Avant j’avais des principes, maintenant j’ai des enfants


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Toutes les femmes peuvent allaiter ?

Par  • Le 9 février 2010 à 17:01 • Catégorie : J'avoue, Réfléchir

cat-breastfeeds-baby Après des décennies de suspicion envers le lait maternel, il était temps de rétablir la vérité. Oui, l’immense majorité des femmes peut produire du lait d’excellente qualité (on voit qu’en Norvège par exemple 98% des femmes allaitent à la naissance). Cependant, dans la lignée de ma réflexion sur information et culpabilité, je me demande si cette affirmation n’a pas entraîné une certaine culpabilisation, infondée de surcroît. Ce n’est un secret pour personne que chaque femme, chaque grossesse, chaque naissance sont différentes. Un couple aura besoin d’assistance médicale pour concevoir un enfant tandis qu’un autre en aura un malgré l’usage d’une contraception supposée efficace. Une femme mènera une grossesse paisible et sans encombre tandis que l’autre développera une complication ou une pathologie. Tel accouchement pourra se faire physiologiquement, sans assistance, tandis qu’un autre nécessitera une césarienne. Bref, sur la route qui nous mène au bébé, nous sommes loin d’être toutes égales. Il paraît logique qu’il en soit de même pour allaiter. Au-delà des situations particulières (prématurité, jumeaux…) qui peuvent handicaper l’allaitement et sans même parler psychologie, il suffit de comparer les histoires de son entourage pour voir toute une diversité de situations : de l’allaitement qui a roulé tout seul aux mères très motivées qui ont fini par jeter l’éponge devant les difficultés rencontrées. Si on reprend l’exemple de la Norvège, on voit d’ailleurs qu’à trois mois le taux d’allaitement passe à 80%. Il y a donc un nombre non négligeable de mères qui ont commencé à allaiter et jeté l’éponge.

Evacuons tout de suite le problème des mauvais conseils et de l’entourage (y compris médical) plombant qui accuse l’allaitement au moindre écart, prônant le sevrage dès que quelque chose ne va pas. Il est complètement schizophrène et contre-productif de mettre des avertissements qui ne sont pas sans rappeler ceux des paquets de cigarette sur les boîtes de lait pour bébé tout en considérant ce même lait comme la norme et le lait maternel comme une gentille excentricité (voire une déviance perverse de mère égoïste) à laquelle il faut renoncer rapidement. Passons aussi sur le libre choix des mères :  il doit être absolument respecté. Ceci dit ce choix doit être informé et éclairé, et non basé sur des contre-vérités et autres culpabilisations infondées (« de toute façon tu n’as pas de lait/il n’est pas assez bon » ou encore « si tu n’allaites pas ton enfant sera débile, malade et dépressif »). Mais in fine, même s’il est important d’être bien informée,  je pense que c’est surtout une décision intuitive, qu’on « sent » plus qu’on ne la raisonne. Il me semble qu’allaiter si on n’en a pas vraiment envie c’est un peu comme faire du sport juste pour maigrir/parce que c’est bon pour la santé : voué à l’échec. Mieux vaut faire comme Johnny et avoir l’envie d’avoir envie… Mais j’ai déjà parlé de toute cela ici, et je vais donc arrêter le réchauffé.

Revenons à nos moutons : qui ne connaît pas une mère, motivée pour allaiter, bien renseignée sur la question (y compris ayant déjà allaité), qui a fini par arrêter ? Ou qui a persévéré, mais à quel prix ? Je connais des femmes qui ont allaité uniquement en tirant leur lait et en le donnant au biberon, d’autres qui ont passé des semaines à rééduquer la succion du bébé par des artifices complexes, d’autres encore qui ont souffert le martyr pendant des jours, certaines qui ont du lutter pied à pied contre un entourage hostile et culpabilisateur. Si vous ne me croyez pas ou n’en connaissez pas, allez simplement sur la section « allaitement » de n’importe quel forum de mères, et vous verrez un condensé de tout ce que ces mères ont enduré (et si vous hésitez à allaiter, il vaut peut-être mieux éviter, c’est assez décourageant). Moi qui ai eu (jusqu’ici) la chance d’avoir des bébés téteurs de compét’ et de baigner dans le lait (donc en gros allaiter = mettre la bouche du bébé devant le téton et attendre que ça se passe tout seul, éventuellement en serrant les dents quand ça fait mal), je suis baba d’admiration devant tant d’énergie et de volonté.

Pour en revenir à mon interrogation initiale, je ne suis pas convaincue par la communication très lisse autour de l’allaitement parfait au pays des bisounours, avec le message sous-jacent que d’une part c’est que du bonheur et que d’autre part ce bonheur est à la portée immédiate de toutes. Parce que que va faire une mère quand ça ne va pas être que du bonheur (et il me semble qu’une bonne majorité des mères allaitantes rencontre un jour ou l’autre un problème) ou quand elle ne va pas y arriver ? Culpabiliser pardi, c’est une seconde nature. Alors OK, tout le monde peut y arriver, mais probablement pas au même prix. Et oui, globalement c’est du bonheur, mais pas que.

Concrètement, je conseille à toutes les femmes qui ont le désir d’allaiter de se préparer, non pas en se massant les tétons mais en s’informant sur les difficultés et les pièges de base (par des lectures, des réunions d’associations type LLL ou des cours de préparation à la naissance), et en étant prête à recourir aux conseils d’une « professionnelle » à la moindre difficulté (sage-femme libérale, bénévole d’association de soutien à l’allaitement, consultante en lactation), idéalement identifiée avant la naissance du bébé. Et à toutes celles qui attendent un bébé de se laisser la possibilité de changer d’avis, quelle que soit leur position initiale. On a le droit de trouver ça trop dur, ou tout simplement que ce ne soit pas son truc, et inversement on peut se laisser surprendre par un nouveau-né tout juste arrivé qui rampe vers le sein, ou juste émouvoir par une amie qui donne le sein avec plaisir.

Pour finir, si vous doutez de la puissance et du pouvoir du sein, je vous suggère de jeter un œil à cette vidéo (le son n’est pas indispensable, par contre évitez la trop grande proximité d’un repas si vous avez l’estomac fragile…) :

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