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La poule pondeuse milite

jeudi, octobre 2nd, 2008

Je sais que ce blog est lu à l’international (rien que cette semaine nous avons eu des commentaires de Suisse, d’Espagne et de Californie, oui j’me la pète graaaaaave !), mais le post d’aujourd’hui est surtout à destination des lectrices résidant en France. Je vous ai parlé ici des différentes possibilités de lieu et d’accompagnement pour accoucher. Le problème est qu’un certain nombre de ces alternatives, même si elles existent sur le papier, sont en réalité extrêmement difficiles à mettre en oeuvre. Pour l’accouchement à domicile (AAD), il est très difficile de trouver une sage-femme qui les accompagne à cause des assurances prohibitives qu’elles doivent assumer. Les maisons de naissance n’existent pas en France, et les maternités ayant ouvert leur plateau technique aux sages-femmes libérales ne se bousculent pas au portillon. A Paris intra-muros, une seule maternité (la clinique du Bien Naître) propose cette alternative, sur les 28 que compte la capitale (si j’en crois cette liste). Je pense que même si on ne se sent pas attirée par les solutions alternative, on est quand même concernée car un pays qui en a les moyens comme le nôtre doit offrir une palette de soins comparable à ses voisins européens. D’autant plus que les solutions alternatives sont moins coûteuses pour la sécurité sociale que l’accouchement « classique » en maternité avec séjour de quelques jours à la clé. Il ne s’agit pas de dénigrer les maternités (ou les femmes qui y accouchent, dont je fais partie !), bien au contraire, mais d’obtenir une offre diversifiée en toute sécurité pour les femmes et les bébés. Certaines femmes sont tellement traumatisées par leur accouchement qu’elles sont réticentes à avoir un autre enfant : il est probable qu’avoir d’autres options pourrait les aider à surmonter ce blocage.

Passons à l’action ! A l’appel du CIANE (groupe de travail GT13), vous pouvez écrire au Conseil National de l’Ordre des Sages-femmes pour faire connaître la réalité de votre situation. On peut écrire aussi même si on n’est pas enceinte ! A mon avis, on peut rajouter son député en copie tant qu’on y est (voir ici si vous ne savez pas qui c’est). 

Tous les détails (modèles de lettre, adresses) sont ICI. N’hésitez pas à faire passer l’info, plus on est de fous…

Pour un diagnostic prénatal non invasif

lundi, septembre 29th, 2008

 Je vous invite aujourd’hui à aller découvrir l‘incroyable imbroglio sur une nouvelle méthode de dépistage prénatal de la trisomie 21 (et d’autres pathologies), plus fiable et moins invasive que celles actuellement en place. 

Pour mémoire, le dépistage prénatal de la trisomie 21 (ou syndrome de Down) se fait actuellement de la façon suivante :

– Mesure de la clarté nucale à la première échographie « officielle », vers 12 semaines d’aménorrhée (2 mois 1/2 de grossesse). Risque lié à l’examen négligeable, fiabilité moyenne

Tri-test HT21 : prise de sang (à la maman) entre 14 et 18 semaines d’aménorrhée (en gros le 4ème mois de grossesse) qui permet de mesurer les taux de certains marqueurs (alpha-foetoprotéine et HCG). Risque lié à l’examen négligeable, fiabilité très médiocre.

Ces facteurs sont ensuite compilés avec l’âge de la maman (plus elle est jeune plus le risque est faible). Si le risque ainsi obtenu est supérieur à 1/250, on pratique alors une amniocentèse, c’est-à-dire un prélèvement de liquide amniotique. En pratique ça se fait avec une grande aiguille qu’on pique dans le ventre maternel sous contrôle d’échographie (histoire d’éviter de perforer le foetus au passage…). L’examen permet de récupérer des cellules foetales pour les passer directement au crible génétique et obtenir une réponse fiable. Par contre c’est assez risqué : probabilité de 1/100 à 1/200 de faire une fausse couche suite à l’examen. A noter qu’avant 14 semaines d’aménorrhée (si la clarté nucale est alarmante par exemple) on procède plutôt à un prélèvement sur le placenta (choriocentèse ou biopsie du trophoblaste en termes pour se la péter). Vue du côté de la patiente, la procédure est relativement similaire. 

Et si vous avez 38 ans ou plus, on vous propose de passer directement à la case amniocentèse (sans passer par la case départ ni toucher 20 000 francs), votre âge vous mettant d’emblée dans la catégorie à risque. Bien sûr, rien de tout cela n’est obligatoire, c’est juste remboursé par la sécu. 

En pratique, ce système complexe permet de détecter la grande majorité des enfants trisomiques avant qu’ils ne naissent, mais à quel prix ! Les faux positifs du tri-test ne sont pas rares, et génèrent une angoisse terrible chez la femme enceinte, qui doit ensuite gérer une douloureuse incertitude jusqu’à l’amniocentèse, examen extrêmement anxiogène, puis jusqu’aux résultats de celle-ci (en général quelques jours mais pour la recherche d’autres pathologies ça peut être plus long). Sans compter le risque de fausse-couche : statistiquement, un certain nombre de mères perdent un enfant en bonne santé suite à une amniocentèse. Notons ainsi qu’on propose l’amniocentèse à partir d’un risque de 1/250 alors que le risque de fausse couche est d’au moins 1/200. Donc pour un risque de trisomie évalué entre 1/250 et 1/200, la fausse couche est plus probable que la trisomie. Cherchez l’erreur… 

Personnellement, la clarté nucale combinée à mon âge (20 ans et des -grosses- poussières) avait donné un risque ridiculement bas (genre 1/10 000), j’avais donc décidé de me passer du tri test qui ne pourrait que semer le doute dans mon esprit. Il me semble qu’en effet, une fois qu’on a un résultat un peu « anormal », on ne peut plus en faire abstraction et se dire qu’après tout, le test n’est pas fiable. Il est quasiment impossible de refuser l’amniocentèse après cela. Regardez autour de vous : si ça ne vous est pas arrivé personnellement, c’est très probablement arrivé à des femmes de votre entourage. Je vous le dis en tout cas pour que les futures mamans se posent au moins la question : ce test n’a rien d’obligatoire ! N’hésitez pas à en discuter avec le médecin ou la sage-femme qui vous suit. 

Or donc, que nous veut le CIANE ? Eh bien figurez-vous que des cellules foetales circulent dans le sang maternel. Une inoffensive et banale prise de sang pourrait permettre d’en récupérer pour les analyser et obtenir un résultat fiable. Dit comme ça, ça a l’air tout simple mais en réalité c’est une technologie de pointe, dont la mise en oeuvre nécessite un sérieux effort de recherche ainsi que des gros sousous (dans la popoche). Il a fallu que des laboratoires publics s’allient avec une société de biotechnologie pour qu’une méthode puisse voir le jour. Et là ils sont en train de se battre sur des histoires de brevet (comprendre « gros sousous dans la popoche ») pendant que la valse des amniocentèses continue. Malheureusement je ne vois pas bien quoi faire concrètement pour débloquer cette situation, mais j’imagine que d’en parler ne peut pas faire de mal. J’encourage les futures mamans (surtout celles qui n’ont pas encore concrétisé leur projet) à se tenir au courant, afin de pouvoir demander cet examen (plutôt que l’amniocentèse) dès qu’il sera disponible -et remboursé. 

(Photo : caryotype humain, INSERM ALPHA PICT 2000.)