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Bien-être et maternité

jeudi, janvier 7th, 2010

bienetre Je continue sur la lignée des livres prêtés par ma prof de yoga prénatal (probablement un des derniers, car comme l’indique l’adjectif « prénatal », je risque de ne plus beaucoup la revoir d’ici très bientôt) avec ce beau pavé du Dr Bernadette de Gasquet. Celle-ci est à la fois médecin et professeur de yoga, et s’est rendue célèbre dans le microcosme de la périnatalité par ses travaux sur la mécanique obstétricale et notamment ses propositions en matière de liberté de position à l’accouchement. Elle a aussi beaucoup travaillé sur les abdos et le périnée.

C’est plutôt un bon livre pour accompagner la grossesse car il ne se contente pas d’énumérer tous les problèmes auxquels on peut être confrontée avec pour seule explication « c’est normal/c’est les hormones/c’est psychosomatique » et pour seule proposition d’amélioration « ce n’est pas grave/ça ne durera pas plus de 9 mois, soyez patiente/prenez du paracétamol/arrêtez de stresser/allez voir un psy ». En effet le livre propose toute une série de postures (inspirées ou directement prises au yoga), d’exercices, de relaxations et de propositions pour aider concrètement les femmes à se sentir bien pendant la grossesse, l’accouchement et le post-partum. Les postures sont bien décrites et illustrées au fil des pages, en accompagnement de la description des troubles qu’elles sont censées apaiser, et il y a des propositions de séances pré et post-natales pour les enchaîner. Evidemment si comme moi vous avez un cours de yoga c’est moins utile, mais si vous avez des difficultés à en trouver un ou une fâcheuse tendance à oublier les postures (SNU quand tu nous tiens), c’est toujours bon à avoir sous le coude. Ce que je trouve bien aussi dans ce livre c’est qu’il n’est pas culpabilisant et qu’il reste très pragmatique, du coup je pense qu’il peut convenir à beaucoup de femmes et pas seulement à celles qui sont vraiment dans une démarche d’accouchement très « nature » et physiologique. Du coup je pense qu’il peut faire un cadeau apprécié à une amie enceinte, même si on n’est pas tout à fait dans la même approche.

Evidemment, ce livre a aussi quelques aspects qui peuvent être irritants. Il est écrit surtout sous forme de dialogue entre la femme et le « professeur » (mais moins particulier que le style Leboyer quand même…), ce qui peut faire bizarre. Il y a quelques suggestions et conseils un peu étranges (du style remplacer son sac à main par une valisette qu’on pourra utiliser comme repose-pied ; je peux vous dire que le premier qui tente de remplacer mon Twenty par une valisette il se prend le Twenty en question et son énorme aimant dans sa face*), mais après tout rien n’empêche de piocher ce qui nous convient et d’ignorer le reste. Le livre date de 1997 (il est à sa septième édition) mais ses photos ont un furieux goût de 80’s-début des 90’s, on se croirait chez Véronique et Davina… Notez qu’il n’est pas obligatoire de revêtir la même tenue ou de se faire un brushing assorti pour que les postures soient efficaces. L’allaitement n’est pas trop mal traité mais ça ne vaut pas un vrai livre sur le sujet comme le grand classique de Marie Thirion, ou mieux encore la possibilité d’avoir une personne référente de confiance (sage-femme, consultante en lactation, animatrice d’association…) dès la naissance du bébé pour aider à résoudre ses problèmes avec des solutions adaptées. Ce n’est pas la même chose de voir une photo d’une position d’allaitement ou d’avoir quelqu’un qui vient chez vous vous montrer comment la réaliser avec vos fauteuils, vos coussins et votre bébé. Enfin il faut avoir un minimum envie d’essayer les postures et les étirements, il semble peu probable qu’une approche donnée puisse convenir à tout le monde.

En conclusion je dirais que dans la myriade des guides de grossesse c’est plutôt un bel investissement, à offrir, se faire offrir, prêter ou emprunter. A mon avis bien plus utile que le Pernoud en tout cas (et moins cher si j’en crois les tarifs Amazon).

*par contre je suis tout à fait ouverte si on cherche à le remplacer par un Birkin par exemple…

Efficace, inutile ou dangereux ?

lundi, janvier 4th, 2010

doug_ross Pour commencer dignement cette année 2010 (que je vous souhaite bien sûr remplie de bonheur, de succès, de joie et d’enfants qui dorment 12 heures par nuit), je vais partager avec vous une bonne résolution.

Comme vous le savez sans doute si vous lisez régulièrement les articles de la Basse-cour, j’essaie d’avoir l’esprit relativement critique sur les traitements médicaux, en particulier pour ce qui ne me semble pas essentiel (si j’ai une pneumonie et qu’on me prescrit des antibios, je ne crois pas que j’irai faire une recherche avant de les prendre…). Au-delà de la confiance qu’on peut avoir en un praticien (et qui est bien sûr essentielle au bon fonctionnement de la thérapie), je m’appuie sur l‘Evidence-based medicine (EBM pour les intimes) ou Médecine factuelle en français (voir ici ou pour plus d’explications). Ce système de pensée a déjà été pas mal intégré dans la médecine allopathique occidentale, même s’il reste encore beaucoup de travail, notamment en obstétrique (voir par exemple la réticence de certains à abandonner des pratiques démontrées nocives et/ou inutiles comme l’épisiotomie ou le monitoring continu systématiques). A côté, les remèdes plus traditionnels et les médecines alternatives restent moins étudiés, et c’est fort dommage. Il ne faudrait pas jeter le bébé avec l’eau du bain, il est clair que notamment les plantes recèlent de molécules actives avec des propriétés thérapeutiques (l‘aspirine vient du saule par exemple, la pénicilline de champignons). Or pour beaucoup de produits de ce type c’est surtout basé sur l’expérience générale d’un praticien, et pas du tout sur des tests standardisés, avec des contrôles, des placebos, des doubles aveugles etc. Scientifiquement je ne trouve pas ça satisfaisant. Et l’argument « c’est naturel donc c’est bien/pas dangereux » n’a à mon sens aucune valeur, je laisse ses tenants le tester par ingestion de ciguë ou d’ammanite phalloïde (garantis bio et sans OGM). S’il y a des molécules actives, il y a forcément des effets indésirables potentiels.

Donc ma résolution pour cette nouvelle année, c’est d’aller voir sur PubMed (THE base de données des articles médicaux) à chaque fois qu’une proposition de traitement me pose question, histoire de voir s’il est utile et quels en sont les risques éventuels. N’ayant accès qu’aux résumés, cela ne donne hélas qu’une vue partielle des études mais je trouve que c’est toujours mieux que rien. Il est révélateur de constater le faible nombre d’études que je trouve à chacune de mes recherches (en général moins de 20).

Voici déjà quelques exemples sur des prescriptions faites au cours de la grossesse. Loin de moi l’idée de vous dire quoi faire ou pas, simplement partager avec vous ce que j’ai trouvé afin que, si cela vous intéresse, cela puisse vous aider à prendre une décision éclairée.

La tisane de feuille de framboisier : à prendre le dernier mois pour préparer l’utérus et les tissus. Je lance donc une recherche sur « raspberry leaf pregnancy ». Bingo, la première entrée est un article « Raspberry leaf -should it be recommended to pregnant women? ». Il s’agit d’une revue de la littérature existante, donc plutôt intéressant puisque permettant de prendre en compte plusieurs études et tests. Le résumé déplore l’absence de recherche sur le sujet ; les quelques données disponibles indiquent un risque possible pour l’enfant à naître et ne permettent pas de mettre en évidence son efficacité. Donc en l’état actuel des connaissances : ça ne sert à rien et c’est potentiellement dangereux. Une autre étude va dans le même sens. On peut tout de même tempérer par une étude randomisée en double aveugle avec contrôle par placebo sur la prise de comprimés de feuille de framboisier à partir de 32 semaines de grossesse. Les auteurs concluent qu’il y a peu de différences significatives entre les deux groupes et qu’il faudrait plus de recherches, notamment sur le dosage. Conclusion : je passe (en plus ça a pas l’air super bon).

Le massage du périnée en fin de grossesse pour éviter épisio et déchirures : résultats de la recherche « antenatal perineal massage ». Une première revue de la littérature ne parle pas de ces massages : sa principale conclusion est que la meilleure protection du périnée passe par la diminution de l’utilisation de l’épisiotomie, pour les autres pratiques on est dans le flou. Une autre quant à elle arrive à la conclusion suivante : les massages du périnée pendant la grossesse diminuent la probabilité d’avoir une épisiotomie, en particulier chez les primipares, et peuvent diminuer les douleurs du périnée du post partum (3 mois après la naissance) chez les femmes ayant déjà accouché par voie basse. Par contre il n’influence pas les déchirures (quel qu’en soit le degré), l’incidence des extractions instrumentales, la satisfaction sexuelle et le risque d’incontinence. Enfin un article dont le résumé ne montre pas très bien sur quoi il se base (revue de la littérature ? essais cliniques ? « on dit » ?) cite le massage du périnée chez les primipares comme moyen de réduire les traumatismes des voies génitales, avec un certain nombre d’autres facteurs (position d’accouchement verticale ou latérale, éviter la poussée de Vasalva*, éviter l’épisiotomie, gérer la sortie de la tête du bébé…). Il y a aussi des études randomisées avec comparaison d’un groupe témoin et d’un groupe faisant des massages (bon on ne peut pas faire ça en double aveugle comme avec un médicament, les femmes ayant tendance à se rendre compte de si elles se massent ou pas…). Les résultats ne sont pas très tranchés (ha ha ha) :

  • Shipman et al (1997) : Le massage du périnée semble avoir certains bénéfices en termes de réduction des déchirures de 2ème et 3ème degré, des épisiotomies et des extractions instrumentales. Ces effets sont plus marqués chez les femmes de 30 ans et plus.
  • Eogan et al (2006) : Le massage permet de limiter la douleur du périnée lors du post partum mais n’influence pas le taux de périnées intacts lors de l’accouchement, pas plus que les lésions du sphincter anal.
  • Meidan et al (2008) : Le massage n’a d’effet ni bénéfique ni délétère sur l’occurrence d’un traumatisme du périnée.

A noter que ces trois études ont été conduites chez des primipares attendant un seul enfant. Par ailleurs, avec les résumés du moins, si on veut se lancer dans le massage, on ne sait pas : quand commencer, à quelle fréquence, combien de temps, faut-il utiliser une huile ou une crème (si oui laquelle ?), avec quelle technique ? J’avoue qu’en ce qui me concerne, n’étant pas très tentée par la chose, je ne trouve pas cela suffisamment convaincant pour lever mes réticences. Mais pour le coup je reconnais que ça ne peut pas faire de mal.

Le massage des tétons en fin de grossesse pour préparer l’allaitement ; après quelques essais infructueux je trouve des articles intéressants avec les mots clés « nipple massage ».

  • Brown et Hurlock (1975) : ils ont demandé à des femmes de préparer un seul sein en se massant les tétons, en appliquant de la crème ou en exprimant du colostrum. Aucune différence n’a été observée entre les seins en termes de sensibilité ou de traumatisme.
  • Whitley (1978) : un sondage a été conduit auprès de jeunes mères et permet de proposer entre autres que le massage des tétons et des seins (avec expression de colostrum) n’est associé ni à un allaitement plus long ni à une prévention des tétons irrités et des engorgements. Cette hypothèse reste à étayer par des études plus poussées.

Je trouve incroyable qu’en ces temps où les pouvoirs publics veulent promouvoir l’allaitement on ne trouve pas plus d’études plus récentes. Ceci dit la Leche league par exemple ne recommande aucune préparation des seins, si ce n’est dans un but de « familiarisation » pour les femmes qui ne sont pas très à l’aise avec l’idée d’allaiter et avec leur corps en général.

Les soins du cordon à la teinture-mère de calendula : je n’ai rien trouvé sur ce sujet sur PubMed, par contre il y a un certain nombre d’articles démontrant l’efficacité du calendula pour d’autres affections. En élargissant ma recherche au grand Google, je suis tombée sur les recommandations de la fédération des sages-femmes suisses sur les soins du cordon. Il ne semble pas très clair qu’il y ait vraiment besoin de traiter le cordon, mais si on le fait le calendula ne semble pas pire qu’autre chose, donc pourquoi pas.

Si vous avez d’autres données sur ces sujets ou sur d’autres pouvant intéresser la basse-cour, n’hésitez pas à les partager.

*qui semble correspondre à notre « inspirez-bloquez-poussez » mais qu’on me corrige si je me trompe.

Photo : après le sondage organisé par Clemys à l’occasion d’un précédent billet, je vous remets George, le grand vainqueur, pour commencer l’année tout en douceur (what else ?).

Tokophobia

lundi, octobre 26th, 2009

munch_thescream Quelle femme n’a pas peur d’accoucher ? Même celles qui sont intimement convaincues que c’est un acte naturel pour lequel leur corps est fait ont leurs appréhensions pour la naissance. Il est vrai que les raisons d’avoir peur ne manquent pas : peur de mourir et/ou de perdre son bébé bien sûr, mais aussi peur de l’hôpital, peur d’avoir mal, peur de perdre sa dignité, peur d’avoir des séquelles, peur de certains gestes médicaux, et bien d’autres encore. Et ce bien que la naissance n’ait jamais été aussi sûre, tant pour la mère que pour l’enfant. Même si cette peur est plus ou moins présente chez tout le monde, elle peut prendre des proportions très importantes chez certaines (jusqu’à prendre plusieurs contraceptions simultanées voire renoncer à avoir un enfant) : on parle alors de tokophobie (si vous n’êtes pas rebutée par l’anglais vous pourrez lire de nombreux témoignages ici).

Sans aller jusqu’à ces extrêmes, il me semble que plusieurs facteurs peuvent entretenir cette peur :

  • Quelle représentation de la naissance dans notre société ? L’image principale qu’on en a, dans les médias notamment, est celle d’un passage difficile, sous haute surveillance médicale, qui ne demande qu’à partir en sucette. Dans les films on voit souvent la femme au moment crucial, échevelée, rouge et suante, entourée par un tas de blouses blanches qui lui crient « Poussez ! pousseeeeeeeeez ! » (apparemment les scénaristes n’ont pas lu Leboyer), le plan suivant représentant généralement la mère parfaitement coiffée et maquillée avec un « nouveau-né » de six mois dans les bras. Ou alors si vous êtes fan de séries médicales (comme la Poule…) il y aura entre les deux un passage plein de sang et de stress où le beau médecin sauvera in extremis Maman et bébé d’une mort fulgurante dans d’atroces souffrances sous le regard enamouré de la jeune infirmière/interne. Perturbant, et globalement pas très tentant.
  • L’entourage a également un rôle important : quelle femme n’a jamais entendu des récits d’accouchements terrifiants, avec douleurs insoutenables, mort évitée de justesse, déchirures du vagin jusqu’à l’anus et j’en passe. C’est peut-être une sorte de bizutage, mais en particulier quand on est enceinte on est abreuvée d’histoires plus gores et terrifiantes les unes que les autres (soit de première main, soit l’amie d’une amie dont la cousine a une tante qui…). Certes, il n’est pas très constructif d’enfermer les femmes enceintes au pays des Bisounours sous prétexte qu’il ne faut pas les stresser, mais on peut peut-être trouver un juste milieu non ? Evidemment les récits de l’entourage très proche (notamment les femmes de la famille) sont les plus percutants pour la future mère, qui se sent logiquement plus concernée (il y a une part de génétique dans le déroulement de la grossesse et de l’accouchement, même s’il y a bien sûr de nombreux autres facteurs à prendre en compte). Mais il peut aussi y avoir eu un film ou une image mal à propos qui gardent une empreinte durable.
  • Enfin bien sûr il y a le vécu d’une mère lorsque ce n’est pas sa première grossesse et qu’un accouchement antérieur s’est mal déroulé et/ou a été mal vécu (il y a des naissances qui sont sans problème d’un point de vue médical -le fameux « la mère et le bébé vont bien »- mais qui laissent un goût amer à la femme, voire au bébé) ; on peut aisément comprendre qu’on n’y retourne pas volontiers. Si la naissance a nécessité une intervention médicale importante, cela peut entamer la confiance de la femme en ses capacités pour donner naissance et ajouter à son angoisse.

La peur d’accoucher est donc probablement une des choses les mieux partagées par les femmes (et ne parlons pas des hommes…). Alors comment atténuer et gérer ces peurs, qu’on les ressente soi-même ou qu’on y soit confronté chez une autre ?

Tout d’abord, il me semble que comme la plupart des peurs et phobies, celle-ci a une part d’irrationnel qu’on ne doit pas juger ou moquer. La première chose à faire est au contraire de laisser la personne vider son sac et exprimer ses peurs : voir sa souffrance entendue et reconnue est un premier pas vers le soulagement. Le simple fait de formuler certaines peurs à voix haute en présence d’une personne bienveillante peut déjà permettre de les éliminer. Au delà, se documenter, tant sur l’accouchement en général que sur la façon dont les choses peuvent se passer à la maternité choisie (si on est enceinte) peut également faire tomber certaines craintes. N’oublions pas que les choses évoluent (même si parfois trop lentement), et qu’un certain nombre de pratiques redoutées par les femmes ont été abandonnées : si votre mère ou votre grand-mère vous explique qu’elle a du subir un lavement et être intégralement rasée, sachez qu’il y a peu de chances que ça vous arrive. Même s’il y a encore une grande disparité entre hôpitaux et praticiens, l’épisiotomie systématique semble elle aussi être en déclin. Visiter une salle de naissance, éventuellement voir certains instruments, cela peut aider. Par exemple lorsqu’on me parlait de la ventouse je visualisais le gros truc en caoutchouc pour déboucher l’évier, en fait le modèle obstétrical est nettement moins impressionnant. Bien sûr une phobie plus profonde est irrationnelle et ne pourra être levée par des arguments objectifs (tous les phobiques de l’avion se sont vus répéter 2 372 fois que c’est le moyen de transport le plus sûr bla bla bla, avec autant d’effet que de cracher dans un violon) : dans ce cas il faut envisager une psychothérapie si on souhaite traiter sa phobie.

Une échappatoire à cette peur de l’accouchement peut être pour certaines la césarienne. Il me semble qu’il faut éviter cela au maximum, et rappeler que pour une grossesse et un accouchement non pathologiques, la césarienne est plus risquée que l’accouchement par voie basse, tant pour la mère que pour l’enfant. Bien sûr il ne s’agit pas de diaboliser la césarienne, qui a sauvé et sauve tous les jours des femmes et des enfants, mais simplement de l’utiliser à bon escient. Or pour beaucoup de personnes la césarienne paraît plus sûre que l’accouchement par voie basse, et c’est cette idée reçue qu’il faut à mon avis battre en brèche (si le sujet vous intéresse voir aussi cet article très bien fait de Césarine sur la césarienne de convenance). Ceci dit, il ne faut pas non plus être dogmatique, et respecter la détresse et l’angoisse des femmes qui ne peuvent surmonter cette peur (ou pas dans les délais de l’accouchement). De toute façon, si la tokophobie est trop importante, elle peut suffire à bloquer le processus de l’accouchement et conduire à une césarienne en urgence.

Personnellement je dois dire que j’ai longtemps trouvé l’accouchement terrifiant, et qu’au début de la grossesse du Poussin je n’en menais pas large (Ste Péridurale priez pour moi). Je trouve d’ailleurs que c’est un des tests pour savoir si on est prêt à avoir un bébé : être capable d’écouter un récit d’accouchement sanguinolant/de nuits épouvantables depuis 6 mois/de gastro explosive et d’avoir toujours envie d’un petit bout. Finalement, entre diverses lectures, les cours de préparation à l’accouchement, la visite de la maternité, des témoignages positifs d’amies ayant accouché dans ladite maternité, et probablement aussi l’influence des hormones et du SNU (syndrome du neurone unique, une complication fréquente de la grossesse…) combinés (avec un soupçon de méthode Coué ?), je suis arrivée à peu près rassérénée pour l’accouchement. Pour cette deuxième naissance qui se profile, je dois dire que le fait d’avoir déjà accouché par voie basse sans instruments me donne une certaine confiance en mon corps, d’autant plus que la deuxième naissance est censée être plus facile que la première. Le fait d’avoir aussi un projet bien ficelé, avec l‘accompagnement global et une bonne préparation, y contribue également. Et n’oublions pas la merveilleuse combinaison hormones-SNU. On verra dans trois mois… Ce petit topo « ma vie mon œuvre » n’est pas pour m’ériger en modèle à suivre (à moins que je ne lance une secte ? l’argent est un souci qui te retient… la Poule te débarrasse de tous tes soucis…) mais pour que celles qui seraient dans ma situation initiale sachent que ce n’est pas inéluctable.

Pour finir, je vous laisse sur cet extrait de Cette lumière d’où vient l’enfant de Frédérick Leboyer (je rappelle qu’il est obstétricien, né en 1918, et donc qu’il a du commencer la médecine dans les années 40, à une époque où la mortalité périnatale était encore loin d’être au niveau actuel).

– Quant à l’accouchement, ce ne sont pas les risques qui vous troublent. C’est la peur.

– La peur des risques ?

– Ah ! non, c’est là qu’est votre erreur. C’est là la confusion. Vous avez peur. Mais certes pas d’hémorragies, d’infections, de possibles quoique rares complications dont, au reste, vous ne savez rien.

– Je ne suis pas médecin.

– C’est votre chance. Une fois encore, pensez aux ennuis et ils arrivent.

– Mais alors, de quoi ai-je peur ?

– De tout et de rien. Vous avez peur. Un point c’est tout. Et vous vous mettez à projeter cette peur partout. Suivez-moi bien. Vous allez au cinéma et l’o vous montre un film d’épouvante. Si le film est bien fait, à mesure que les images défilent, la peur monte en vous. […]

– Cela m’est arrivé la semaine dernière, oh ! quel film ! Pendant trois nuits je n’ai pu dormir. […] Et je n’osais plus aller, le soir, dans la resserre.

– Qu’y a-t-il, dans la resserre, qui vous fasse trembler ?

– Des araignées.

– Qui, sortant du noir, vont se jeter sur vous et vous dévorer ?

– Oui, je sais, c’est stupide. Mais qu’y faire ?

– Non, ce n’est pas stupide puisque c’est. Donc, voici la peur imaginaire : vous savez bien que ces petites bêtes sont inoffensives. […] Elles n’ont pas plus d’existence que les images sur l’écran. Lesquelles, tout images qu’elles soient, vous ôtent le sommeil et ruinent votre estomac.

– Je vois.

– Or, il existe une autre peur qu’on pourrait appeler réelle : le feu peut prendre dans le cinéma. La pellicule est très inflammable. Un incendie peut détruire le bâtiment. Et votre vie. De cela, avez-vous souci ?

– Je n’y songe même pas.

– Quand vous allez au cinéma, vous n’allez pas, j’imagine, vous asseoir tout près de la sortie de secours au cas où…

– Je me mets au beau milieu de la salle.

– Face à l’écran. Pour bien voir. Au mépris de toute prudence ! Car si le feu prenait…

– Je m’en moque bien.

– Et vous avez raison. Donc, il existe deux sortes de peur, l’une réelle, l’autre imaginaire. L’une rationnelle, raisonnable, l’autre folle. Et vous voyez que, des deux, c’est la folle qui a le plus d’emprise sur votre vie.

– Quelle folie !

– Oui. Mais c’est ainsi. Or, il en va très exactement de même pour l’accouchement. Ces hémorragies, ces infections qui sont aussi réelles et rares que l’incendie au cinéma, vous vous en souciez comme d’une guigne.  Vous ne les connaissez même pas.

– Et de quoi donc ai-je peur ?

– D’aller dans la resserre. Vous avez peur des araignées. Cette peur, toute imaginaire qu’elle soit, est, pour vous, bien réelle. […] Pour combattre les effets de cette peur, que fait-on ? On construit des hôpitaux. Sans cesse plus grands, plus équipés, plus compliqués et plus ruineux. Lesquels, vous me l’accorderez, auront bien du mal à vous défendre des araignées.

(Image : faut-il vraiment présenter Munch ?)

Se préparer

mercredi, septembre 30th, 2009

whalesbeachEPA_450x300 Dans la série des billets spécial gros bidon, quelques mots sur la préparation à la naissance. Encore un MPR (méga problème de riche) : comment utiliser au mieux les huit séances que nous offre Sainte Sécurité Sociale* (Amen) ? Les initiatives et les méthodes fleurissent, plus ou moins originales et efficaces : comment s’y retrouver ? Vous allez dire que je me répète, mais il n’y a bien sûr pas de méthode supérieure aux autres, il y a ce qui convient à telle femme (et à tel couple) pour telle grossesse et tel projet de naissance.

Déjà, à quoi ça sert de se préparer ? Après tout ça fait des millénaires que les femmes donnent la vie sans se poser de question, et c’est encore le cas de la majorité de celles qui peuplent le globe actuellement. Certes. Ceci dit nos admirables congénères vivent et ont vécu sans téléphone portable, internet, canapé, congélateur, TGV, Mooncup et j’en passe. En ce qui me concerne, je vois plusieurs intérêts aux activités prénatales :

  • accompagner les transformations inévitables du corps et apaiser les (petits ?) maux qui les accompagnent généralement ;
  • s’offrir un temps pour soi et pour le bébé à venir (d’autant plus important si on a déjà de la marmaille) ;
  • avoir un temps de parole plus libre et plus ouvert que les consultations pour exprimer ses angoisses et ses tracas sans craindre de s’aliéner ses derniers amis (où d’autre pourrez-vous vous plaindre de vos hémorroïdes ?), mais aussi obtenir des réponses à ses questions, y compris les plus tabous et les plus bizarres ;
  • pouvoir rencontrer d’autres futurs parents (certaines activités sont mixtes), toujours intéressant dans une société centrée sur la famille nucléaire ;
  • et bien sûr se préparer, mentalement et physiquement, à l’épreuve de l’accouchement, et disposer d’outils pour mieux vivre ce moment exceptionnel à tous points de vue.
  • enfin ce n’est probablement pas le profil type de la basse-cour mais c’est aussi un vecteur d’intégration (ou réintégration) pour les femmes en situation précaire.

Je conseille donc aux futurs parents de prendre en compte ces différents points dans le choix de leur préparation ; d’ailleurs rares sont les méthodes qui permettent de tous les satisfaire, il est tout à fait possible de cumuler plusieurs techniques (tant qu’elles sont compatibles). Par ailleurs l’intervenant et/ou le cadre que vous trouverez près de chez vous font souvent autant que la technique elle-même : il me semble qu’avoir un « animateur » avec lequel on accroche et en qui on a vraiment confiance est un point crucial du choix. Attention également à la crédibilité de celui-ci : comme beaucoup de disciplines para-médicales et/ou à visées psychothérapeutiques on trouve à boire et à manger, y compris au sein de courants reconnus. Faites fonctionner le bouche à oreille, les annuaires professionnels et votre radar personnel. Pour qu’elles aient un intérêt, il faut en effet que vous alliez aux séances avec plaisir et motivation, rien ne sert d’y aller juste parce que il faut/c’est remboursé/ma copine l’a fait. Selon vos affinités, vous pouvez aussi choisir des séances individuelles et/ou en groupe. Notons enfin que certaines méthodes peuvent être poursuivies après l’accouchement pour aider à l’établissement du lien mère (et père) – enfant.

Les techniques de préparation les plus connues et répandues sont :

  • la préparation « classique » : sorte de cours et/ou de session questions-réponses qui permet d’aborder en détail tout ce qui se passe avant, pendant et après l’accouchement. Si possible, suivre ce type de préparation en lien avec le lieu où on accouche apporte une valeur ajoutée, tant sur les gestes préconisés par le protocole (perfusion systématique ? soins au bébé après la naissance ? etc) que sur les possibilités matérielles offertes par l’endroit (baignoires ? chambres seules ? etc), par exemple. L’intérêt d’être en groupe est qu’on peut profiter des questions des autres (auxquelles on n’aurait pas forcément pensé), et éventuellement réaliser qu’on n’est pas la plus larguée du lot (me souviens d’un cours où une femme -proche de la quarantaine quand même- avait annoncé avoir découvert à la télé que le nouveau-né n’était pas exactement rose et frais lorsqu’il sortait du ventre…). Ce type de préparation peut également être couplé à d’autres méthodes plus spécifiques (séances ou parties de séances dédiées).
  • l’haptonomie : d’après un sage-femme spécialiste de cette technique, on ne peut pas vraiment comprendre ce que c’est tant qu’on ne l’a pas fait… et je n’ai pas fait… Discipline fondée par Frans Veldman, elle se définit comme une science de l’affectivité. Si on en croit le site haptonomie.org, l’accompagnement pré et postnatal haptonomique favorise le développement des liens affectifs entre l’enfant, le père et la mère. Il leur permet de vivre une relation de tendresse lorsque l’enfant est encore dans le giron de sa mère. Il favorise également l’accueil du nouveau-né au moment de la naissance et après celle-ci. Très tôt l’enfant acquiert une sécurité de base qui l’invite à l’autonomie, à la communication et à la confiance. Cette méthode accorde une grande place au père. Toujours d’après le site, il s’agit de mettre en oeuvre le contact psychotactile affectivo-confirmant plein de tendresse et d’amour. D’après divers témoignages (et à la lecture du site web), je dirais que l’haptonomie n’est peut-être pas à recommander aux personnes les plus cartésiennes. Enfin il faut savoir que (je cite encore) l’haptonomie est totalement incompatible avec les méthodes qui visent à modifier le tonus musculaire et la respiration, telles que le yoga, la sophrologie, les techniques respiratoires, etc… Celles-ci, par leur caractère d’apprentissage, entraveraient l’effet libérateur de l’expression affective. En outre, toute attention portée sur la respiration ou sur une « représentation imaginaire » de l’enfant fait obstacle au contact affectif avec celui-ci. Cependant, l’haptonomie offre une approche très complète, couvrant toute la grossesse, la naissance et également la période post-natale. Je laisse les commentatrices (hommes aussi s’il y en a !) qui ont testé vous en dire plus.
  • la sophrologie : D’après le site sophrologie-info.com, la sophrologie est une science qui étudie la conscience humaine, un ensemble de techniques et de méthodes à médiation corporelle. Elle vise la conquête ou le renfort de l’équilibre entre nos émotions, nos pensées et nos comportements. Au croisement de la relaxation occidentale et de la méditation orientale adaptées, elle permet à chacun de trouver de nouvelles ressources en lui-même et d’améliorer sa qualité de vie. C’est une des préparations que j’ai choisies pour cette grossesse. Je n’ai pas encore fait beaucoup de séances alors ma vision de la chose reste assez partielle mais en gros il s’agit d’atteindre un état de conscience particulier (la sophronisation), à partir duquel on peut mieux gérer les sensations douloureuses et désagréables et également avoir un meilleur ressenti de son corps (y compris des parties qu’on ressent rarement consciemment comme le col de l’utérus au hasard). Je vous en dirai plus dans un prochain billet, probablement après l’accouchement, pour mieux vous décrire la méthode et vous dire si ça m’a bien aidée ou pas.
  • la préparation en piscine : il s’agit de sessions dédiées aux gros bidons, généralement animées par une sage-femme ou a minima par une personne formée aux spécificités de la femme enceinte. C’est une des préparations les plus physiques, elle sera donc généralement impossible pour les femmes en menace d’accouchement prématuré (contrairement à celles citées auparavant qui peuvent être faites au domicile par une sage-femme libérale par exemple). Je n’ai pas testé de cours spécifique mais j’apprécie beaucoup de nager pendant la grossesse. A mon avis l’inconvénient de ce type de préparation c’est que les éléments sont plus difficiles à mobiliser pour la naissance (à moins d’accoucher en piscine ?), même si les étirements, l’activité, la respiration etc sont toujours bons à prendre.
  • Le yoga prénatal : on en a un peu parlé dans ce billet sur le livre de Leboyer. J’ai testé pour la grossesse du Poussin et je remets le couvert pour celle de l’Oeuf, j’adore. En plus j’ai la chance d’avoir un cours génial à 100 mètres de chez moi. Si vous faites déjà du yoga hors grossesse, vous pouvez continuer à pratiquer en douceur : ce qui est vraiment déconseillé est ce qui fait travailler les abdos. Le reste est à adapter en fonction de votre ressenti et de votre expérience, même si il vaut également mieux éviter les postures qui accentuent le creux lombaire (et au contraire bien basculer le bassin vers l’avant, notamment quand on est sur le dos). Concrètement, je trouve que le yoga apporte énormément pour toutes les petites douleurs articulaires et ligamentaires, notamment dans le dos. On économise quelques séances d’ostéo je trouve ! Par ailleurs je ne suis pas quelqu’un de particulièrement stressé ou angoissé, mais le yoga est connu aussi pour ses effets bénéfiques sur ce type de problème. Enfin cela peut être un atout intéressant pour l’accouchement, tant pour la variété de postures qu’on peut essayer que pour la concentration et pour la respiration. Mon expérience sur ce point est limitée puisque j’ai accouché du Poussin sous péridurale. On verra bien pour l’Oeuf (oui oui je vous raconterai).

D’autres préparations moins connues (mais pas forcément moins bien !) existent aussi :

  • la méthode Bonapace (prononcez à l’italienne Bonapatché) : c’est une technique mise au point par une Québecoise (voir le site officiel) et encore très peu connue en France. Elle se base sur les propriétés physiologiques de transmission du message de douleur et sur les possibilités de le court-circuiter en massant certains points bien identifiés. Elle demande apparemment une forte implication du père. Je n’ai pas pu tester mais cette méthode m’intéresse.
  • le chant prénatal : j’en ai parlé ici, même si mon expérience ne correspond pas à ce qu’on entend habituellement par chant prénatal. Pour en savoir plus, voir le site de l’Association française de chant prénatal.
  • le Pilates : proche du yoga, cette méthode plutôt physique (donc réservée aux grossesses « normales ») peut être adaptée aux femmes enceintes. Voir ici par exemple pour en savoir plus.
  • le gros ballon : il est de plus en plus présent dans les maternités mais présente aussi des avantages certains pendant la grossesse. C’est plutôt un outil « solitaire » même s’il y a probablement des cours quelque part. On peut trouver ces ballons en magasin de sport ou en hypermarché (entre autres), voir aussi l’occasion et les copines qui ont eu des bébés il y a peu. Plus de détails ici.

On peut aussi citer toutes les médecines « alternatives » : acupuncture, shiatsu, ostéopathie, aromathérapie, phytothérapie, réflexothérapie, etc, qui ne sont pas à proprement parler des méthodes de préparation mais qui peuvent également être utiles tant pendant la grossesse que pendant l’accouchement. Il y a des sages-femmes (surtout libérales) qui ont la double casquette.

Enfin je trouve qu’une façon intéressante de se préparer consiste à lire des récits de naissance (de préférence positifs…) pour mieux appréhender l’événement et éventuellement aider à corriger certaines représentations fausses ou biaisées qu’on pourrait traîner et qui risquent de pourrir son accouchement. On en trouve un peu partout sur le net, notamment sur les forums (mais il faut faire le tri !), ou par exemple sur le site Périnatalité (si vous êtes branchée naissance « physiologique », mais même si on ne l’est pas ça me semble intéressant d’en lire quand même !).

Bon je ne prétends pas être exhaustive (argl je ne vous ai pas parlé d’harponomie, scandale !) et je compte sur la basse-cour pour compléter sur les méthodes citées ici et les autres dans les commentaires (quitte à faire évoluer ensuite l’article en cas d’oubli majeur).

Edit : J’ai oublié de vous parler de l’hypnose, je répare en cours de route. On peut avoir soit de l’autohypnose soit être hypnotisé par un praticien (certaines doulas notamment le proposent). Evidemment pas évident d’avoir la personne à côté de soi au moment M, surtout dans les maternités où le personnel n’y est pas formé et où on n’a souvent droit qu’à un seul accompagnant. Le concept semblait fumeux à mon esprit cartésien jusqu’à ce que la poule accoucheuse me raconte avoir vu un couple de médecins, lui anesthésiste (!), qui pratiquait l’hypnose et a eu un accouchement physio super grâce à ça. Qu’un anesthésiste préfère hypnotiser sa femme plutôt que de lui faire une péri, ça m’a laissée sur mon (ample) postérieur. Pour en savoir plus : un article sur l’autohypnose et un autre sur l’hypnonatal.

*Je précise suite à la remarque judicieuse de Sophie Gamelin que quelle que soit la technique choisie, seuls les cours faits par une sage-femme sont remboursés. Voir aussi avec son comité d’entreprise qui peut sponsoriser certaines activités à caractère sportif (genre yoga ou piscine) ou artistique (chant prénatal ?).

(Photo : un cours collectif de préparation à la naissance -méthode non spécifiée)