Avant j’avais des principes, maintenant j’ai des enfants


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Quand partir à la maternité

Par  • Le 22 décembre 2009 à 7:00 • Catégorie : Faire un bébé, Naissance

JustinChambers_DrKarev Autant le dire tout de suite, cet article ne concernent pas vraiment celles qui ont le projet d’accoucher chez elles. Mais comme elles ne représentent qu’environ 1% des accouchements en France, on peut en déduire qu’il reste donc un nombre non négligeable de femmes enceintes (et de futurs pères) qui se posent cette question.

Il y a en gros deux raisons d’aller à la maternité (hors des rendez-vous) :

  • pour accoucher
  • parce qu’on suspecte un problème pour l’enfant et/ou pour la mère

Pour le deuxième cas, les principaux signes d’alerte sont :

  • fièvre (supérieure à 38.5°C)
  • pertes de sang : il faut savoir cependant que le col de l’utérus étant très irrigué et plus fragile pendant la grossesse il n’est pas inquiétant d’avoir des pertes légères de sang frais après un examen, un rapport ou encore une bonne série de contractions.
  • pas de mouvement du bébé pendant 24 heures
  • contractions fréquentes et prolongées et/ou perte de liquide amniotique avant 37 semaines d’aménorrhée (bon pas de panique si on est à 36 SA et 4 jours…) : un début de travail prématuré doit conduire fissa à la maternité, où on pourra essayer de l’arrêter ou au moins de le retarder, le temps d’injecter des corticoïdes afin d’accélérer la maturation des poumons du bébé.

Il me semble aussi que les femmes enceintes, au fur et à mesure que le bébé grandit, ainsi qu’au fil des grossesses, développent une connaissance intuitive de leur bébé ; à mon avis il ne faut pas hésiter à consulter en urgence si on a vraiment le sentiment que quelque chose ne va pas.

Parlons maintenant du cas le plus général et le plus joyeux (c’est Noël après tout) : un bébé qui va bien, qui est à terme et qui a décidé de faire plus ample connaissance avec ses parents. On ne parlera pas ici des grossesses pathologiques pour lesquelles les recommandations sont à voir au cas par cas avec l’équipe médicale.

Rappelons déjà que les deux signes qui montrent que le travail se lance sont des contractions régulières et/ou la rupture de la poche des eaux. On dit de façon classique qu’il faut partir à la maternité dès qu’on perd du liquide amniotique (rupture franche ou fissure de la poche) ou quand on a des contractions toutes les 5 minutes depuis 2 heures pour un premier bébé (1 heure pour les suivants). Cependant il me semble qu’en fonction d’un certain nombre de paramètres, une femme aura intérêt à partir plus vite ou au contraire plus tard. La distance de la maternité, la garde éventuelle des aînés, le souhait d’une naissance physiologique ou d’avoir une péridurale aussi vite que possible, le rang de naissance (les accouchements sont censés être de plus en plus rapides, même si cela peut se rallonger après quelques enfants -le nombre exact étant sujet à débat et hautement dépendant de la femme) sont autant de facteurs qui doivent vous conduire à tempérer ces indications, à la hausse ou à la baisse.

Concernant la perte des eaux, on demande de venir rapidement à la maternité à cause du risque infectieux (le fœtus n’étant plus protégé par la membrane hermétique) ; ceci est cependant tempéré par les partisans de la naissance physiologique qui suggèrent qu’il y a plus de pathogènes à l’hôpital que chez soi et craignent les infections nosocomiales. Quelle que soit votre décision dans ce cas, surveillez la couleur et la consistance du liquide : s’il se teinte ou perd son aspect transparent et fluide partez rapidement. Ceci dit la rupture prématurée des membranes à terme (en français : quand on perd les eaux avant d’avoir des contractions) ne concerne qu’environ 10% des accouchements (même si dans les films cette proportion monte à environ 75%). Par contre, si vous perdez les eaux alors que les contractions ont déjà bien commencé il ne faut plus traîner car la naissance risque d’arriver assez vite. Et une fois la poche des eaux rompue il est fortement déconseillé d’aller à la maternité à pied (risque notamment de procidence du cordon). Si vous n’avez pas de voiture, sachez que la Sécu vous remboursera un trajet en ambulance ; les pompiers et le SAMU sont « gratuits » mais ils vont à la maternité la plus proche, qui n’est pas forcément celle où vous êtes inscrite.

Un écueil à repérer : le faux travail (ou pré-travail selon la façon dont on voit les choses), qui consiste en des contractions dites inefficaces car elles n’agissent pas sur le col, même si elles sont aussi douloureuses que des contractions de travail. Le test généralement recommandé consiste à prendre un bain chaud et/ou quelques Spasfon, en comprimés solubles ou en suppositoires (voir la posologie avec votre praticien habituel) : si ça s’arrête vous pouvez rester au chaud. Attention aussi à la perte du bouchon muqueux qui n’est pas en soi un signe d’accouchement imminent (ce sont des pertes visqueuses d’une délicate couleur marronnasse, un vrai poème). Cependant quand il fait chaud il peut être quasi liquide et ainsi se confondre avec du liquide amniotique. En cas de doute, la maternité doit normalement vous avoir donné le téléphone des salles de naissance où vous pouvez joindre une sage-femme de garde 24 heures sur 24 (sinon n’hésitez pas à le demander à la dernière consultation).

Enfin si malgré tout vous accouchez de façon impromptue chez vous ou en route, sachez que ces accouchements ultra-rapides sont généralement sans problème. Contrairement à ce qu’on voit dans les films, il n’y a généralement pas d’urgence à couper le cordon, prenez le temps de reprendre vos esprits. Si vous êtes chez vous et que tout se passe bien (bébé a l’air à peu près en forme, vous ne pissez pas le sang…), j’aurais tendance à vous suggérer d’appeler une sage-femme libérale pour venir évaluer la situation plutôt que les pompiers qui n’y connaissent souvent pas grand chose ; même s’ils sont grands beaux et musclés ce n’est généralement pas le moment où on veut en voir débarquer cinq dans son salon. Et pour information, le lieu officiel de la naissance (pour l’Etat civil) n’est pas l’endroit où le bébé est sorti mais celui où a eu lieu la délivrance (expulsion du placenta et des membranes).

Je vous ai préparé avec tout le sérieux et la rigueur scientifique qui me caractérisent un petit questionnaire pour vous aider.

A quelle distance êtes-vous de la maternité et quelles sont les conditions de trafic ?

a. J’habite à 3 minutes à pied.

b. Je suis à 20 minutes de voiture quand ça roule mais aux heures de pointe ça peut prendre 1h30.

c. Il y en a pour deux heures de route de montagne, certains cols seront peut-être fermés à cause de la neige, et la voiture démarre une fois sur deux.

d. La réponse d.

Quelle est votre situation familiale ?

a. C’est mon premier enfant et le papa a arrêté de travailler depuis 1 mois juste pour s’occuper de moi.

b. C’est mon deuxième enfant, il faut que je fasse venir quelqu’un pour le garder et le père travaille à 1 heure de chez nous.

c. C’est mon cinquième enfant, il faut que je dépose les aînés chez ma mère (qui ne conduit pas) à une heure de chez moi après être allée tous les chercher dans quatre écoles/crèches différentes et le père en a pour 3 heures à nous rejoindre.

d. La réponse d.

Quel est votre position sur la péridurale ?

a. Si quelqu’un s’approche avec une aiguille, je mords.

b. Je voudrais essayer sans ou au moins l’avoir le plus tard possible.

c. Peut-on l’avoir avant le début des contractions ?

d. La réponse d.

Comment s’est déroulée votre grossesse ?

a. C’est quoi une contraction ? ça veut dire quoi « col long, fermé, postérieur et tonique » ?

b. Cela fait un mois que j’ai régulièrement des contractions et on m’a dit que mon col était ramolli et un peu ouvert (un ou deux doigts).

c. Cela fait trois mois que je suis allongée/que je fais le poirier et que je prends des médicaments pour menace d’accouchement prématuré, il paraît qu’on voit déjà les cheveux.

d. La réponse d.

Comment voyez-vous votre maternité ?

a. Je veux y passer le moins de temps possible, l’odeur d’hôpital me donne la nausée et tous ces gens en blouse font sûrement partie du CMCM (Complot Mondial Contre Moi).

b. Je trouve le personnel plutôt sympa et j’adore la déco des salles de pré-travail.

c. C’est là que je me sens en sécurité : d’ailleurs si je pouvais j’habiterais dans un hôpital, c’est tellement plus prudent.

d. La réponse d.

Avez-vous déjà accouché ? Si oui combien de temps ont duré vos premiers accouchements ?

a. 72 heures sans compter les 15 jours de « faux » travail.

b. Entre 6 et 10 heures.

c. J’ai accouché au restaurant/sur le trottoir/à la Poste.

d. La réponse d.

Vous avez répondu à toutes les questions ? Passons donc aux résultats…

Si vous avez une majorité de a, vous pouvez probablement attendre d’avoir envie de pousser pour vous mettre en route.

Si vous avez une majorité de b, bonne chance pour savoir quand partir, vous avez à peu près autant de probabilité d’arriver beaucoup trop tôt que d’accoucher en route.

Si vous avez une majorité de c, allez à la maternité à 37 SA pour vous faire déclencher.

Si vous avez une majorité de d, vous devez arrêter de regarder cette vidéo en boucle.

Photo : C’est peut-être lui qui vous attend à la maternité (Joyeux Noël Clemys !).

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