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Les fausses-couches précoces

mardi, septembre 25th, 2012

 Après le touchant témoignage de Ficelle, et suite à vos nombreux commentaires, il me semble utile de faire un petit bilan autour de ce sujet douloureux.

D’abord un point sur la terminologie

– Une fausse-couche est une interruption spontanée de la grossesse avant le seuil de viabilité du foetus, soit 22 SA ; si elle a lieu avant 12 SA elle est dite précoce (cela représente 80% des fausses couches), après tardive
– Après 22 SA on parle de mort foetale in utero

Ici on s’intéressera uniquement au cas des fausses-couches précoces, mais si bien sûr certain-e-s souhaitent témoigner plus largement en commentaire chacun-e est bienvenu-e.

Selon les statistiques considérées, on considère qu’une grossesse a 10 à 20% de “chances” de s’interrompre spontanément. Comme le risque est le plus grand en début de grossesse et diminue progressivement, plus la grossesse est diagnostiquée précocément (ainsi certains tests permettent d’avoir une réponse avant même le retard de règles) et plus on voit de fausses couches. Certains auteurs qui définissent une grossesse dès la fécondation de l’ovocyte (avant même l’implantation de l’oeuf dans l’utérus) arrivent à des taux de 70% d’interruptions spontanées (dont la plus grande partie passe inaperçue chez les femmes).

Les causes des fausses couches

Elles sont multiples, qu’elles soient temporaires ou permanentes. On peut citer :

anomalies chromosomiques ou génétiques de l’oeuf ou de l’embryon compromettant sa viabilité ; cela peut se traduire par un oeuf clair, c’est-à-dire qu’il y a un sac embryonnaire (visible à l’échographie) mais vide : on ne voit pas d’embryon (cela concerne un tiers des fausses couches avant 8 SA). C’est la cause la plus fréquente (une étude de 8000 fausses-couches a trouvé plus de 40% d’embryons atteints de tels défauts ) qui ne compromet en rien la possibilité d’une nouvelle grossesse
– grossesse extra-utérine (au lieu de s’implanter dans l’utérus, l’embryon se développe ailleurs, généralement une des trompes de Fallope)
défaut de l’utérus (par exemple la muqueuse n’est pas favorable à la nidation) ou du col
– problèmes hormonaux (comme une déficience en progestérone pendant la phase lutéale du cycle -après l’ovulation)
infection génitale (par exemple à chlamydia) ou générale (notamment listériose ou salmonellose)

Certaines pathologies peuvent donc entraîner des fausses-couches à répétition (soit trois ou plus successives) et parfois nécessiter un traitement pour obtenir une grossesse évolutive, cependant ce sont les cas les plus rares.

Quelques facteurs de risque ont été identifiés, comme l’alcool, le tabac ou la caféine (au delà de 200 à 300 mg par jour, soit environ deux tasses de café). On peut également citer l’exposition chronique (c’est-à-dire de faibles doses sur une longue période de temps) à certaines substances toxiques, notamment dans certaines professions, que ce soit pour l’homme ou pour la femme, ou la prise de certains médicaments. Un stress important peut également entraîner une fausse-couche, ainsi que de l’exercice physique intense. Le poids de la mère joue enfin (dans les deux sens), ainsi que son âge. Bien sûr l’exposition à un facteur de risque n’entraîne pas systématiquement de fausse-couche, pas plus qu’on ne peut expliquer toutes les fausses-couches par la présence d’au moins un de ces facteurs. Il s’agit simplement de corrélations statistiques, sans qu’un mécanisme de causalité soit toujours connu.

Quels sont les signes ?

Les symptômes les plus courants sont des saignements vaginaux et des douleurs au ventre (comme des règles, quoique souvent plus intenses). Certaines femmes voient aussi l’arrêt de leurs maux de grossesse (notamment les nausées) ; d’autres ont simplement un pressentiment que quelque chose ne va pas.
Cela doit inviter la femme à consulter afin de confirmer le diagnostic et le cas échéant d’envisager un traitement. Différents examens permettent d’affiner le diagnostic :
prise de sang : alors que l’hormone beta HCG doit voir son taux augmenter rapidement dans le cas d’une grossesse évolutive, on observe une croissance faible voire une décroissance entre deux prélèvements, ou un taux très inférieur à ce qui est habituellement observé à un terme de grossesse donné.
l’échographie : en tout début de grossesse, elle est souvent faite par voie endovaginale, c’est-à-dire que la sonde est introduite dans le vagin. Elle permet notamment de diagnostiquer un oeuf clair ou une grossesse extra-utérine ; après 6 SA l’absence de battement cardiaque est un signe quasi-certain d’arrêt de la grossesse.

Quel traitement ?

Cela doit évidemment faire l’objet d’une discussion avec la personne qui pose le diagnostic (médecin ou sage-femme), afin de déterminer la meilleure façon de faire pour chaque cas. Il est de toute façon nécessaire de consulter afin de s’assurer qu’il s’agit bien d’une fausse-couche et le cas échéant de vérifier que tous les produits de grossesse ont bien été évacués. Voici les grandes alternatives :

observation : la majorité des fausses-couches précoces s’inscrit dans un processus physiologique d’élimination des embryons non viables qui sont donc expulsés naturellement par le corps de la femme. Cependant cela peut prendre jusqu’à six semaines après le diagnostic, et certaines femmes souhaitent hâter le processus (pour pouvoir retomber plus vite enceinte, parce qu’elles subissent encore des effets “secondaires” désagréables comme les nausées, pour maîtriser le moment de l’évacuation qui peut être difficile et douloureux -en vue d’un voyage ou d’une obligation professionnelle par exemple…). Il existe également un risque d’infection. Dans d’autres cas, l’embryon aura déjà été évacué au moment de la consultation.

traitement médical : des médicaments abortifs sont pris par la femme (par voie orale ou vaginale). Ils provoquent des contractions (souvent douloureuses) et in fine l’expulsion de l’embryon. Ce traitement peut être conduit intégralement en ville (sans passer par l’hôpital) et la femme le prend chez elle, généralement sur deux jours. Il peut y avoir des échecs, qui conduisent à la dernière option.

traitement chirurgical : il ne peut être fait qu’en milieu hospitalier, au bloc opératoire, généralement sous anesthésie générale. On procède à une dilatation du col de l’utérus puis à une aspiration qui permet de “vider” intégralement l’utérus (on parle souvent abusivement de curetage mais cette procédure est globalement délaissée au profit de l’aspiration, moins traumatique). Il est notamment indiqué dans les cas où la fausse-couche entraîne des saignements importants à la femme qui compromettent sa santé. La chirurgie est également la principale option en cas de grossesse extra-utérine (mais avec une procédure différente, puisque justement l’embryon n’est pas dans l’utérus).

Très concrètement, cela peut nécessiter de réaménager son emploi du temps des semaines à venir en fonction de l’alternative choisie, avec souvent plusieurs consultations médicales et examens (analyses sanguines, échographies…) à prévoir, ainsi que la possibilité d’un arrêt de travail.

Et après ?

Chaque femme vit l’événement à sa façon : certaines sont plus ou moins affectées, l’une souhaitera retomber enceinte au plus vite alors qu’une autre préfèrera prendre le temps de faire le deuil de cette grossesse. Evidemment le terme auquel la fausse-couche est découverte, la situation personnelle de la femme (parcours d’aide médicale à la procréation, âge, première grossesse ou pas, etc), le fait que la grossesse ait été plannifiée ou pas, et tout simplement sa vision de l’embryon (pour certaines c’est déjà leur bébé, pour d’autres cela ne reste qu’une possibilité d’enfant) sont autant de facteurs qui vont influencer le vécu de l’événement. On ne peut que souhaiter à chaque femme de pouvoir exprimer les émotions que la fausse-couche provoque, sans que sa souffrance ne soit niée (“ce n’était qu’un tas de cellules”) ou qu’au contraire elle ne soit culpabilisée de ne pas manifester un chagrin jugé adéquat par son interlocuteur. Cela peut être fait dans un cadre médical ou de suivi psychologique, mais aussi simplement avec des proches bienveillants (réels ou “virtuels” : certaines communautés en ligne peuvent apporter un soutien plus que chaleureux). La place du père ou du partenaire de la femme qui fait une fausse couche est délicate : pour beaucoup à ce stade la grossesse est encore peu concrète, même si certains peuvent l’avoir déjà investie. Le point commun reste généralement la souffrance de leur femme (psychologique comme physique).

Quoi qu’en disent certains mythes urbains, hors certaines pathologies la prévention des fausses couches précoces reste rudimentaire pour ne pas dire impossible (et si c’est pour finir avec du distilbène…). Même si la tentation de refaire le film à grands coups de “et si” est forte, la culpabilisation n’apportera pas grand chose de constructif.

Enfin il n’y a pas de délai particulier à respecter si on souhaite rapidement une nouvelle grossesse, sauf avis médical contraire. Une contraception peut également être mise en place dans la foulée. La fausse-couche peut aussi avoir des répercussions lors d’une grossesse ultérieure, avec pour certaines une anxiété accrue quant à son bon déroulement. Il ne faut pas hésiter à évoquer ces angoisses avec la personne qui assure le suivi : parfois le seul fait de les exprimer suffit à les calmer, si nécessaire un suivi plus rapproché (échographies plus fréquentes par exemple) peut être envisagé pour rassurer la femme.

Des liens

Beaucoup déplorent le silence qui entoure cet événement pourtant courant ; voici donc quelques témoignages glanés sur le net :

Un site très complet et informatif en anglais (pourquoi on n’a pas de site médical pro de ce niveau en France ?)

Image : ça faisait longtemps qu’il n’y avait pas eu de beau gosse par ici (dont la présence sur ce blog est je le rappelle réglementaire pour les billets médicaux à caractère anxiogène) et pour changer un peu des médecins je vous propose Rabbi Dave (de Weeds), une épaule sur laquelle pleurer… et si vous n’aimez pas Rabbi Dave faites votre choix sur pfffouuu! (cliquez à vos risques et périls)

Un bébé en retard

dimanche, mai 16th, 2010

tanguy Toutes les femmes enceintes voient arriver avec soulagement le terme de 37 semaines d’aménorrhée (SA), qui correspond à la fin de la prématurité. Et s’il est bien légitime de craindre la mise au monde d’un bébé prématuré, on pense moins souvent au problème inverse : un bébé qui se fait attendre. C’est un sujet que je connais bien puisque Pouss1 est né le lendemain du terme et Pouss2 une semaine après.

La date prévue d’accouchement (DPA) est calculée de façon différente selon les pays. Ainsi, en France on considère la DPA comme la date avant laquelle on doit avoir accouché (41 SA), alors qu’en Belgique ou en Suisse par exemple on prend une date à laquelle il est probable d’accoucher (40 SA : 79 % des naissances auraient lieu entre 37 et 39 SA). Quoi qu’il en soit, tout le monde s’accorde à parler de terme dépassé ou de grossesse prolongée autour de 42 SA.

L’écueil principal est de déterminer avec précision la date de début de grossesse : on se base souvent sur la date des dernières règles (qui sont plus faciles à repérer que l’ovulation) en supposant que l’ovulation a eu lieu 14 jours après. Ainsi n SA = n SG + 2. Cependant, toutes les femmes n’ovulent pas avec la régularité d’un coucou suisse, sans parler des interférences possibles de la contraception (sous contraception hormonale par exemple les saignements ne sont pas liés à une éventuelle ovulation mais à la privation hormonale lors de la pause entre deux plaquettes) ou encore des femmes qui enchaînent grossesses et allaitements sans passer par le retour de couches (« de quand datent vos dernières règles ? » « d’il y a deux ans »…). Certaines femmes sentent l’ovulation (et peuvent même dire quel est l’ovaire actif !), d’autres utilisent des méthodes d’observation (température, col, glaires…) qui permettent de situer la période fertile mais ce n’est pas le cas de toutes. Rappelons que comme les spermatozoïdes peuvent survivre plusieurs jours à attendre un ovule, la date du rapport n’est pas forcément celle du début de la grossesse ; l’ovule ayant un temps de survie plus faible (environ 24 heures) est un meilleur indicateur. En dehors de certaines procédures d’assistance médicale à la procréation où on sait exactement la date du début de la grossesse, le plus fiable reste une échographie de datation avant 12 semaines d’aménorrhée lors de laquelle la mesure de l’embryon permet de déterminer une date de début de grossesse à plus ou moins trois jours. Le taux de beta-HCG dans le sang maternel est un moins bon indicateur : un taux bas peut indiquer une grossesse toute récente comme une fausse-couche à venir. Pour ma part, j’ai fait une échographie de datation autour de 8 SA pour chacune de mes grossesses, ce qui a dans les deux cas permis de corriger la DPA de quinze jours par rapport à l’estimation selon la date des dernières règles. Cependant l’échographie « officielle » des 12 SA permet normalement d’ajuster le terme, même si plus l’échographie est précoce et plus elle est précise. Notons aussi qu’on compte le terme à neuf mois après la date de début de grossesse ou à 39 semaines après cette même date (ce qui correspond à 41 SA) : c’est supposé être équivalent mais selon les dates 41 semaines font plus ou moins neuf mois. Par exemple pour Pouss1 les deux dates coïncidaient exactement mais pour Pouss2 il y avait deux jours d’écart. Ainsi si on prend le terme de 41 SA il est né à 42 SA +1, alors que si on se base sur neuf mois on est à 41 SA +6. Cela paraît négligeable sur neuf mois de grossesse, mais à partir de 41 SA chaque jour de rab est généralement l’objet d’une âpre négociation.

En effet, le dépassement de terme s’accompagne d’un risque accru de postmaturité : au bout d’un certain temps le placenta cesse de fonctionner correctement, entraînant une baisse du poids du bébé (et parfois une hypotrophie) et pouvant aller jusqu’à sa mort in utero (la mortalité périnatale est multipliée par 3 à 42 SA). Paradoxalement, tant que le placenta fonctionne bien, le bébé continue à grossir et la probabilité d’une macrosomie fœtale augmente. L’approche de la date du terme (41 SA) entraîne donc généralement la mise en place d’une surveillance rapprochée pour dépister d’éventuels signes de postmaturité. Les examens généralement pratiqués sont :

  • le monitoring : il permet de suivre à la fois le rythme cardiaque du bébé et d’éventuelles contractions de la mère (et s’il y a des contractions de voir comment le bébé les supporte)
  • l’échographie : on y vérifie la quantité de liquide amniotique (qui peut diminuer en fin de grossesse : on parle d’oligoamnios), les mouvements du bébé et le bon fonctionnement du placenta (on parle de grade placentaire, allant de 0 à III, III étant le plus avancé)

La surveillance commence autour de 41 SA, tous les deux jours, puis tous les jours.

Vous entendrez peut-être parler des examens suivants mais d’après la poule sage-femme ils ne sont quasiment plus pratiqués :

  • amnioscopie : observation du liquide amniotique afin d’en vérifier la qualité (un liquide teinté est généralement le signe d’une souffrance foetale).
  • test au syntocinon : une perfusion d’ocytocine artificielle (syntocinon) permet de provoquer des contractions et de voir comment le bébé les supporte par monitoring.

L’examen du col de l’utérus n’est pas nécessaire (il ne permet pas de déterminer l’imminence éventuelle de l’accouchement) mais peut être réalisé afin d’évaluer la faisabilité d’un déclenchement.

Bien sûr tout ceci est valable pour une grossesse non pathologique, certains facteurs (grossesse multiple, diabète gestationnel…) peuvent venir compliquer la donne.

A la naissance, quelques signes sont typiques des bébés qui ont fait du rab : pieds et mains fripés (comme s’ils étaient restés trop longtemps dans le bain…), peu ou pas de vernix, peau qui pèle dans les jours qui suivent. Pour ma part j’ai été étonnée de voir à quelle vitesse Pouss2 s’est « déplié » : les nouveaux-nés ont en effet les jambes et les bras en flexion et apprécient généralement d’être « contenus » dans un couffin, par emmaillotage, etc. Mais lui au contraire semblait ravi de s’étaler et n’a jamais voulu dormir dans la nacelle, préférant son transat ou notre lit.

Psychologiquement, la situation est assez inconfortable. Il est difficile de prévoir la date d’un accouchement mais en général tout le monde a pris ses dispositions en pensant que le bébé serait là après cette date. Si vous avez un (ou plusieurs) aînés, la personne qui doit s’en occuper pendant l’accouchement n’est peut-être plus disponible. Vos parents ou beaux-parents ont peut-être prévu de s’installer chez vous pour vous aider après la naissance : vous voilà tous tournant comme des lions en cage sans savoir quand le bébé arrivera. La fin de la grossesse est rarement de tout repos, et on est tiraillée entre l’envie d’en finir et celle de laisser le temps à un bébé qui se fait désirer, surtout si l’équipe médicale qui vous suit vous met la pression pour déclencher (parfois simplement par protocole alors que d’après cet article il n’y a pas de bénéfice prouvé à déclencher sans signe de souffrance fœtale avant 42 SA). Sans compter les appels réguliers des proches pour savoir où on en est (forte tentation de répondre que ça fait quinze jours que le bébé est là mais qu’on n’a pas jugé utile de prévenir), auxquels s’ajoutent tous les trucs censés déclencher l’accouchement : boire du champagne (« allons à ce stade ça ne peut plus faire de mal au bébé ») et/ou de l’huile de ricin (se préparer à passer les six heures qui suivent sur les toilettes), rouler sur des pavés (en Austin mini pour les plus raisonnables, en deux roues pour les plus aventureuses), faire un grand ménage et en particulier les vitres (bonjour la sciatique), faire du trampoline (et rebondir sur sa dignité largement piétinée), faire l’amour (pour celles dont la circonférence permet encore au futur père de s’approcher), se mettre pieds nus sur la terre adossée à un arbre (parfait à Paris au mois de janvier), marcher 17 km (cf la sciatique plus haut) et j’en passe. Ajoutons le recours aux médecines parallèles : ostéopathie, homéopathie, acupuncture, et j’en passe, ainsi que des suggestions formulées avec plus ou moins de tact que vous faites un blocage psychologique qui empêche ce pauvre enfant de sortir, le tout repassé en boucle à une femme qui vient de supporter neuf mois de grossesse et qui a les hormones en folie : je tire mon chapeau à celle qui n’aura pas craqué au moins une fois dans cette situation. Il n’est pas interdit de débrancher son téléphone et d’aller passer l’après-midi au cinéma (ou toute autre activité agréable qui sera difficile à faire après la naissance) pour se changer les idées. Certains disent ainsi qu’il n’y a rien de tel qu’une soirée en amoureux au restaurant pour accoucher dans la nuit : au moins c’est plus sympa que de faire les vitres et meilleur que l’huile de ricin. C’est aussi l’occasion de (re)lire en famille l’excellent Bébé de Fran Manushkin et Ronald Himler.

Image : ça a failli être le quatrième prénom de Pouss2…

Mes choix pour cette grossesse (2)

mardi, septembre 8th, 2009

edward-cullen-photo Après vous avoir parlé du cadre général et en particulier du déroulement de l’accouchement dans le billet précédent, voici plus de détails sur le suivi de grossesse en lui-même et ce que nous avons choisi avec la sage-femme. Il faut déjà savoir que ce n’est pas parce qu’un test ou un examen est systématiquement proposé et/ou remboursé qu’il est obligatoire. En fait il n’y a pas grand chose d’obligatoire (il semblerait que les sept consultations prénatales * soient nécessaires pour toucher les allocations familiales et obtenir le 100% de la sécu pour la fin de la grossesse mais il doit y avoir un minimum de souplesse, pour les grossesses découvertes tardivement par exemple). Mais on trouve facilement des phrases, comme ici par exemple (les fautes d’orthographe sont d’origine…), qui montrent qu’il y a encore du chemin à faire :

Si certaines [consultations prénatales] sont obligatoires pour être en règle au niveau administratif, d’autres en revanche sont purement médical et nécessaire au bon déroulement de la grossesse.

Les consultations ne sont pas nécessaires au bon déroulement de la grossesse, elles le vérifient, nuance. Cela peut paraître anecdotique mais c’est à force de présenter les choses comme cela que les femmes perdent confiance en elles.

Pour en revenir à nos moutons, je fais donc mes consultations prénatales avec ma sage-femme. Celles-ci durent quasiment une heure et c’est principalement l’occasion de parler (bon OK je me plains pendant environ 99% du temps). Il y a bien sûr aussi quelques actes médicaux : prise de la tension, écoute du coeur du bébé, analyse d’urine, mesure de la hauteur utérine, pesée (gloups). Le toucher vaginal est facultatif (seulement si signes d’alerte comme des contractions par exemple, donc pour le moment aucun), comme dans d’autres pays européens. Les analyses de sang sont faites dans un labo en ville et les échographies chez ma gynéco.

La sage-femme assure également les séances de préparation à l’accouchement, en l’occurrence pour mon cas des séances de sophrologie individuelle. Je vais suivre un cours de yoga pour femmes enceintes en parallèle (déjà fait pour la grossesse du Poussin et adoré !). Ne voulant pas que la péridurale soit ma seule option (même si je ne suis pas non plus farouchement contre voir ce billet et suivants sur la question), j’ai pensé qu’il serait utile de baliser le terrain en ayant des outils tant physiques que psychologiques pour m’aider le jour J. J’aurais bien fait la méthode Bonapace mais la sage-femme qui la proposait est en congé maternité (rhaaa ces gonzesses qui font rien que tomber enceintes tout le temps…). Pour la grossesse du Poussin j’avais suivi des cours « classiques » en maternité, très bien et très instructifs, mais ce serait un peu redondant cette fois-là.

Au niveau des tests et dépistages, j’ai choisi de faire toutes les échographies (avec une supplémentaire au début du deuxième mois pour s’assurer de la viabilité de la grossesse et du terme, cf ce billet). Par contre j’ai refusé le test des marqueurs sériques HT21, qui entraîne de nombreux faux positifs (et donc de nombreuses amniocentèses inutiles, avec risque de fausse couche accru, sans parler du stress occasionné, plus de détails dans ce billet). La clarté nucale combinée à mon âge a permis de calculer un risque intégré que j’ai trouvé largement satisfaisant. On peut d’ailleurs le calculer online ici.

En outre, la sage-femme m’a dit qu’elle n’était pas pour le dépistage systématique du diabète gestationnel en l’absence de signe d’appel, et cela me va bien. Les recommandations du CNGOF le préconisent pourtant, mais le rapport de la HAS (notez qu’il date de 2005 alors que le papier du CNGOF date de 1996) montre qu’autant le problème est réel et peut entraîner de sérieuses complications, autant le consensus scientifique sur les méthodes de diagnostic reste assez flou, générant pas mal de faux positifs et du coup de gestes inutiles et potentiellement iatrogènes. Je cite notamment une de leurs conclusions :

Les données de la littérature scientifique ne permettent pas de conclure sur les meilleures
stratégies de dépistage et de diagnostic du diabète gestationnel, ni sur leurs modalités de
réalisation. L’ampleur des controverses et des incertitudes conduit à ne pas faire de
recommandations dans l’attente d’études complémentaires.

Je suis par ailleurs immunisée contre la toxoplasmose et de rhésus positif, ce qui m’évite les prises de sang mensuelles. Par contre la maternité où j’ai accouché du Poussin ayant omis de me remettre une carte de groupe sanguin, il va falloir que je refasse une énième détermination (voir ce billet très instructif de JADDO sur le sujet). Le fait que je ne fasse pas ces tests (ou en tout cas pas systématiquement, selon l’évolution de la grossesse je pourrai être amenée à faire le test du diabète par exemple) ne veut pas dire que je les trouve inutiles mais simplement que pour mon cas et pour cette grossesse leurs risques apparaissent supérieurs aux bénéfices à mon avis (pas le risque de la prise de sang bien sûr -quoique quiconque s’est avalé l’infâme solution de glucose du test de O’Sullivan en disconviendra probablement…- mais des conséquences d’un faux positif). Encore une fois il ne s’agit pas de convaincre tout le monde de faire comme moi (j’ai la chance d’avoir une grossesse pour l’instant non pathologique et sans facteur de risque particulier) mais d’amener les lectrices à se poser des questions et à prendre en main leur grossesse. L’idée n’est pas de s’opposer par principe à tout ce que propose le praticien, avec lequel il vaut mieux établir une relation de confiance (quitte à en changer si cela s’avère impossible).

Par contre, étant atteinte d’une légère malformation cardiaque (sans gravité je vous rassure), j’ai passé une échographie supplémentaire consacrée à l’examen du coeur du bébé auprès d’un ponte du genre et je prendrai des antibiotiques au moment de l’accouchement. Tout ça pour vous dire que je ne suis en aucune façon opposée à la médicalisation de la grossesse et de l’accouchement, mais autant que possible adaptée à mon cas particulier (je vous avais prévenus dès le début du premier billet du caractère « Me, myself and I » de ce sujet…).

Il me semble que c’est à chacune de définir ses priorités pour son suivi et son accouchement (on n’est pas non plus obligée de s’exciter sur chaque geste et chaque analyse, par exemple j’aurais sans doute pu me passer du dépistage de la syphillis en début de grossesse mais bon, quitte à faire une prise de sang… tant pis pour la sécu…) et de chercher ensuite un praticien qui permette de trouver une solution acceptable en fonction des circonstances. Bien sûr le corps médical et l’organisation du système de santé portent leur part de responsabilité dans cette systématisation des tests et des examens mais après tout si vous voulez reprendre la main il est plus logique de prendre l’initiative que d’attendre sagement qu’on vous la propose.


Photo : Certes il n’est pas médecin mais on apprend qu’il a fait des études de médecine et à un moment il fait même un accouchement, alors je suis certaine que vous ne lui en tiendrez pas rigueur…

* Je précise que contrairement à ce qui est dit dans le lien, le toucher vaginal ne sert pas à examiner le rythme cardiaque du foetus (qu’on écoute à l’aide d’un doppler ou d’un stéthoscope foetal, selon le terme).

Les tests de grossesse

mercredi, juillet 15th, 2009

test_grossesse Dans la panoplie à la disposition de la femme moderne pour maîtriser sa fécondité, le test de grossesse est un atout important. Cela ne fait pas si longtemps qu’on peut savoir de façon fiable et objective si on est enceinte, et ce dès 2 semaines de grossesse. Il est vrai que faire pipi sur une bandelette n’a rien de très excitant, mais c’est toujours plus pratique que le test de la lapine que cette méthode a relégué aux oubliettes. Oui c’est bien ce que vous pensez, on injectait l’urine de la femme potentiellement enceinte à une lapine, et si la lapine mourrait dans d’atroces souffrances (hémorragies etc) alors c’est que la femme était bien enceinte. Ceci dit il semble qu’il y ait une autre méthode avec une grenouille où la mort de l’animal n’est pas requise.

Comment ça marche ? Attention, ceci ressemble fort à un cours de biochimie. La femme enceinte (ou plus exactement l’œuf, puis le placenta) sécrète une hormone spécifique, la beta-HCG, laquelle se retrouve dans le sang et dans les urines. Le test sert à repérer la présence (ou non) de cette hormone. La technique utilisée est appelée immunochromatographie (oui, ça en jette, mais ça ne doit pas trop rapporter au Scrabble). En gros, le test contient des anticorps spécifiques de l’hormone beta-HCG, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent se lier qu’à cette molécule. En prime on leur a collé une molécule colorée qui permet de les repérer sur le test. Tout cela migre le long de la bandelette du test avec l’urine. Plus une molécule est lourde, moins elle s’arrête loin. Le test de base a donc deux fenêtres. La plus éloignée de l’endroit où il faut mettre l’urine permet de vérifier la validité du test, elle correspond à l’endroit où s’arrêtent les anticorps seuls, qui n’ont pas trouvé de beta-HCG à qui se lier. La plus proche correspond elle à l’arrêt des couples de molécule anticorps + beta-HCG, fatalement plus lourds que les anticorps seuls. S’il n’y a pas de beta-HCG, alors les anticorps vont tous dans la bande la plus éloignée. Dans tous les cas, la molécule colorée permet de repérer les bandes en question (les autres molécules contenues dans le test et dans l’urine restent invisibles, bien qu’elles se baladent aussi). Pour être sûr que les molécules s’arrêtent bien au bon endroit, il y a les anticorps qui vont bien là où les bandes sont supposées apparaître. Certains tests plus sophistiqués ont un affichage plus chiadé, mais le principe reste le même (les tests électroniques qui indiquent directement « enceinte » ou « pas enceinte » utilisent des marqueurs magnétiques plutôt que colorés). Enfin l’intensité de la coloration de la bande est directement liée au nombre de molécules présentes : plus la bande est foncée et plus la concentration en hormone est importante. Fin du cours de biochimie.

Concrètement, il faut mettre du pipi dessus. Personnellement, je ne vois même pas comment on fait pour viser sur un si petit truc (encore une idée de mec ? ou de femme de pub qui fait pipi bleu, comme ses règles ?). Donc je prends un gobelet en plastique propre (toujours demander un gobelet pour les analyses d’urine d’ailleurs, c’est toujours plus large que les flacons standards), et ensuite je trempe le test. Beaucoup plus simple je trouve, et au moins on n’en a pas sur les doigts. Ensuite on attend une ou deux minutes (c’est écrit sur le mode d’emploi, ça dépend des tests) mais pas beaucoup plus ; en général chaque test a une limite au-delà de laquelle il n’est plus fiable. Chacune a sa technique : fixer intensément la fenêtre positive pour qu’une ligne apparaisse, ou au contraire ignorer le test et faire semblant de rien pour choper la ligne par surprise (ça marche aussi dans l’autre sens pour les femmes qui craignent un accident bien sûr).

Quelle est la fiabilité de ce type de test ? Clairement, la faiblesse de la méthode est plutôt dans les faux négatifs que dans les faux positifs. En effet, les tests ne répondent théoriquement qu’à la beta-HCG, et la beta-HCG n’est normalement présente qu’en cas de grossesse. Ceci dit, certains traitements médicamenteux peuvent semer le trouble (notamment ceux pour les problèmes de fertilité), mais on peut espérer que les médecins qui les prescrivent expliquent la conduite à tenir à leurs patientes. Et bien sûr, il est possible que la grossesse ne soit pas évolutive (œuf clair, grossesse extra-utérine…). Les faux négatifs par contre sont plus courants : il suffit que la concentration en hormones ne soit pas assez élevée pour être visible sur le test (rappelons qu’une ligne, même pâle et ténue, compte). Il faut refaire le test quelques jours plus tard, lorsque le taux d’hormones aura augmenté. Lorsque le test est positif, mon premier réflexe est généralement d’en acheter un autre d’une autre marque pour confirmer le résultat. Cependant, je ne peux pas vous dire si c’est la rigueur scientifique ou la paranoïa qui me pousse, même si je penche plutôt pour la deuxième option…

Justement, quand faut-il faire le test ? Normalement il faut attendre d’avoir un retard de règles, même si certains tests peuvent détecter une grossesse quelques jours plus tôt. Mais plus on fait le test tard, plus il est fiable (je sais, je sais, plus facile à dire qu’à faire). Si vous n’êtes pas sûre de quand doivent tomber vos règles, il faut tabler sur 15 jours après l’ovulation et/ou le rapport supposé fécondant. Bon vous n’êtes probablement pas sûre de ça non plus… le dernier recours c’est de se caler sur le plus long cycle que vous ayez observé (hors interférences hormonales type pilule, implant & co). Mon corps ayant une interprétation très personnelle du fameux cycle de 28 jours avec ovulation à J14, je peux vous dire que je compatis si vous êtes dans le flou. Par ailleurs, la concentration en beta HCG est maximale le matin, mais les tests sont normalement suffisamment sensibles pour marcher toute la journée. La bonne nouvelle c’est que la circulation sanguine entre la mère et le fœtus par le placenta n’est fonctionnelle que vers 3 semaines de grossesse : si vous avez bu ou pris des médicaments avant d’avoir fait le test (j’entends avant d’avoir eu le retard de règles), c’est a priori sans conséquence pour bébé (bon ce n’est pas une raison pour se mettre des mines tous les soirs quand vous lancez un projet bébé, juste qu’on n’est pas obligée de vivre comme une Mormone dès qu’on arrête la contraception). Pour les problèmes infectieux (type listériose ou toxoplasmose) c’est moins clair car cela dépend du timing et de la durée de l’infection. J’avoue que je n’y fais pas gaffe tant que je n’ai pas un test positif mais je ne prétends pas que ce soit la façon de faire la plus intelligente…

Où acheter le test ? Ils sont vendus en pharmacie à prix d’or (8-10€ pièce en moyenne), mais vous pouvez aussi acheter de simples bandelettes sur internet pour moins d’1€ pièce (ce qui coûte cher c’est tout le plastique qu’ils mettent autour pour faire joli). J’ai testé ce site américain, dont les prix défient toute concurrence (on peut aussi acheter des tests d’ovulation pas chers), et je n’ai rien à en redire (si ce n’est que le mode d’emploi est vraiment laconique, il vaut mieux avoir une vague idée de comment ça marche). Il faut prendre les « strips » qui sont des bandelettes, ce sont les moins chers, mais a priori pas faits pour faire directement pipi dessus (à tremper dans un récipient). Dans le même genre j’ai trouvé ce site français mais je n’ai pas testé.

Quand le test est positif, c’est généralement une grande joie mais n’oubliez pas que vous avez fait pipi dessus, et qu’il est donc à mon avis d’un goût douteux de le déposer sur l’oreiller/l’assiette de votre cher et tendre. Et je ne suis pas certaine que le bébé ait vraiment envie de recevoir ça pour ses 18 ans… Bref chez moi c’est direction poubelle ! Et avant de l’annoncer à la Terre entière, il peut être prudent de vérifier que la grossesse est bien évolutive. La prise de sang (qui cherche aussi l’hormone beta HCG, mais dans le sang, et permet d’en mesurer la concentration) peut être une indication mais le plus fiable est l’échographie. Si vous en êtes tout juste au retard de règles c’est un peu tôt mais au cours du deuxième mois (6-7 SA) on peut normalement percevoir les battements cardiaques. Personnellement je ne suis pas pour une médicalisation outrancière de la grossesse mais dans les deux cas j’ai fait une échographie vers 7-8 SA (semaines d’aménorrhée) et je le referai si c’est à refaire.

Pourquoi ? Même si ça n’est pas une garantie que tout va bien se passer à 100%, ça permet déjà d’identifier ou d’éliminer un certain nombre de problèmes : oeuf clair, grossesse extra-utérine (GEU), grossesse non évolutive… En général cela finit naturellement en fausse couche (sauf la GEU, mais d’autres signes peuvent alerter) mais l’arrivée des symptômes peut prendre des semaines, je préfère savoir le plus tôt possible. Parce que me traîner comme une loque pendant des semaines pour une grossesse qu’on sait condamnée, si je peux éviter… D’autre part, j’ai mentionné plus haut mes cycles étranges : si on calcule mon terme avec ma date des dernières règles, je me prends facilement 15 jours d’avance. Parfait pour avoir un congé maternité mal cadré, une première écho officielle au mauvais moment et surtout un déclenchement pour un faux dépassement de terme. La mesure de l’embryon par écho est une des méthodes de datation les plus fiables. Si vous souhaitez faire cette échographie et que votre praticien habituel est réticent (même si maintenant de plus en plus de gynécos ont des appareils à échographie et jettent volontiers un coup d’oeil au passage) vous pouvez toujours prétexter une incertitude dans la datation. Mais bien sûr cela n’a rien d’obligatoire et il me semble que c’est surtout une question de vécu (par ex si on a déjà eu une fausse couche) et de ressenti.

(Photo : Flickr)