2010

sagefemme E-zabel témoignait l’autre jour sur son blog de son expérience du baby blues et de la dépression du post-partum. Il est évidemment crucial d’informer les femmes de la possibilité de l’un comme de l’autre afin de les préparer au mieux à les affronter le cas échéant ; un tel billet est un formidable moyen de communiquer sur cela et je ne vais pas ici le décrire. Ce qui m’interroge, c’est la part de responsabilité de l’entourage de la jeune mère dans ces cas. En effet, autant il est important de savoir qu’il y a des processus hormonaux qui peuvent influencer l’humeur et le comportement, de façon parfois très forte, autant je trouve que les hormones ont parfois bon dos. Une jeune femme qui pleure à la maternité ? C’est les hormones, c’est le baby blues ! Êtes-vous sûr que ça n’a rien à voir avec le fait que depuis 6 heures du matin un(e) parfait(e) inconnu(e) entre dans sa chambre toutes les demi-heures environ pour des choses aussi urgentes que la prise de température ou une photographie de son bébé ? Alors que son bébé venait enfin de s’endormir du sommeil du juste vers 5h53 ? Ou encore cette vague impression d’avoir Hiroshima entre les jambes grâce au duo gagnant forceps/épisio ? Le fait qu’il faille rendre des comptes précis sur la quantité de lait ingérée (à la goutte près) et de selles produites (description quantitative et qualitative) sur les dernières 24 heures, qui conduit généralement les mères inexpérimentées à culpabiliser d’avoir oublié si bébé a tété 12 ou 17 minutes le sein gauche à 3h54 du matin et celles qui ont plus de bouteille à mentir ? Qu’on suggère insidieusement qu’elle affame son bébé si elle l’allaite et qu’elle l’empoisonne si elle le biberonne ? Qu’elle rentre chez elle pour trouver un bazar sans nom et ne peut compter que sur elle-même pour assurer un semblant d’ordre au foyer (heureusement ceci est de moins en moins fréquent, n’est-ce pas Messieurs ?) ? Vous devez commencer à voir où je veux en venir ?

Je ne suis pas professionnelle de santé, je ne suis pas psychologue, je ne suis pas dans une association, je n’ai même pas eu de baby blues, ce qui vous donne une idée de ma légitimité sur la question, mais je voudrais partager et discuter ici quelques idées avec vous, pour mieux entourer les femmes autour de la naissance et ainsi limiter et prévenir tant baby blues que dépression du post partum.

A mon avis, une des clés de la prévention c’est la sage-femme. Pas n’importe quelle sage-femme, ma sage-femme, ta sage-femme, leur sage-femme… En clair : une femme, une sage-femme. C’est ce que j’ai eu pour la grossesse, la naissance et les suites de couches de Pouss2 et c’est tellement logique. L’accompagnement global n’implique absolument pas d’accoucher chez soi sur une peau de mouton en brûlant de l’encens et en priant mère Gaïa d’épargner son bébé. On peut avoir une péridurale, une césarienne, passer une semaine à la maternité… tout est possible en fonction des besoins et envies de la femme et de son enfant ! Bien sûr le fait que ce soit cette sage-femme qui soit présente à l’accouchement, pendant toute sa durée, et exclusivement auprès de cette femme, peut poser des problèmes d’organisation (même si les sages-femmes en accompagnement global s’y engagent), qui pourraient être résolus en créant des petites équipes (deux à cinq sages-femmes par exemple dont il y a toujours une de garde ou d’astreinte), de telle façon à ce que la femme en travail et la sage-femme qui l’accompagne se connaissent. Pour moi, bien plus qu’une batterie d’examens, c’est là la vraie sécurité médicale autour de l’accouchement. Ce n’est pas une démédicalisation de la naissance que je souhaite, c’est une autre médicalisation. La sage-femme est compétente pour déceler toute pathologie et y répondre, que ce soit en pratiquant les premiers gestes (réanimation du bébé, délivrance artificielle, prescription de médicaments, etc) ou en passant le relai au médecin. Et ce dernier cas ne veut pas dire que la sage-femme ne peut pas garder sa place auprès des parents, afin d’assurer cette continuité si précieuse, qui lui permettra aussi de déceler les premiers signes d’une pathologie.

Je vais caricaturer*, mais à votre avis qui est plus à même de détecter une dépression du post-partum ? Le gynéco que vous voyez un quart d’heure dont la moitié les jambes en l’air ou la sage-femme qui vous reçoit trois quarts d’heure à parler de votre grossesse et de votre accouchement ? Et lors d’un accouchement, qui voit en premier que quelque chose ne va pas : la sage-femme qui court entre plusieurs femmes en travail en surveillant des monitorings continus (dont l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé reconnaît d’ailleurs qu’ils n’ont pas de meilleurs résultats qu’une écoute discontinue tout en entraînant plus d’interventions comme les césariennes) ? ou celle qui est auprès de la parturiente, qu’elle a appris à connaître au cours des derniers mois, et qui verra tout de suite une pâleur, un tremblement ou tout autre signe subtil potentiellement annonciateur d’un problème** et déclenchera immédiatement les tests médicaux ad hoc pour confirmer ou infirmer cette suspicion ? A qui la femme aura-t-elle plus de facilités à dire son ressenti, à confier une intuition que quelque chose ne va pas pendant l’accouchement, à avouer ses faiblesses, son découragement, ses difficultés après la naissance? Quelqu’un qu’elle a vu trois fois entre deux portes ou quelqu’un avec qui elle a noué une vraie relation de confiance ?

Il a été établi à de nombreuses reprises l’importance des processus psychologiques pendant la grossesse (certains hélas poussant le raisonnement un peu trop loin et incriminant la mère pour absolument tout et n’importe quel problème, ce qui en plus de ne pas être basé sur grand chose d’autre que leur pifomètre est hyper culpabilisant pour les femmes qui n’y peuvent pas grand chose). Alors pourquoi ne pas s’appuyer beaucoup plus largement sur les sages-femmes, qui ont la double compétence d’accompagnement humain ET médical ? Pourquoi ne pas leur permettre ainsi d’exercer pleinement leur profession, en respectant les besoins psychologiques de la mère tout en garantissant sa sécurité physique et celle de son bébé ?

En pratique, cela ne veut pas du tout dire que tout le monde doit accoucher de la même façon, mais simplement pouvoir trouver la sage-femme (ou la petite équipe) avec qui vivre sa grossesse, son accouchement et les suites, à la maternité, à la maison ou en maison de naissance, en fonction des souhaits des parents et des impératifs liés à d’éventuelles pathologies. Les sages-femmes hospitalières pourraient voir le mode d’organisation refondé pour travailler en ce sens, quant aux sages-femmes libérales une plus grande place pourrait leur être accordée, tant dans les maternités (avec l’ouverture plus généralisés des plateaux techniques, permettant aux femmes d’accoucher à la maternité mais en n’étant accompagnée que par la sage-femme libérale, comme je l’ai fait pour Pouss2) qu’à domicile et dans les (futures) maisons de naissance. A mon avis cela serait une belle piste pour s’assurer que chaque femme a les soins dont elle a réellement besoin : ni trop, ni trop peu ; un suivi sur mesure plutôt que des protocoles rigides et pas toujours efficaces.

Concrètement, si vous êtes enceinte ou si vous souhaitez une grossesse, je ne peux que vous encouragez à chercher une sage-femme, qui deviendra votre sage-femme. Dans l’état actuel du système français, c’est souvent plus simple de chercher une sage-femme libérale, qui aura généralement plus de temps à accorder en consultation (la mienne prévoyait 40-45 minutes par consultation pré-natale, ce qui se traduisait généralement par une heure !) et qui pourra venir vous voir à la maison après la naissance (et pourquoi pas à la maternité aussi, même si ce n’est pas vraiment dans nos mœurs ?). Malheureusement, elle ne pourra que rarement vous accompagner pendant la naissance, mais si cette possibilité vous intéresse cela vaut vraiment le coup de chercher. Elle peut en tout cas dès le début de la grossesse faire le point avec vous sur ce que vous souhaitez pour votre accouchement et vous aider à choisir une maternité dans votre coin en fonction de cela. Bien sûr, si vous n’accrochez pas, n’hésitez pas à changer, je crois vraiment que le facteur humain est capital dans cette relation. N’hésitez pas à faire cette démarche, même si vous êtes dans un cas particulier (jumeaux par exemple) ou pathologique (menace d’accouchement prématuré, suspicion de malformation, etc). Pour trouver une sage-femme, outre le bouche à oreille, vous pouvez consulter les pages jaunes, l’annuaire de l’ANSFL et celui du site Périnatalité (qui est d’ailleurs plein d’infos intéressantes). Au niveau financier, les consultations sage-femme sont remboursées par la sécurité sociale ; certaines pratiquent des dépassements d’honoraires (remboursables par les mutuelles en fonction de votre couverture) mais pas toutes.

Voici enfin quelques articles du blog autour de ce sujet :

Une femme, sa sage-femme : ce n’est peut-être qu’un rêve, mais je crois qu’il est à notre portée. Et vous ?

*Ces questions un peu provocatrices ne visent pas à remettre en question les personnes et leurs compétences mais plutôt l’organisation de notre système de soins

**Dans Au monde (dont vous trouverez une fiche de lecture ici), Chantal Birman raconte qu’elle a repéré une détresse fœtale qui n’était pas visible par les examens classiques par le rire inhabituel de la mère.

Photo : affiche trouvée sur le site de l’Association Corporative des Etudiants Sages-femmes

Se préparer

mercredi, septembre 30th, 2009

whalesbeachEPA_450x300 Dans la série des billets spécial gros bidon, quelques mots sur la préparation à la naissance. Encore un MPR (méga problème de riche) : comment utiliser au mieux les huit séances que nous offre Sainte Sécurité Sociale* (Amen) ? Les initiatives et les méthodes fleurissent, plus ou moins originales et efficaces : comment s’y retrouver ? Vous allez dire que je me répète, mais il n’y a bien sûr pas de méthode supérieure aux autres, il y a ce qui convient à telle femme (et à tel couple) pour telle grossesse et tel projet de naissance.

Déjà, à quoi ça sert de se préparer ? Après tout ça fait des millénaires que les femmes donnent la vie sans se poser de question, et c’est encore le cas de la majorité de celles qui peuplent le globe actuellement. Certes. Ceci dit nos admirables congénères vivent et ont vécu sans téléphone portable, internet, canapé, congélateur, TGV, Mooncup et j’en passe. En ce qui me concerne, je vois plusieurs intérêts aux activités prénatales :

  • accompagner les transformations inévitables du corps et apaiser les (petits ?) maux qui les accompagnent généralement ;
  • s’offrir un temps pour soi et pour le bébé à venir (d’autant plus important si on a déjà de la marmaille) ;
  • avoir un temps de parole plus libre et plus ouvert que les consultations pour exprimer ses angoisses et ses tracas sans craindre de s’aliéner ses derniers amis (où d’autre pourrez-vous vous plaindre de vos hémorroïdes ?), mais aussi obtenir des réponses à ses questions, y compris les plus tabous et les plus bizarres ;
  • pouvoir rencontrer d’autres futurs parents (certaines activités sont mixtes), toujours intéressant dans une société centrée sur la famille nucléaire ;
  • et bien sûr se préparer, mentalement et physiquement, à l’épreuve de l’accouchement, et disposer d’outils pour mieux vivre ce moment exceptionnel à tous points de vue.
  • enfin ce n’est probablement pas le profil type de la basse-cour mais c’est aussi un vecteur d’intégration (ou réintégration) pour les femmes en situation précaire.

Je conseille donc aux futurs parents de prendre en compte ces différents points dans le choix de leur préparation ; d’ailleurs rares sont les méthodes qui permettent de tous les satisfaire, il est tout à fait possible de cumuler plusieurs techniques (tant qu’elles sont compatibles). Par ailleurs l’intervenant et/ou le cadre que vous trouverez près de chez vous font souvent autant que la technique elle-même : il me semble qu’avoir un « animateur » avec lequel on accroche et en qui on a vraiment confiance est un point crucial du choix. Attention également à la crédibilité de celui-ci : comme beaucoup de disciplines para-médicales et/ou à visées psychothérapeutiques on trouve à boire et à manger, y compris au sein de courants reconnus. Faites fonctionner le bouche à oreille, les annuaires professionnels et votre radar personnel. Pour qu’elles aient un intérêt, il faut en effet que vous alliez aux séances avec plaisir et motivation, rien ne sert d’y aller juste parce que il faut/c’est remboursé/ma copine l’a fait. Selon vos affinités, vous pouvez aussi choisir des séances individuelles et/ou en groupe. Notons enfin que certaines méthodes peuvent être poursuivies après l’accouchement pour aider à l’établissement du lien mère (et père) – enfant.

Les techniques de préparation les plus connues et répandues sont :

  • la préparation « classique » : sorte de cours et/ou de session questions-réponses qui permet d’aborder en détail tout ce qui se passe avant, pendant et après l’accouchement. Si possible, suivre ce type de préparation en lien avec le lieu où on accouche apporte une valeur ajoutée, tant sur les gestes préconisés par le protocole (perfusion systématique ? soins au bébé après la naissance ? etc) que sur les possibilités matérielles offertes par l’endroit (baignoires ? chambres seules ? etc), par exemple. L’intérêt d’être en groupe est qu’on peut profiter des questions des autres (auxquelles on n’aurait pas forcément pensé), et éventuellement réaliser qu’on n’est pas la plus larguée du lot (me souviens d’un cours où une femme -proche de la quarantaine quand même- avait annoncé avoir découvert à la télé que le nouveau-né n’était pas exactement rose et frais lorsqu’il sortait du ventre…). Ce type de préparation peut également être couplé à d’autres méthodes plus spécifiques (séances ou parties de séances dédiées).
  • l’haptonomie : d’après un sage-femme spécialiste de cette technique, on ne peut pas vraiment comprendre ce que c’est tant qu’on ne l’a pas fait… et je n’ai pas fait… Discipline fondée par Frans Veldman, elle se définit comme une science de l’affectivité. Si on en croit le site haptonomie.org, l’accompagnement pré et postnatal haptonomique favorise le développement des liens affectifs entre l’enfant, le père et la mère. Il leur permet de vivre une relation de tendresse lorsque l’enfant est encore dans le giron de sa mère. Il favorise également l’accueil du nouveau-né au moment de la naissance et après celle-ci. Très tôt l’enfant acquiert une sécurité de base qui l’invite à l’autonomie, à la communication et à la confiance. Cette méthode accorde une grande place au père. Toujours d’après le site, il s’agit de mettre en oeuvre le contact psychotactile affectivo-confirmant plein de tendresse et d’amour. D’après divers témoignages (et à la lecture du site web), je dirais que l’haptonomie n’est peut-être pas à recommander aux personnes les plus cartésiennes. Enfin il faut savoir que (je cite encore) l’haptonomie est totalement incompatible avec les méthodes qui visent à modifier le tonus musculaire et la respiration, telles que le yoga, la sophrologie, les techniques respiratoires, etc… Celles-ci, par leur caractère d’apprentissage, entraveraient l’effet libérateur de l’expression affective. En outre, toute attention portée sur la respiration ou sur une « représentation imaginaire » de l’enfant fait obstacle au contact affectif avec celui-ci. Cependant, l’haptonomie offre une approche très complète, couvrant toute la grossesse, la naissance et également la période post-natale. Je laisse les commentatrices (hommes aussi s’il y en a !) qui ont testé vous en dire plus.
  • la sophrologie : D’après le site sophrologie-info.com, la sophrologie est une science qui étudie la conscience humaine, un ensemble de techniques et de méthodes à médiation corporelle. Elle vise la conquête ou le renfort de l’équilibre entre nos émotions, nos pensées et nos comportements. Au croisement de la relaxation occidentale et de la méditation orientale adaptées, elle permet à chacun de trouver de nouvelles ressources en lui-même et d’améliorer sa qualité de vie. C’est une des préparations que j’ai choisies pour cette grossesse. Je n’ai pas encore fait beaucoup de séances alors ma vision de la chose reste assez partielle mais en gros il s’agit d’atteindre un état de conscience particulier (la sophronisation), à partir duquel on peut mieux gérer les sensations douloureuses et désagréables et également avoir un meilleur ressenti de son corps (y compris des parties qu’on ressent rarement consciemment comme le col de l’utérus au hasard). Je vous en dirai plus dans un prochain billet, probablement après l’accouchement, pour mieux vous décrire la méthode et vous dire si ça m’a bien aidée ou pas.
  • la préparation en piscine : il s’agit de sessions dédiées aux gros bidons, généralement animées par une sage-femme ou a minima par une personne formée aux spécificités de la femme enceinte. C’est une des préparations les plus physiques, elle sera donc généralement impossible pour les femmes en menace d’accouchement prématuré (contrairement à celles citées auparavant qui peuvent être faites au domicile par une sage-femme libérale par exemple). Je n’ai pas testé de cours spécifique mais j’apprécie beaucoup de nager pendant la grossesse. A mon avis l’inconvénient de ce type de préparation c’est que les éléments sont plus difficiles à mobiliser pour la naissance (à moins d’accoucher en piscine ?), même si les étirements, l’activité, la respiration etc sont toujours bons à prendre.
  • Le yoga prénatal : on en a un peu parlé dans ce billet sur le livre de Leboyer. J’ai testé pour la grossesse du Poussin et je remets le couvert pour celle de l’Oeuf, j’adore. En plus j’ai la chance d’avoir un cours génial à 100 mètres de chez moi. Si vous faites déjà du yoga hors grossesse, vous pouvez continuer à pratiquer en douceur : ce qui est vraiment déconseillé est ce qui fait travailler les abdos. Le reste est à adapter en fonction de votre ressenti et de votre expérience, même si il vaut également mieux éviter les postures qui accentuent le creux lombaire (et au contraire bien basculer le bassin vers l’avant, notamment quand on est sur le dos). Concrètement, je trouve que le yoga apporte énormément pour toutes les petites douleurs articulaires et ligamentaires, notamment dans le dos. On économise quelques séances d’ostéo je trouve ! Par ailleurs je ne suis pas quelqu’un de particulièrement stressé ou angoissé, mais le yoga est connu aussi pour ses effets bénéfiques sur ce type de problème. Enfin cela peut être un atout intéressant pour l’accouchement, tant pour la variété de postures qu’on peut essayer que pour la concentration et pour la respiration. Mon expérience sur ce point est limitée puisque j’ai accouché du Poussin sous péridurale. On verra bien pour l’Oeuf (oui oui je vous raconterai).

D’autres préparations moins connues (mais pas forcément moins bien !) existent aussi :

  • la méthode Bonapace (prononcez à l’italienne Bonapatché) : c’est une technique mise au point par une Québecoise (voir le site officiel) et encore très peu connue en France. Elle se base sur les propriétés physiologiques de transmission du message de douleur et sur les possibilités de le court-circuiter en massant certains points bien identifiés. Elle demande apparemment une forte implication du père. Je n’ai pas pu tester mais cette méthode m’intéresse.
  • le chant prénatal : j’en ai parlé ici, même si mon expérience ne correspond pas à ce qu’on entend habituellement par chant prénatal. Pour en savoir plus, voir le site de l’Association française de chant prénatal.
  • le Pilates : proche du yoga, cette méthode plutôt physique (donc réservée aux grossesses « normales ») peut être adaptée aux femmes enceintes. Voir ici par exemple pour en savoir plus.
  • le gros ballon : il est de plus en plus présent dans les maternités mais présente aussi des avantages certains pendant la grossesse. C’est plutôt un outil « solitaire » même s’il y a probablement des cours quelque part. On peut trouver ces ballons en magasin de sport ou en hypermarché (entre autres), voir aussi l’occasion et les copines qui ont eu des bébés il y a peu. Plus de détails ici.

On peut aussi citer toutes les médecines « alternatives » : acupuncture, shiatsu, ostéopathie, aromathérapie, phytothérapie, réflexothérapie, etc, qui ne sont pas à proprement parler des méthodes de préparation mais qui peuvent également être utiles tant pendant la grossesse que pendant l’accouchement. Il y a des sages-femmes (surtout libérales) qui ont la double casquette.

Enfin je trouve qu’une façon intéressante de se préparer consiste à lire des récits de naissance (de préférence positifs…) pour mieux appréhender l’événement et éventuellement aider à corriger certaines représentations fausses ou biaisées qu’on pourrait traîner et qui risquent de pourrir son accouchement. On en trouve un peu partout sur le net, notamment sur les forums (mais il faut faire le tri !), ou par exemple sur le site Périnatalité (si vous êtes branchée naissance « physiologique », mais même si on ne l’est pas ça me semble intéressant d’en lire quand même !).

Bon je ne prétends pas être exhaustive (argl je ne vous ai pas parlé d’harponomie, scandale !) et je compte sur la basse-cour pour compléter sur les méthodes citées ici et les autres dans les commentaires (quitte à faire évoluer ensuite l’article en cas d’oubli majeur).

Edit : J’ai oublié de vous parler de l’hypnose, je répare en cours de route. On peut avoir soit de l’autohypnose soit être hypnotisé par un praticien (certaines doulas notamment le proposent). Evidemment pas évident d’avoir la personne à côté de soi au moment M, surtout dans les maternités où le personnel n’y est pas formé et où on n’a souvent droit qu’à un seul accompagnant. Le concept semblait fumeux à mon esprit cartésien jusqu’à ce que la poule accoucheuse me raconte avoir vu un couple de médecins, lui anesthésiste (!), qui pratiquait l’hypnose et a eu un accouchement physio super grâce à ça. Qu’un anesthésiste préfère hypnotiser sa femme plutôt que de lui faire une péri, ça m’a laissée sur mon (ample) postérieur. Pour en savoir plus : un article sur l’autohypnose et un autre sur l’hypnonatal.

*Je précise suite à la remarque judicieuse de Sophie Gamelin que quelle que soit la technique choisie, seuls les cours faits par une sage-femme sont remboursés. Voir aussi avec son comité d’entreprise qui peut sponsoriser certaines activités à caractère sportif (genre yoga ou piscine) ou artistique (chant prénatal ?).

(Photo : un cours collectif de préparation à la naissance -méthode non spécifiée)

Mes choix pour cette grossesse (2)

mardi, septembre 8th, 2009

edward-cullen-photo Après vous avoir parlé du cadre général et en particulier du déroulement de l’accouchement dans le billet précédent, voici plus de détails sur le suivi de grossesse en lui-même et ce que nous avons choisi avec la sage-femme. Il faut déjà savoir que ce n’est pas parce qu’un test ou un examen est systématiquement proposé et/ou remboursé qu’il est obligatoire. En fait il n’y a pas grand chose d’obligatoire (il semblerait que les sept consultations prénatales * soient nécessaires pour toucher les allocations familiales et obtenir le 100% de la sécu pour la fin de la grossesse mais il doit y avoir un minimum de souplesse, pour les grossesses découvertes tardivement par exemple). Mais on trouve facilement des phrases, comme ici par exemple (les fautes d’orthographe sont d’origine…), qui montrent qu’il y a encore du chemin à faire :

Si certaines [consultations prénatales] sont obligatoires pour être en règle au niveau administratif, d’autres en revanche sont purement médical et nécessaire au bon déroulement de la grossesse.

Les consultations ne sont pas nécessaires au bon déroulement de la grossesse, elles le vérifient, nuance. Cela peut paraître anecdotique mais c’est à force de présenter les choses comme cela que les femmes perdent confiance en elles.

Pour en revenir à nos moutons, je fais donc mes consultations prénatales avec ma sage-femme. Celles-ci durent quasiment une heure et c’est principalement l’occasion de parler (bon OK je me plains pendant environ 99% du temps). Il y a bien sûr aussi quelques actes médicaux : prise de la tension, écoute du coeur du bébé, analyse d’urine, mesure de la hauteur utérine, pesée (gloups). Le toucher vaginal est facultatif (seulement si signes d’alerte comme des contractions par exemple, donc pour le moment aucun), comme dans d’autres pays européens. Les analyses de sang sont faites dans un labo en ville et les échographies chez ma gynéco.

La sage-femme assure également les séances de préparation à l’accouchement, en l’occurrence pour mon cas des séances de sophrologie individuelle. Je vais suivre un cours de yoga pour femmes enceintes en parallèle (déjà fait pour la grossesse du Poussin et adoré !). Ne voulant pas que la péridurale soit ma seule option (même si je ne suis pas non plus farouchement contre voir ce billet et suivants sur la question), j’ai pensé qu’il serait utile de baliser le terrain en ayant des outils tant physiques que psychologiques pour m’aider le jour J. J’aurais bien fait la méthode Bonapace mais la sage-femme qui la proposait est en congé maternité (rhaaa ces gonzesses qui font rien que tomber enceintes tout le temps…). Pour la grossesse du Poussin j’avais suivi des cours « classiques » en maternité, très bien et très instructifs, mais ce serait un peu redondant cette fois-là.

Au niveau des tests et dépistages, j’ai choisi de faire toutes les échographies (avec une supplémentaire au début du deuxième mois pour s’assurer de la viabilité de la grossesse et du terme, cf ce billet). Par contre j’ai refusé le test des marqueurs sériques HT21, qui entraîne de nombreux faux positifs (et donc de nombreuses amniocentèses inutiles, avec risque de fausse couche accru, sans parler du stress occasionné, plus de détails dans ce billet). La clarté nucale combinée à mon âge a permis de calculer un risque intégré que j’ai trouvé largement satisfaisant. On peut d’ailleurs le calculer online ici.

En outre, la sage-femme m’a dit qu’elle n’était pas pour le dépistage systématique du diabète gestationnel en l’absence de signe d’appel, et cela me va bien. Les recommandations du CNGOF le préconisent pourtant, mais le rapport de la HAS (notez qu’il date de 2005 alors que le papier du CNGOF date de 1996) montre qu’autant le problème est réel et peut entraîner de sérieuses complications, autant le consensus scientifique sur les méthodes de diagnostic reste assez flou, générant pas mal de faux positifs et du coup de gestes inutiles et potentiellement iatrogènes. Je cite notamment une de leurs conclusions :

Les données de la littérature scientifique ne permettent pas de conclure sur les meilleures
stratégies de dépistage et de diagnostic du diabète gestationnel, ni sur leurs modalités de
réalisation. L’ampleur des controverses et des incertitudes conduit à ne pas faire de
recommandations dans l’attente d’études complémentaires.

Je suis par ailleurs immunisée contre la toxoplasmose et de rhésus positif, ce qui m’évite les prises de sang mensuelles. Par contre la maternité où j’ai accouché du Poussin ayant omis de me remettre une carte de groupe sanguin, il va falloir que je refasse une énième détermination (voir ce billet très instructif de JADDO sur le sujet). Le fait que je ne fasse pas ces tests (ou en tout cas pas systématiquement, selon l’évolution de la grossesse je pourrai être amenée à faire le test du diabète par exemple) ne veut pas dire que je les trouve inutiles mais simplement que pour mon cas et pour cette grossesse leurs risques apparaissent supérieurs aux bénéfices à mon avis (pas le risque de la prise de sang bien sûr -quoique quiconque s’est avalé l’infâme solution de glucose du test de O’Sullivan en disconviendra probablement…- mais des conséquences d’un faux positif). Encore une fois il ne s’agit pas de convaincre tout le monde de faire comme moi (j’ai la chance d’avoir une grossesse pour l’instant non pathologique et sans facteur de risque particulier) mais d’amener les lectrices à se poser des questions et à prendre en main leur grossesse. L’idée n’est pas de s’opposer par principe à tout ce que propose le praticien, avec lequel il vaut mieux établir une relation de confiance (quitte à en changer si cela s’avère impossible).

Par contre, étant atteinte d’une légère malformation cardiaque (sans gravité je vous rassure), j’ai passé une échographie supplémentaire consacrée à l’examen du coeur du bébé auprès d’un ponte du genre et je prendrai des antibiotiques au moment de l’accouchement. Tout ça pour vous dire que je ne suis en aucune façon opposée à la médicalisation de la grossesse et de l’accouchement, mais autant que possible adaptée à mon cas particulier (je vous avais prévenus dès le début du premier billet du caractère « Me, myself and I » de ce sujet…).

Il me semble que c’est à chacune de définir ses priorités pour son suivi et son accouchement (on n’est pas non plus obligée de s’exciter sur chaque geste et chaque analyse, par exemple j’aurais sans doute pu me passer du dépistage de la syphillis en début de grossesse mais bon, quitte à faire une prise de sang… tant pis pour la sécu…) et de chercher ensuite un praticien qui permette de trouver une solution acceptable en fonction des circonstances. Bien sûr le corps médical et l’organisation du système de santé portent leur part de responsabilité dans cette systématisation des tests et des examens mais après tout si vous voulez reprendre la main il est plus logique de prendre l’initiative que d’attendre sagement qu’on vous la propose.


Photo : Certes il n’est pas médecin mais on apprend qu’il a fait des études de médecine et à un moment il fait même un accouchement, alors je suis certaine que vous ne lui en tiendrez pas rigueur…

* Je précise que contrairement à ce qui est dit dans le lien, le toucher vaginal ne sert pas à examiner le rythme cardiaque du foetus (qu’on écoute à l’aide d’un doppler ou d’un stéthoscope foetal, selon le terme).

Mes choix pour cette grossesse (1)

lundi, septembre 7th, 2009

c-est-mon-choix Exceptionnellement aujourd’hui (et demain sans doute vu que c’est en deux parties) un billet mon-nombril-moi-je-personnellement.com. Plusieurs d’entre vous m’ont demandé ce que j’avais choisi pour mon suivi de grossesse de l’Oeuf (ah la célébrité, on n’a plus de vie privée…), j’en arrive donc à la conclusion que c’est un sujet qui vous intéresse. Evidemment l’idée n’est pas d’expliquer à tout un chacun qu’il faut faire comme moi, il me semble au contraire que c’est quelque chose d’éminemment personnel, qui pour chaque femme évolue au fil des grossesses, tant en fonction de ses envies que de son état de santé (et de celui du bébé). Et ce qui est idéal pour l’une ne l’est pas pour l’autre. Mais peut-être que la lecture de ces billets (il y aura deux parties) pourra vous amener à réaliser d’une part qu’on a finalement le choix sur beaucoup de choses, et d’autre part qu’il existe certaines alternatives dont on n’a pas toujours connaissance. Je précise enfin que j’attends mon deuxième enfant (après une première grossesse « normale » suivie d’un accouchement par voie basse que j’ai bien vécu) et que -pour l’instant au moins- ma grossesse actuelle n’a pas de caractère pathologique.

J’ai choisi un accompagnement global par une sage-femme libérale avec un accouchement en plateau technique. En Français, cela signifie que toutes mes consultations prénatales ainsi que les séances de préparation à l’accouchement sont assurées par la même sage-femme, laquelle ira ensuite avec moi à la maternité pour l’accouchement, pour lequel elle m’accompagnera seule (et je serai sa seule patiente). Le bébé et moi resterons moins de 24 heures à la maternité (idéalement départ après les deux heures de surveillance post-natale) et les suites de couches seront assurées à la maison, toujours par la même sage-femme. Bien sûr tout cela c’est dans l’hypothèse où tout se passe bien, en cas de problème nous bénéficions de la présence des équipes de la maternité (anesthésiste, pédiatre, obstétricien…). Il est également possible d’avoir la péridurale (puisqu’un anesthésiste rôde dans les parages) tout en restant ensuite suivie exclusivement par la sage-femme.

J’ai opté pour cette solution car je souhaite nous donner au bébé et à moi toutes les chances pour avoir une naissance physiologique, dans les meilleures conditions de confort et de sécurité. Il me semble qu’avoir une sage-femme rompue à ce type d’exercice, qui a appris à me connaître au fil de la grossesse, et qui se consacre exclusivement à ma petite personne (enfin ce jour-là je serai plutôt énorme mais passons), est le meilleur moyen d’atteindre ce but. Bien sûr, la naissance est un événement hautement imprévisible et ce n’est pas une garantie que tout se passera bien, mais je pense que je le vivrai mieux sachant que j’ai fait tout ce que je pouvais. Le petit plus dans mon cas est que ma sage-femme est organisée avec d’autres sages-femmes et des obstétriciens partageant la même « philosophie » de la naissance. Ainsi si pour une raison ou une autre elle n’est pas disponible au moment de la naissance (c’est un vrai scandale mais elle n’est qu’humaine), elle peut être remplacée par une autre sage-femme, certes moins familière mais dans le même état d’esprit. Et si la grossesse ou l’accouchement prennent un caractère pathologique, c’est un des obstétriciens du groupe qui intervient. Par contre le côté négatif c’est que leur accord est avec une clinique privée, où je n’aurais probablement jamais mis les pieds autrement.

Autant vous le dire, je suis une privilégiée : ce type d’accompagnement est un luxe. D’abord financier : avoir une sage-femme rien que pour soi disponible 24h/24 7 jours/7 ça se paie, et même si ça ne me semble pas choquant ça représente un certain investissement. Les dépassements d’honoraires sont pratiqués pour les consultations (mais celles-ci durent près d’une heure), ainsi que pour l’accouchement (comparables à ceux d’un obstétricien en clinique sauf que la sage-femme accompagnera tout le travail alors que l’obstétricien vient généralement juste pour la fin). C’est dommage que ça ne soit pas mieux considéré par la Sécu, car ce qu’on paie d’un côté on l’économise de l’autre en gestes et interventions évités, sans compter qu’évidemment une mère et son bébé coûtent moins cher à la maison avec une visite de sage-femme par jour qu’en séjour à la maternité. D’autre part ce type d’arrangement (l’ouverture des plateaux techniques aux sages-femmes libérales) reste exceptionnel dans les maternités françaises (moins de trente sages-femmes libérales le pratiquent d’après l’ANSFL) : selon l’endroit où vous habitez il est possible qu’il n’y en ait aucune. Et à Paris intra-muros, alors qu’on compte environ 25 maternités, seules deux cliniques ont ouvert leur plateau technique (et aucun hôpital public), à quoi s’ajoute le cas un peu particulier de la maison de naissance des Bluets. Cependant, on peut plus facilement trouver une sage-femme libérale pour un accompagnement semi-global (c’est-à-dire comme l’accompagnement global sauf l’accouchement qui est fait en maternité avec l’équipe de garde), ou dans certains cas s’orienter vers un accouchement à domicile (AAD). Si vous êtes intéressée, en plus du bouche à oreille, vous pouvez aller voir :

Dans le deuxième billet je vous parlerai plus en détail du suivi de grossesse. D’ici-là vous pouvez aller (re)lire ces billets sur le même thème :

(Photo : je vous signale que j’ai écrit ce billet avec une perruque, des lunettes de soleil et un filtre pour brouiller ma voix)

Manif dans la basse-cour

lundi, mai 4th, 2009

compo2_500x300 Aujourd’hui, en special guest star, c’est la poule sage-femme qui vous parle. Diplômée depuis une dizaine d’années, elle exerce dans une grande maternité publique parisienne, ce qui ne l’a pas empêchée d’aller accueillir des bébés en Guyane, à Madagascar et même en Afghanistan. Place à elle donc…

Sage-femme :

Le « plus beau métier du monde » est mal reconnu en France

La poule a la gentillesse de me passer la plume pour vous informer de la mobilisation nationale des Sages-femmes françaises demain le 5 mai 2009, à l’occasion de la journée internationale des Sages-femmes. Je vais tâcher de ne pas verser dans le militantisme débile (je suis remontée à bloooc).

Si nous sommes satisfaites de la reconnaissance des patientes et des équipes au sein desquelles nous exerçons, il n’en est pas de même de celle de la société (qui connaît mal notre profession à moins d’être passé par la case maternité) et de celle des pouvoirs publics (qui reconnaît mal la place des femmes dans la vie active) ! Nos revendications n’ont pas été prises en compte dans le fameux projet de loi « Hôpital, Patient, Santé, Territoire ». Les représentants associatifs et syndicaux, le Conseil de l’Ordre et l’Association Nationale des Etudiants nous appellent à la grève pour réaffirmer la place de la filière Sage-femme dans le système de soins. En trois points, que je vous résume rapidement car nous avons des tartines de revendications, ça donne :

  • « Une société qui maltraite les Sages-femmes, c’est une société qui ne traite pas bien les femmes » (Yvonne Kniebielher, historienne)

Nos conditions d’exercice, comme les conditions d’accompagnement pour les femmes se dégradent. La création de grands pôles de naissances nous éloigne de l’équation idéale

Une femme = une sage-femme

Nous sommes 17 000 Sages-femmes à exercer en France et nous devrions être 5 000 de plus pour accompagner les futurs parents de manière optimale et respecter leurs attentes.

  • Notre formation initiale : nous revendiquons d’intégrer l’université

La formation des sages-femmes a beaucoup évolué : une première année commune avec les médecins et les chirurgiens dentistes, validée par le même concours, puis quatre années d’études dans des écoles hospitalières non universitaires. Nous demandons la reconnaissance de 5 années universitaires pour être alignées sur les diplômes européens de Master 2.

  • Notre compétence médicale, qui figure dans le Code de la Santé Publique, doit être mieux reconnue (lire : rémunérée, mais ça ne s’écrit pas dans les tracts !)

Nous avons pour compétence de suivre les grossesses, y compris de pratiquer les échographies. Si la grossesse est pathologique, nous participons largement à sa surveillance en partenariat avec un obstétricien. Nous animons les séances de préparation à la naissance. Nous réalisons les accouchements normaux (600 000 par an), le premier examen pédiatrique ainsi que les réanimations néonatales. Nous suivons la mère et son nouveau-né dans les suites de couches et le soutien à l’allaitement. Nous assurons la rééducation périnéale. L’exercice de la profession peut se faire en salarié des hôpitaux et des cliniques, ou en libéral.

Spécialistes de la grossesse et de l’accouchement physiologiques, il nous est demandé d’élargir nos compétences (récemment : contraception et dépistage du cancer du col) sans valorisation salariale. Nous sommes les cadres les moins bien payés de France ! Une meilleure formation et une meilleure reconnaissance nous permettront d’avoir plus d’indépendance, et de faire avancer certains dossiers qui tiennent à cœur à beaucoup de femmes, comme les maisons de naissances et les accouchements à domicile.

Si vous voulez soutenir les revendications des Sages-femmes, nous vous attendons nombreuses dans le cortège de manifestation. A Paris, il partira à 11h30 du jardin du Luxembourg (RER B) pour aller aux ministères de la Recherche puis de la Santé. Dans quelques villes de province, des cortèges sont aussi prévus.

Vous pouvez signer et diffuser une pétition en ligne :

http://zigszags.free.fr/mobilisationdessagesfemmes/

Voir aussi les infos sur le site de l’association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL).

(Photo : CDLPSF)

Le melon à deux pattes, suite

mardi, mars 10th, 2009

Après la grande discussion autour de cet article sur la naissance, Cybie m’a signalé une super animation qui montre la progression du bébé lors d’une naissance « normale ». La voici :

Il se trouve que la même équipe a aussi fait une animation sur la césarienne (pas de sang, rien de gore), par contre on ne peut pas l’intégrer dans un site donc vous pouvez aller voir directement ici. Je n’ai pas encore pu écouter le blabla donc j’espère qu’il n’y a pas trop de bêtises (de toute façon c’est en anglais).

Et tant que j’y suis dans la série « je fais bosser les lecteurs pour faire croire qu’il se passe des trucs sur le blog »,  CDLPSF me signale que l’Assemblée nationale a voté l’amendement étendant les compétences des sages-femmes à la contraception et à la prévention du cancer du col de l’utérus. Bonne nouvelle pour les sages-femmes et pour les femmes, dont l’accès à ces soins devrait s’accroître,  mais il ne faudrait pas non plus que ce soit l’occasion d’enterrer définitivement les gynécos de ville.

De mon côté je suis partie mardi à l’aube pour trois jours au pays d’Hamlet avec accès internet en pointillés, donc ne vous étonnez pas de ne pas me voir par ici (je teste la publication programmée).

Trop de césarisées

lundi, décembre 8th, 2008

C’est le JDD qui reprend une étude de la Fédération Hospitalière de France (FHF, pas trouvé l’étude sur leur site), avec ces résultats : le taux de césariennes a doublé en un peu plus de 20 ans (de 10,9% en 1981 à 20,1% en 2007). Cela veut dire qu’actuellement un bébé sur cinq naît par césarienne. Or si cette opération s’avère vitale dans certains cas, il est clair qu’elle n’est pas dénuée de risques, tant pour la mère (mortalité 3,5 fois supérieure à la voie basse) que pour l’enfant (risque de fragilité pulmonaire accru, entre autres). L’OMS, cet empêcheur de jouer du bistouri tranquille, préconise un taux de 15%. D’après le JDD, les raisons avancées de cette popularité de la césarienne sont les suivantes :

  • Optimisation de l‘organisation et du budget des services en programmant des césariennes quand le personnel est disponible
  • Augmentation des grossesses tardives et multiples qui sont statistiquement plus sujettes à complications
  • Crainte des poursuites judiciaires : un obstétricien sera poursuivi pour n’avoir pas fait la césarienne à temps, mais jamais pour avoir fait une césarienne injustifiée
  • Publication de l’étude Hannah (2000) montrant que la césarienne était moins risquée pour l’enfant que la voie basse en cas de présentation en siège, même si son interprétation porte à controverse (y compris par le CNGOF)
  • Hausse de la demande de césariennes de convenance

Pour ce dernier point, rappelons que la césarienne est une intervention chirurgicale, donc autant sur le coup c’est bien plus rapide et indolore qu’une voie basse, autant ça se paie ensuite pour les suites de couches.

Un autre point intéressant de cette étude est le top 100 du taux de césariennes par maternité, au sein duquel prédominent largement les cliniques privées de niveau 1. La palme (le César ?) revient à la clinique de la Muette avec un beau 43,3 %. En moyenne, le taux de césariennes est supérieur d’un point dans les maternités privées de niveau 1 à celui des maternités de niveau 3, toutes publiques et supposées accueillir les cas les plus pathologiques (même s’il y a toujours des surprises). J’avais déjà expliqué ici que privilégier une petite clinique à un gros hôpital n’était pas toujours une stratégie gagnante si on voulait un accouchement aussi physiologique que possible (même si bien sûr il s’agit d’une tendance globale à laquelle existent de nombreuses exceptions).

Les cliniques visées se défendent par les arguments suivants :

  • La césarienne n’est pas avantageuse financièrement (seulement 347 €).
  • Ce sont les femmes qui leur demandent des césariennes de convenance.
  • L’étude ne prend pas en compte le nombre d’accouchements, ce qui introduit un biais statistique (argument réfuté par la FHF).
  • Le taux de césarienne n’est pas un bon indicateur de la qualité des soins.

Tout ceci est fort intéressant, mais on peut regretter que comme souvent, l’article suppose qu’on ne peut accoucher qu’en maternité, ce qui n’est pas (tout à fait) le cas. Comme déjà évoqué ici, on peut accoucher :

  • en maternité
  • en maternité mais avec une sage-femme libérale ayant accès au plateau technique dans le cadre de l‘accompagnement global
  • en maison de naissance (si on n’habite pas en France ou alors près des frontières du Nord-Est)
  • à la maison avec une sage-femme libérale
  • à la maison sans assistance médicale (même si ça n’est pas recommandé, je ne crois pas que ce soit illégal)

Malheureusement, en France tout est fait pour orienter les couples vers la première option et pour décourager les autres possibilités ; d’ailleurs je vous rappelle que vous pouvez faire quelque chose (pour le moment j’ai eu une réponse convenue de l’Ordre des sages-femmes et pas un mot ni de Roselyne, ni du directeur de l’AP-HP, et pas plus de mon député, à qui j’avais envoyé une copie). Attention, il ne s’agit pas de stigmatiser les maternités ou les mères qui y accouchent (comme la Poule pondeuse par exemple), mais encore une fois d’offrir un vrai choix aux futurs parents. Il me semble en tout cas que ça pourrait être une bonne piste pour réduire un peu ce taux : ça n’empêchera pas les femmes de demander des césariennes de convenance mais ça devrait au moins diminuer la part due à l’optimisation du fonctionnement des services.

Si vous avez ou devez accoucher par césarienne, ce billet n’est pas là pour vous culpabiliser non plus : bien sûr qu’il y a un nombre non négligeable de cas où l’opération est incontournable, et heureusement qu’elle existe. A la maternité où j’ai accouché, ils recommandaient de prendre le rendez-vous des six semaines après la naissance avec l’obstétricien qui a pratiqué l’opération, afin de pouvoir lui poser toutes vos questions et de « refaire le film » ensemble. Et si vous ne le vivez pas bien, j’ai entendu beaucoup de bien de l’association Césarine. Peut-être certaines commentatrices qui sont passées par là pourront nous en dire plus ?

Où accoucher

vendredi, juillet 18th, 2008

 Pour la grande majorité des femmes, la question ne se pose même pas : on accouche à la maternité. Pourtant il y a une large gamme de possibilités (certes pas aussi étendue que ce qu’on souhaiterait mais…), et même « la maternité » recouvre un certain nombre d’options.

C’est vrai, c’est quoi une maternité ? D’après wikipedia,

Les maternités sont des lieux de santé assurant le suivi de la grossesse, l’accouchement et les suites de couche de la femme enceinte, ou parturiente. 

Ce sont des structures hospitalières, privées ou publiques, dans lesquelles travaillent aussi bien des médecins (obstétriciens, anesthésistes, pédiatres) que des sages-femmes (et bien sûr infirmières, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes, etc). Toute intervention nécessaire peut y être pratiquée, notamment grâce à la présence d’un bloc chirurgical (et du personnel ad hoc pour le faire fonctionner). Il existe trois niveaux (en fait quatre si on compte bien) qui correspondent aux niveaux de pathologies (en gros au niveau de prématurité de l’enfant) pouvant être pris en charge. Ils vont de 1 (le moins « médicalisé ») à 3 avec une petite subtilité pour le 2 qui se divise en 2A et 2B.  Je ne vous recopie pas tous les détails donnés par wikipedia pour chacun que vous pouvez lire d’un simple clic. Comme cela a déjà été abordé ici, les maternités de niveau plus bas ne sont paradoxalement pas les moins excitées du bistouri. Bien y réfléchir avant de choisir donc… si tant est que votre situation géographique vous le permette (dit la Parigote qui dans son seul arrondissement compte pas moins de quatre maternités) !

Sachez ensuite que certaines maternités proposent ce qu’on appelle des pôles physiologiques, avec des salles de naissance dites « nature », avec ballons, baignoires, draps accrochés au plafond pour se suspendre, etc (voir un exemple ici). Seules les sages-femmes y officient (l’anesthésiste ne passera pas vous proposer la péridurale). Elles sont bien sûr réservées aux accouchements a priori non pathologiques, et si un problème survient la parturiente est immédiatement transférée dans le circuit « classique ».

Une autre possibilité est l’accouchement avec une sage-femme libérale à la disposition de laquelle l’hôpital met son plateau technique. En gros, la sage-femme vous suit à son cabinet pendant votre grossesse, et le jour J vous vous retrouvez à la maternité, où on vous donne une salle d’accouchement et là vous vous débrouillez toutes les deux (enfin le papa est admis quand même). Si tout s’est bien passé, une fois l’accouchement fini, vous prenez vos cliques et vos claques (n’oubliez pas le bébé) et rentrez chez vous, où la sage-femme passera régulièrement vous voir. Et si ça ne se passe pas si bien, les toubibs de la maternité prendront la situation en main.

Si vous avez décidé que ni la grossesse ni l’accouchement n’étaient des pathologies (et si vous avez bien sûr la chance que votre grossesse se déroule sans anicroche), vous pouvez fuir hôpitaux et cliniques, mais autant vous prévenir : en France c’est un peu le parcours du combattant (contrairement à d’autres pays européens comme les Pays-Bas, terre sacrée des militants de la naissance naturelle).

Il est théoriquement possible d’accoucher chez soi avec l’aide d’une sage-femme libérale (les initiés parlent d’accouchement à domicile ou AAD). Mais vue la réticence globale du système sanitaire en France, ces sages-femmes sont de moins en moins nombreuses car ont de gros problèmes d’assurance. Et les parents peuvent ensuite avoir maille à partir avec la sécu (ce qui est bien dommage puisque -on s’en doute- l’AAD est bien moins coûteux que la maternité), sans compter les tracasseries avec la maternité à laquelle il faut quand même mieux s’inscrire pour s’y rabattre en cas de pépin. Un répertoire de sages-femmes libérales pratiquant les AAD en France (ainsi que celles ayant accès à un plateau technique) est disponible sur le site http://www.perinatalite.info/ (il faut ensuite cliquer sur « répertoire sages-femmes », on ne peut pas faire de lien direct). Certaines vont même jusqu’à l’accouchement non assisté (ANA), soit volontairement (mais ça n’est vraiment pas recommandé), soit parce qu’elles ont un poussin très très pressé (un joli exemple chez Isabelle95). Bon à savoir : dans la grande majorité des cas, les accouchements super rapides ne nécessitent pas d’intervention médicale particulière.

Enfin une dernière possibilité est celle de la maison de naissance. Celle-là est vraiment théorique puisqu’il n’y en a pas en France. Mais si vous habitez à l’étranger ou à proximité de pays maisondenaissançophiles, vous pouvez en bénéficier. La maison de naissance est un lieu indépendant entièrement sous la responsabilité de sages-femmes, au sein duquel une (ou deux) sage-femme réferente suit une femme enceinte pendant sa grossesse puis son accouchement et enfin les suites de couches. Bien entendu, à tout moment, la future maman peut être transférée vers un service d’obstétrique hospitalier si son état le nécessite. Un certain nombre de projets sont dans les cartons en France mais ils semblent rencontrer une certaine résistance de la part des pouvoirs publics et des médecins (notamment le CNGOF et le CARO) , alors que les sages-femmes soutiennent largement l’expérimentation du concept (voir le communiqué du Conseil national de l’ordre des sages-femmes). Je n’ai pas une connaissance très pointue des spécificités françaises qui empêchent de transposer chez nous un système qui a visiblement fait ses preuves chez nos voisins, mais il semblerait que ce soient surtout des querelles de chapelles qui soient à l’oeuvre, ce qui est bien dommage. En témoigne la controverse sur la localisation des maisons de naissance, qui pour certains devraient se trouver à l’intérieur des maternités et pour d’autres (le CIANE en particulier) en être totalement indépendantes. Et c’est bien dommage, car même si je ne me sens pas moi-même prête à accoucher en maison de naissance et à renoncer à Sainte Péridurale (faudrait déjà que je sois enceinte me direz-vous…), je trouve important qu’il y ait une offre suffisamment diversifiée pour que chacune y trouve son compte dans des conditions de sécurité optimales. 

Pour ceux et celles que ça intéresse, un peu de lecture (en plus des sites déjà cités en cours d’article) :

Le point sur les maisons de naissance : http://chaumont.catherine.free.fr/mdn/index.html

Le réseau européen des maisons de naissance (en anglais) : http://www.birthcenter-europe.net/index.html

Une histoire de la naissance en France par Marie-France Morel en quelques pages : http://couleurbebe.free.fr/phpBB2/viewtopic.php?t=4460

Le collectif Naître chez soi : http://www.naitrechezsoi.org/

N’hésitez pas à en proposer d’autres en commentaires.

(Image : http://cereales.lapin.org/index.php?number=131)

L’épisiotomie

mardi, juillet 8th, 2008

Sujet hautement controversé et délicat que j’aborde aujourd’hui : l’épisiotomie. Terreur des femmes enceintes (et même des nulligestes !), elle semble unanimement décriée et pourtant reste une pratique courante en France. En 2003-2004, 47% des femmes accouchant par voie basse ont eu une épisiotomie.

D’abord l’épisio (petit nom pour les intimes…) c’est quoi ? D’après wikipedia, l’épisiotomie est un acte chirurgical consistant à ouvrir le périnée au moment de l’accouchement afin de laisser passer l’enfant. Cette incision a idéalement pour but de sectionner le muscle releveur de l’anus. En clair, c’est une incision à la fois de la peau et des muscles qui permet d’agrandir le vagin. Il en existe plusieurs types (en fonction de l’endroit où on coupe) : actuellement sont principalement mises en oeuvre l’épisiotomie médio-latérale (seule utilisée en France) et l’épisiotomie médiane. Voir ici le schéma illustratif. En France, c’est un geste qui peut être pratiqué par une sage-femme ou par un obstétricien (alors que par exemple les forceps ne peuvent être utilisés que par l’obstétricien).

Comment ça se passe ? Ce geste est pratiqué juste avant la sortie du bébé. Lorsqu’il est bien fait, il n’est pas douloureux sur le coup, même sans péridurale (c’est après que c’est une autre paire de manches). Le praticien fait l’incision au moment d’une contraction/poussée. Une fois l’accouchement terminé (y compris l’expulsion du placenta), l’incision est refermée par des points chirurgicaux, avec des fils « classiques » ou résorbables. Si on n’est pas sous péridurale, une anesthésie locale doit être faite pour recoudre.

A quoi ça sert ? On peut distinguer deux types d’indication :

Protéger le périnée d’une déchirure très sévère. On lit et on entend maintenant que l’épisiotomie ne protège pas des déchirures, mais cette affirmation résulte d’une mauvaise interprétation : c’est l’épisiotomie systématique (appliquée à toutes les femmes) qui ne protège pas des déchirures. Les connaissances actuelles montrent aussi qu’une petite déchirure est « mieux » qu’une épisiotomie. Par contre, dans certains cas où le périnée apparaît très mis à mal, ce geste peut effectivement être efficace. D’après l’OMS, l’incidence des déchirures les plus sévères est de 0.4%, et donc cette indication ne devrait justifier l’épisiotomie qu’épisodiquement.

Faciliter et accélérer le passage de l’enfant, surtout s’il donne des signes de détresse. C’est pour ça que paradoxalement il n’est pas rare d’en avoir une pour une naissance prématurée ou un très petit bébé qui ont plus de risques d’être sensibles à un travail qui se prolonge. De la même façon, l’épisiotomie est souvent associée aux extractions instrumentales (avec les forceps par exemple), qui correspondent à des situations de blocage du bébé.

Il faut bien distinguer le problème de l’épisiotomie systématique, qui commence heureusement à être abandonnée en France (voir le communiqué du CNGOF), puisque toutes les études scientifiques ont montré qu’elle n’avait aucun intérêt médical, du geste en lui-même. Il faut d’ailleurs noter que ces études en général s’intéressent à l’intérêt de l’épisio systématique (ou libérale), et pas à celui de l’épisio « tout court ». C’est d’ailleurs le cas de la plupart des gestes et interventions obstétriques : leur mise en oeuvre peut sauver des vies mais à les pratiquer alors qu’ils ne sont pas forcément justifiés ils finissent par créer d’autres problèmes. L’OMS d’ailleurs recommande un taux de 10% (et pas de 0, même si on est encore loin des 30% préconisés par le CNGOF). La confusion entre le geste en soi et la pratique systématique est très présente sur le net et dans les esprits, et peut entraîner une sorte de paranoïa à l’égard des soignants, ainsi qu’un rejet total de toute intervention, qui sera si elle est nécessaire vécue par la femme comme un échec. Il est évident que la façon dont ces gestes sont faits est parfois insupportable d’arrogance et de toute-puissance médicale, et que -comme dans toute profession-, il y a aussi des abrutis finis dans les maternités. Dans cette optique, il y a sans doute un travail d’accompagnement et d’écoute psychologique à mettre en place par le personnel médical (sauf qu’il est en sous-effectif et débordé). Mais entretenir un tel climat de suspiscion ne me semble productif pour personne.

Clairement, l’épisiotomie ne fait plaisir à personne, ni à la femme qui la subit, ni à la sage-femme ou à l’obstétricien qui la pratique. Alors comment la prévenir ? Malheureusement, les taux d’épisiotomie des maternités ne sont que rarement publiés, et l’idéal serait de pouvoir questionner l’équipe médicale avant de s’inscrire pour connaître la politique générale du service. On peut également expliquer à la personne qui vous assiste pour l’accouchement (sage-femme ou obstétricien) qu’on souhaite éviter l’épisiotomie et qu’on préfère prendre le risque d’une petite déchirure. Mais personne ne pourra rien vous promettre : de toute façon un accouchement est imprévisible. On peut aussi se masser le périnée quelques semaines avant le D-day (maintenant on vend même des huiles de massages spécifiques ! business business), mais aucune efficacité n’est garantie (en plus super pratique avec le gros bidon… à moins de mettre son chéri à contribution ? ahem). Enfin on peut lire que de pouvoir choisir sa position d’accouchement pourrait réduire la probabilité d’épisiotomie mais je n’ai pas trouvé de données scientifiques pour étayer cette donnée (il y a aussi le fait que l’épisiotomie est plus souvent faite dans les accouchements « à risque » pendant lesquels les choix de position sont beaucoup plus restreints).

Si malgré tout on n’y coupe pas (trop drôle la poule), que faire ? Dans les premiers jours, certains préconisent d’appliquer de l’argile blanche pour aider à la cicatrisation (il paraît aussi que des bouts de placenta ça marche bien, histoire d’être au top du glamour : slip filet + super serviette maxi méga nuit + bouts de placenta). Par contre la changer régulièrement pour éviter que ça devienne un bouillon de culture. Quand on va aux toilettes, se rincer doucement à l’eau (avec le brumisateur par exemple) et tamponner gentiment avec une petite compresse plutôt qu’utiliser le PQ premier prix de la maternité. La bouée (pour s’asseoir dessus) a apparemment été mise hors jeu, car même si elle apportait un mieux sur le coup, ça se payait après. Idem pour le sèche-cheveu pour sécher la cicatrice (et imaginez un peu la scène !!). Par contre une serviette de toilette pliée peut faire un bon coussin. Eviter les efforts et tous les gestes qui tirent sur la cicatrice. Au niveau psychologique, il ne faut pas hésiter à en parler à l’équipe soignante, voire à demander à la personne qui a pratiqué le geste de vous expliquer pourquoi et comment. Prendre un petit miroir pour examiner le problème peut aussi aider à se réapproprier cette partie du corps, et dans certains cas à éviter d’avoir une grande distorsion entre l’image qu’on en a et la réalité.

Ensuite il faudra apporter un soin particulier à la rééducation périnéale, qui peut aider notamment à se réapproprier en douceur la zone meurtrie. Lors de la reprise des câlins, y aller progressivement et gentiment (ne pas hésiter à utiliser du lubrifiant dans un premier temps). Messieurs, il faudra être « infinite love, infinite patience » (comme disait un grand maître indien) avec votre chérie. Au fur et à mesure de la cicatrisation (quelques semaines), si les tissus ne se referment pas tous à la même vitesse, cela peut créer des tensions douloureuses : ne pas hésiter à consulter, surtout si un peu de paracétamol (seul anti-douleur autorisé si vous allaitez !) ne vous soulage pas.

A plus long terme, certaines femmes se plaignent de douleurs récurrentes, notamment lors des rapports. Si on se trouve dans ce cas, il faut savoir que des solutions existent. Un soutien psychologique peut être très bénéfique, d’autant plus que pour ce type de problème l’aspect psychologique joue souvent un rôle très important. Les médecines alternatives (ostéopathie, acupuncture…) peuvent aussi vous aider. Et si la cicatrice reste très douloureuse, elle peut être reprise par un chirurgien. Cela n’est pas très attirant mais pour les cas les plus extrêmes c’est la seule solution qui reste. Il ne faut pas hésiter à en parler à son gynéco/sage-femme/kiné ou toute autre personne du corps médical en qui on ait confiance.

Un grand merci à la poule accoucheuse pour ses lumières et ses explications.