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La nuit d’avant

lundi, avril 5th, 2010

lmaternite_litsidecar Encore un billet pour vous parler de lait, mais à ma décharge je baigne un peu dedans ces temps-ci. Promis pour les prochains je vais essayer de varier les plaisirs. Il s’agit d’un aspect très concret de l’allaitement mais sur lequel je n’ai pas trouvé grand chose : la nuit précédant la montée de lait. Pour Pouss1, j’étais encore à la maternité, jeune et naïve ; c’était sa deuxième nuit à l’air libre. Moi pleine de bonne volonté je l’allaitais donc à la demande, découvrant avec stupeur que mon bébé, s’il avait bien cinq doigts à chaque main et à chaque pied, devait probablement être pourvu de trois ou quatre estomacs. Mais cette nuit-là sa demande était quasiment continue. Heureusement l’auxiliaire de puériculture, appelée à la rescousse par la jeune poule en panique, m’a immédiatement rassurée : c’était un phénomène normal et passager qui voulait dire que la montée de lait arriverait le lendemain. Effectivement, le lendemain le colostrum avait été remplacé par du lait, et Pouss1 s’était un peu calmé. Pour Pouss2 ça n’a pas raté : il a tété facilement toutes les heures à sa deuxième nuit aérienne. Cette fois pas de panique, j’ai pris mon mal en patience, donné à la demande et telle la chèvre de M. Seguin attendu que le soleil le Coq se lève (nous étions déjà à la maison) pour lui refiler le bébé et dormir jusqu’à midi. Et l’après-midi le lait était là, et le poussin moins acharné au sein. Je dois dire que jusqu’ici, ayant eu deux gros bébés bons téteurs, j’ai accueilli la montée de lait avec soulagement car les quantités répondent plus facilement à la demande et comme ça coule facilement ils tètent moins fort.

Pourquoi est-ce que  je vous raconte tout ça ? Il me semble que c’est typiquement le genre de situation qui entraîne une jeune mère dans une spirale de doute sur son allaitement, et ce d’autant plus si elle est mal entourée et conseillée : « mon lait n’est pas assez bon/pas suffisant pour le bébé » « si c’est ça l’allaitement autant arrêter tout de suite ». Or cette demande acharnée (qui peut avoir lieu dès la deuxième nuit ou plus tard) est à la fois normale et transitoire (un peu comme pour les pics de croissance). Et dans mes nombreuses lectures sur l’allaitement, je n’ai jamais rien vu sur le sujet.

Que faire ? Dans l’idéal, il faut donner au bébé quand il réclame, afin de bien lancer la crèmerie. Cependant, nous ne vivons pas dans un monde idéal, et ça n’est pas toujours possible. On a le droit d’être fatiguée et de vouloir dormir plus d’une demi-heure à la fois ou encore d’avoir mal aux seins. Je dois dire que pour Pouss1,  j’ai accepté sans discuter la proposition de l’auxiliaire de puériculture de l’embarquer 2-3 heures avant de terminer la nuit tant bien que mal (elle lui a même proposé des compléments dont il n’a pas trop voulu… tout ce qu’il ne faut pas faire mais heureusement pour nous sans incidence sur la suite de l’allaitement). Il y a toujours la carte du petit doigt (peut être proposé par le père s’il est dans les parages -il y a maintenant des maternités où il peut rester dormir), voire de la tétine, mais pour cette dernière avec un risque d’interférence avec la succion (surtout si le bébé ne tète pas très bien). Il n’est pas recommandé de donner des compléments de lait artificiel, mais j’imagine qu’il y a des cas où cela peut rendre service sans compromettre l’allaitement (d’autant plus s’ils sont donnés à la pipette plutôt qu’au biberon). Prendre l’enfant dans son lit est aussi une bonne façon de répondre à sa demande sans trop se fatiguer ; on peut se rendormir pendant la tétée et cela évite de se lever sans cesse (surtout juste après l’accouchement). Si on s’assure que le lit ne comporte aucun risque de chute ou d’étouffement (et s’il n’y a pas d’adulte sous l’influence de psychotropes dedans), il n’y a pas de risque accru (voir ici par exemple). Ceci dit, il n’est pas obligatoire de répondre à la demande pour que la montée de lait survienne (d’ailleurs on donne un médicament pour l’empêcher aux femmes qui ne veulent pas allaiter) mais cela facilite le processus.

Cet article se basant beaucoup sur ma propre expérience (puisque je n’ai hélas pas trouvé grand chose sur le sujet), il serait très intéressant de savoir comment ça s’est passé pour d’autres : avez-vous constaté aussi une nuit de folie avant la montée de lait ? Si oui comment l’avez-vous gérée ? Et les bébés au bib ? Ont-il aussi été tout fous une nuit 2 ou 3 jours après leur naissance ?

Photo : l’allaitement des paresseuses ou comment préserver son sommeil

Pourquoi allaiter (ou pas)

lundi, mars 22nd, 2010

0125child7 Je ne vais pas vous refaire l’article des nombreux bienfaits de l’allaitement maternel, tant pour le bébé que pour la mère. Tout le monde les a entendus (sinon faites un tour à la Leche League), et soit vous allaitez et ça ne sert à rien de vous convaincre, soit vous n’allaitez pas et vous allez trouver ça culpabilisant. Il me semble aussi que ce n’est pas forcément ce qui joue le plus dans la décision d’allaiter ou pas : c’est si intime, si personnel. Je crois que c’est plutôt une question d’envie, de plaisir. Ainsi je vous propose de partager sur un mode plus personnel les petits trucs qui me plaisent et aussi ceux qui m’agacent dans l’allaitement.

Pourquoi j’aime allaiter :

  • Ne pas avoir à me lever la nuit pour faire des biberons et pouvoir me rendormir en cours de tétée
  • Avoir une bonne excuse pour faire du shopping : personnellement entre acheter une robe d’allaitement et acheter un chauffe-biberon, y a pas photo
  • Dépenser 500 calories de plus par jour sans bouger mes fesses du canapé, et admirer les cuissots dodus et autres triples mentons en me disant que c’est toujours ça de moins pour ma cellulite
  • Kit mains libres (une main libre, voire deux avec le coussin d’allaitement ou un porte-bébé) : pendant la tétée je peux bouquiner, manger, glander sur l’iPhone, etc (d’ailleurs ce billet a été en partie écrit pendant une tétée)
  • Avoir une bonne excuse pour ne rien faire : « Ah non désolée je ne peux pas ……………*, j’ai le bébé au sein »
  • Avoir trouvé le bouton « mute » : quand Pouss2 grogne et s’agite et que je n’entends plus ma série préférée, hop au sein et silence (oui c’est très mal, il mettra des années de psychanalyse à s’en remettre)
  • Ne pas avoir à réfléchir : suivre les quantités prises au cours du temps, savoir si un biberon est encore bon, etc. Il demande et je suis disponible : au sein.
  • Ne pas avoir besoin de faire pipi (ou presque) : quel agréable contraste avec la fin de grossesse !

Pourquoi ça m’énerve :

  • Tout repose sur moi, alors que je vois la parentalité comme une aventure à deux. Et je je ne nous reconnais pas dans les clichés sur la fusion mère – enfant avec le père en tiers séparateur ; pour moi les deux parents sont différents mais ont la même « importance » pour l’enfant (pas la mère à la place du Soleil et le père quelque part en orbite autour de Pluton).
  • Après neuf mois d’abstinence, je veux boire ET me resservir.
  • Un bébé qui s’énerve sur son biberon, c’est un peu agaçant. Un bébé qui s’énerve au sein : AAAAAÏÏÏEEEEE ! (j’appréhende l’arrivée des dents…).
  • J’ai parfois l’impression d’être une paire de seins sur pattes plus qu’une personne pour mon bébé et que toute tentative de câlin finit inévitablement par une tétée (or je préfère les câlins aux tétées, moi).
  • En lieu et place de seins j’ai une paire de pastèques qui ne rentre dans RIEN.
  • Les grosses fuites de lait : pas très fréquentes mais totalement imprévisibles et rien ne les arrête, trop glamour. Sans parler des montées de lait inopportunes, à croire que mes seins mènent une vie indépendante de la mienne.

Et vous ? Bien sûr ça marche aussi avec le biberon…

* remplir en fonction de la situation, par exemple, changer la couche pleine de caca du grand, faire la vaisselle…

Image : J’adore ce mode d’emploi imagé du bébé

Toutes les femmes peuvent allaiter ?

mardi, février 9th, 2010

cat-breastfeeds-baby Après des décennies de suspicion envers le lait maternel, il était temps de rétablir la vérité. Oui, l’immense majorité des femmes peut produire du lait d’excellente qualité (on voit qu’en Norvège par exemple 98% des femmes allaitent à la naissance). Cependant, dans la lignée de ma réflexion sur information et culpabilité, je me demande si cette affirmation n’a pas entraîné une certaine culpabilisation, infondée de surcroît. Ce n’est un secret pour personne que chaque femme, chaque grossesse, chaque naissance sont différentes. Un couple aura besoin d’assistance médicale pour concevoir un enfant tandis qu’un autre en aura un malgré l’usage d’une contraception supposée efficace. Une femme mènera une grossesse paisible et sans encombre tandis que l’autre développera une complication ou une pathologie. Tel accouchement pourra se faire physiologiquement, sans assistance, tandis qu’un autre nécessitera une césarienne. Bref, sur la route qui nous mène au bébé, nous sommes loin d’être toutes égales. Il paraît logique qu’il en soit de même pour allaiter. Au-delà des situations particulières (prématurité, jumeaux…) qui peuvent handicaper l’allaitement et sans même parler psychologie, il suffit de comparer les histoires de son entourage pour voir toute une diversité de situations : de l’allaitement qui a roulé tout seul aux mères très motivées qui ont fini par jeter l’éponge devant les difficultés rencontrées. Si on reprend l’exemple de la Norvège, on voit d’ailleurs qu’à trois mois le taux d’allaitement passe à 80%. Il y a donc un nombre non négligeable de mères qui ont commencé à allaiter et jeté l’éponge.

Evacuons tout de suite le problème des mauvais conseils et de l’entourage (y compris médical) plombant qui accuse l’allaitement au moindre écart, prônant le sevrage dès que quelque chose ne va pas. Il est complètement schizophrène et contre-productif de mettre des avertissements qui ne sont pas sans rappeler ceux des paquets de cigarette sur les boîtes de lait pour bébé tout en considérant ce même lait comme la norme et le lait maternel comme une gentille excentricité (voire une déviance perverse de mère égoïste) à laquelle il faut renoncer rapidement. Passons aussi sur le libre choix des mères :  il doit être absolument respecté. Ceci dit ce choix doit être informé et éclairé, et non basé sur des contre-vérités et autres culpabilisations infondées (« de toute façon tu n’as pas de lait/il n’est pas assez bon » ou encore « si tu n’allaites pas ton enfant sera débile, malade et dépressif »). Mais in fine, même s’il est important d’être bien informée,  je pense que c’est surtout une décision intuitive, qu’on « sent » plus qu’on ne la raisonne. Il me semble qu’allaiter si on n’en a pas vraiment envie c’est un peu comme faire du sport juste pour maigrir/parce que c’est bon pour la santé : voué à l’échec. Mieux vaut faire comme Johnny et avoir l’envie d’avoir envie… Mais j’ai déjà parlé de toute cela ici, et je vais donc arrêter le réchauffé.

Revenons à nos moutons : qui ne connaît pas une mère, motivée pour allaiter, bien renseignée sur la question (y compris ayant déjà allaité), qui a fini par arrêter ? Ou qui a persévéré, mais à quel prix ? Je connais des femmes qui ont allaité uniquement en tirant leur lait et en le donnant au biberon, d’autres qui ont passé des semaines à rééduquer la succion du bébé par des artifices complexes, d’autres encore qui ont souffert le martyr pendant des jours, certaines qui ont du lutter pied à pied contre un entourage hostile et culpabilisateur. Si vous ne me croyez pas ou n’en connaissez pas, allez simplement sur la section « allaitement » de n’importe quel forum de mères, et vous verrez un condensé de tout ce que ces mères ont enduré (et si vous hésitez à allaiter, il vaut peut-être mieux éviter, c’est assez décourageant). Moi qui ai eu (jusqu’ici) la chance d’avoir des bébés téteurs de compét’ et de baigner dans le lait (donc en gros allaiter = mettre la bouche du bébé devant le téton et attendre que ça se passe tout seul, éventuellement en serrant les dents quand ça fait mal), je suis baba d’admiration devant tant d’énergie et de volonté.

Pour en revenir à mon interrogation initiale, je ne suis pas convaincue par la communication très lisse autour de l’allaitement parfait au pays des bisounours, avec le message sous-jacent que d’une part c’est que du bonheur et que d’autre part ce bonheur est à la portée immédiate de toutes. Parce que que va faire une mère quand ça ne va pas être que du bonheur (et il me semble qu’une bonne majorité des mères allaitantes rencontre un jour ou l’autre un problème) ou quand elle ne va pas y arriver ? Culpabiliser pardi, c’est une seconde nature. Alors OK, tout le monde peut y arriver, mais probablement pas au même prix. Et oui, globalement c’est du bonheur, mais pas que.

Concrètement, je conseille à toutes les femmes qui ont le désir d’allaiter de se préparer, non pas en se massant les tétons mais en s’informant sur les difficultés et les pièges de base (par des lectures, des réunions d’associations type LLL ou des cours de préparation à la naissance), et en étant prête à recourir aux conseils d’une « professionnelle » à la moindre difficulté (sage-femme libérale, bénévole d’association de soutien à l’allaitement, consultante en lactation), idéalement identifiée avant la naissance du bébé. Et à toutes celles qui attendent un bébé de se laisser la possibilité de changer d’avis, quelle que soit leur position initiale. On a le droit de trouver ça trop dur, ou tout simplement que ce ne soit pas son truc, et inversement on peut se laisser surprendre par un nouveau-né tout juste arrivé qui rampe vers le sein, ou juste émouvoir par une amie qui donne le sein avec plaisir.

Pour finir, si vous doutez de la puissance et du pouvoir du sein, je vous suggère de jeter un œil à cette vidéo (le son n’est pas indispensable, par contre évitez la trop grande proximité d’un repas si vous avez l’estomac fragile…) :

Tire-lait ou congé ?

vendredi, février 6th, 2009

01_baobama1 Les Etatsuniens ont de la chance. Déjà ils ont Barack Obama : il est beau, il est sympa, il est classe, il est intelligent, il va sauver le monde. Et en plus il existe vraiment. Bref.

Et puis alors que nous autres Français on en est encore à débattre pour savoir si l’allaitement est compatible avec le féminisme (sans parler des petits pots et des couches lavables…), ils sont passés à une question bien plus intéressante : la libération de la mère allaitante passe-t-elle par un plus long congé maternité ou par des conditions optimales pour tirer son lait au travail ? Ou encore que veut-on promouvoir dans l’allaitement ? Le lait maternel ou le fait de téter le sein ? Les deux ?

Le débat est parti d’un article bien documenté et très intéressant de Jill Lepore dans le New Yorker que vous pouvez lire ici. On y trouve une mise en perspective historique pleine de détails savoureux. Par exemple on y apprend que Linné lors de sa première tentative de classification des êtres vivants en 1735 avait mis les humains dans la classe des Quadrupèdes, ce qui avaient été assez mal pris par ses contemporains, déjà peu enclins à se classer parmi les animaux, et s’était finalement rabattu sur l’appellation Mammifères (qu’il a lui-même créée). L’idée étant que personne à l’époque ne pouvait nier que le petit d’homme était allaité par sa mère. Linné avait d’ailleurs beaucoup prêché contre les nourrices.

L’auteur rappelle également l’accent mis par les autorités sur l’allaitement maternel et sa glorification, tant en Europe qu’aux USA… jusqu’à la fin du XIXème siècle où on observe deux phénomènes concomitants : apparition des premiers substituts au lait maternel et tarissement supposé de la lactation des femmes. J’aime particulièrement son résumé de l’histoire de la nourriture : quand les riches mangent du pain blanc et donnent du lait maternisé, les pauvres mangent du pain complet et allaitent ; ensuite ils échangent.

La situation actuelle (qui n’est pas sans rappeler nos problèmes hexagonaux) est la suivante : on dit aux mères que le mieux est d’allaiter exclusivement pendant (au moins) 6 mois, mais elles n’ont généralement que 12 (10 ici) semaines de congé post-natal. Alors que donner aux bébés entre deux ? Apparemment aux USA au moins, l’Etat met l’accent sur la possibilité pour les femmes de tirer leur lait : exemption de taxes sur les tire-lait, pressions sur les entreprises pour mettre à disposition des mères des endroits confortables pour faire marcher les machines, etc. Pour Jill Lepore, ce sont de pâles substituts d’un vrai congé maternité. L’art féminin de l’allaitement est devenu la science du lait maternel.

Ce qui nous amène donc à une question intéressante : que veut-on dire par allaitement maternel ? Faire téter un bébé au sein ou boire le lait de sa mère ? Qu’est-ce qui est vraiment important ? Les professionnels de la santé bucco-dentaire mettent en avant les effets bénéfiques de la tétée au sein sur le développement des structures faciales, même s’il me semble qu’on les entend beaucoup moins que les explications sur les bénéfices du lait. Et bien sûr, la proximité physique induite entre la mère et l’enfant favorise l’établissement d’un lien d’attachement solide, dont les effets bénéfiques sur le psychisme des enfants (et des parents) n’est plus à démontrer. Ceci dit, rien n’empêche de donner un biberon en peau à peau et d’en faire un super moment de câlin (à part peut-être ces objets étranges ? encore qu’apparemment on peut s’en servir pour donner un biberon à un enfant en porte-bébé et garder les mains libres).

Là où l’auteur va un peu loin, c’est quand elle nous dit « Quand est-ce que le droit des femmes est devenu le droit des femmes à travailler ? ». Je ne suis pas la seule à tiquer : une chroniqueuse trouve que Jill Lepore « jette le bébé avec le reste de lait tiré ». Elle souligne que le soutien aux femmes qui souhaitent rester chez elles pour allaiter ne doit pas se faire aux dépens de celles qui veulent retourner bosser et pouvoir y tirer sereinement leur lait. Je pense également que c’est à chaque famille de voir ses priorités et de trouver ses compromis et ses solutions.

Par contre, dans un pays où on attend de l’Etat qu’il mette en place des politiques de santé publique et de prévention d’envergure, quel doit être le message à faire passer ? Et surtout quelles mesures pour encourager sa mise en pratique ? Le budget et les moyens étant par nature limités, sur quoi faudrait-il insister ? Comment donner vraiment le choix aux femmes ? On en a déjà discuté ici, mais il me semble qu’un système de congé parental vraiment flexible, correctement rémunéré et permettant un relai entre les parents irait dans ce sens. D’ailleurs ça a l’air de plutôt bien marcher chez nos voisins scandinaves non ?

Tant qu’on est dans cette thématique, j’en profite pour vous signaler cette excellente interview de Sylviane Giampino, psychanalyste et psychologue, relayée par le site Les papas = les mamans (une mine d’articles très intéressants et bien faits). Le sujet : Les femmes qui travaillent sont-elles coupables ? Sylviane Giampino y fait une synthèse assez réussie entre féminisme et besoins de l’enfant, loin des poncifs éculés et autres clichés habituels.

Et pour finir sur une vraie question existentielle : peut-on tirer son lait en public, comme cette femme au bord de l’engorgement qui s’est « soulagée » dans le train de banlieue (une main pour se tenir à la barre, l’autre sur le tire-lait), ou encore à un bar en sirotant son verre de vin ?

(Photo : AP Photo/Alex Brandon, trouvée sur http://www.boston.com/bigpicture/2008/12/2008_the_year_in_photographs_p.html, et spéciale dédicace pour ma mômman. En même temps c’est plus sympa qu’un tire-lait non ?)

Nibar news

vendredi, décembre 19th, 2008

Vu sur Strollerderby* : en Angleterre (plus exactement à Liverpool) on va enseigner l’allaitement dès la maternelle. Partant du constat que l’allaitement, bien que naturel, n’est pas inné, les autorités locales espèrent augmenter le taux de mères choisissant l’allaitement (actuellement autour d’1/3). Les leçons commenceront dès la maternelle et iront jusqu’au lycée, où des mères allaitantes viendront faire la démo. Filles et garçons seront concernés, puisqu’apparemment l’opposition du père est un frein non négligeable à l’allaitement.

Je trouve l’initiative très intéressante, et à suivre. Ayant encore entendu par une de mes collègues : « Je n’avais pas de lait. J’ai essayé d’en tirer mais rien n’est sorti. Alors j’ai laissé tomber. », je pense que ce ne serait pas du luxe chez nous. Et j’y ajouterais bien quelques cours de psychologie de l’enfant (histoire qu’on arrête de suggérer qu’un bébé de trois semaines qui ne veut pas qu’on le pose fait des caprices…), et puis de vrais cours sur la reproduction et sur la contraception.

Dans un genre assez différent, j’ai aussi récupéré cette pub d’un goût douteux pour une crème contre les crevasses :

torn-nipple

La pub est prévue avec un point de colle entre les deux pages pour que quand vous vouliez la voir, le téton soit arraché et reste collé dans la bouche du chérubin. Le message : si vous allaitez sans la crème machin, vous allez morfler. Ahem. D’un côté, je trouve qu’on doit prévenir les femmes que les débuts de l’allaitement peuvent être douloureux, et que même si on fait tout bien comme il faut, et qu’on arrive à éviter crevasses et engorgement, on peut quand même avoir mal. Non parce qu’à force d’entendre parler d’un merveilleux moment d’intimité et de câlin bla bla bla, on tombe un peu des nues quand ce n’est pas l’extase dès la première tétée. Mais de l’autre, suggérer qu’une crème est indispensable, là Maurice, tu dépasses les bornes des limites. Et pour ceux qui ne seraient pas au courant : ceci n’est pas une femme qui vient d’accoucher, et cela n’est pas un nouveau-né (6-9 mois je dirais).

Pour finir, le carnet rose : Michelle Duggar a accouché de son 18ème enfant (par césarienne), la petite Jordyn-Grace. Son mari quant à lui a déjà hâte de remettre ça…

*Contrairement à ce qu’on pourrait croire vus les derniers posts, je ne compte pas transformer ce blog en VF de Strollerderby…

Les seins de Salma

jeudi, novembre 20th, 2008

 Sous ce titre racoleur (tout est bon pour faire de l’audience), je vous propose un billet qui mêlera people, glamour, gros nénés, féminisme, allaitement et réflexion de haut vol (on pourrait peut-être même parler de philosophie). Le seul problème, c’est que ce n’est pas vraiment mon billet mais un vulgaire succédané de celui-ci. Mais comme il est en anglais, je vous offre au moins un résumé-traduction à ma sauce. 

Donc. Tout le monde connaît Salma Hayek, sex symbol et bombe sexuelle (sauf peut-être dans Frida avec son mono-sourcil). Elle a une petite fille de 13 mois, dont le père est le richissime François-Henri Pinault. Le couple devait se marier mais a finalement rompu. Fin du petit rappel pour ceux qui ne sont toujours pas abonnés à Pure people (à défaut de Voici). Or -attention révélation choquante- Salma a avoué que non seulement elle allaitait encore sa fille de 13 mois, mais qu’en plus elle y était accro. Je cite (en traduisant grossièrement) :

« Je suis comme une alcoolique. Je me dis : « Tant pis si je pleure, tant pis si je suis grosse, je continue encore juste une semaine ou juste un mois ». Et puis je vois tout le bien que ça lui fait et je ne peux pas m’arrêter. »

Elle aurait mieux fait de se faire un rail de coke en boîte (suivez mon regard…), personne n’aurait mis en cause ses capacités maternelles. Alors que là… Je vous cite en préambule ce document (p. 68 du fichier), écrit par le Comité nutrition de la Société française de pédiatrie, édité par le Programme National Nutrition Santé (PNNS), et trouvé sur le site du ministère de la Santé :

L’allaitement maternel exclusif permet une croissance normale au moins jusqu’à l’âge de 6 mois Il n’y a donc pas de raison d’introduire d’autres aliments avant cet âge, comme l’OMS le recommande, en insistant sur le fait que l’allaitement maternel peut être poursuivi jusqu’à l’âge de 2 ans ou même davantage, selon les souhaits de la mère, à condition d’être complété par la diversification alimentaire à partir de l’âge de 6 mois.

Nonobstant ces recommandations, les commentateurs plus ou moins qualifiés hurlent au scandale. Pour certains il faut sevrer l’enfant quand il a des dents (sachant que les premières peuvent arriver bien avant 6 mois… voire à la naissance), pour d’autres quand il marche, pour d’autres quand il parle (sinon il ne parlera jamais pensez-vous), pour d’autres quand il peut se servir tout seul… Sans compter les LDP* qui suggèrent qu’elle allaite uniquement pour garder ses obus ou encore que son allaitement est la raison de la rupture de ses fiançailles (ça semble un peu contradictoire : comment un homme peut-il reprocher à sa femme d’avoir de tels obus ? Je pencherais plutôt pour la tenue tyrolienne façon Heidi). 

Concernant l’âge du sevrage, il me semble que c’est une décision intime et personnelle qui ne regarde que la maman et son bébé : on arrête quand l’un des deux n’en a plus envie. Quoi qu’il en soit, aucun fondement médical ne permet de justifier une deadline. Grosso modo, si on rappelle que c’est le biberon qui remplace le sein (et non l’inverse), tant que vous ne trouvez pas choquant de voir un enfant boire au biberon vous ne devriez pas être choqué de le voir au sein. J’avoue que moi-même je ne suis pas toujours à l’aise face aux grands bambins allaités, mais je sais que c’est aussi le résultat de notre culture et donc je me raisonne et passe par dessus mon ressenti. Attention, je ne dis pas que tout le monde doit allaiter jusqu’à deux ans au moins (d’ailleurs je ne le fais pas moi-même…), ni même que tout le monde doit allaiter, non non pas du tout, mais qu’on ne doit pas stigmatiser ou condamner celles qui le font ou souhaitent le faire : il me semble que des encouragements seraient plus appropriés. 

Mais là où l’article dont je vous parle va plus loin, c’est dans ce passage que je vous traduis à la volée :

Ce n’est pas aussi simple que « la société patriarcale veut que les femmes n’allaitent pas » ou « la société patriarcale veut que les femmes allaitent ». Ce que la société patriarcale « veut » (si on veut bien suivre ce raisonnement un tantinet téléologique) est le contrôle de l’allaitement. Parfois cela pourra impliquer de forcer à allaiter (tout en se gardant de donner un vrai soutien), parfois de forcer à ne pas allaiter, parfois l’allaitement sera un outil pour garder les femmes au foyer, parfois la culpabilité de ne pas allaiter sera cultivée pour vendre aux femmes plus de produits. Par dessus tout, les femmes qui allaitent se voient rappeler chaque jour que leurs corps sont une propriété publique, que l’allaitement n’est pas un passeport gratuit pour sortir du groupe des sexués, et que quoi qu’elles fassent, il ne manquera pas de gens pour leur dire qu’elles ne le font pas bien.

Les sociétés australiennes et étatsuniennes ont les taux d’allaitement parmi les plus bas du monde. Nous avons développé un mélange bizarrement pernicieux de :

  • puritanisme semi-laïque
  • Freudisme misogyne mal cuit (OK la traduction de celui-là est pourrie… si quelqu’un propose mieux pour « half-baked woman-hating Freudianism » ?)
  • capitalisme toxique
  • pratiques hostiles aux mères dans le monde du travail (tout à fait d’actualité chez nous)
  • isolation sociale des jeunes mères
  • une peur et une suspicion profondément ancrées de n’importe quelle intimité charnelle qui ne soit pas sexuelle
  • et un immense sentiment d’être propriétaire des seins pour les hommes hétérosexuels

Evidemment la situation aux USA n’est pas tout à fait la même qu’en France, notamment sur le puritanisme et le rapport au corps et au sexe en général (sans parler du « capitalisme toxique » qui ne serait pas forcément le terme que j’aurais choisi…), ceci dit nos sociétés ne sont pas si différentes non plus. Et dans tous les cas je rappelle une vérité qui devrait être évidente pour tout le monde : la légitime propriétaire des seins n’est ni le papa ni le bébé, mais bien la femme qui se les trimballe toute la journée. Et elle fait ce qu’elle veut avec ! 

(attention teaser de la mort) Nous devrions prochainement reparler allaitement, féminisme, instinct maternel et Salma Hayek topless dans ces colonnes, restez dans les parages !

*LDP = langues de pute

(Photo : oui, j’ai même piqué celle de l‘article)

Qui dort dîne

mercredi, mai 14th, 2008

Un petit truc à destination des allaitantes (Je parle là pour les cas où tout se passe gentiment : la lactation est suffisante, le poussin tète bien, il grossit bien, etc. Pour les autres il vaut mieux se référer à des professionnels). Vous avez peut-être remarqué que votre poussin (surtout s’il est tout neuf) a une légère tendance à s’endormir au sein. Je ne parle pas de sombrer dans le sommeil après une bonne tétée, l’air d’un junkie qui vient d’avoir sa dose et la goutte de lait sur la commissure des lèvres. Ce que je veux dire, c’est : « je tète 5 minutes, je pionce 10 minutes -sans lâcher le néné-, puis je retète », etc, le tout pouvant durer une éternité. Il faut savoir qu’avoir l’estomac toujours un peu plein peut entraîner un mal de ventre chez le nourrisson, qui voudra le soulager en tétant, et entrera ainsi dans une sorte de cercle vicieux où il ne se décrochera plus du sein -littéralement. Si cette situation vous pèse un peu, voici quelques petits trucs que la sage-femme m’avait donnés. Rien de révolutionnaire, mais ça m’a bien rendu service, alors je fais passer.

  • Lorsque le poussin est au sein, il faut qu’il soit efficace (on n’est pas là pour rigoler, non mais !). Donc il faut vérifier régulièrement qu’il est vraiment en train de manger (vous voyez les muscles de la mâchoire et près de la tempe qui se contractent). On peut dire qu’en 3/4 h maximum l’affaire devrait être pliée.
  • Quand on a chaud, on s’endort plus facilement. Le fait de téter (= effort physique) et d’être tout contre mômman (= chaleur humaine) fait monter la température. Ne pas hésiter à enlever une couche au poussin avant de le mettre au sein, ou d’ouvrir les boutons du pyjama par exemple.
  • Si vous voyez que Junior commence à piquer du nez au bout de cinq minutes, stimulez-le par des petites papouilles, en le massant un peu sur le corps et/ou sur le visage.
  • Si malgré tout il s’endort, décrochez-le doucement du sein (en passant un doigt dans sa bouche pour décoller la ventouse, pas en tirant sur le sein bien sûr). Il n’est pas forcément optimal qu’il prenne l’habitude de faire sa sieste avec un téton dans la bouche. Personnellement j’avais observé qu’il suffisait dans ces cas-là de mettre le poussin endormi dans son joli berceau pour qu’il se réveille dans les deux minutes et finisse sa tétée bien efficace…

N’hésitez pas si vous avez d’autres trucs à les partager dans les commentaires.

France vs. USA

jeudi, avril 17th, 2008

J’ai vu hier sur Babble (souvenez-vous) un article intitulé C’est bon ? An expat fact-checks France’s rep as a parenting paradise (c’est-à-dire Une expat vérifie la réputation de la France comme paradis des parents). Donc apparemment pour les Américains (ou plutôt les Etatsuniens devrais-je dire) la France est un paradis pour les femmes enceintes et les jeunes parents (un peu comme les Pays-bas en matière de naissance pour nous…). Notre réputation là-bas est telle que si on en croit l’auteur, les livres sur la maternité ne devraient contenir qu’une seule ligne : « Epousez un Français ». J’ai trouvé très intéressant de nous voir par le bout US de la lorgnette.

Voici les principaux avantages que nous aurions et que nos amies outre-Atlantique nous envient :

  • Vin et fromage enceinte : Officiellement, ni le vin (ou aucune autre forme d’alcool d’ailleurs) ni le fromage au lait cru ne sont recommandés pendant la grossesse. Mais autant il y en a certaines (comme moi) qui suivent scrupuleusement les recommandations sanitaires (m’en fous j’aime pas le fromage), autant l’ambiance générale reste encore assez cool sur le sujet, ou au moins plus cool qu’aux US. Apparemment là-bas prendre un coca light enceinte revient à s’exposer à la vindicte publique, à cause de… la caféine ! Donc nous sommes probablement juste un peu moins parano sur le sujet. Et je passe sur la pression insupportable qu’on met sur les femmes enceintes pour qu’elles aient la silhouette de Kate Moss pendant et après la grossesse (ça mérite un billet à part !).
  • Crèche gratuite : Là l’auteur n’a pas d’autre choix que de reconnaître une vaste part de mythe sur ce douloureux sujet. Les places en crèche ne sont pas nombreuses, et on se précipite sur n’importe laquelle parce que de toute façon il n’y en a pas d’autre, alors qu’apparemment les US moms visitent un certain nombre de lieux pour choisir celui qui leur semblera digne d’accueillir leur progéniture. Par contre il est clair que la maternelle -gratuite tant que vous allez dans le public- a peu d’équivalents dans le monde (et aucun aux US). A cette occasion, on découvre qu’aux Etats-Unis on commence le pot vers 3-4 ans plutôt que 2 ans – 2 ans 1/2 comme chez nous (d’ailleurs je crois qu’à l’inverse la grossesse dure 40 semaines contre 41 chez nous, comme quoi…).
  • Enfants bienvenus : Apparemment en France les enfants sont bien accueillis dans les restaurants et mariages, et il est de bon ton d’aller partout avec eux. Pour les mariages, je suis tout à fait d’accord (au passage, petit débat pour les commentaires : est-il acceptable de donner le sein à l’église ?), pour le reste il me semble que la réalité est plus nuancée. Et je ne pense pas que l’auteur ait jamais essayé de prendre le métro avec une poussette… En plus, si on en croit cette expat au Texas (mais depuis de retour à Paris), aller au ciné avec 3 enfants dont un bébé aux US : peace of cake !

Je rajouterai qu’apparemment aux Etats-Unis il y a une vraie controverse sur l’allaitement en public, un peu/beaucoup hypocrite, du genre « Couvrez ce sein que je ne saurez voir ». Diverses solutions allant de ridicules à franchement pénibles ont été proposées pour calmer les puritains : allaiter aux toilettes ou dans un local prévu à cet effet (en général un grand placard…), porter une sorte de couverture/tente/burqa pour étouffer gentiment l’enfant qui tète, ou encore se promener avec des biberons de lait maternel tiré (tellement pratique !). Une mère a même été virée d’un avion car elle refusait d’allaiter dans les toilettes. Autant vous dire que l’affiche de J’ai toujours rêvé d’être un gangster n’aurait probablement pas fini dans tous les couloirs de métro/abribus là-bas.

Et ne parlons pas des coûts médicaux : là encore, après avoir lu notre (ex)Texane, vous trouverez très raisonnables les dépassements d’honoraire de votre toubib… 

Hum je réalise que mon billet risque de passer pour de l’anti-américanisme primaire, ce qui n’était pas vraiment mon intention ! J’aimais beaucoup d’ailleurs le blog de la Desperate housewife du Texas, qui donnait une vision très nuancée de ce pays (malheureusement elle ne publie plus beaucoup depuis qu’elle est rentrée à Paris), et je vous invite à faire un petit tour dans les archives. Et puis c’est eux qui ont fait Babble, après tout. 

Sevrage et allaitement mixte

jeudi, mars 27th, 2008

bib  Autant clarifier tout de suite : ce billet n’est pas un débat pour savoir jusqu’à quand allaiter. C’est l’affaire personnelle de chacune et ce n’est pas à moi de m’en mêler. Il s’agit juste de donner quelques pistes à celles qui souhaitent arrêter avant le sevrage « naturel », pour aider à la transition.

D’abord -si c’est possible- il vaut mieux éviter que le sevrage soit concomitant avec un autre changement important dans la vie du poussin (au hasard : maman retourne au travail). Il est aussi préférable pour tout le monde de prévoir un peu de temps (pour passer d’un allaitement exclusif au 100% biberon compter au moins une semaine et idéalement deux voire trois). Et plus le poussin est diversifié (moins il tète), plus c’est facile. Enfin, la physiologie de la lactation fait que c’est plus simple de sevrer après 2-3 mois qu’avant, quand on a encore des montées de lait.

D’autre part, il peut être judicieux de commencer par introduire le biberon avec du lait maternel, histoire de faire une découverte à la fois. Cela peut être fait dès que l’allaitement est bien installé sans le compromettre. Certains poussins refusent totalement le biberon, même avec du lait maternel. Mieux vaut que ce ne soit pas la mère qui donne le premier biberon (volontaire désigné : au hasard, le père), car l’enfant risque de ne pas comprendre pourquoi elle ne lui propose pas son sein préféré. Il peut même être préférable qu’elle quitte la pièce. Comme toute nouveauté alimentaire, le premier bib est plus facilement accepté si vous n’attendez pas que le bébé hurle de faim. Mieux vaut lui proposer quand il est à peu près de bonne humeur, quitte à ce qu’il n’en prenne qu’un petit peu la première fois. Si il refuse totalement, n’insistez pas sur le coup et reproposez plus tard. Il faut savoir que certains bébés sont très difficiles sur la tétine ; parfois essayer une autre marque peut s’avérer payant.

A propos de tétine, il vaut mieux en choisir une à faible débit (pour nouveau-né, deux trous maximum), même si votre poussin est plus âgé. Ainsi vous optimiserez vos chances qu’il continue à prendre le sein pour les autres tétées.

Autre petit problème technique : quelle quantité de lait préparer ? Au sein on n’a pas la moindre idée du volume ingurgité, et même s’il a déjà pris des biberons de lait maternel, il n’est pas dit qu’il lui faille les mêmes quantités de lait artificiel. Un truc simple est de proposer le volume suggéré sur la boîte de lait pour l’âge de l’enfant. S’il en laisse, c’est qu’il a eu assez. Par contre s’il le siffle en entier, vous pouvez rajouter 30 ml au prochain. Personnellement, je préfère en préparer juste un peu plus pour être sûre que le poussin ait assez.

Une fois ce premier contact établi, vous allez pouvoir remplacer une tétée par un biberon. Mieux vaut éviter de commencer par la tétée du matin ou par celle du soir, l’idéal étant celle de la fin d’après-midi où la lactation est généralement plus faible. Si vous sentez un peu de tension dans les seins, n’hésitez pas à tirer un peu de lait pour éviter un engorgement. Si nécessaire, vous pourrez tirer un peu moins de lait chaque jour jusqu’à ce que vos seins s’habituent à moins produire. Ensuite il faut éviter de supprimer deux tétées consécutives, et attendre deux-trois jours entre deux suppressions de tétées. Notez que le temps d’ajustement du corps n’est pas forcément linéaire : personnellement il m’a fallu une semaine pour ne plus avoir les seins tendus après avoir supprimé une tétée, alors que pour les autres en 24 heures c’était plié.

Si le poussin tète encore la nuit (et que vous aimeriez qu’il arrête…), vous pouvez assez rapidement proposer un biberon à la place. Certes il faut se lever, allumer la lumière et tout, mais : 1. le papa peut s’en occuper pendant que vous dormez du sommeil du juste et 2. si le repas de la nuit est la seule tétée qu’il reste au bébé, sa valeur affective risque de vite dépasser sa valeur nutritive. Ne vous méprenez pas, j’adore faire des câlins à mon poussin, mais la nuit honnêtement je préfère dormir.

De fil en aiguille, vous arrivez généralement à la situation suivante : il vous reste une tétée le matin et une tétée le soir, situation merveilleusement compatible avec votre reprise du travail, généralement connue sous le nom d’allaitement mixte. Cette situation est-elle pérenne ? Je n’en suis pas sûre, et je ne suis pas la seule : encore un bel article de Co-naître, L’allaitement mixte, est-ce possible ? du Dr Claire Laurent. D’abord, pour certaines femmes la lactation peut rapidement se tarir, et n’être relancée que par un allaitement exclusif, ce qui n’est pas le but du schmilblick si on ne veut plus allaiter. Ensuite, certains bébés préfèrent le biberon et se désintéressent totalement du sein. Enfin, même si -comme votre amie la poule pondeuse– vous avez une lactation généreuse et un poussin totalement bilingue sein-biberon, ça risque de ne pas suffire malgré tout. Ainsi, j’avais fini par supprimer la dernière tétée (du soir) car au bout de 45 minutes de tétée intensive le poussin ne semblait toujours pas vraiment rassasié. Et pourtant il y avait toujours du lait à la fin de la tétée, mais le débit ne suivait pas. Donc remplacement par un biberon. Je dois dire que j’ai toujours considéré l’allaitement surtout du point de vue nutritionnel, mais je sais que pour certaines c’est le côté affectif qui prévaut (ce que je respecte bien sûr entièrement). Dans ce cas je pense qu’il est possible de garder une tétée « câlin » par ci par là pendant longtemps. Mais sinon ne vous leurrez pas : l’allaitement mixte est dans la grande majorité des cas la transition vers le sevrage total.

(image : http://www.villiard.com/images/bebes/boire-biberon.jpg)

L’allaitement rend-il beau, riche et intelligent ?

samedi, mars 15th, 2008

Vous avez sans doute remarqué la foultitude d’articles sous laquelle on croule régulièrement : oui l’allaitement protège l’obésité, mais finalement il n’augmenterait le QI que si on possède un certain gène, sauf qu’il rendrait significativement moins addict à TF1, mais tout en augmentant les chances de gagner la Star Ac’, etc etc. Que penser de tout ça ?

A mon humble avis, ces études prennent le problème à l’envers. Il n’y a pas à prouver que le lait maternel et le sein sont supérieurs au biberon et au lait artificiel. Ils le sont, c’est sûr. On a un peu tendance à l’oublier je trouve, mais c’est le lait maternisé et le biberon qui imitent l’allaitement maternel, et non l’inverse. Donc c’est à eux de prouver leur innocuité, et non pas à l’allaitement d’établir sa supériorité. On devrait s’inquiéter de ce que les enfants nourris au lait artificiel ne rentrent pas dans les courbes des allaités plutôt que l’inverse.

Ceci étant posé, est-on une mère indigne si on ne peut/veut allaiter son bébé, et ce jusqu’au sevrage naturel ? Certes les laits artificiels sont moins bons, mais ils ne sont pas mauvais pour autant. Et vue la multitude de formules disponibles (incluant des laits végétaux, bios ou que sais-je), on doit pouvoir en trouver un qui convienne à chaque bébé et soit un bon substitut au lait maternel, même s’il n’est pas aussi parfait. Tout le monde sera d’accord pour dire que l’air des Alpes est plus pur et moins pollué que l’air parisien, et qu’il serait donc meilleur pour un enfant. Jette-t-on pour autant l’opprobre sur tous les parents parisiens ? Non, car le bien-être d’un poussin est multi-factoriel. Et il ne sera pas heureux si ses parents ne le sont pas, surtout si leur mal-être provient (en partie) de choix liés au bébé qui ne leur conviennent pas.

On dit souvent « mieux vaut un biberon donné avec amour qu’un sein donné à contre-coeur ». Je crois que globalement un poussin sera en meilleure santé, tant physique que psychologique, avec un biberon et une mère équilibrée qu’avec du lait maternel et une mère dépressive (en caricaturant).

Ceci dit, nous avons en France un vrai problème avec la promotion de l’allaitement. Comment expliquer que tant de femmes abandonnent rapidement l’allaitement, plus ou moins à contre-cœur, car pas assez de lait, trop douloureux ou autre, alors que 98% des Scandinaves allaitent. A moins que se rouler nue dans la neige après le sauna affecte significativement la production de lait, nous pouvons donc en déduire que la très grande majorité des femmes devrait être parfaitement capable d’allaiter, si seulement on prenait la peine de lui expliquer convenablement de quoi il retourne. Si cela vous intéresse, je vous conseille la lecture de cet article de l’institut Co-naître, qui est une analyse scientifique très fouillée du problème : Allaitement maternel : l’insuffisance de lait est un mythe culturellement construit, par Gisèle Gremmo-Freger (2003). Il faudrait aussi qu’au moindre signe de problème physique de la mère et/ou de l’enfant, le corps médical propose d’abord des pistes pour continuer l’allaitement plutôt que de préconiser le sevrage. C’est tout à fait logique si on se rappelle que c’est le biberon la roue de secours. Et je ne me lancerai pas sur la longueur du congé maternité et son effet ravageur sur la poursuite de l’allaitement.

Quant à l’entourage de la jeune maman, son rôle semble parfois être de l’enfoncer dans sa culpabilité quoi qu’elle choisisse : il lui assènera avec autant de conviction « Quoi, tu l’allaites encore ? Mais tu ne penses qu’à ton propre plaisir égoïste/Tu dois être épuisée » que « Pauvre enfant comment peut-il supporter cet infâme bout de plastique et ce lait infect ? » (rayer la mention inutile).

Et l’OMS ? Qui n’a pas entendu ces fameuses recommandations : allaitement exclusif jusqu’à six mois puis diversification avec lait maternel jusque vers deux ans ? C’est tout à fait fondé, mais n’oublions pas que le M d’OMS signifie « mondiale » : la vocation de cette noble institution est de s’adresser à la grande majorité de la planète qui n’a pas les sous pour se payer du lait artificiel de qualité et ne dispose pas non plus d’eau potable sûre. Il est clair que le lait artificiel est un luxe de pays riche et un véritable massacre s’il est mal utilisé. Et les campagnes éhontément organisées par les fabricants dans les pays du tiers-monde, qui plus est sous couvert de philanthropie et d’humanitaire, sont un scandale à propos duquel on aimerait un peu plus d’indignation de la part des institutions concernées. A ce propos, voir cet article très complet de la FAO sur l’allaitement maternel et les risques d’autres pratiques dans les pays en voie de développement.

Si vous êtes enceinte et que vous vous posez l’inévitable question « sein ou biberon », n’oubliez pas que c’est votre corps et votre bébé. Vous seule savez ce qui est bon pour l’un comme pour l’autre. Renseignez-vous, lisez, prenez des idées et des conseils à droite et à gauche, mais au final c’est votre décision et personne ne devrait vous demander de la justifier. Et vous avez même le droit de changer d’avis en cours de route. Jeunes et futurs pères, donnez votre avis, discutez, mais au final respectez et soutenez vos femmes dans leur choix, elles en auront vraiment besoin.

Si vous souhaitez allaiter, sachez que les débuts peuvent être difficiles (à ce propos un autre excellent article de Co-naître : « Tu enfanteras dans la douleur, tu allaiteras dans le bonheur » de Mariella Landais, 2005), mais ne laissez personne vous faire douter de votre capacité à nourrir votre bébé. Avant la naissance, prenez contact avec des personnes susceptibles de vous soutenir efficacement, comme des sages-femmes libérales ou des associations de soutien à l’allaitement. N’hésitez pas à en voir plusieurs pour trouver quelqu’un avec qui vous vous sentiez à l’aise. Ainsi, à la moindre difficulté vous serez heureuse d’avoir quelqu’un qui vous proposera des solutions adéquates et vous aidera à les mettre en œuvre.