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Les mystères du col

lundi, octobre 13th, 2008

Un article pour nous, les femmes. Messieurs, vous pouvez rester par amour pour la science, mais on vous aura prévenus. Nous allons parler d’une partie souvent méconnue de l’anatomie féminine : le col de l’utérus (ou cervix pour les anglophones). Pour éviter de trop vous raconter n’importe quoi, j’ai sollicité les lumières de la poule accoucheuse, une super sage-femme qui voit du col toute la sainte journée depuis bien une décennie. Tout le monde en a plus ou moins entendu parler, mais c’est quoi exactement ?

Il s’agit de la partie basse de l’utérus, qui fait la transition vers le vagin. C’est comme une sorte de petit tuyau (les gens qui s’y connaissent parlent de manchon musculaire), avec des parois épaisses et un fin canal au centre. Voilà un joli schéma explicatif (trouvé sur http://www.infovisual.info/03/063_fr.html) :

 

 

De façon générale, le col est fermé pour protéger l’utérus contre l’entrée d’éléments hostiles. Il s’ouvre cependant à plusieurs occasions :
  • pour les règles, afin de laisser passer le sang et les muqueuses
  • lors de l’orgasme, afin de laisser passer les tétards de Monsieur (rappelons que les ovules  sont pondus par les ovaires dans les trompes de Fallope, qui se trouvent à l’autre bout de l’utérus). Il s’ouvre aussi au moment de l’ovulation
  • lors de l’accouchement, afin de laisser passer le bébé 
A noter que l’ouverture pour le passage des règles ou du sperme n’est pas comparable à celle pour le passage du bébé, mais vous vous en doutiez je pense !

 

De façon générale, le col n’aime pas trop s’ouvrir et vous le fait savoir : cela cause les douleurs menstruelles et celles de l’accouchement (pour l’orgasme c’est une autre affaire…). Son ouverture est provoqué par des contractions de l’utérus. L’utérus étant un muscle lisse, on ne peut pas contrôler ses contractions sciemment (de la même façon qu’on ne contrôle pas ses mouvements intestinaux ou ses battements cardiaques, à moins d’être un grand maître yogi). C’est donc généralement l’action des hormones, et notamment l’ocytocine qui déclenche les contractions. A noter que le sperme de Monsieur contient des prostaglandines, qui provoquent également l’ouverture du col. A l’origine, c’est pour faciliter l’entrée des spermatozoïdes mais c’est aussi la base de la fameuse méthode italienne pour déclencher un accouchement qui tarde à venir (bien que son efficacité ne soit pas garantie, elle a au moins l’avantage d’être basée sur une relation de cause à effet scientifiquement prouvée).

 

C’est bien joli tout ça mais en quoi cela nous concerne-t-il ? Eh bien le col est une véritable éponge à hormones et peut donc vous aider à suivre votre cycle menstruel. Si on prend une contraception hormonale (pilule, implant, anneau, certains stérilets…) évidemment les modifications seront moins importantes. Cependant, avec un peu de pratique, l’examen du col peut révéler en quelques instants à quel moment vous vous trouvez. Vous pouvez déterminer si vous ovulez, si vos règles sont sur le point de débarquer et éventuellement si vous êtes enceinte. C’est donc une aide précieuse pour maîtriser sa fécondité, de façon naturelle et simple (à ce point je dois dire que si vous n’êtes pas du tout prête à accueillir un accident, ça ne me semble pas une méthode de contraception optimale ; voir ici pour des idées de contraception « naturelle »). Si vous utilisez une coupe menstruelle, avoir une bonne connaissance des lieux vous sera également utile.

 

Alors concrètement comment fait-on ? Contrairement à ce que votre dernière visite chez le gynéco aurait pu vous faire croire, pas besoin d’un spéculum (objet sympathique à classer dans le top 10 des trucs les plus détestés par les femmes) et d’un coton-tige géant (ça c’est « juste » pour faire un frottis, c’est-à-dire récupérer quelques cellules pour vérifier qu’il n’y a pas de vilaine cancéreuse). D’abord on s’installe dans un endroit calme où on se sent détendue et sans risque d’intrusion inopinée : sur son lit, dans sa baignoire, aux toilettes… Euh non, d’abord on se lave les mains ! Ensuite, on glisse un doigt dans le vagin jusqu’à sentir une sorte de boule. De façon générale, la consistance rappelle celle du bout du nez. Et voilà, vous avez trouvé votre col ! Vous allez vite trouver au centre une petite ouverture, dans laquelle vous pouvez plus ou moins glisser un ongle, mais pas plus. Voilà le chemin vers votre utérus. Et en photo (source : http://www.aly-abbara.com/livre_gyn_obs/images/gif/uterus/Col_uterin/col_nullipare.html) ça ressemble à ça (pour les nullipares, voir ici après six enfants) :

 

 

Une fois que vous avez repéré les lieux, quels sont les paramètres sur lesquels se concentrer ? 
– la position dans le vagin : est-il haut ou bas ? Dans l’alignement ou un peu de côté ?
– la consistance : ferme (comme le bout du nez) ? ou mou (comme les lèvres) ?
l’ouverture : un ongle ? un doigt ?
– la taille : long ? plus court ?
Tout ceci est surtout relatif et varie au cours du cycle, d’où l’importance d’une auto-observation régulière pour qu’elle soit pertinente.
Ainsi, à l’ovulation le col remonte, s’ouvre, s’efface et se ramollit. Avant les règles il s’ouvre également. Le diagnostic dit clinique de la grossesse est aussi possible mais l’auto diagnostic n’est pas évident. Vers 9 SA (semaines d’aménorrhée), on commence à sentir via le vagin que l’utérus a grossi et que les culs de sac vaginaux (parties en cul de sac entre le col et le fond du vagin, voir le joli schéma plus haut) sont plus « pleins ». Vous pouvez voir un autre joli schéma (ainsi que des explications) chez Bibou d’avril.

Lors de la grossesse, vous pouvez ainsi facilement détecter vous-même des changements dans votre col, surtout si vous ressentez des contractions précoces. Enfin facilement, au début hein, parce qu’après un certain point, plus ou moins impossible à moins d’être une contorsionniste mongole. Dommage, parce que ça pourrait éviter de partir trop tôt pour la maternité. Mais à moins de former Monsieur à cet art délicat… Ceci dit, je pense que ça peut être utile notamment au premier trimestre, quand on a toujours peur de faire une fausse couche et qu’il arrive qu’on ait des maux de ventre violents (l’intestin pressentant qu’il va à la longue se faire tasser dans un petit coin par le nouvel intrus et protestant vigoureusement contre un tel sort). Car rien ne sortira de l’utérus si le col ne se ramollit et ne s’ouvre pas d’abord. Ceci dit, il est courant en fin de grossesse que le col commence à travailler et à s’ouvrir sans pour autant que l’accouchement soit imminent ni que ça pose problème. 
Le col lors de la grossesse est évalué par les médecins et les sages-femmes selon quatre critères:      

  • sa position : postérieur (ce qui veut dire en arrière), intermédiaire, ou centré
  • sa longueur : long, mi-long, court, voire épais ou effacé pendant le travail (celle-ci est d’ailleurs évaluée plus précisément par l’échographie du col)
  • sa tonicité : tonique, ramolli, mou
  • son ouverture : de fermé à 10cm en passant par la fameuse expression un doigt ou deux doigts pour les premiers cm (après on passe aux cm et on en reste là pour les doigts)

Ils y ajoutent la hauteur de la présentation foetale (tête ou siège) : haute et mobile, appliquée, fixée sur le bassin, puis pour l’accouchement (et une fois la dilatation du col complète), engagée dans le bassin.
Tout ceci permet de calculer le score de Bishop qui permet d’évaluer entre autres si on peut déclencher l’accouchement (mais aussi évaluer une menace d’accouchement prématuré). Rappelons que plus le col est postérieur, tonique, fermé et long, et plus la présentation du bébé est haute, et moins l’accouchement est a priori imminent. 

 

 

Pour l’accouchement, le col doit s’ouvrir de 10 cm et s’effacer totalement (c’est-à-dire devenir tout plat). Une tête de bébé ayant un périmètre d’environ 33-34 cm, on multiplie le diamètre (10) par Pi (3,14) pour obtenir le périmètre et hop miracle, ça passe ! Tant que le col n’est pas totalement ouvert (c’est la phase de dilatation) on attend que ça se passe. Comme ce sont les contractions qui permettent l’ouverture du col, cette attente n’est pas toujours une partie de plaisir. Et c’est ensuite, une fois que le bébé commence à descendre par le col qu’on pousse (phase d’expulsion). 
Pour voir la descente du bébé à l’accouchement (et aussi plein d’autres trucs, comme l’appareil génital féminin sous toutes les coutures), voir ce petit diaporama
Remercions la poule accoucheuse, grâce à qui vous serez vous-même une poule informée à votre prochaine visite chez le gynéco ou la sage-femme (et même d’ici-là !). 

La péridurale vue de l’intérieur (1)

lundi, avril 21st, 2008

La poule pondeuse tient ses promesses, voici donc un billet sur la péridurale qui sera scindé en trois parties :

  • (1) la péridurale c’est quoi et pour qui ?
  • (2) en pratique, ça se passe comment ?
  • (3) y a-t-il des effets sur le déroulement du travail ?

Je vous donne mon « plan » à l’avance, que vous ne m’accusiez pas de passer sous silence une vaste partie du problème 😉

Enfin cette nouvelle trilogie a de nouveau bénéficié des lumières de la poule accoucheuse, qui est sage-femme depuis dix ans dans un grand hôpital parisien, et nous apporte tant ses connaissances qu’un certain recul. En avant pour la première partie !

Depuis les années 1970, une technique innovante permet aux femmes de ne plus subir le célèbre « Tu enfanteras dans la douleur » : la péridurale (voir ici pour un petit historique sur le soulagement de la douleur pendant l’accouchement : on y apprend notamment qu’au XVème siècle on a brûlé des sages-femmes pour avoir tenté de contrecarrer cette charmante maxime biblique). D’après Wikipedia, il s’agit d’une technique d’anesthésie loco-régionale consistant à introduire un cathéter dans l’espace péridural (espace anatomique entourant la dure-mère d’où son nom) permettant la diffusion d’un produit actif (analgésique, anesthésique, glucocorticoïde…). Selon la dose de produit injectée, la péridurale peut permettre de supprimer la douleur tout en gardant ses sensations et sa mobilité. Pour l’avoir vécu, je peux vous dire que c’est vraiment ça, c’est limite magique. Mais j’ai aussi constaté que de nombreuses rumeurs et légendes circulent autour de cet acte devenu banal dans les maternités françaises (62.6% en 2003 en France d’après l’OMS).

Reprenons depuis le début.

Qui a droit à la péridurale ? La grande majorité des femmes. Il existe cependant quelques contre-indications médicales permanentes, comme des troubles de la coagulation ou une forte scoliose, mais vous devriez en être rapidement informée si c’est votre cas. Et des contre-indications plus ponctuelles : de la fièvre, une infection dans la zone concernée (jusqu’à certains cas d’acné) ou un tatouage au mauvais endroit (vous savez, ce papillon qui dépasse juste de votre jean taille basse). Les mauvaises langues vous diront d’ailleurs que si vous avez supporté un tatouage, vous supporterez bien l’accouchement sans péridurale. N’ayant testé ni l’un ni l’autre, je ne me prononce pas. La péridurale est entièrement remboursée par la Sécu (mais peut faire monter la facture dans une clinique privée) : si vous accouchez à l’hôpital on ne vous demandera pas un kopeck (ou un euro d’ailleurs).

Qui peut faire la péridurale ? Seul un médecin anesthésiste est habilité à pratiquer ce geste. Donc n’y comptez pas si vous accouchez à la maison ou en maison de naissance (qui n’existent pas encore en France mais il y a de l’espoir). Cela peut aussi poser des problèmes dans les petites structures où l’anesthésiste n’est pas toujours présent, et où la pose pourra intervenir à un moment qui n’est pas optimal pour le déroulement du travail, voire entraîner un déclenchement. Réfléchissez-y en choisissant votre maternité.

Quels sont les risques ? Une anesthésie n’est jamais un geste anodin. Cependant, en France en 2008 et si elle est correctement pratiquée (ce qui est généralement le cas, la péri étant le pain quotidien des anesthésistes de maternité), la péridurale n’entraîne plus aucune complication grave et irréversible (genre paralysie ou mort), à de rarissimes exceptions près. La piqûre se fait à un endroit de la colonne vertébrale où il n’y a pas de moëlle épinière (qui ne peut donc pas être touchée). Vous risquez éventuellement une brèche de la dure-mère qui entraîne alors des maux de tête violents mais ceux-ci pourront être traités par une intervention bénigne dès le lendemain du diagnostic.

Concernant le poussin, on considère généralement qu’il n’est pas affecté par cette technique. Les produits actuels sont faiblement dosés et seule une très légère quantité passe dans le sang maternel (et donc vers le bébé). En outre c’est une exposition généralement brève, puisqu’on ne passe pas trois jours sous péridurale, et unique. D’après la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR), « pour votre bébé, l’accouchement sous analgésie péridurale ne comporte pas plus de risque qu’un accouchement sans péridurale ». Cependant, d’après l’OMS, on manque de données résultant d’essais randomisés sur les effets possibles de l’analgésie épidurale sur la mère ou sur l’enfant à long terme.