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Attendre…

mercredi, février 4th, 2009

sheperd Un article publié en novembre 2008 par une équipe de l’UCSF dans Obstetrics and Gynecology, le journal de l’American College of Obstetricians and Gynecologists (ACOG), l’équivalent de notre CNGOF, conclut qu’un peu de patience lorsque le travail lors de l’accouchement ralentit ou s’arrête pourrait éviter un certain nombre de césariennes, pour le bénéfice des mères et sans conséquence négative pour les enfants. L’article constate qu’alors que l’ACOG recommande d’attendre au moins deux heures d’arrêt de progression de la dilatation avant d’envisager la césarienne, en pratique les obstétriciens étatsuniens tendent à dégainer le scalpel plus rapidement. L’étude s’est intéressée pendant 10 ans à 1014 femmes ayant accouché à terme d’un seul enfant (à la fois) vivant, accouchement pendant lequel un arrêt de la phase active (défini comme deux heures ou plus d’arrêt de la dilatation) a été constaté. Il apparaît que sur ces 1014 femmes, environ un tiers ont finalement accouché par voie basse, tandis que les autres ont eu une césarienne. En outre, la comparaison entre les deux groupes de la santé des femmes (hémorragie du post-partum, infections…) et des enfants (score d’Agpar, infections, taux d’admission en néonatologie) montre qu’autant la césarienne entraîne plus de complications pour les femmes, autant la voie basse n’en entraîne pas plus pour les bébés.

Aux Etats-Unis, un tiers des césariennes pour un premier bébé ont pour cause un arrêt du travail. Si les recommandations d’attendre au moins deux heures étaient vérifiées, un tiers d’entre elles (soit donc 1/9 du total, la Poule pondeuse est trop forte en maths) pourraient être évitées, avec des conséquences bénéfiques pour la santé des mères, sans que ce soit au détriment de celle de leurs enfants. On sait aussi qu’avoir une césarienne pour le premier enfant augmente significativement la probabilité d’en avoir une pour le second (même si avoir eu une césarienne à l’accouchement précédent n’est pas en soi une contre-indication formelle à tenter un accouchement vaginal après césarienne, ou AVAC ; ce qui l’est c’est plutôt que la raison de la césarienne se reproduise).

En France, les recommandations pour la pratique clinique (RPC) du CNGOF sur la césarienne indiquent (je cite) :

Au cours du travail (y compris à dilatation complète), la réalisation systématique d’une césarienne après deux heures de stagnation de la dilatation doit être reconsidérée, du fait d’une diminution des césariennes en cas d’expectative prolongée (NP2), sans augmentation significative de la morbidité maternelle. L’analgésie péridurale permet de rendre cette expectative plus tolérable (NP 2).

(NP : niveau de preuve scientifique, de 1 à 5, 1 étant le plus fiable)

Le document datant de 2000 est donc largement antérieur à l’étude (cocorico ?). Reste à savoir quelle est sa probabilité de mise en œuvre dans nos maternités hexagonales, avec probablement un certain nombre de disparités entre services, voire obstétriciens. Apparemment c’était au moins le cas dans la maternité où j’ai accouché puisque j’ai moi-même connu un arrêt du travail de plus de deux heures à 8 cm de dilatation, qui ne m’a finalement pas empêchée de faire naître un poussin en pleine forme par voie basse, même s’il était clair que nous n’étions pas passés loin du bloc opératoire. Bien sûr d’autres éléments sont à prendre en compte, et par exemple il ne serait plus approprié d’attendre en cas de signes de détresse fœtale (dans notre cas un monitoring parfait a certainement joué favorablement).

Enfin je tiens à préciser qu‘il ne s’agit nullement de jeter l’opprobre sur la césarienne, qui sauve régulièrement des vies, et dont nous avons la chance de bénéficier facilement, gratuitement et dans les meilleures conditions de sécurité. Simplement il s’agit d’une opération chirurgicale, avec des risques et  des bénéfices associés qu’il convient donc de peser soigneusement avant d’en prendre la décision, de la même façon qu’on n’imagine pas enlever l’appendice à tout le monde sous prétexte qu’il pourrait un jour nous causer des problèmes et qu’on a une technique sûre pour le faire.

Information trouvée via le blog Unnecesarean.

Photo : à partir de maintenant (bonne résolution pour la deuxième année de blog), toute nouvelle médicale à caractère potentiellement anxiogène sera accompagnée d’une photo médicale relaxante et apaisante.

Du « nouveau » du côté des coupes menstruelles

lundi, juillet 7th, 2008

Ceux et celles à qui le titre paraît incompréhensible sont invités à aller voir ici et , sinon ce billet risque de leur sembler un peu ésotérique.

J’ai trouvé ici un article paru dans le journal scientifique Obstetrics and Gynecology de… 1962 ! Rédigé par Eduardo F. Peña, un gynécologue américain, l’article s’intitule Menstrual protection: advantages of the menstrual cup (Protections menstruelles : avantages de la coupe menstruelle). Basé sur la pratique de l’auteur, mais aussi sur une étude conduite sur 125 femmes de 25 à 40 ans, ainsi que sur une étude antérieure rassemblant 40 femmes, il présente les faits suivants :

  • L’utilisation de tampons et de serviettes, en plus d’inconvénients pratiques (fuites, inconfort…), augmente les risques d’infection vaginale (Candida albicans, Trichomonas vaginalis) et de cystite (infection urinaire).
  • Au contraire, chez les femmes utilisant une coupe menstruelle, on n’a observé ni irritation, ni crampes, ni infection.
  • Toutes les femmes de l’étude (125 !), même celles initialement réticentes à une protection intra-vaginale, se sont finalement déclarées séduites par cette méthode de protection et ne plus vouloir utiliser ni tampon ni serviette. Six femmes ont ressenti un inconfort dans les premiers temps de l’utilisation, qui a totalement disparu après quelque temps.
  • Les femmes ont notamment apprécié l’absence d’odeur par rapport à d’autres méthodes de protection.
  • Une des craintes de l’auteur était que la coupe empêche le sang de s’écouler correctement et même le force à remonter dans le col de l’utérus : il montre que cette crainte était infondée.
  • Notons que le test a été fait avec une coupe en caoutchouc, la Tassette, qui n’existe plus, et que déjà à l’époque la coupe était fournie avec un dustbag (spécial dédicace pour PrincesseStrudel).
  • Au niveau pratique, les femmes de l’étude ont obtenu une protection satisfaisante en vidant la coupe deux fois par 24 heures (trois le premier jour). Pour l’entretien, rinçage à chaque fois qu’elles ont vidé la coupe et stérilisation entre deux cycles (avec un peu de javel, puisqu’on ne peut pas faire bouillir le caoutchouc). Et pour éviter les fuites, elle plaçaient un peu de coton à la base de la coupe (ça me tente moins mais pourquoi pas ?).
  • La coupe peut aussi être utilisée pour garantir que certains médicaments restent en place.
  • L’auteur ne voit pas d’inconvénient à l’utilisation de la coupe par des vierges, et notamment ne pense pas que cela puisse endommager l’hymen.
  • La conjecture de l’auteur sur un danger potentiel de l’utilisation de la coupe par les femmes ayant un utérus rétroversé ou un prolapsus mériterait d’être examinée par un gynécologue à la lumière des connaissances actuelles ; je suggère donc à celles qui présenteraient de telles indications et souhaiteraient utiliser une coupe d’en parler à leur praticien habituel (en lui présentant l’article au cas -probable- où il n’en ait jamais entendu parler). 
  • Conclusion finale de l’article : « La coupe menstruelle libère les femmes des dangers et des nuisances des serviettes hygiéniques et des tampons. » Voilà qui se passe de commentaire…

Donc on sait depuis les années 60 que la coupe est une protection menstruelle fiable et bien plus hygiénique et sanitaire que les alternatives plus connues. Et depuis, plus rien ! Je suis allée sur PubMed, LE site de recherche de référence pour les articles scientifiques médicaux et j’ai recherché « menstrual cup ». Bilan : huit articles, dont seulement quatre vraiment pertinents (pour info, si on tape « tampon », on a 578 réponses). Le plus récent date de 1964. On peut trouver ici (en anglais) un historique des coupes menstruelles (en plusieurs volets, cliquer sur « next » en bas de la page), et la principale explication est encore et toujours le tabou autour des règles et de la masturbation (même s’il n’y a pas de lien direct) qui rend les femmes réticentes à y mettre les doigts (d’où le succès des tampons avec applicateur). 

Si cela vous intéresse, voici l’article sous deux formats.

Format image :

Format pdf :

http://www.poule-pondeuse.fr/files/menstrual_cups_Pena_1962.pdf