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Les tests de grossesse

mercredi, juillet 15th, 2009

test_grossesse Dans la panoplie à la disposition de la femme moderne pour maîtriser sa fécondité, le test de grossesse est un atout important. Cela ne fait pas si longtemps qu’on peut savoir de façon fiable et objective si on est enceinte, et ce dès 2 semaines de grossesse. Il est vrai que faire pipi sur une bandelette n’a rien de très excitant, mais c’est toujours plus pratique que le test de la lapine que cette méthode a relégué aux oubliettes. Oui c’est bien ce que vous pensez, on injectait l’urine de la femme potentiellement enceinte à une lapine, et si la lapine mourrait dans d’atroces souffrances (hémorragies etc) alors c’est que la femme était bien enceinte. Ceci dit il semble qu’il y ait une autre méthode avec une grenouille où la mort de l’animal n’est pas requise.

Comment ça marche ? Attention, ceci ressemble fort à un cours de biochimie. La femme enceinte (ou plus exactement l’œuf, puis le placenta) sécrète une hormone spécifique, la beta-HCG, laquelle se retrouve dans le sang et dans les urines. Le test sert à repérer la présence (ou non) de cette hormone. La technique utilisée est appelée immunochromatographie (oui, ça en jette, mais ça ne doit pas trop rapporter au Scrabble). En gros, le test contient des anticorps spécifiques de l’hormone beta-HCG, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent se lier qu’à cette molécule. En prime on leur a collé une molécule colorée qui permet de les repérer sur le test. Tout cela migre le long de la bandelette du test avec l’urine. Plus une molécule est lourde, moins elle s’arrête loin. Le test de base a donc deux fenêtres. La plus éloignée de l’endroit où il faut mettre l’urine permet de vérifier la validité du test, elle correspond à l’endroit où s’arrêtent les anticorps seuls, qui n’ont pas trouvé de beta-HCG à qui se lier. La plus proche correspond elle à l’arrêt des couples de molécule anticorps + beta-HCG, fatalement plus lourds que les anticorps seuls. S’il n’y a pas de beta-HCG, alors les anticorps vont tous dans la bande la plus éloignée. Dans tous les cas, la molécule colorée permet de repérer les bandes en question (les autres molécules contenues dans le test et dans l’urine restent invisibles, bien qu’elles se baladent aussi). Pour être sûr que les molécules s’arrêtent bien au bon endroit, il y a les anticorps qui vont bien là où les bandes sont supposées apparaître. Certains tests plus sophistiqués ont un affichage plus chiadé, mais le principe reste le même (les tests électroniques qui indiquent directement « enceinte » ou « pas enceinte » utilisent des marqueurs magnétiques plutôt que colorés). Enfin l’intensité de la coloration de la bande est directement liée au nombre de molécules présentes : plus la bande est foncée et plus la concentration en hormone est importante. Fin du cours de biochimie.

Concrètement, il faut mettre du pipi dessus. Personnellement, je ne vois même pas comment on fait pour viser sur un si petit truc (encore une idée de mec ? ou de femme de pub qui fait pipi bleu, comme ses règles ?). Donc je prends un gobelet en plastique propre (toujours demander un gobelet pour les analyses d’urine d’ailleurs, c’est toujours plus large que les flacons standards), et ensuite je trempe le test. Beaucoup plus simple je trouve, et au moins on n’en a pas sur les doigts. Ensuite on attend une ou deux minutes (c’est écrit sur le mode d’emploi, ça dépend des tests) mais pas beaucoup plus ; en général chaque test a une limite au-delà de laquelle il n’est plus fiable. Chacune a sa technique : fixer intensément la fenêtre positive pour qu’une ligne apparaisse, ou au contraire ignorer le test et faire semblant de rien pour choper la ligne par surprise (ça marche aussi dans l’autre sens pour les femmes qui craignent un accident bien sûr).

Quelle est la fiabilité de ce type de test ? Clairement, la faiblesse de la méthode est plutôt dans les faux négatifs que dans les faux positifs. En effet, les tests ne répondent théoriquement qu’à la beta-HCG, et la beta-HCG n’est normalement présente qu’en cas de grossesse. Ceci dit, certains traitements médicamenteux peuvent semer le trouble (notamment ceux pour les problèmes de fertilité), mais on peut espérer que les médecins qui les prescrivent expliquent la conduite à tenir à leurs patientes. Et bien sûr, il est possible que la grossesse ne soit pas évolutive (œuf clair, grossesse extra-utérine…). Les faux négatifs par contre sont plus courants : il suffit que la concentration en hormones ne soit pas assez élevée pour être visible sur le test (rappelons qu’une ligne, même pâle et ténue, compte). Il faut refaire le test quelques jours plus tard, lorsque le taux d’hormones aura augmenté. Lorsque le test est positif, mon premier réflexe est généralement d’en acheter un autre d’une autre marque pour confirmer le résultat. Cependant, je ne peux pas vous dire si c’est la rigueur scientifique ou la paranoïa qui me pousse, même si je penche plutôt pour la deuxième option…

Justement, quand faut-il faire le test ? Normalement il faut attendre d’avoir un retard de règles, même si certains tests peuvent détecter une grossesse quelques jours plus tôt. Mais plus on fait le test tard, plus il est fiable (je sais, je sais, plus facile à dire qu’à faire). Si vous n’êtes pas sûre de quand doivent tomber vos règles, il faut tabler sur 15 jours après l’ovulation et/ou le rapport supposé fécondant. Bon vous n’êtes probablement pas sûre de ça non plus… le dernier recours c’est de se caler sur le plus long cycle que vous ayez observé (hors interférences hormonales type pilule, implant & co). Mon corps ayant une interprétation très personnelle du fameux cycle de 28 jours avec ovulation à J14, je peux vous dire que je compatis si vous êtes dans le flou. Par ailleurs, la concentration en beta HCG est maximale le matin, mais les tests sont normalement suffisamment sensibles pour marcher toute la journée. La bonne nouvelle c’est que la circulation sanguine entre la mère et le fœtus par le placenta n’est fonctionnelle que vers 3 semaines de grossesse : si vous avez bu ou pris des médicaments avant d’avoir fait le test (j’entends avant d’avoir eu le retard de règles), c’est a priori sans conséquence pour bébé (bon ce n’est pas une raison pour se mettre des mines tous les soirs quand vous lancez un projet bébé, juste qu’on n’est pas obligée de vivre comme une Mormone dès qu’on arrête la contraception). Pour les problèmes infectieux (type listériose ou toxoplasmose) c’est moins clair car cela dépend du timing et de la durée de l’infection. J’avoue que je n’y fais pas gaffe tant que je n’ai pas un test positif mais je ne prétends pas que ce soit la façon de faire la plus intelligente…

Où acheter le test ? Ils sont vendus en pharmacie à prix d’or (8-10€ pièce en moyenne), mais vous pouvez aussi acheter de simples bandelettes sur internet pour moins d’1€ pièce (ce qui coûte cher c’est tout le plastique qu’ils mettent autour pour faire joli). J’ai testé ce site américain, dont les prix défient toute concurrence (on peut aussi acheter des tests d’ovulation pas chers), et je n’ai rien à en redire (si ce n’est que le mode d’emploi est vraiment laconique, il vaut mieux avoir une vague idée de comment ça marche). Il faut prendre les « strips » qui sont des bandelettes, ce sont les moins chers, mais a priori pas faits pour faire directement pipi dessus (à tremper dans un récipient). Dans le même genre j’ai trouvé ce site français mais je n’ai pas testé.

Quand le test est positif, c’est généralement une grande joie mais n’oubliez pas que vous avez fait pipi dessus, et qu’il est donc à mon avis d’un goût douteux de le déposer sur l’oreiller/l’assiette de votre cher et tendre. Et je ne suis pas certaine que le bébé ait vraiment envie de recevoir ça pour ses 18 ans… Bref chez moi c’est direction poubelle ! Et avant de l’annoncer à la Terre entière, il peut être prudent de vérifier que la grossesse est bien évolutive. La prise de sang (qui cherche aussi l’hormone beta HCG, mais dans le sang, et permet d’en mesurer la concentration) peut être une indication mais le plus fiable est l’échographie. Si vous en êtes tout juste au retard de règles c’est un peu tôt mais au cours du deuxième mois (6-7 SA) on peut normalement percevoir les battements cardiaques. Personnellement je ne suis pas pour une médicalisation outrancière de la grossesse mais dans les deux cas j’ai fait une échographie vers 7-8 SA (semaines d’aménorrhée) et je le referai si c’est à refaire.

Pourquoi ? Même si ça n’est pas une garantie que tout va bien se passer à 100%, ça permet déjà d’identifier ou d’éliminer un certain nombre de problèmes : oeuf clair, grossesse extra-utérine (GEU), grossesse non évolutive… En général cela finit naturellement en fausse couche (sauf la GEU, mais d’autres signes peuvent alerter) mais l’arrivée des symptômes peut prendre des semaines, je préfère savoir le plus tôt possible. Parce que me traîner comme une loque pendant des semaines pour une grossesse qu’on sait condamnée, si je peux éviter… D’autre part, j’ai mentionné plus haut mes cycles étranges : si on calcule mon terme avec ma date des dernières règles, je me prends facilement 15 jours d’avance. Parfait pour avoir un congé maternité mal cadré, une première écho officielle au mauvais moment et surtout un déclenchement pour un faux dépassement de terme. La mesure de l’embryon par écho est une des méthodes de datation les plus fiables. Si vous souhaitez faire cette échographie et que votre praticien habituel est réticent (même si maintenant de plus en plus de gynécos ont des appareils à échographie et jettent volontiers un coup d’oeil au passage) vous pouvez toujours prétexter une incertitude dans la datation. Mais bien sûr cela n’a rien d’obligatoire et il me semble que c’est surtout une question de vécu (par ex si on a déjà eu une fausse couche) et de ressenti.

(Photo : Flickr)

Les miracles de l’ocytocine

mercredi, octobre 8th, 2008

L’alchimie des hormones de la femme enceinte, et en particulier au moment de la naissance, est quelque chose de fascinant (passons discrètement sur les joies nauséeuses du premier trimestre, voire plus si affinités). Grâce à ce blog, je découvre les résultats de cet article, publié dans Science. C’est-à-dire de la vraie science tout ce qu’il y a de plus sérieux (avec sacrifice de rats et tutti quanti). Ainsi, lors de l’accouchement, le pic d’ocytocine maternelle entraîne la « mise en veille » du cerveau du bébé, en rendant un neurotransmetteur appelé GABA inhibiteur plutôt qu’excitateur. On imagine facilement que cela pourrait aider à protéger l’enfant du choc psychologique de la naissance, mais il y a mieux. Les cellules ainsi mises « au repos » sont plus résistantes au manque d’oxygène, qui est la première cause de mort et de dommages cérébraux à la naissance. Voilà donc un nouvel argument pour les partisans des naissances peu ou pas médicalisées, et contre les césariennes à la demande. En cas de césarienne programmée pour raisons médicales, il semble donc plus bénéfique d’attendre que le travail se déclenche spontanément afin de permettre l’exposition du foetus à l’ocytocine maternelle (même s’il y aura toujours des cas où ce n’est pas possible). 

Pour en savoir plus sur l’ocytocine (surnommée « hormone de l’amour »), voir l’article de wikipedia, ainsi que les travaux de Michel Odent (et notamment son livre L’amour scientifié).

Référence : Tyzio et al. (2006) Maternal Oxytocin Triggers a Transient Inhibitory Switch in GABA Signaling in the Fetal Brain During Delivery. Science, Vol. 314. no. 5806, pp. 1788 – 1792

PS : Y a-t-il des journalistes à Libé ? En lisant cet article, on peut se poser la question (50 % de risques de fausse couche avec « l’amniocenthèse » -qui ne prend pas de « h »-, manquerait plus que ça !)…

La listériose

mercredi, juillet 23rd, 2008

 On en parlait ce matin aux infos, alors j’en profite pour faire un petit point sur le sujet, d’autant plus que je constate que la plupart des femmes enceintes que je connais n’a que des idées très vagues sur le sujet.

La listériose est une infection provoquée par la bactérie Listeria monocytogenes (d’où son nom, pas très originaux ces scientifiques). La maladie est bénine chez les personnes en bonne santé (quelque chose entre pas de symptôme et une grippe) mais peut avoir des conséquences dramatiques pour une femme enceinte, ou plus exactement pour son bébé. L’infection peut en effet entraîner une fausse couche ou un accouchement prématuré, avec un bébé souvent mort-né ou gravement malade. C’est pourquoi on recommande aux femmes enceintes de consulter immédiatement en cas de fièvre supérieure à 38.5°C, puisque c’est un des symptômes de cette infection (mais de beaucoup d’autres aussi, ne voyez pas déjà le pire si le thermomètre s’affole). Une antibiothérapie est alors mise en place, mais il est difficile de trouver des chiffres sur le succès du traitement. Contrairement à la toxoplasmose ou à la rubéole (autres infections craintes par le gros bidon), on ne peut être ni immunisé ni vacciné.

Le meilleur traitement est donc la prévention, puisque la principale voie de contamination est l’alimentation.  Je vous livre telles quelles les recommandations de l’Institut de veille sanitaire (InVS) :

1- Listeria monocytogenes résiste au froid mais est sensible à la chaleur. Or parmi les aliments les plus fréquemment contaminés par L.m., certains sont consommés sans cuisson.

La consommation de ces aliments à risque en l’état doit être évitée :
   – éviter de consommer des fromages au lait cru (ainsi que le fromage vendu râpé) ;
   – éviter la consommation de poissons fumés, de coquillages crus, de surimi, de tarama, etc.
   – éviter de consommer crues des graines germées telles que les graines de soja

L.m peut également contaminer, lors de leur fabrication, des produits qui subissent une cuisson au cours de leur préparation mais sont ensuite consommés en l’état. Si la contamination de ces produits intervient après l’étape de cuisson, ces produits présentent le même risque que des produits crus
contaminés.

Il s’agit pour l’essentiel de produits de charcuterie :
   – éviter les produits de charcuterie cuite tels que les rillettes, pâtés, foie gras, produits en gelée, etc.
   – pour les produits de charcuterie type jambon, préférer les produits préemballés qui présentent moins de risque d’être contaminés.

Note de la PP : On voit donc que la congélation ne débarrasse pas de la bactérie (qui comme la plupart de ses congénères résiste sans problème à des températures de -80°C).  On voit aussi que les aliments incriminés ne posent plus de problème s’ils sont cuits : non au saumon fumé sur son blini, oui à la quiche saumon fumé-épinard, non au toast de foie gras, oui à la poularde farcie au foie gras. Et si vous avez des envies irrépressibles de jambon, saucisson et autres, prenez les aliments industriels emballés qui sont stérilisés par irradiation plutôt qu’à la coupe chez le boucher du coin. Pour info, la charcuterie Monop est de très bonne qualité (et je suis TRES difficile en jambons).

2- Listeria monocytogenes est ubiquitaire, les aliments sont contaminés par contact avec l’environnement :
   – enlever la croûte des fromages ;
   – laver soigneusement les légumes crus et les herbes aromatiques ;
   – cuire les aliments crus d’origine animale (viande, poissons, charcuterie crue telle que les lardons).

Ces mesures sont suffisantes pour éliminer les germes qui se trouvent en plus grande quantité en surface de ces aliments. Les steaks hachés, qui sont des aliments reconstitués (et pour lesquels cette notion de contamination en surface ne peut être retenue), doivent impérativement être cuits à coeur.

Note de la PP : dommage pour le steack tartare aller-retour et les sushis.

3- Afin d’éviter des contaminations croisées (d’un aliment à l’autre) :
   – conserver les aliments crus (viande, légumes, etc.) séparément des aliments cuits ou prêts à être consommés ;
   – après la manipulation d’aliments non cuits, se laver les mains et nettoyer les ustensiles de cuisine qui ont été en contact avec ces aliments.

Note de la PP : Donc on coupe les carottes pour l’entrée avant de débiter ses escalopes de poulet crues si on ne veut pas laver la planche entre les deux.

4- Les règles habituelles d’hygiène doivent également être respectées :
   – les restes alimentaires et les plats cuisinés doivent être réchauffés soigneusement avant consommation immédiate ;
   – nettoyer fréquemment et désinfecter ensuite avec de l’eau javellisée son réfrigérateur ;
   – s’assurer que la température du réfrigérateur est suffisamment basse (4°C) ;
   – respecter les dates limites de consommation.

Note de la PP : A la télé, la dame de l’InVS (qui est ma copine !) a notamment expliqué qu’une fois ouverts il fallait rapidement consommer les aliments (dans les 2-3 jours). Et -faut-il le rappeler ?- on consomme rapidement un produit décongelé et on ne le recongèle pas (sauf s’il a été cuit entre temps ; ex : vous utilisez des oignons surgelés dans votre tagine, vous pouvez quand même congeler le reste de tagine, surtout après deux heures de cuisson) !

Je précise aussi qu’à mon avis ce sont ces recommandations-là qui font autorité. La connaissance des contaminations alimentaires n’est pas vraiment le boulot des sages-femmes et gynécologues, c’est celui d’agences comme l’InVS ou l’Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments). L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), qui est chargé de la communication vers le grand public, propose un certain nombre de brochures très bien faites (plus que les deux autres, qui sont moins accessibles je trouve) sur tous les sujets de santé (alimentation, alcool, dépression, SIDA, etc). Si vous avez un doute sur un aliment, c’est à mon avis vers ces instituts qu’il faut se tourner. Par contre, si vous craignez qu’il ne soit trop tard, c’est bien sûr le médecin ou la sage-femme qui vous suit qu’il faut consulter.

Si vous suivez à la lettre ces recommandations, vous risquez de vous attirer l’incrédulité, voire les moqueries de votre entourage (surtout la génération précédente chez qui ce discours de prévention était totalement absent). Il faut savoir que la listériose est un problème relativement récent qui n’existe que dans les pays industrialisés. On compte quelques centaines de cas par an en France, ce qui est évidemment très peu (même s’il y a probablement des cas non recensés car passant pour une simple crève). Dans ce contexte, certaines femmes trouvent que le risque est trop faible pour se priver de toutes ces bonnes choses, d’autant que leurs mère et/ou belle-mère leur répètent à l’envi qu’elles ont bien mangé et bu tout ce qu’elles voulaient et que leurs enfants se portent comme des charmes (ce qui n’est évidemment pas un raisonnement acceptable, l’absence de preuve n’étant pas la preuve de l’absence). Il est vrai qu’on a probablement plus de « chances » de se prendre une voiture en traversant la rue que d’attrapper la listériose en craquant sur un camembert coulant ou un plateau de sushis. Mais l’exposition à cette maladie est un risque relativement facile à maîtriser (dit celle qui a failli pleurer à une soirée où il n’y avait que des poissons crus, marinés ou en rillettes -dont elle rêvait pour apaiser ses nausées- et qui n’a mangé que des blinis). Quoi qu’il en soit, c’est comme toujours au gros bidon de peser le pour et le contre avant de se jeter sur le saumon fumé (ou de passer Noël aux carottes râpées -bien rincées, attention !), mais au moins avec les recommandations à jour : pas très logique de se priver de camembert si on se gave de foie gras à côté. Un de ces quatre il faudra que je vous parle toxoplasmose aussi (mais ça m’a semblé moins urgent car celles qui sont immunisées ne sont pas concernées).

Et si vous voulez tout savoir sur Listeria et la listériose, un topo complet est disponible ici (c’est là que j’ai trouvé la jolie photo de la bête).

La question du jour

jeudi, juin 12th, 2008

Pourquoi les femmes enceintes ont-elles cette irritante manie de se caresser le bidon d’un air extatique ?

Si vous avez déjà été enceinte (ou l’êtes actuellement) vous avez évidemment la réponse, mais je sais qu’il y a des nullipares (pas très joli ce mot), voire des nulligestes (pas beaucoup mieux), et même des hommes (mais si, mais si) qui traînent par ici. En plus ces derniers n’ont pas été très gâtés par le billet d’hier.

Donc comme beaucoup de monde, je me disais que je ne me caresserais pas la bedaine à tout va le jour où il y aurait un petit habitant dedans (autre qu’un ver solitaire… hmm vient me voir petit ténia, et faire de moi la plus belle en maillot…). Sauf que. Quand le petit habitant commence à manifester sa présence en remuant son adorable petit fessier (au lieu de se faire remarquer en faisant vomir tripes et boyaux à sa pauvre mère), le réflexe est incoercible : on répond avec sa main. Et puis le schtroumpf se manifeste de plus en plus souvent (même si ça dépend aussi des poussins), et à chaque fois sa mère ne peut pas s’empêcher de lui faire un petit coucou. C’est comme ouvrir la bouche quand on met du mascara, c’est comme Sega : c’est plus fort que toi.

A force, quand le poussin commence à prendre sérieusement ses aises, il arrive aussi qu’on ne soit plus vraiment en train de se caresser le ventre avec bonheur mais plutôt en train de recadrer ce rroognntuudjuuu de petit envahisseur qui semble aimer se coincer les pieds dans nos côtes (se reconnaît à l’air plus du tout extatique de la future maman).

Vous l’aurez compris : ce n’est pas vraiment le ventre que la femme enceinte touche, c’est le bébé. J’espère que la prochaine fois que vous en surprendrez une en flagrant délit vous ne la prendrez pas pour une narcissique égocentrique…

Vous êtes ce que votre mère mange

vendredi, avril 25th, 2008

Quelques précisions sur une publication scientifique qui a eu un certain succès médiatique ces derniers temps, mais qui peut facilement prêter à des interprétations un peu délirantes : You are what your mother eats: evidence for maternal preconception diet influencing foetal sex in humans, qu’on pourrait traduire par Vous êtes ce que votre mère mange : preuves de l’influence du régime maternel pré-conception sur le sexe du fœtus chez l’homme (résumé ici). Evidemment le titre est un peu racoleur mais c’est la dure loi de la science : un jeu de mots à deux balles ou une affirmation un peu provocante augmentent significativement les chances d’être publié dans une bonne revue, et ensuite de se voir interviewé par la presse généraliste. A ce propos, j’ajouterai que la revue où cet article a été publié (Proceedings of the Royal Society of London, B) est un journal généraliste en biologie, particulièrement réputé en sciences de l’évolution. Donc l’article a été soumis à la rigoureuse évaluation d’au moins deux confrères concurrents des auteurs avant d’être accepté, tout ça pour vous dire que ça n’est pas juste le premier torchon venu. J’ajouterai enfin que j’ai moi-même lu ce papier (et pas juste le résumé), et que je dispose d’une version pdf que j’enverrai à tous ceux que ça intéresse par email (cliquer sur le gros téléphone à gauche).

Quelles sont les principales conclusions de cet article ? En comparant le régime maternel pré-conception, il apparaît que les femmes ayant une alimentation plus riche (tant en énergie qu’en micronutriments –vitamines et autres), et notamment celles qui mangent des céréales de petit déjeuner, ont plus de chances d’avoir un garçon que les autres. Cet effet est cependant modéré : on observe 56% de garçons chez le tiers des femmes avec l’alimentation la plus riche contre 45 % chez le tiers avec l’alimentation la moins calorique.

 

Petite précision : c’est le chromosome X ou Y du spermatozoïde qui va déterminer le sexe de l’enfant, puisque tous les ovules sont X. Cependant, on sait que l’ovule et plus généralement les conditions physico-chimiques sur le « chemin » jusqu’à lui ont une grande influence sur la sélection du spermatozoïde gagnant. En outre, le corps de la mère peut éliminer sélectivement l’embryon dans les jours qui suivent la conception (notamment en cas de défaut génétique). D’où le rôle maternel dans le sexe de l’enfant à venir.

 

Si vous souhaitez choisir le sexe de votre futur enfant, vous conviendrez donc que ces résultats, quoi que prometteurs, vous laissent encore une grande part de hasard. En même temps ce n’est pas le but de cette étude. Il s’agit de travaux en sciences de l’évolution, dont le but est de comprendre quels facteurs peuvent influencer le sex ratio en général, et pas de permettre à Mme Schmoldu d’avoir enfin le fils dont son mari rêve pour transmettre ce précieux patronyme. En effet, on a constaté depuis quelques décennies que le sex ratio à la naissance penche de plus en plus en faveur des filles, alors qu’il est naturellement de 105 pour 100 en faveur des garçons (ceux-ci étant de petites choses fragiles ont plus de mal à atteindre l’âge reproducteur). Il semble donc important de comprendre les raisons de ce phénomène avant de nous retrouver avec une situation déséquilibrée, comme en Chine ou en Inde (mais inversée).

 

Le mécanisme évolutif proposé et généralement admis est le suivant. D’abord un petit rappel sur la théorie de l’évolution : contrairement à ce qu’on lit partout, les individus n’ont strictement rien à carrer de la perpétuation de leur espèce. Ce qui les intéresse c’est la perpétuation et la multiplication de leurs gènes (notons que ceci peut en parallèle contribuer à la perpétuation de l’espèce mais ce n’est pas le moteur). Faire un garçon est plus coûteux et plus risqué qu’une fille : les garçons ont besoin de plus de nourriture, ils ont plus d’accidents, ils sont moins résistants aux maladies. Par contre, le potentiel reproducteur d’un mâle est bien supérieur à celui d’une femelle, pas besoin de vous faire un dessin. Ainsi en période de disette mieux vaut opter pour la sécurité (une fille), alors qu’en période faste on peut faire un pari plus audacieux (un garçon).

 

Quelques détails intéressants (en vrac) sur le protocole et les résultats de l’étude :

  • Au niveau du régime alimentaire pré-conception, les éléments pour lesquels on trouve une différence significative entre bébé fille et bébé garçon sont : énergie, glucides, protéines, fer, zinc, sodium, potassium et calcium. Et c’est toujours plus élevé chez les mères de garçons.
  • Le régime alimentaire a également été suivi pendant le début de la grossesse, mais aucune différence n’a été trouvée. Le sexe du fœtus/embryon ne semble donc pas influencer le régime maternel. 
  • Les auteurs ont croisé ces données avec un grand nombre d’autres facteurs concernant les mères : tabagisme, âge, supplémentation en folate avant la conception, éducation, poids, taille et IMC avant la conception et à 14 semaines de gestation. Aucun impact significatif de ces variables n’a été observé. Notons que la parturiente moyenne dans cette étude a 25.8 ans et pèse environ 62 kg pour 1.64 m (avant bébé). Et que bien que les mères de garçons aient en moyenne mangé plus riche que les mères de filles, elles ne pesaient que 200g de plus avant la grossesse (ça c’est le vrai scoop de cette étude !).
  • Aucune des mères ne connaissait le sexe de son bébé lorsqu’elles ont répondu au questionnaire, et les données « pré-conception » portent sur l’année précédente.
  • Toutes les femmes ayant participé étaient blanches et primipares, car tant le groupe ethnique que le rang de naissance (de l’enfant) peuvent influencer le sexe du fœtus (mais il n’est pas précisé dans quel sens).
  • L’impact des céréales est selon les auteurs représentatif de l’impact du petit déjeuner, puisqu’au Royaume-Uni (lieu de l’étude) cela semble d’une part le principal aliment du petit déjeuner, et d’autre part le petit déjeuner semble le principal moment auquel on les consommerait.
  • A noter que les femmes observées étaient globalement bien nourries et que personne ne mourrait de faim. Il est probable que des effets encore plus marqués seraient observés s’il y avait une vraie disette.

 

Evidemment, le sexe du fœtus est le résultat d’un ensemble de facteurs (parmi lesquels le hasard tient probablement une bonne place) : hormones (et perturbateurs endocriniens), stress, ou timing relatif entre insémination et conception (les spermatozoïdes ayant une durée de vie de quelques jours dans les voies génitales féminines, le jour du rapport n’est pas forcément celui de la fécondation) sont parmi les plus souvent évoqués. Les auteurs notent cependant que la diminution du nombre de garçons à la naissance dans les pays occidentaux est corrélée avec celle du nombre de personnes prenant un petit déjeuner, ainsi qu’à une tendance à la restriction des apports alimentaires (vous savez, le fameux « spécial maigrir pour être la plus belle en maillot perdez ces 2 kg qui vous défigurent en une semaine »).

 

En conclusion : il est probablement peu efficace de se taper consciencieusement son bol de corn flakes tous les matins pour avoir un garçon (ou de se serrer la ceinture toute la journée si on veut une fille). Cela ne changera probablement pas grand chose à la probabilité habituelle de 1/2. Par contre, il est important que notre société réfléchisse aux implications de la dérive du sex ratio et aux moyens pour la contrer si ces conséquences apparaissent inacceptables. Ce type d’étude me semble donc tout à fait pertinent dans cette optique.

 

La péridurale vue de l’intérieur (2)

mardi, avril 22nd, 2008

Pour la première partie c’est ici.

Alors la péridurale, comment ça se passe dans la vraie vie ?

Déjà il faut savoir qu’il y a une sorte de fenêtre temporelle pendant laquelle on peut poser la péridurale. Trop tôt, on risque de trop ralentir le travail, trop tard, elle risque de ne faire effet qu’après la sortie du bébé. Cependant la définition précise de cette fenêtre varie selon les protocoles et les anesthésistes, même si au minimum on se base sur une dilatation du col de l’utérus comprise entre 2 et 8 cm (on parle aussi de doigts jusqu’à « deux doigts larges »). Pour information, la dilatation va de 0 (col fermé) à 10, qui est le diamètre suffisant pour permettre le passage de la tête de bébé. Après la dilatation le bébé sort de l’utérus et doit passer dans le vagin pour sortir tout court : c’est la phase d’expulsion (« poussez madame ! » « gniiiiiiiiii »). Pour ce moment-là, on peut baisser la dose pour que vous ayiez plus de sensations pour pousser et accompagner poussin vers le grand air.

Donc mettons que vous ne présentiez aucune contre-indication et que le timing soit de votre côté. La sage-femme appelle l’anesthésiste. C’est le moment de faire sortir le papa (à moins qu’il ne soit lui-même anesthésiste, et encore) car l’anesthésiste a une grande aiguille dont la vue n’est pas sans rappeler Freddy sort ses griffes ou autre film du même acabit. Pour vous pas de souci, l’aiguille n’est pas dans votre champ de vision. Il vous désinfecte, fait une piqûre d’anesthésie locale, puis la piqûre pendant laquelle il faut pas du tout bouger. Il s’enquière normalement de savoir si vous n’êtes pas en pleine contraction pour que vous restiez plus facilement immobile. La grande aiguille permet le passage d’un petit cathéter (un tuyau en clair) par lequel il vous injecte une première dose-test d’anesthésiant. Il faut attendre 15-20 minutes pour que les effets soient complets (mais on sent progressivement l’analgésie s’installer). Le produit a un effet limité dans le temps, donc il faut régulièrement réinjecter des doses (une fois que le cathéter est posé c’est ultra-simple, ça marche grosso modo comme une perfusion) : soit vous disposez d’une pompe personnelle (avec une limite à la dose maximum tout de même), soit c’est la sage-femme qui vient vous refaire un shoot dès que vous sentez à nouveau les contractions.

Vous voilà donc (normalement) parfaitement relaxée, puisque les analgésiques vous permettent de ne plus sentir du tout les contractions. Vous pouvez même (incroyable) dormir. Cependant ce bonheur a un prix, sous forme de petits désagréments, qui sont bizarrement peu évoqués lorsqu’on aborde le sujet.

Un des effets secondaires les plus fréquents de la péridurale est de provoquer des chutes de tension, qu’on peut généralement contrer en s’allongeant sur le côté. On surveille donc votre tension de très très près. En pratique, vous portez en permanence un brassard automatique, qui se gonfle tous les quarts d’heure, en vous broyant le bras et en faisant bip bip. A chaque nouvelle injection de produit : prise de tension juste avant, pendant, et juste après. Du coup c’est un peu plus difficile de dormir (plus de 15 minutes d’affilée). Et le brassard automatique n’est pas tendre avec votre petit bras.

La péridurale peut aussi faire légèrement monter la température (jusqu’à 38-38.5°C), donc une infirmière vient régulièrement vous la mesurer (généralement avec un thermomètre auriculaire, relax).

Vous ne couperez pas non plus au monitoring permanent (c’est-à-dire deux capteurs maintenus sur le ventre par une grosse bande de tissu, avec le coeur fetal qui fait boumboumboumboum -mais il y a un bouton « volume » sur l’appareil). Mais avec la péri on le supporte généralement bien. La perfusion est aussi inévitable (l’apport d’eau permettant en plus de lutter contre l’hypotension). Vous avez tout à fait le droit de demander ce qu’on y met et de donner votre avis.

La péridurale coupe la plupart du temps l’envie de faire pipi ; d’ailleurs on n’y arrive plus du tout. Vous devez donc être régulièrement sondée par la sage-femme (la sonde permanente n’est pas obligatoire), surtout avec toute la flotte que balance la perfusion.

Comme toute anesthésie, elle est généralement présentée comme incompatible avec l’alimentation : plus le droit de manger ni de boire, à part des micro-gorgées pour s’humecter la bouche (ou le fameux brumisateur). Cependant cette interdiction est remise en question par certaines études. Si votre dernier repas remonte à loin (le travail peut souvent couper l’appétit de toute façon), on peut vous mettre un peu de glucose dans la perfusion. Il faut savoir que la péridurale peut aussi provoquer nausées et vomissements.

Selon l’intensité des contractions (qui augmente au cours du travail), pour que l’analgésie soit suffisante, la dose injectée peut être telle que vous pouvez à peine/plus du tout bouger à partir du bassin. Cependant avec un peu d’aide (« chériiiiiiiii ? ») il est parfaitement possible, voire recommandé, de changer de position, du moment qu’on ne se met pas en appui sur les jambes, forcément (restent au moins sur le dos, semi-assise, assise, sur le côté). A ce propos, la péridurale ambulatoire, qui permet de se déplacer tout en bénéficiant de l’anesthésie, semble ne pouvoir souvent s’appliquer qu’à une partie du travail. En outre, vus les appareils sophistiqués et coûteux qu’elle nécessite (on peut se déplacer, certes, mais seulement avec monitoring et tout le tintouin), elle n’est disponible que dans une poignée de maternités.

Vous pouvez aussi ressentir des fourmis/picotements dans les jambes : sensation un peu bizarre mais pas insupportable non plus. Et certaines femmes ont un effet « tremblante du mouton » assez sympathique (même si sans conséquence).

Une fois la péridurale posée, on la garde. Théoriquement on peut arrêter d’injecter du produit à tout moment mais une fois qu’on a goûté au calme les contractions deviennent difficilement tolérables (d’autant plus qu’elles sont de plus en plus fortes).

Le gros bug de la péridurale, c’est la latéralisation. Le cathéter dévie un peu, et vous devenez Dr Peace & love et Mrs Achevez-moi tout de suite. En clair, un côté de votre corps est anesthésié et pas l’autre. Ceci est corrigé par un deuxième passage du toubib qui reposera le petit tube comme il faut.

Voilà donc ce qu’implique la péridurale pour votre petite personne (pas si petite que ça d’ailleurs puisqu’en général à ce stade on a largement dépassé le mètre de circonférence). Demain nous verrons ce que cela entraîne/peut entraîner pour le déroulement du travail. Et après ça, vous devriez avoir toutes les cartes en main pour trouver ce qui vous convient.