Posts Tagged ‘cycle menstruel’

La lune en moi

lundi, mars 16th, 2009

lune L’internet des femmes ne parle plus que du dernier documentaire diffusé par Arte : La lune en moi. Rien que dans la basse-cour, deux lectrices ont attiré mon attention dessus, Isabelle95 et Mariette. Grâce à la magie d’internet, j’ai pu voir le film sur le site d’Arte mais malheureusement ça n’est plus possible.

Donc : un documentaire très bien, pour nous aider à comprendre les règles, mais aussi la perception qu’on en a et l’intérêt qu’elles pourraient avoir (ou pas). Quelques informations intéressantes à retenir :

  • Les règles qu’on a sous pilule (ou toute autre contraception hormonale comme patch, implant, anneau, ou encore un certain nombre de stérilets*, comme le Mirena) ne sont pas des vraies règles. Pour en savoir plus je vous recommande ce très bon article de Martin Winckler.
  • Un certain nombre de solutions (autres que « prendre des antalgiques ») est proposé au problème des règles douloureuses : faire de la danse orientale, avoir un orgasme (avec ou sans assistance…), pratiquer le tai chi, mais aussi faire la part de son histoire familiale et de son propre stress, s’impliquer dans un groupe de femmes, etc
  • Quant au fameux syndrome prémenstruel, une des intervenantes suggère de le voir comme une occasion de se recentrer et de prendre du temps pour soi, comme un mécanisme d’auto-protection.
  • Je passe sur les superstitions épouvantables attachées aux règles (un homme explique très sérieusement qu’une femme ayant ses règles qui touche un nouveau-né lui communique une terrible maladie qui va le conduire à la mort… sait-il que la mère du nouveau-né perd au moins autant de sang qu’une femme qui a ses règles ??) ; j’avoue que je trouve même les superstitions moins dramatiques (comme de traîner en luge les femmes ayant leurs règles pour fertiliser la terre) pas très sympathiques non plus (j’aime pas trop les superstitions tout court je crois). Ceci dit il me semble que ç’aurait été une bonne occasion d’en réfuter un certain nombre, explications à la clé, puisqu’elles sont encore si répandues. De façon générale, un certain nombre de choses (comme la coupe menstruelle) sont à peine abordées ou suggérées alors qu’on aimerait en savoir un peu plus.
  • Les règles ont souvent été utilisées comme excuse pour éloigner les femmes du monde du travail, puisqu’elles seraient rendues inaptes presque une semaine par mois. Il est intéressant de noter que pendant la deuxième guerre mondiale, lorsque les hommes étaient au front les Etats-Unis ont soudainement trouvé plein d’études montrant que les femmes étaient au moins aussi aptes que les hommes à aller à l’usine, études qui ont mystérieusement disparu une fois les hommes revenus au pays. Et finalement il semblerait que les hommes aient autant de sautes d’humeur que les femmes, la différence étant que les femmes elles savent quand les leurs vont se concentrer.

Le film insiste aussi pas mal sur le tabou autour des règles : ne pas en parler, ne jamais dire qu’on les a. Cela m’a fait penser à l’excellent livre de Sarah Blaffer Hrdy, Les instincts maternels (j’en ai parlé ici). En effet, elle explique que la femme, par rapport aux femelles d’autres mammifères (et notamment des singes), a une ovulation cachée. Pas de chaleurs, pas de fesses rouges ou autres signaux sympathiques. Ainsi l’homme ne peut pas savoir si le coït a des chances d’être fructueux ou pas. Si la femme fréquente plusieurs hommes, c’est elle qui détient l’information cruciale de la paternité : un pouvoir loin d’être négligeable, qui peut (selon l’organisation sociale) lui permettre de solliciter plusieurs pères potentiels pour l’aider avec sa progéniture. La plupart des coutumes visant à stigmatiser d’une façon ou d’une autre les femmes ayant leurs règles sont donc un moyen pour les hommes de les priver de ce pouvoir. Vous n’êtes pas sans savoir qu’à partir des règles on peut calculer la date d’ovulation, même si c’est loin d’être une science exacte, n’en déplaise à Monsieur Ogino. J’en profite pour rappeler à ceux qui l’ignoreraient (moi-même je ne le sais pas depuis très longtemps) qu’autant la période entre les règles et l’ovulation peut être variable d’une femme à l’autre (et d’un cycle à l’autre), autant la période entre l’ovulation et les règles elle est environ à deux semaines dans la plupart des cas. En effet, c’est l’ovulation qui provoque les règles et non l’inverse. Donc de ce côté-là, je dirais que bien sûr il faut briser le tabou et permettre notamment aux adolescentes d’aborder aussi sereinement que possible leurs premières règles, mais combattre ces coutumes archaïques pour qu’il revienne à chacune de décider si elle a envie d’en parler ou pas. Il me semble que cela relève principalement de l’intime.

Alors maintenant que les hormones artificielles nous donnent les moyens de nous débarrasser des règles, ou au moins de les contrôler largement, faut-il les voir comme une joie ou comme une malédiction ? Sont-elles un anachronisme évolutif ou au contraire ont-elles un rôle important ? La communauté scientifique n’est pas vraiment unanime, et surtout il semblerait qu’elle s’en foute un peu. Une chercheuse assez iconoclaste, Margie Profet, propose que les règles sont un mécanisme de lutte contre les infections de l’utérus et des trompes de Fallope (infections principalement propagées par les petits tétards de Monsieur). Le débat est assez bien résumé sur cette page, même si on sent assez bien quelle thèse est privilégiée par l’auteur. Personnellement, je suis surtout pour plus d’information, plus de recherche, plus d’alternatives (médicales et autres). Et plus de respect pour les femmes et leurs corps. La seule chose dont je suis à peu près certaine, c’est qu’il n’y a pas de solution unique qui conviendrait à toutes les femmes.

Quelques lectures supplémentaires si le sujet vous intéresse :

Quant au film, il sera rediffusé mercredi 18 mars 2009 à à 3h (du matin) et vendredi 27 mars 2009 à 1h25 (toujours du matin) sur Arte.

*qu’on appelle maintenant DIU comme dispositifs intra-utérins ou SIU (systèmes intra-utérins)

(Photo : Flickr)

Les mystères du col

lundi, octobre 13th, 2008

Un article pour nous, les femmes. Messieurs, vous pouvez rester par amour pour la science, mais on vous aura prévenus. Nous allons parler d’une partie souvent méconnue de l’anatomie féminine : le col de l’utérus (ou cervix pour les anglophones). Pour éviter de trop vous raconter n’importe quoi, j’ai sollicité les lumières de la poule accoucheuse, une super sage-femme qui voit du col toute la sainte journée depuis bien une décennie. Tout le monde en a plus ou moins entendu parler, mais c’est quoi exactement ?

Il s’agit de la partie basse de l’utérus, qui fait la transition vers le vagin. C’est comme une sorte de petit tuyau (les gens qui s’y connaissent parlent de manchon musculaire), avec des parois épaisses et un fin canal au centre. Voilà un joli schéma explicatif (trouvé sur http://www.infovisual.info/03/063_fr.html) :

 

 

De façon générale, le col est fermé pour protéger l’utérus contre l’entrée d’éléments hostiles. Il s’ouvre cependant à plusieurs occasions :
  • pour les règles, afin de laisser passer le sang et les muqueuses
  • lors de l’orgasme, afin de laisser passer les tétards de Monsieur (rappelons que les ovules  sont pondus par les ovaires dans les trompes de Fallope, qui se trouvent à l’autre bout de l’utérus). Il s’ouvre aussi au moment de l’ovulation
  • lors de l’accouchement, afin de laisser passer le bébé 
A noter que l’ouverture pour le passage des règles ou du sperme n’est pas comparable à celle pour le passage du bébé, mais vous vous en doutiez je pense !

 

De façon générale, le col n’aime pas trop s’ouvrir et vous le fait savoir : cela cause les douleurs menstruelles et celles de l’accouchement (pour l’orgasme c’est une autre affaire…). Son ouverture est provoqué par des contractions de l’utérus. L’utérus étant un muscle lisse, on ne peut pas contrôler ses contractions sciemment (de la même façon qu’on ne contrôle pas ses mouvements intestinaux ou ses battements cardiaques, à moins d’être un grand maître yogi). C’est donc généralement l’action des hormones, et notamment l’ocytocine qui déclenche les contractions. A noter que le sperme de Monsieur contient des prostaglandines, qui provoquent également l’ouverture du col. A l’origine, c’est pour faciliter l’entrée des spermatozoïdes mais c’est aussi la base de la fameuse méthode italienne pour déclencher un accouchement qui tarde à venir (bien que son efficacité ne soit pas garantie, elle a au moins l’avantage d’être basée sur une relation de cause à effet scientifiquement prouvée).

 

C’est bien joli tout ça mais en quoi cela nous concerne-t-il ? Eh bien le col est une véritable éponge à hormones et peut donc vous aider à suivre votre cycle menstruel. Si on prend une contraception hormonale (pilule, implant, anneau, certains stérilets…) évidemment les modifications seront moins importantes. Cependant, avec un peu de pratique, l’examen du col peut révéler en quelques instants à quel moment vous vous trouvez. Vous pouvez déterminer si vous ovulez, si vos règles sont sur le point de débarquer et éventuellement si vous êtes enceinte. C’est donc une aide précieuse pour maîtriser sa fécondité, de façon naturelle et simple (à ce point je dois dire que si vous n’êtes pas du tout prête à accueillir un accident, ça ne me semble pas une méthode de contraception optimale ; voir ici pour des idées de contraception « naturelle »). Si vous utilisez une coupe menstruelle, avoir une bonne connaissance des lieux vous sera également utile.

 

Alors concrètement comment fait-on ? Contrairement à ce que votre dernière visite chez le gynéco aurait pu vous faire croire, pas besoin d’un spéculum (objet sympathique à classer dans le top 10 des trucs les plus détestés par les femmes) et d’un coton-tige géant (ça c’est « juste » pour faire un frottis, c’est-à-dire récupérer quelques cellules pour vérifier qu’il n’y a pas de vilaine cancéreuse). D’abord on s’installe dans un endroit calme où on se sent détendue et sans risque d’intrusion inopinée : sur son lit, dans sa baignoire, aux toilettes… Euh non, d’abord on se lave les mains ! Ensuite, on glisse un doigt dans le vagin jusqu’à sentir une sorte de boule. De façon générale, la consistance rappelle celle du bout du nez. Et voilà, vous avez trouvé votre col ! Vous allez vite trouver au centre une petite ouverture, dans laquelle vous pouvez plus ou moins glisser un ongle, mais pas plus. Voilà le chemin vers votre utérus. Et en photo (source : http://www.aly-abbara.com/livre_gyn_obs/images/gif/uterus/Col_uterin/col_nullipare.html) ça ressemble à ça (pour les nullipares, voir ici après six enfants) :

 

 

Une fois que vous avez repéré les lieux, quels sont les paramètres sur lesquels se concentrer ? 
– la position dans le vagin : est-il haut ou bas ? Dans l’alignement ou un peu de côté ?
– la consistance : ferme (comme le bout du nez) ? ou mou (comme les lèvres) ?
l’ouverture : un ongle ? un doigt ?
– la taille : long ? plus court ?
Tout ceci est surtout relatif et varie au cours du cycle, d’où l’importance d’une auto-observation régulière pour qu’elle soit pertinente.
Ainsi, à l’ovulation le col remonte, s’ouvre, s’efface et se ramollit. Avant les règles il s’ouvre également. Le diagnostic dit clinique de la grossesse est aussi possible mais l’auto diagnostic n’est pas évident. Vers 9 SA (semaines d’aménorrhée), on commence à sentir via le vagin que l’utérus a grossi et que les culs de sac vaginaux (parties en cul de sac entre le col et le fond du vagin, voir le joli schéma plus haut) sont plus « pleins ». Vous pouvez voir un autre joli schéma (ainsi que des explications) chez Bibou d’avril.

Lors de la grossesse, vous pouvez ainsi facilement détecter vous-même des changements dans votre col, surtout si vous ressentez des contractions précoces. Enfin facilement, au début hein, parce qu’après un certain point, plus ou moins impossible à moins d’être une contorsionniste mongole. Dommage, parce que ça pourrait éviter de partir trop tôt pour la maternité. Mais à moins de former Monsieur à cet art délicat… Ceci dit, je pense que ça peut être utile notamment au premier trimestre, quand on a toujours peur de faire une fausse couche et qu’il arrive qu’on ait des maux de ventre violents (l’intestin pressentant qu’il va à la longue se faire tasser dans un petit coin par le nouvel intrus et protestant vigoureusement contre un tel sort). Car rien ne sortira de l’utérus si le col ne se ramollit et ne s’ouvre pas d’abord. Ceci dit, il est courant en fin de grossesse que le col commence à travailler et à s’ouvrir sans pour autant que l’accouchement soit imminent ni que ça pose problème. 
Le col lors de la grossesse est évalué par les médecins et les sages-femmes selon quatre critères:      

  • sa position : postérieur (ce qui veut dire en arrière), intermédiaire, ou centré
  • sa longueur : long, mi-long, court, voire épais ou effacé pendant le travail (celle-ci est d’ailleurs évaluée plus précisément par l’échographie du col)
  • sa tonicité : tonique, ramolli, mou
  • son ouverture : de fermé à 10cm en passant par la fameuse expression un doigt ou deux doigts pour les premiers cm (après on passe aux cm et on en reste là pour les doigts)

Ils y ajoutent la hauteur de la présentation foetale (tête ou siège) : haute et mobile, appliquée, fixée sur le bassin, puis pour l’accouchement (et une fois la dilatation du col complète), engagée dans le bassin.
Tout ceci permet de calculer le score de Bishop qui permet d’évaluer entre autres si on peut déclencher l’accouchement (mais aussi évaluer une menace d’accouchement prématuré). Rappelons que plus le col est postérieur, tonique, fermé et long, et plus la présentation du bébé est haute, et moins l’accouchement est a priori imminent. 

 

 

Pour l’accouchement, le col doit s’ouvrir de 10 cm et s’effacer totalement (c’est-à-dire devenir tout plat). Une tête de bébé ayant un périmètre d’environ 33-34 cm, on multiplie le diamètre (10) par Pi (3,14) pour obtenir le périmètre et hop miracle, ça passe ! Tant que le col n’est pas totalement ouvert (c’est la phase de dilatation) on attend que ça se passe. Comme ce sont les contractions qui permettent l’ouverture du col, cette attente n’est pas toujours une partie de plaisir. Et c’est ensuite, une fois que le bébé commence à descendre par le col qu’on pousse (phase d’expulsion). 
Pour voir la descente du bébé à l’accouchement (et aussi plein d’autres trucs, comme l’appareil génital féminin sous toutes les coutures), voir ce petit diaporama
Remercions la poule accoucheuse, grâce à qui vous serez vous-même une poule informée à votre prochaine visite chez le gynéco ou la sage-femme (et même d’ici-là !).