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Mon bébé comprend tout

dimanche, août 21st, 2011

Voilà un livre dont je dois vous parler depuis bien longtemps. C’est encore une fois à une amie fort attachante que j’en dois la lecture. J’avoue que je n’avais pas très envie de me plonger dedans à la base, car il se traîne une sacrée réputation : c’est le livre qui dit qu’il faut que les bébés pleurent (enfin c’est ce que dit sa réputation). Mais n’écoutant que mon courage et mon dévouement pour vous, Basse-cour chérie, j’ai tout lu.

D’abord, un premier point qui n’a pas manqué de me séduire : Aletha Solter est titulaire d’un doctorat en psychologie, a étudié avec Jean Piaget (un monument en psychologie de l’enfant), et assortit la moindre de ses assertions d’une citation de la littérature scientifique en bonne et due forme. J’ai aussi apprécié qu’elle parle assez systématiquement de « parent », et pas juste de la pauvre mômman, sur qui pèseraient toutes les responsabilités (surtout en cas d’échec). J’ai par contre été moins séduite par la traduction, avec notamment cette perle : j’ai fini par comprendre que « couverture de sécurité » était une traduction littérale de « safety blanket », alors que dans ce contexte il s’agit plutôt d’un doudou que d’une couverture de survie. Je ne suis pas fana non plus des « exercices pratiques » à la fin de chaque chapitre, qui m’évoquent plus une McPsychothérapie à emporter (copyright Le Spykologue) que quelque chose de vraiment utile.

Et le fond alors ? Voici déjà les quatre postulats de base, copiés-collés depuis la quatrième de couverture :

  • Le nouveau-né sait de quoi il a besoin.
  • Si ses besoins sont satisfaits et qu’on ne lui fait pas de mal, il sera gai, intelligent et aimant.
  • Le bébé est très vulnérable ; ses peines et ses besoins insatisfaits peuvent avoir des effets durables.
  • Il a la possibilité de guérir spontanément de ses peines s’il peut exprimer ses sentiments de détresse.

Les besoins généraux du bébé tels que décrits dans le livre ne sont pas révolutionnaires (en gros être alimenté, porté et câliné à la demande, avec une forte préférence de l’auteur pour allaitement et sommeil partagé), si on excepte la question des pleurs. En effet, pour l’auteur, les pleurs, lorsqu’ils ne traduisent pas un besoin non satisfait de l’enfant (faim, sommeil, propreté…), sont là pour lui permettre d’exprimer ses sentiments négatifs et sont nécessaires à son équilibre et à son bien-être. Ils ne doivent donc pas être entravés par ce qu’elle appelle des automatismes de contrôle, dont les plus courants sont le doudou (euh pardon, la couverture de sécurité), la tétine, le pouce et même la tétée câlin. Par contre, pour être vraiment libérateurs et réparateurs, les pleurs doivent toujours être versés dans les bras d’un adulte aimant et contenant (à ce sujet, voir aussi cette étude récente, trouvée -encore !- grâce au Spykologue selon laquelle la recette du « bien pleurer » tiendrait en trois termes : « vite, fort et avec un confident »). Si l’enfant est laissé seul, c’est nocif. Donc en gros, c’est LA solution magique à tous les problèmes : une bonne séance de pleurs dans les bras (temps illimité, près d’1 heure d’affilée ce n’est pas un problème…) et vous aurez un enfant charmant, gai, qui dort et fait le café.

Aletha Solter a donc globalement une idée extrêmement exigeante de ce que doit être la parentalité, et martèle régulièrement que c’est une tâche extrêmement difficile, pour laquelle les parents devraient recevoir autant d’aide que possible, tant par leur entourage que par la société. Elle pousse d’ailleurs son raisonnement jusqu’au bout : à moins d’être exceptionnellement bien aidé, un couple ne devrait selon elle pas avoir plus de deux enfants, qui devraient avoir au moins trois ans d’écart.

Pour ma part, je trouve l‘idée de base intéressante, même si développée de façon légèrement psycho-rigide. En effet, notre société a un rapport assez bizarre aux pleurs des bébés et enfants : non seulement un bon enfant est un enfant mort silencieux, mais tout cri doit être a minima ignoré, voire réprimandé. Or nous avons tous de la colère, de la frustration, de la tristesse et d’autres émotions négatives à exprimer. Je ne connais pas beaucoup d’adultes capables de le faire systématiquement de façon productive (ou en tout cas qui ne soit nocive ni pour eux ni pour les autres), même si nous avons à notre disposition un certain nombre de moyens : en parler, pleurer sur une épaule compatissante, faire une activité physique, etc. Un bébé ou un jeune enfant ne peut que pleurer ou crier pour exprimer une vaste gamme d’émotions négatives, à moins carrément de les transformer en problèmes physiques par la somatisation. Il me semble donc assez intéressant et utile pour un parent de savoir qu’il n’est pas forcément anormal ou pathologique de ne pas réussir à consoler immédiatement tout pleur ou cri de leur enfant. Au contraire, accueillir ces manifestations avec compassion peut aussi être bénéfique à l’enfant. C’est finalement une forme d’écoute active, également préconisée par A. Solter, qui cite d’ailleurs Thomas Gordon. A noter que Gordon Neufeld et Gabor Maté, dans Retrouver son rôle de parent, parlent également du rôle crucial des « larmes d’impuissance » pour aider un bambin à accepter la frustration.

Cependant, je ne peux que regretter le caractère assez dogmatique et péremptoire de l’ouvrage, qui me semble bien difficile à mettre en pratique aussi exactement que le préconise l’auteur. En gros, si j’ai bien compris, il faut être prêt à écouter des pleurs, pour une durée indéfinie, à tout moment du jour et de la nuit. Sans parler de ma disponibilité émotionnelle, forcément limitée, il n’est pas compatible avec mon mode de vie de passer 45 minutes à écouter la frustration de mon bébé qui ne veut pas aller à la crèche alors que j’ai une réunion il y a 10 minutes. Je suis aussi bien contente que Pouss2 prenne la tétine dans la voiture, ce qui lui permet de rester à peu près calme dans une situation où on ne peut pas le prendre dans mes bras. Autre problème : comment faire la distinction entre pleurs exprimant un besoin et pleurs de décharge ? Personnellement je trouve que c’est justement un des avantages de l’allaitement : pas besoin de savoir si bébé veut manger, câlin, dormir, consolation ou un mélange de plusieurs, puisque le sein peut lui fournir tout cela, et plus encore. Il me semble qu’une interprétation trop stricte de ces préceptes pourrait d’ailleurs dans certains cas entraîner des problèmes de lactation par stimulation insuffisante. Enfin les pleurs incessants peuvent aussi signaler une vraie pathologie (chez les nouveaux-nés on peut citer notamment le RGO, relativement courant, très douloureux, et pas toujours accompagné de régurgitations), qui demande un traitement médicamenteux et pas seulement de l’empathie pour guérir.

En bref, il me semble important de retenir le message de fond du livre, à savoir que pleurer en présence d’une oreille compatissante est aussi un besoin fondamental des bébés et enfants (voire des adultes mais c’est un autre sujet), tout en le relativisant. Je trouve qu’il est important de dire les faits, même si c’est une vérité qui ne nous arrange pas, mais le dogmatisme « faites comme ça et pas autrement sinon votre enfant va devenir un dangereux psychopathe façon Hannibal Lecter » m’horripile. Je préfère largement l’approche de Sarah Blaffer Hrdy par exemple. Personnellement je n’en recommanderais donc pas la lecture sans l’assortir de certaines précautions fortes. C’est typiquement le genre de livre qui n’est absolument pas fait pour être appliqué à la lettre à mon avis, sous peine de finir complètement chèvre (d’ailleurs on pourrait presque se demander si ce n’est pas là qu’Elisabeth Badinter a trouvé sa caricature de la mère naturaliste allaitante sacrificielle dans laquelle je ne me reconnais absolument pas). Vous pouvez par ailleurs découvrir un certain nombre des théories et propositions d’Aletha Solter sur le site des Parents conscients (j’aime bien ses 20 alternatives à la punition par exemple). Quoi qu’il en soit, il me semble important de toujours garder un certain recul par rapport aux livres en général : ils peuvent bien sûr nous apporter des éclairages passionnants, voire nous permettre de vrais changements, mais n’oublions pas que les choses sont rarement si simples dans la vraie vie et que les bébés, eux, ne les ont pas lus.

Ajout ultérieur : afin que ce billet puisse contribuer aux Vendredis intellos de Mme Déjantée (dont je vous recommande au passage le blog), je complète avec le petit widget associé et un extrait du bouquin (deux, en fait). Vous comprendrez qu’en tant que BHL des Pampers (surnom qui m’avait été donné il y a quelque temps déjà sur un autre blog) je ne pouvais pas rester indifférente à une telle initiative…

Voici un premier extrait, qui montre bien le potentiel de culpabilisation du bouquin :

J’ai expliqué plus haut que le fait de faire attendre un enfant pour sa nourriture peut l’amener plus tard à avoir un appétit insatiable de nourriture ou de boisson. Pour une raison complètement différente, le surallaitement peut conduire au même problème.

Comprendre : si faim et soif de bébé ne sont pas satisfaits avec une précision chirurgicale il va devenir un adulte boulimique et alcoolique.

Pour finir sur une note plus réconfortante, un extrait sur la nécessité d’aider les parents et en particulier des mères :

Une autre raison pour laquelle il peut sembler difficile d’être parent est que beaucoup d’entre eux ne sont pas assez aidés. S’occuper d’un enfant est un travail extrêmement prenant, et on ne peut pas attendre d’une seule et même personne qu’elle lui donne l’attention dont il a besoin tout au long de la journée (et la nuit, aussi !). L’envie d’avoir du temps pour soi, loin de son enfant, ne signifie pas forcément qu’on le rejette. On attend souvent des femmes qu’elles soient les seules à s’en occuper : c’est ridicule ; les mères ont besoin d’aide.

 

 

Maternage, écologie et féminisme

mardi, décembre 2nd, 2008

L’article de Marianne a jeté un pavé dans la mare : et si le maternage et l’écologie étaient anti-féministes ? La question est intéressante, mais hélas tellement mal traitée qu’on ne peut pas en ressortir grand chose. Caricatural, l’article est entièrement à charge et aligne les contre-vérités et les approximations, sans nuance ni conscience de la complexité de la situation. J’ai beaucoup de respect pour Elisabeth Badinter, mais là elle est franchement à côté de la plaque. Au-delà de la méthode déplorable (dans la flopée de commentaires sur le site du magazine, une des femmes interviewées se plaint que la « journaliste » ait déformé ses propos), le problème sous-jacent à mon avis est d‘opposer a priori le bien-être de l’enfant à celui de la mère. Ou la femme se sacrifie pour sa progéniture, ou au contraire elle la sacrifie à l’autel de son égoïsme. Et selon les époques, le balancier passe de l’un à l’autre, mais c’est toujours plus ou moins l’un OU l’autre. Eh bien moi je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas optimiser les deux à la fois. Ne dit-on pas que l’enfant a besoin d’une mère épanouie pour s’épanouir ? Et à l’inverse, croit-on vraiment qu’une mère sera heureuse si ses enfants sont malheureux ?

Regardons un peu plus au Nord : les pays scandinaves sont réputés à la fois pour leur avancée en matière de droits des femmes (les Parlements les plus féminisés du monde en 1999 sont ceux de la Suède avec 42% de femmes, du Danemark, de la Finlande et de la Norvège, la France n’étant que 52ème avec 10,9 %) et des droits de l’enfant (pionniers dans les lois d’abolition de la fessée, plus de 90% d’allaitement maternel). Et en plus ils sont écolos. Si vous ajoutez à cela que les gens y seraient heureux (alors que l’hiver là-bas doit être encore plus déprimant qu’ici), que leur modèle socio-économique fait baver le reste de la planète, et qu’ils ont inventé Ikea, on finit par se dire qu’il faudrait peut-être tenter de s’en inspirer, non ? Alors certes tout n’est pas directement transposable chez nous, notamment pour l’écologie et le modèle socio-économique, mais concernant la périnatalité ? Les taux de natalité par exemple sont comparables, aux alentours de 2 enfants par femme si on en croit cette carte (même si moins élevés qu’en France qui est vice championne d’Europe). Et cette étude nous indique que la France comme les pays scandinaves est un des rares endroits d’Europe où les femmes sont à la fois très présentes dans le monde du travail et (relativement) très fécondes.

Une autre hypothèse sous-jacente qui me pose problème, c’est qu’on suppose que les clés du bonheur sont universelles. Il y a évidemment un socle commun (genre mieux vaut être riche et en bonne santé que pauvre et malade…), mais le paradis des uns peut tout à fait être l’enfer des autres. A toute mère (ou future mère) qui se pose la question de travailler ou de se consacrer à ses enfants, je suggère de lire cet article publié sur le blog des (Z)imparfaites. C’est une histoire de tripes : on le sent ou on le sent pas. Dans les deux cas, il ne faut pas se forcer. Le problème étant que même si nous vivons dans un pays où notre liberté individuelle est à peu près garantie, le choix n’est pas toujours vraiment possible. Comment retourner au travail si vous ne trouvez pas de façon satisfaisante de faire garder vos enfants ? Et comment s’y consacrer exclusivement si ça implique des fins de mois difficiles ?

Ce qui aliène les femmes, ce n’est pas d’allaiter ou de donner le biberon, ce n’est pas de rester avec leurs enfants ou de faire son trou dans un monde du travail fait par et pour les hommes.  C’est qu’on leur dise d’emblée quoi faire ou ne pas faire, qu’on les prive de faire elles-mêmes des choix mûrement réfléchis (ou du fond de leurs tripes, ça marche aussi), soit parce qu’elles n’ont pas toutes les informations, soit parce que certaines options leur sont en pratique interdites.

Et surtout, surtout : où sont les pères dans ces débats ? Voilà ce qui me gêne dans le terme de maternage : ça n’implique que la mère. Les Anglo-saxons parlent d’attachment parenting, nous devrions plutôt parler de parentage (mais c’est assez moche). OK, ce sont les femmes qui ont les utérus et les seins, mais il n’y a pas que ça ! Qu’une mère allaite n’empêche pas le père de prendre le bébé en peau à peau, de le porter, de dormir avec lui, de le laver, de lui changer ses couches (et de les laver…), de lui faire des purées, de le consoler, de le câliner et encore bien d’autres choses ! Tant qu’ils ne sont pas conflictuels, les liens d’attachement peuvent tout à fait se cumuler : un enfant peut être attaché à sa mère, à son père, à sa nounou, à ses grands-parents… Au risque de passer en mode bisounours : l’amour se multiplie, il ne se divise pas.

Les pères ont une grande responsabilité, car certains aménagements du monde du travail (temps partiel, congé parental, etc) ne deviendront vraiment acceptables et acceptés que quand ils ne seront plus que des histoires de bonnes femmes, mais quand les hommes s’y mettront aussi. Pour cela, il faut aussi que nous (les femmes) leur laissions prendre leur place, qu’on accepte qu’ils ne sont pas nos clones mais que même s’ils font les choses à leur façon, au moins ils les font !

Finalement je vois que je n’ai pas beaucoup parlé d’écologie, mais en fait je ne vois pas bien le rapport. Il est clair que beaucoup de femmes, et de couples, connaissent une vraie prise de conscience à l’arrivée de leur premier enfant, et tant mieux ! Je ne suis pas une militante acharnée, loin de là, mais travaillant pour l’Etat dans le domaine de l’environnement je peux vous confirmer que oui, l’écologie est un vrai problème, et que non, le changement climatique n’est pas un mythe (et qu’on peut encore tenter d’en limiter l’ampleur). Et à mon humble avis, une fois que le coût réel d’un certain nombre de produits sera intégré (c’est-à-dire la compensation pour les dommages causés à l’environnement tout au long du cylce de vie des produits), nous reverrons en profondeur notre façon de faire. On peut se planter la tête dans le sable et attendre de se prendre le changement de plein fouet, ou s’y préparer progressivement, en tentant de modifier en douceur quelques habitudes. Je ne dis pas ça pour vous faire la morale et vous culpabiliser (d’ailleurs moi-même je suis très loin d’être Ste Ecolo), mais parce que c’est inéluctable. Et nous faisons tous les jours l’expérience que ce n’est absolument pas incompatible avec une vie professionnelle.

Demain je vous ferai part de quelques idées pour améliorer la vie des femmes ET des enfants à la fois.

Le maternage

mardi, juillet 22nd, 2008

Je vous ai indirectement parlé de maternage dans ces colonnes, et il me semble maintenant intéressant de revenir sur ce sujet. Si on en croit ce site web dédié au maternage,

Le maternage désigne l’art de s’occuper d’un enfant à la manière d’une mère. Cela sous-entend d’une part, que la manière de faire d’une mère diffère de celle de toute autre personne amenée à s’occuper d’un enfant qui n’est pas le sien. On sait bien que personne n’est plus habilitée que la mère biologique à interpréter les signaux de son nouveau-né et à y répondre adéquatement. Cela sous-entend aussi que le maternage est inscrit biologiquement en chaque mère. C’est ce qu’on appelle communément l’instinct maternel.

En pratique, le maternage s’inscrit généralement dans une approche très « nature » et tournée vers l’écologie. Suivi médical minimum pendant la grossesse, accouchement avec aussi peu d’intervention que possible (idéalement à la maison), allaitement long (jusqu’au sevrage naturel), couches lavables (voire hygiène naturelle infantile ou HNI pour les intimes), portage (avec un porte-bébé physiologique bien sûr), cododo, nourriture bio, éducation non-violente, etc. Petite récap sympa ici. Les materneuses sont généralement en froid avec le corps médical : puisque le postulat de base est que la mère sait le mieux ce qui est bon pour son enfant, elle finit tôt ou tard par remettre en question ce que lui préconise le médecin (à tort ou à raison, ce n’est pas le débat), lequel ne le prend généralement pas très bien. En particulier, elles rejettent pour la plupart totalement ou partiellement la vaccination et se tournent en priorité vers homéopathie, naturopathie et autres médecines alternatives. Si vous vous reconnaissez dans tout ça et souhaitez échanger avec d’autres materneuses, j’ai repéré deux forums sur lesquels vous trouverez votre bonheur (mais il y en a sûrement d’autres) :

http://lesmaterneuses.superforum.fr/

http://bebe-nature.forumactif.com/

Le maternage est notamment inspiré par d’autres cultures (voir Jean Liedloff et les indiens Yeqwana, son livre Le concept du continuum étant une des bibles du maternage), à tel point que le Figaro Madame a lancé le terme d’ethnopuériculture. C’est un des aspects sur lesquels je bloque un peu. Je trouve bien sûr qu’il est arrogant et stupide de prétendre que le mode de vie à l’occidentale est la seule et l’unique vérité, et qu’on a tout à gagner à voir ce qui se fait ailleurs et à s’inspirer des pratiques des autres. Mais de là à les ériger comme modèle absolu et à qualifier nos sociétés de dégénérées, je trouve qu’il y a un grand pas que je ne franchirai pas. N’oublions pas que ce sont dans les mêmes sociétés africaines qu’on portent leurs bébés en permanence, qu’on les allaite à volonté et qu’on dort avec, mais aussi qu’on pratique la polygamie et l’excision. Les Balinais dont Jean Liedloff vante (à juste titre) les mérites éducationnels liment les dents des adolescents pour les débarrasser des mauvais esprits (personnellement je risquerais fort de devenir le mauvais esprit de la personne qui tient la lime…).

En ce qui me concerne, on peut me définir comme materneuse puisque j’élève mon poussin en fonction de ce que nous (son père et moi) pensons et sentons être le mieux pour lui. Pourtant (entre autres hérésies) il n’a pas été allaité longtemps, il lui arrive de pleurer tout seul deux minutes avant de s’endormir et je ne vois pas de différence entre homéopathie et effet placebo…  Plus sérieusement, j’aime bien lire et me documenter, découvrir des théories et mieux comprendre le développement de l’enfant, mais j’essaie de toujours garder un certain recul, et surtout de ne pas tout prendre comme parole d’évangile. Je fais le tri, entre ce qui me parle et ce qui me semble moins approprié. Un des risques d’être à fond dans le maternage, à mon avis, c’est de s’oublier complètement, et ça n’est jamais bon. Par exemple, on vous a dit qu’il fallait allaiter un enfant complètement à la demande, mais vous avez le droit d’en avoir marre, et d’instaurer des règles (surtout s’il s’agit d’un bambin qui a tout à fait la capacité de gérer un peu d’attente). On a aussi le droit de n’adhérer qu’à une partie de la kyrielle de pratiques généralement associée au maternage : sinon on va devenir une sainte martyre qui n’en peut plus de laver des couches, de mixer des purées bio et de donner 17 tétées par nuit (retour à la case précédente : ne pas s’oublier). Il faut garder à l’esprit ce point fondamental : un enfant n’est pas heureux si sa mère n’est pas heureuse. Et il n’apprendra pas le respect s’il sent que sa mère ne se respecte pas elle-même.

J’ai fait un onglet maternage dans la liste de liens, qui présente des sites que je trouve assez radicaux. Je les lis avec intérêt même si je suis loin d’adhérer à tout ce qui y est écrit. J’imagine (j’espère !) que les lecteurs de ce blog font pareil : je ne veux pas m’ériger en grand gourou de la parentalité, juste aider les parents à comprendre les tenants et les aboutissants des options qui s’offrent à eux pour qu’ils puissent faire un choix éclairé (même si c’est avec un soupçon de ma mauvaise foi naturelle…). Je mets aussi l’accent sur certaines pratiques liées au maternage car elles souffrent souvent d’un déficit de promotion, et on ne peut pas faire un vrai choix si on ne connaît pas toutes les alternatives.

C’est comme ça que je vois le maternage : c’est à vous de prendre les décisions (avec le papa, même si pour certaines décisions concernant le corps de la mère c’est à elle de trancher et au père de dire « amen »), pas au pédiatre, pas à la copine (même si elle est materneuse !), pas à la grand-mère, pas à votre aîné, et pas au bébé. Il est souvent intéressant d’entendre l’avis de tout le monde, et surtout de faire confiance à ses enfants, mais au final c’est vous qui tranchez.

L’écharpe porte-bébé

mercredi, juin 18th, 2008

Je vous ai déjà pas mal parlé de portage par ici, mais encore jamais vraiment de l’écharpe. J’ai acheté mon écharpe, une immense Storchenwiege (je crois que c’est la 4.60 m), quand j’étais enceinte, à l’occasion d’un atelier de portage. A l’époque je n’étais pas aussi informée que maintenant sur le portage, et pour moi n’existaient que deux possiblités : le porte-bébé kangourou « classique » et l’écharpe. J’avais lu pis que pendre sur le premier et tout de bien sur la seconde, donc mon choix a été vite vu. C’est un peu dommage, car nous aurions peut-être été mieux avec un mei-tai ou un porte-bébé physiologique comme l’ergo.

Contrairement à une idée répandue, l’écharpe porte-bébé ne vient pas d’Afrique mais d’Allemagne, où son utilisation a été initiée par des médecins et ostéopathes qui trouvaient les portes-bébé occidentaux mal adaptés tant au bébé qu’au porteur. Les écharpes les plus réputées (comme Storchenweige et Lana) viennent d’ailleurs de chez nos voisins d’outre-Rhin. Ils n’ont pas tout inventé non plus, puisque les nouages « kangourou » viennent des Andes (et pas d’Australie, ha ha ha). Le choix des tissus et l’art de nouer sont donc le fruit d’études minutieuses.

Ainsi l’écharpe est probablement le mode de portage le plus versatile, et permet une variété de positions et de nouages sans égale, pour un confort optimal du porteur et du porté, de la naissance (même prématurée) à trois ans et plus. Mais pour cela il faut bien savoir faire les noeuds. Et c’est très loin d’être inné ou super intuitif. Il faut donc d’une part bénéficier de conseils éclairés, et d’autre part être motivé pour s’entraîner, car il n’y a qu’avec la pratique qu’on peut s’améliorer (et les premiers essais peuvent être décourageants). A mon avis, si on n’a pas prévu de porter très souvent, l’écharpe n’est pas un bon investissement. Mieux vaut un truc plus simple à installer. Le coq par exemple a fait quelques essais, et il ne veut à peu près plus en entendre parler, au grand dam de mes frêles épaules.

Mais si ça vous motive, il ne faut pas hésiter. D’abord, il faut acheter une bonne écharpe. Je sais bien que dans le reste du monde on ne se pose pas ce genre de question, mais dans le reste du monde on a l’habitude de porter des charges lourdes toute la journée, souvent sur la tête. Moi à part mon sac à main sur l’épaule… Donc si on veut porter régulièrement (et si on ne veut pas l’écharpe n’est pas la meilleure solution à mon sens), il faut une écharpe confortable. Il y a ici une liste de marques et de critères pour choisir. Si on a des moyens limités, il vaut mieux acheter une bonne écharpe d’occasion qu’une moins bonne neuve.

Vient ensuite le problème de la taille. On trouve par exemple ici les différents nouages qu’on peut faire pour chaque longueur d’écharpe. Cela dépend bien sûr de la corpulence du porteur. On a tendance à prendre des écharpes très longues pour être paré à toutes les situations, mais on se retrouve souvent avec des bouts de tissu qui traînent et dont on ne sait pas trop quoi faire. D’autant plus que si on veut faire ou défaire le noeud dans un lieu public (parking, trottoir…) ça augmente les chances que les bouts de l’écharpe traînent par terre. Les nouages kangourou, qui sont les plus confortables et les plus recommandés (mais pas les plus faciles !), nécessitent peu de tissu. Si un seul des deux dans le couple risque de porter, il vaut mieux optimiser la longueur pour celui-là et pas pour les deux (vous comprendrez que je parle d’expérience…). Au pire on peut toujours couper une écharpe trop longue (mais il ne faut pas se louper) ou la revendre pour en acheter une plus courte (et vice versa).

Une fois en possession de l’écharpe, il convient de se familiariser avec l’objet et notamment avec un ou deux nouages pour commencer. Idéalement, la participation à un atelier sous la conduite d’une personne expérimentée est un excellent moyen pour débuter. Sinon l’internet regorge de ressources et notamment de vidéos (voir sur dailymotion par exemple). Il y a aussi des pas à pas en images, comme ici ou . Si c’est la panique, il y a aussi ce forum.

Bon à savoir :

  • Les premiers essais sont souvent fastidieux, et il est possible que le poussin manifeste son désaccord de façon bruyante. Il suffit souvent de faire quelques pas avant de finir le nouage ou juste après l’avoir fini pour qu’il se calme rapidement et voie les avantages de sa nouvelle situation.
  • Pour que ce soit confortable, il faut que le bébé soit aussi haut et aussi serré que possible, et même encore plus que ça. Au début sur un tout petit on ne sent pas trop si l’écharpe est trop lâche, mais je peux vous dire qu’avec 10 kg sur le dos c’est crucial.
  • Le plus confortable est de porter sur le dos, et ça peut être fait avec un tout petit poussin (voir ces photos de Zabou et de sa princesse d’à peine 1 mois). L’inconvénient c’est que ça ne cache pas le ventre post-grossesse… Quoi qu’il en soit il vaut mieux ne pas attendre que le poussin soit trop lourd/agité pour devant pour commencer à tester les nouages dans le dos, car plus il est lourd et remuant, et plus c’est difficile.
  • Il y a souvent des petites variantes autour de chaque nouage, et aussi dans la façon de les faire (il y a plusieurs méthodes pour passer l’enfant sur le dos pour le kangourou par exemple -et j’en utilise encore une différente…). Il ne faut pas hésiter à fouiner sur le net pour les essayer et choisir celle qu’on préfère.
  • Pour les nouages kangourou, il faut faire attention à ce que le tissu reste bien déployé sous les fesses et cuisses du poussin tout au long du nouage, car c’est principalement ça qui le tient. Et dès que le petit fourbe se cambre ou gigote, ça a tendance à remonter dans le dos (pas une fois que tout est attaché, je vous rassure). Un truc possible est de faire un peu remonter le tissu entre ses jambes.
  • Il paraît qu’on peut allaiter dans l’écharpe, mais je n’ai jamais réussi (pas beaucoup essayé non plus). En tout cas il faut en général bien desserrer le noeud pour avoir la tête du schtroumpf à bonne hauteur.
  • La plupart des gens que je vois dans la rue utilisent le nouage dit « croisé simple« , qui a l’avantage d’être très facile à faire (et un des seuls où on peut enlever et remettre le poussin sans le défaire) mais qui est loin d’être le plus confortable. A partir d’un certain poids, il n’est plus gérable sauf pour un portage de courte durée. 

Et puis quand les enfants seront grands vous pourrez toujours recycler votre écharpe… N’hésitez pas à partager vos trucs dans les commentaires.

(photo Storchenwiege.com)

Choisir un porte-bébé

jeudi, mars 6th, 2008

panier bébé

(photo : Michel Davo, http://www.aebfrance.com/utilisations-artisanat/b-05.html)

D’abord je ne reviendrai pas sur l’utilité d’une telle babiole. Que ce soit pour les balades, pour les transports en commun, ou juste comme kit « mains libres » à la maison, avoir un porte-bébé n’est pas du luxe à mon avis. Et ça n’est pas forcément redondant avec la poussette, qui est aussi bien utile. Sans compter évidemment les bienfaits psychologiques et physiques du portage, mais déjà que ce billet va être long, on ne va pas développer ici.

porte bb chinois (photo: mei tai)

La première chose à vérifier, c’est qu’un porte-bébé soit confortable pour le bébé. Pour qu’il respecte la physiologie de l’enfant, il faut que celui-ci y soit assis sur ses fesses et ses cuisses, et pas suspendu sur les parties génitales avec les jambes qui pendouillent. Cette position doit aussi lui permettre d’avoir le dos légèrement arrondi (les pros parlent de cyphose), ce qui est très important pour les nouveaux-nés. Les portes-bébés en tissu remplissent à peu près tous cette condition. On connaît souvent l’écharpe, mais il y en a plein d’autres : porte-bébé chinois (mei tai ou chinado), porte-bébé coréen (podeagi), pagne africain, sling (hamac à boucles ou porte-calllin), bébétube, tonga, etc. Ça n’est en général pas le cas des portes-bébés plus classiques, mais on peut citer l’ergobaby et le manduca qui sont prévus pour.

echarpe-portebebe.jpg(photo : écharpe)

La seconde, c’est le confort du porteur. Pour que le poussin vous paraisse moins lourd, il faut qu’il soit installé aussi haut et aussi serré contre vous que possible. Le porte-bébé doit vous permettre de régler parfaitement ces deux paramètres. Il est aussi important que le poids du schtroumpf soit bien réparti sur l’ensemble du corps, et pas juste sur les épaules. Notez aussi qu’a priori il me semble plus confortable de porter de façon symétrique qu’asymétrique, mais cette dernière technique a aussi ses adeptes. Pensez aussi au poids du porte-bébé qui devra s’additionner à celui du bébé : plus il y a d’armatures, de machins et de bidules, et plus ça pèse lourd. Enfin les portes-bébés en tissu artisanaux doivent être d’une qualité exemplaire ; le type de tissu peut notamment beaucoup jouer sur le confort. Il ne faut pas lésiner à mon avis. Certes les Africaines portent leur enfant avec un petit bout de tissu tout simple tout fin, mais n’oubliez pas que ce mode de portage a été développé pour un style de vie assez différent du nôtre (incluant notamment de porter beaucoup de choses et pas des plus légères de façon routinière, et beaucoup sur la tête). Mieux vaut un bon porte-bébé/écharpe d’occasion qu’un neuf plus cheap.

podeagi (photo : podeagi)

Il faut ensuite vous préoccuper des possibilités offertes par le porte-bébé : quelles positions ? à partir de et jusqu’à quel âge/poids ? Dans notre culture on voit surtout des bébés portés devant, mais il faut savoir que surtout à partir d’un certain poids il est beaucoup plus agréable de porter dans le dos. Vous avez remarqué qu’on part en rando avec un sac à dos ? Et pas avec un sac à ventre ? Si vous voulez pouvoir porter le poussin quand il a dépassé les 9-10 kg, vous serez vraiment mieux avec lui dans le dos. Et en plus vous serez bien plus dégagé pour vaquer à vos occupations habituelles. Le portage dit « face au monde » (sur le ventre) est assez populaire, mais il est difficile de positionner le poussin de façon physiologique pour lui comme pour vous. On imagine bien qu’il va avoir tendance à pencher vers l’avant (donc pas vers le porteur), et ça n’est pas très confortable. Et je ne rentre même pas dans le débat de savoir si cette position apporterait trop de stimuli au bébé (parce que franchement je n’ai pas d’opinion sur la question).

portage afrique (photo : http://www.afrology.com/soc/portages_bebe.html)

Le dernier critère, mais pas des moindres, est l’utilisation que vous comptez en faire : fréquente ou pas, pour des grandes balades ou plutôt ponctuellement, qui va porter (les deux parents ou un seul), voulez-vous l’utiliser pour allaiter, etc. Et il n’est pas toujours évident de se projeter avant l’arrivée du poussin.

L’écharpe est à mon avis le mode de portage le plus protéiforme. On peut porter même des prématurés (il en existe d’ailleurs une spéciale plus étroite pour ça) et jusqu’à 3-4 ans confortablement. Elle s’adapte confortablement à tous les porteurs et peut être mise de plusieurs façons dans différentes positions. L’inconvénient, c’est qu’il faut s’y mettre et être un minimum motivé. A mon avis c’est un peu comme la coupe menstruelle/les lentilles de contact, les premières fois sont galères mais quand ça roule c’est cool (ma poule). Je ferai sûrement un billet plus détaillé sur les subtilités de l’écharpe bientôt.

Le mei tai et le podeagi, je n’ai pas essayé. Ça a l’air plus simple à maîtriser que l’écharpe et très confortable. C’est aussi moins enveloppant donc plus aéré en été. Par contre les différents sites qui en vendent ne s’accordent pas sur l’âge minimum du poussin (naissance ici, 4 mois ).

Le pagne à l’africaine, pas essayé non plus. Ce mode de portage a tendance à écraser un peu les seins, donc personnellement ça ne me tente pas. Mais vous trouverez une adepte (avec vidéo d’explication), qui apprécie d’avoir les épaules dégagées, ici.

sling tonga

Le sling (à gauche), le tonga (à droite) et le bébétube sont assez simples d’utilisation et s’installent et se désinstallent en un tour de main. Par contre on porte de façon asymétrique. Je teste en ce moment le bébétube, je vous raconte bientôt.

Le porte-bébé ergobaby : voir un avis ici.

Et bien sûr plein d’autres que j’ai oubliés, que je ne connais pas ou qui vont être bientôt proposés. Mais avec tout ce que je vous ai raconté, vous devriez pouvoir les évaluer tout seul (même si rien ne vaut l’essai !).

Quelques liens utiles pour finir cette tartine :

Bébé portage et son cousin Porter son enfant : beaucoup d’informations et de « trucs » autour du portage en écharpe (c’est là que j’ai trouvé beaucoup d’éléments que j’ai repris dans cet article), des pas à pas pour réaliser les principaux nouages, et sur Bébé portage un forum sur lequel une monitrice en portage répond (en général) dans les 24 heures à toutes les questions.

A portée de bisous : un blog qui tient notamment une « porte-bébé-thèque » à jour

Cerise cannelle : un blog avec tout une partie sur le portage incluant plein de vidéos (et rien ne vous empêche ensuite de fureter sur le site si le reste vous branche)

Porter son bébé : site web d’une association de portage avec plein d’explications, un forum et un blog qui mène un grand test de plein de porte-bébés.

Prochain billet : la fameuse technique de bain !

 

Eviter et soigner l’engorgement

dimanche, février 24th, 2008

bouchon Suite à mes promesses d’hier, voici quelques pistes concernant l’engorgement et ses copines, mastite et lymphangite. Concrètement, de quoi s’agit-il ? Vous sentez une tension désagréable dans une partie du sein, qui peut devenir rouge et gonflée (oui, encore plus que le reste, c’est possible !). Cette tension ne disparaît pas après la tétée (peut s’atténuer puis revenir). C’est généralement un (ou plusieurs) canal lactifère qui est bouché et par lequel le lait ne peut plus s’écouler. Dans certains cas, le bébé n’arrive même pas à faire sortir de lait du sein concerné. Et si vous ne faites rien, ça risque de dégénérer en infection, plus communément appelée mastite ou lymphangite, avec fièvre et autres joyeusetés. C’est surtout fréquent dans les deux-trois premiers mois, quand l’allaitement n’est pas bien régulé, mais ça peut aussi arriver aux vieilles routières.

D’abord, comment éviter une situation somme toute assez pénible ? Tout simplement en évitant le trop-plein : bien alterner les deux seins, et si le bébé saute une tétée, ne pas hésiter à tirer un peu de lait (manuellement ou au tire-lait) si les seins sont tendus. Pas forcément l’équivalent d’une tétée entière, juste de quoi soulager la tension. Evitez aussi de porter des soutien-gorges trop serrés qui vous scient le sein en deux (plus facile à dire qu’à faire quand on fait soudainement du 95 I, je suis bien d’accord). Si vous décidez de sevrer votre poussin, allez-y progressivement (attendez plusieurs jours avant de supprimer une autre tétée) et évitez de supprimer deux tétées consécutives.

Dès que vous sentez les premiers symptômes, prenez immédiatement les choses en main. N’arrêtez surtout pas de faire téter l’enfant, bien au contraire, et ne négligez pas l’autre sein pour autant. Sachez que la zone la plus stimulée du sein est celle au-dessus de laquelle se trouve le menton du poussin. Donc à vous de faire votre propre kama-sutra de l’allaitement pour favoriser le drainage de la zone. Et c’est en tout début de tétée que la stimulation est la plus forte. Vous pouvez « accompagner » en massant la zone douloureuse pendant la tétée.

Entre deux, pour diminuer l’inflammation, appliquez du froid ou du chaud (selon ce qui vous soulage le mieux), et glissez (attention minute glamour) une feuille de chou dans votre ravissant soutien-gorge d’allaitement. Vous pouvez aussi appliquer une pommade du style Osmogel mais à nettoyer soigneusement avant la tétée car pas top pour le poussin. C’est aussi une excuse en or pour vous vautrer dans le canapé pendant que Chéri fait la vaisselle, car le repos est fortement recommandé par la faculté.

Si les symptômes persistent, voire s’aggravent, consultez au plus vite, mais pas n’importe qui. Beaucoup de médecins sont encore hélas peu au fait des subtilités de l’allaitement, et on risque de vous prescrire d’arrêter l’allaitement, ce qui serait dommage et n’arrangerait pas vraiment votre problème. Donc visez plutôt votre maternité ou une sage-femme libérale ; peut-être une consultante en lactation, mais ne les ayant pas fréquentées je préfère ne pas me prononcer sur le sujet. Lorsque cela m’est arrivé, une gentille sage-femme est venue chez moi pour me traire faire un massage drainant. Ça n’est pas très agréable, mais c’est souverain.

(image : http://www.smtc90.fr/upload/smtc/embouteillage.jpg)

Allaiter un morphale : quelques pistes de survie

samedi, février 23rd, 2008

jaws Tous les conseils et préconisations autour de l’allaitement visent généralement à prévenir et à corriger deux problèmes : un bébé qui ne tète pas bien et/ou pas assez et une mère qui n’a pas assez de lait. C’est tout à fait normal et souhaitable puisque ces soucis peuvent facilement conduire à un abandon précoce et souvent mal vécu de l’allaitement, voire à un risque pour la santé de l’enfant qui perd trop de poids. Mais on ne parle à peu près jamais du « couple » à l’autre bout de l’échelle : Jaws, le bébé morphale aux mâchoires d’acier et sa mère la Prim’Holstein. Comme vous vous doutez, la poule pondeuse et son poussin appartiennent (ou plutôt appartenaient) à cette dernière catégorie. Et c’est uniquement à cette catégorie que les quelques conseils de cet article s’adressent. Je n’ai aucune compétence pour les autres, sinon celle de les adresser aux autorités compétentes justement.

Comment savoir si vous faites partie de cette merveilleuse communauté ? Commençons par Jaws, le prédateur en couches-culottes. A peine frais émergé du ventre maternel, il s’est rué sur votre sein comme la vérole sur le bas-clergé. A la maternité, tout le personnel ébahi constate son incroyable force de succion, et vous vous attendez presque à voir débarquer dans la chambre une délégation menée par le chef de service pour lui remettre la médaille du Téteur de Platine. Il n’est pas à l’air libre depuis 48 heures qu’il a déjà exploré tout le ventre et les pectoraux paternels à la recherche d’un sein nourricier. Votre coq favori arbore d’ailleurs un magnifique suçon sur le bras, et ça n’est pas votre œuvre (on se doute que vous avez autre chose à faire). D’ailleurs vous avez tendance à lui laisser le jeune piranha plus souvent qu’à son tour, vu qu’à moins d’1 mètre de votre généreux décolleté, alléché par l’odeur, il (le bébé, pas le papa) ouvre un large bec et pousse des cris de volume croissant jusqu’à ce que vous colliez votre téton dans le bec en question. D’ailleurs il aura dépassé son poids de naissance avant la fin de sa première semaine.

Et vous ? Si bien stimulée par les mâchoires d’acier, votre montée de lait arrive dans les 48 heures. A partir de là, vous découvrez que telle le Petit poucet, vous semez non pas des miettes mais des gouttes de lait partout où vous allez. Vous consommez 4 paires de coussinets d’allaitement ultra-absorbants par jour et ne quittez votre soutien-gorge que pour la douche sous peine de vivre dans une mare de lait permanente. Quand le poussin prend le sein, il commence par s’étrangler pendant 5 minutes tellement la pression est forte (quand vous lisez que le biberon est une invention infâme car l’enfant ne contrôle pas le débit de lait, ça vous fait doucement rigoler). Si vous aviez réussi à joindre le lactarium, vous seriez probablement devenue leur nouvelle meilleure amie. En attendant, porter une coquille recueil-lait sur un sein pendant que le bébé tète l’autre vous suffit à remplir un 125 ml par jour.

Vous y êtes ?

D’abord on dit généralement que dès qu’un bébé manifeste l’envie de téter, il faut le mettre au sein. Dans votre cas, ce n’est pas forcément la meilleure idée. Les bébés ont en effet pour la plupart besoin de succion non nutritive. Et dans votre situation, entre l’efficacité du poussin et votre débit de lait, dès que le bébé est au sein, il mange. Il ne sait pas « tétouiller », c’est-à-dire mâchonner le sein sans manger. Et votre sein ne semble jamais se tarir. Cerise sur le gâteau, si vous le laissez au sein trop longtemps il va vomir toute sa tétée. Vous découvrez que cet estomac n’est finalement pas sans fond. Ô joie, ô bonheur, vous pensez l’avoir enfin rassasié pour plus d’1h30, et à la place vous (votre poussin, votre lit, votre fauteuil…) baignez dans du lait à peine digéré. Quant au poussin, il a l’estomac vide. Donc une demi-heure plus tard, il a encore faim. Et vos seins, si bien stimulés, vont produire encore plus de lait. Vous songez à vous vendre comme nourrice pour quintuplés mais vos pauvres tétons écrabouillés aimeraient bien avoir un temps de répit.

Donc dans votre cas, il faut que le bébé puisse téter autre chose pour apaiser ce besoin. Il y a bien son pouce, mais c’est rare qu’il le trouve avant 3-4 mois. Il vous reste votre auriculaire (ou celui du papa, qu’il se rende un peu compte de ce que vous vivez), la tétine ou un biberon d’eau. Là c’est vraiment à vous de voir ce qui convient le mieux à tout le monde. Vous constaterez peut-être qu’il y a des moments où le bébé va pleurer au sein mais se calmer en tétant votre doigt.

Essayez de repérer le temps maximum d’une tétée (par exemple pas plus de 45 minutes) et d’établir un temps minimum entre deux débuts de tétées (1h30 – 2h). Evidemment il ne faut pas être rigide, ce sont de simples repères. Par exemple si l’enfant est malade, si vous voulez « acheter » son silence dans un lieu public, ou s’il fait très chaud (le lait devient alors plus dilué pour que l’enfant tète plus souvent et soit mieux hydraté), n’hésitez pas à le mettre au sein plus souvent. Pour le faire « tenir » entre les tétées, donnez-lui votre doigt ou une tétine et évitez de lui mettre la tête dans votre décolleté qui sent le lait à 300 mètres (préférez l’épaule). C’est un aspect un peu frustrant de l’allaitement dans ce cas : vous n’osez pas trop faire de câlin à votre bébé entre les tétées (qui ne sont pas forcément une partie de plaisir les premières semaines). Par contre le papa en profite bien (qui a dit que l’allaitement excluait les pères ?) !

On vous répètera aussi qu’il n’y a pas besoin de faire de rot au sein. Quand vous aurez observé 5 minutes de tétée à haute pression, vous réaliserez rapidement qu’une petite pause-rot s’impose, surtout si le pépère râle et se tortille.

Si vous avez besoin d’un peu d’air, essayez de recueillir un peu de lait pour faire un biberon (au début, évitez de tirer mécaniquement trop de lait pour limiter la stimulation) que le père pourra donner pendant que vous faites un petit tour/une sieste. Pour ce type de bébé la confusion sein-tétine est rarement un risque. Au contraire il arrive qu’il refuse carrément le biberon. Dans ce cas-là patience et longueur de temps font mieux que force ni que rage.

Craignez l’engorgement comme la peste et faites très attention à bien alterner les deux seins (n’hésitez pas à donner les deux à chaque tétée, même si c’est juste 5 minutes pour le deuxième). Je ferai bientôt un billet sur le sujet.

Généralement après un mois ou deux, les tétées s’espacent et se régulent graduellement, et votre production de lait s’adapte gentiment. Comme la plupart des femmes, l’allaitement devient plus simple et plus agréable vers 2-3 mois. Dommage, c’est la fin du congé maternité.

Enfin je suis bien consciente que ces problèmes, si insignifiants soient-ils, ne concernent pas la majorité, loin de là. Mais d’une part je connais personnellement plusieurs femmes qui se sont trouvées dans ce cas, et d’autre part ça n’est à peu près jamais évoqué dans les documents sur l’allaitement, que j’ai trouvé peu adaptés quand je pataugeais dans mon propre lait.

Conseil gratuit en allaitement

mardi, février 12th, 2008

allaitement Une information qui peut intéresser les jeunes et futures mamans : le site Materneo propose les services gratuits d’une intervenante en allaitement. Vous lui envoyez un e-mail et elles vous répond dans les 24 heures. N’étant plus concernée je n’ai pas pu tester (et je ne veux pas l’embêter avec des fausses requêtes). N’oubliez pas non plus que la sécu rembourse un certain nombre de visites à domicile d’une sage-femme libérale après l’accouchement (j’ai eu beau fouiller le web, impossible d’en trouver le nombre). Et ça, j’ai personnellement testé et approuvé !

Merci à Christine Fourquet du blog bébé pour l’info.

Le concept du continuum

lundi, février 11th, 2008

Continuum Comme beaucoup de parents, je lis un peu tout ce qui me tombe sous la main lorsqu’il s’agit d’éducation et de comment s’y prendre avec nos poussins. En général, ce qui me plaît le plus, ce sont les auteurs qui prônent grosso modo de faire selon son intuition sans trop se prendre la tête (ahem, d’où l’intérêt de lire ce genre de bouquin…). Récemment j’ai voulu en savoir plus sur le concept du continuum, la bible du maternage. Pour vous rassurer immédiatement sur ma crédibilité de blogueuse, je ne l’ai pas lu. Malgré tout, j’ai fait un grand tour sur le site officiel et je pense en avoir retiré la substantifique moëlle. N’hésitez pas à me reprendre dans les commentaires et à nous faire profiter de votre expérience.

L’auteur, Jean Liedloff, a participé à plusieurs expéditions au Venezuela où elle a pu partager la vie des Indiens Yequanas dans la forêt amazonienne. Ayant constaté à quel point ce peuple et en particulier leurs enfants avaient l’air heureux et paisible, elle a tenté de comprendre les bases de leurs principes d’éducation. Voici les principaux points qu’elle a développés :

  • le bébé doit être depuis la naissance en contact physique permanent avec sa mère ou une autre personne ; il ne doit quitter les bras (ou un porte-bébé) que vers 6-8 mois lorsqu’il commence à se déplacer
  • il doit dormir dans le lit de ses parents (avec les parents bien sûr) jusqu’à ce qu’il le quitte de sa propre initiative (généralement vers 2 ans)
  • il faut l’allaiter complètement à la demande
  • on doit répondre immédiatement à ses demandes (faim, sommeil, câlin, etc) sans dévaluer l’enfant comme pénible, mais sans non plus en faire le centre de l’attention

Bon, autant vous dire que ça ne me paraît pas transposable tel quel au mode de vie occidental (au mien en tout cas). En même temps, ça n’est pas très grave, car notre mode de vie n’est pas celui des Yequanas, donc il ne me semble pas choquant que les enfants y soient préparés différemment. Ce qui me semble le plus intéressant, c’est le dernier point, celui qui à mon sens est le corps de cette théorie.

L’idée de répondre à la demande aux besoins de l’enfant (ou au moins du nouveau-né) est de plus en plus populaire en Occident. Cette pratique centrée sur l’enfant peut tendre à le mettre sur un piédestal et à lui donner un sentiment de toute-puissance. Pour Jean Liedloff, c’est nocif. L’enfant a besoin de sentir que l’adulte qui s’en occupe sait ce qu’il fait et ce qu’il veut, et pas qu’il recherche son assentiment pour chaque acte simple du quotidien. En outre, c’est l’enfant qui doit s’intégrer dans la vie de ses parents et non l’inverse. Elle prône ainsi que les parents vaquent à leurs activités habituelles en compagnie de l’enfant sans chercher ni à en faire le centre ni à le repousser. Si au cours de cette activité l’enfant manifeste un besoin, il faudrait y répondre simplement puis retourner à cette activité dès que le besoin est satisfait, voire si c’est possible continuer ce qu’on faisait en s’occupant de l’enfant. Pour elle, les enfants sont naturellement sociaux, c’est-à-dire que leur disposition innée est de collaborer avec les adultes et de participer à leurs activités.

Je trouve ceci extrêmement intéressant pour plusieurs raisons. D’une part, cela va à l’encontre de l’idée reçue selon laquelle une éducation plutôt fusionnelle et à l’écoute de l’enfant devrait obligatoirement créer de petits tyrans. D’autre part, je suis largement déculpabilisée de tous ces moments où je suis avec mon poussin sans vraiment m’occuper de lui (sans parler de toutes ces tétées pendant lesquelles j’ai bouquiné, parlé au téléphone, regardé la (trash) télé… shame on me !).

Evidemment, tout ceci est très séduisant sur le papier : des enfants calmes et heureux, des parents qui n’élèvent jamais la voix… N’oublions pas que les Indiens Yequanas vivent quasi-nus (« tu vas mettre tes chaussures oui ! »), n’ont pas de canapé Roche Bobois en soie sauvage écrue (« aaaaah nooooooon pas le nutella »), ne doivent pas aller à l’école ou chez le pédiatre (« dépêche-toi maintenant on est en retard »), et n’ont pas de gadgets coûteux (« arrrgll mon iphone dégouline de bave »). En prime ils profitent d’une structure sociale resserrée où la mère peut facilement confier son enfant à sa famille ou à d’autres enfants plus grands.

Malgré tout, ces pistes me semblent intéressantes. Quelqu’un a testé ?