Posts Tagged ‘césarienne’

Le melon à deux pattes, suite

mardi, mars 10th, 2009

Après la grande discussion autour de cet article sur la naissance, Cybie m’a signalé une super animation qui montre la progression du bébé lors d’une naissance « normale ». La voici :

Il se trouve que la même équipe a aussi fait une animation sur la césarienne (pas de sang, rien de gore), par contre on ne peut pas l’intégrer dans un site donc vous pouvez aller voir directement ici. Je n’ai pas encore pu écouter le blabla donc j’espère qu’il n’y a pas trop de bêtises (de toute façon c’est en anglais).

Et tant que j’y suis dans la série « je fais bosser les lecteurs pour faire croire qu’il se passe des trucs sur le blog »,  CDLPSF me signale que l’Assemblée nationale a voté l’amendement étendant les compétences des sages-femmes à la contraception et à la prévention du cancer du col de l’utérus. Bonne nouvelle pour les sages-femmes et pour les femmes, dont l’accès à ces soins devrait s’accroître,  mais il ne faudrait pas non plus que ce soit l’occasion d’enterrer définitivement les gynécos de ville.

De mon côté je suis partie mardi à l’aube pour trois jours au pays d’Hamlet avec accès internet en pointillés, donc ne vous étonnez pas de ne pas me voir par ici (je teste la publication programmée).

Attendre…

mercredi, février 4th, 2009

sheperd Un article publié en novembre 2008 par une équipe de l’UCSF dans Obstetrics and Gynecology, le journal de l’American College of Obstetricians and Gynecologists (ACOG), l’équivalent de notre CNGOF, conclut qu’un peu de patience lorsque le travail lors de l’accouchement ralentit ou s’arrête pourrait éviter un certain nombre de césariennes, pour le bénéfice des mères et sans conséquence négative pour les enfants. L’article constate qu’alors que l’ACOG recommande d’attendre au moins deux heures d’arrêt de progression de la dilatation avant d’envisager la césarienne, en pratique les obstétriciens étatsuniens tendent à dégainer le scalpel plus rapidement. L’étude s’est intéressée pendant 10 ans à 1014 femmes ayant accouché à terme d’un seul enfant (à la fois) vivant, accouchement pendant lequel un arrêt de la phase active (défini comme deux heures ou plus d’arrêt de la dilatation) a été constaté. Il apparaît que sur ces 1014 femmes, environ un tiers ont finalement accouché par voie basse, tandis que les autres ont eu une césarienne. En outre, la comparaison entre les deux groupes de la santé des femmes (hémorragie du post-partum, infections…) et des enfants (score d’Agpar, infections, taux d’admission en néonatologie) montre qu’autant la césarienne entraîne plus de complications pour les femmes, autant la voie basse n’en entraîne pas plus pour les bébés.

Aux Etats-Unis, un tiers des césariennes pour un premier bébé ont pour cause un arrêt du travail. Si les recommandations d’attendre au moins deux heures étaient vérifiées, un tiers d’entre elles (soit donc 1/9 du total, la Poule pondeuse est trop forte en maths) pourraient être évitées, avec des conséquences bénéfiques pour la santé des mères, sans que ce soit au détriment de celle de leurs enfants. On sait aussi qu’avoir une césarienne pour le premier enfant augmente significativement la probabilité d’en avoir une pour le second (même si avoir eu une césarienne à l’accouchement précédent n’est pas en soi une contre-indication formelle à tenter un accouchement vaginal après césarienne, ou AVAC ; ce qui l’est c’est plutôt que la raison de la césarienne se reproduise).

En France, les recommandations pour la pratique clinique (RPC) du CNGOF sur la césarienne indiquent (je cite) :

Au cours du travail (y compris à dilatation complète), la réalisation systématique d’une césarienne après deux heures de stagnation de la dilatation doit être reconsidérée, du fait d’une diminution des césariennes en cas d’expectative prolongée (NP2), sans augmentation significative de la morbidité maternelle. L’analgésie péridurale permet de rendre cette expectative plus tolérable (NP 2).

(NP : niveau de preuve scientifique, de 1 à 5, 1 étant le plus fiable)

Le document datant de 2000 est donc largement antérieur à l’étude (cocorico ?). Reste à savoir quelle est sa probabilité de mise en œuvre dans nos maternités hexagonales, avec probablement un certain nombre de disparités entre services, voire obstétriciens. Apparemment c’était au moins le cas dans la maternité où j’ai accouché puisque j’ai moi-même connu un arrêt du travail de plus de deux heures à 8 cm de dilatation, qui ne m’a finalement pas empêchée de faire naître un poussin en pleine forme par voie basse, même s’il était clair que nous n’étions pas passés loin du bloc opératoire. Bien sûr d’autres éléments sont à prendre en compte, et par exemple il ne serait plus approprié d’attendre en cas de signes de détresse fœtale (dans notre cas un monitoring parfait a certainement joué favorablement).

Enfin je tiens à préciser qu‘il ne s’agit nullement de jeter l’opprobre sur la césarienne, qui sauve régulièrement des vies, et dont nous avons la chance de bénéficier facilement, gratuitement et dans les meilleures conditions de sécurité. Simplement il s’agit d’une opération chirurgicale, avec des risques et  des bénéfices associés qu’il convient donc de peser soigneusement avant d’en prendre la décision, de la même façon qu’on n’imagine pas enlever l’appendice à tout le monde sous prétexte qu’il pourrait un jour nous causer des problèmes et qu’on a une technique sûre pour le faire.

Information trouvée via le blog Unnecesarean.

Photo : à partir de maintenant (bonne résolution pour la deuxième année de blog), toute nouvelle médicale à caractère potentiellement anxiogène sera accompagnée d’une photo médicale relaxante et apaisante.

Trop de césarisées

lundi, décembre 8th, 2008

C’est le JDD qui reprend une étude de la Fédération Hospitalière de France (FHF, pas trouvé l’étude sur leur site), avec ces résultats : le taux de césariennes a doublé en un peu plus de 20 ans (de 10,9% en 1981 à 20,1% en 2007). Cela veut dire qu’actuellement un bébé sur cinq naît par césarienne. Or si cette opération s’avère vitale dans certains cas, il est clair qu’elle n’est pas dénuée de risques, tant pour la mère (mortalité 3,5 fois supérieure à la voie basse) que pour l’enfant (risque de fragilité pulmonaire accru, entre autres). L’OMS, cet empêcheur de jouer du bistouri tranquille, préconise un taux de 15%. D’après le JDD, les raisons avancées de cette popularité de la césarienne sont les suivantes :

  • Optimisation de l‘organisation et du budget des services en programmant des césariennes quand le personnel est disponible
  • Augmentation des grossesses tardives et multiples qui sont statistiquement plus sujettes à complications
  • Crainte des poursuites judiciaires : un obstétricien sera poursuivi pour n’avoir pas fait la césarienne à temps, mais jamais pour avoir fait une césarienne injustifiée
  • Publication de l’étude Hannah (2000) montrant que la césarienne était moins risquée pour l’enfant que la voie basse en cas de présentation en siège, même si son interprétation porte à controverse (y compris par le CNGOF)
  • Hausse de la demande de césariennes de convenance

Pour ce dernier point, rappelons que la césarienne est une intervention chirurgicale, donc autant sur le coup c’est bien plus rapide et indolore qu’une voie basse, autant ça se paie ensuite pour les suites de couches.

Un autre point intéressant de cette étude est le top 100 du taux de césariennes par maternité, au sein duquel prédominent largement les cliniques privées de niveau 1. La palme (le César ?) revient à la clinique de la Muette avec un beau 43,3 %. En moyenne, le taux de césariennes est supérieur d’un point dans les maternités privées de niveau 1 à celui des maternités de niveau 3, toutes publiques et supposées accueillir les cas les plus pathologiques (même s’il y a toujours des surprises). J’avais déjà expliqué ici que privilégier une petite clinique à un gros hôpital n’était pas toujours une stratégie gagnante si on voulait un accouchement aussi physiologique que possible (même si bien sûr il s’agit d’une tendance globale à laquelle existent de nombreuses exceptions).

Les cliniques visées se défendent par les arguments suivants :

  • La césarienne n’est pas avantageuse financièrement (seulement 347 €).
  • Ce sont les femmes qui leur demandent des césariennes de convenance.
  • L’étude ne prend pas en compte le nombre d’accouchements, ce qui introduit un biais statistique (argument réfuté par la FHF).
  • Le taux de césarienne n’est pas un bon indicateur de la qualité des soins.

Tout ceci est fort intéressant, mais on peut regretter que comme souvent, l’article suppose qu’on ne peut accoucher qu’en maternité, ce qui n’est pas (tout à fait) le cas. Comme déjà évoqué ici, on peut accoucher :

  • en maternité
  • en maternité mais avec une sage-femme libérale ayant accès au plateau technique dans le cadre de l‘accompagnement global
  • en maison de naissance (si on n’habite pas en France ou alors près des frontières du Nord-Est)
  • à la maison avec une sage-femme libérale
  • à la maison sans assistance médicale (même si ça n’est pas recommandé, je ne crois pas que ce soit illégal)

Malheureusement, en France tout est fait pour orienter les couples vers la première option et pour décourager les autres possibilités ; d’ailleurs je vous rappelle que vous pouvez faire quelque chose (pour le moment j’ai eu une réponse convenue de l’Ordre des sages-femmes et pas un mot ni de Roselyne, ni du directeur de l’AP-HP, et pas plus de mon député, à qui j’avais envoyé une copie). Attention, il ne s’agit pas de stigmatiser les maternités ou les mères qui y accouchent (comme la Poule pondeuse par exemple), mais encore une fois d’offrir un vrai choix aux futurs parents. Il me semble en tout cas que ça pourrait être une bonne piste pour réduire un peu ce taux : ça n’empêchera pas les femmes de demander des césariennes de convenance mais ça devrait au moins diminuer la part due à l’optimisation du fonctionnement des services.

Si vous avez ou devez accoucher par césarienne, ce billet n’est pas là pour vous culpabiliser non plus : bien sûr qu’il y a un nombre non négligeable de cas où l’opération est incontournable, et heureusement qu’elle existe. A la maternité où j’ai accouché, ils recommandaient de prendre le rendez-vous des six semaines après la naissance avec l’obstétricien qui a pratiqué l’opération, afin de pouvoir lui poser toutes vos questions et de « refaire le film » ensemble. Et si vous ne le vivez pas bien, j’ai entendu beaucoup de bien de l’association Césarine. Peut-être certaines commentatrices qui sont passées par là pourront nous en dire plus ?

Les miracles de l’ocytocine

mercredi, octobre 8th, 2008

L’alchimie des hormones de la femme enceinte, et en particulier au moment de la naissance, est quelque chose de fascinant (passons discrètement sur les joies nauséeuses du premier trimestre, voire plus si affinités). Grâce à ce blog, je découvre les résultats de cet article, publié dans Science. C’est-à-dire de la vraie science tout ce qu’il y a de plus sérieux (avec sacrifice de rats et tutti quanti). Ainsi, lors de l’accouchement, le pic d’ocytocine maternelle entraîne la « mise en veille » du cerveau du bébé, en rendant un neurotransmetteur appelé GABA inhibiteur plutôt qu’excitateur. On imagine facilement que cela pourrait aider à protéger l’enfant du choc psychologique de la naissance, mais il y a mieux. Les cellules ainsi mises « au repos » sont plus résistantes au manque d’oxygène, qui est la première cause de mort et de dommages cérébraux à la naissance. Voilà donc un nouvel argument pour les partisans des naissances peu ou pas médicalisées, et contre les césariennes à la demande. En cas de césarienne programmée pour raisons médicales, il semble donc plus bénéfique d’attendre que le travail se déclenche spontanément afin de permettre l’exposition du foetus à l’ocytocine maternelle (même s’il y aura toujours des cas où ce n’est pas possible). 

Pour en savoir plus sur l’ocytocine (surnommée « hormone de l’amour »), voir l’article de wikipedia, ainsi que les travaux de Michel Odent (et notamment son livre L’amour scientifié).

Référence : Tyzio et al. (2006) Maternal Oxytocin Triggers a Transient Inhibitory Switch in GABA Signaling in the Fetal Brain During Delivery. Science, Vol. 314. no. 5806, pp. 1788 – 1792

PS : Y a-t-il des journalistes à Libé ? En lisant cet article, on peut se poser la question (50 % de risques de fausse couche avec « l’amniocenthèse » -qui ne prend pas de « h »-, manquerait plus que ça !)…

Le top des maternités

mercredi, mars 26th, 2008

shepherd  L’Express vient de publier son célèbre palmarès des maternités. On peut le voir ici, département par département. Ce n’est pas vraiment un classement, car il n’y a pas de maternité idéale. Cela dépend en effet des attentes qu’on a vis-à-vis de ces établissements, et notamment le niveau de médicalisation et d’intervention qu’on souhaite. Par ailleurs certaines grossesses, identifiées comme à risque, vont être systématiquement orientées vers des institutions de niveau 2 ou 3, ce qui limite le choix. Il faut savoir que ces niveaux correspondent aux possibilités de réanimation pour le bébé : pour la mère tout est disponible dans toutes les maternités (notamment un bloc opératoire avec personnel compétent pour faire une césarienne). Le niveau 1 est le plus bas, tandis que le niveau 2 implique la présence d’un service de néo-natalogie pour les nouveaux-nés de plus de 33 semaines et le niveau 3 un service de réanimation pour l’accueil des mini-poussins. En plus de ces informations, l’étude fournit pour chaque institut le niveau d’infections nosocomiales, le nombre d’accouchements par an, et les taux d’accouchements multiples (jumeaux et plus), de césariennes, de transfert vers un autre hôpital et de bébés de petit poids (< 2.5 kg). A noter que j’ai repéré quelques boulettes dans le classement parisien, donc les informations ne sont peut-être pas toute super fiables (par exemple la Pitié est présentée comme niveau 3 alors que c’est un niveau 2, ou encore on nous donne des chiffres pour St Joseph et pour Bonsecours, alors que Bonsecours est la maternité de St Joseph…)

Pour chacun de ces facteurs, le site vous donne également la moyenne nationale comme référence (en glissant la souris sur le titre de la catégorie, subtil non ?). Evidemment, les niveaux les plus élevés ont généralement les taux les plus élevés de césariennes, naissances multiples et petits bébés, puisqu’ils récupèrent tous les cas à problème. Il me semble logique qu’ils soient donc au-dessus de la moyenne nationale. Cependant le site constate que le taux de césariennes est plus élevé dans le privé que dans le public, alors même que le privé ne comporte que des établissements de niveau 1.

C’est une des raisons pour lesquelles j’ai choisi d’accoucher dans un grand hôpital public de niveau 3, alors que je ne souhaitais pas une naissance très médicalisée (mais quand même un peu, merci Sainte Péridurale). Réfléchissons ainsi quelques minutes au fonctionnement d’un hôpital par rapport à celui d’une clinique. Dans un grand hôpital (je parle de taille, pas de réputation), il y a 24 h sur 24 un obstétricien, un anesthésiste et un pédiatre de garde (et s’il pouvait y avoir un certain neurochirurgien tant qu’à faire…). Ils sont là pour toute la durée de leur garde, et puis voilà. De plus ils touchent un salaire mensuel fixe, qui ne dépend pas des actes qu’ils pratiqueront (sachant qu’une césarienne coûte plus cher qu’un accouchement par voie basse par exemple). Dans une clinique, hors des heures de bureau, ils sont d’astreinte. C’est-à-dire qu’ils vaquent à leurs occupations habituelles mais en s’engageant à venir fissa si on les appelle. Par ailleurs, ils sont généralement payés à l’acte. Donc à votre avis, qui a le plus intérêt à vous faire une césarienne parce que le travail n’avance pas assez vite ? Non seulement c’est mieux payé, et en plus on sera rentré pour l’apéro. Attention, je ne pense pas que ce soit la façon générale de fonctionner dans les cliniques, où je ne doute pas que la grande majorité des médecins ait une éthique et un dévouement irréprochables, mais plutôt une dérive inhérente à ce type de système, qui serait le fait d’une minorité. Il est aussi tout à fait possible que certaines femmes y demandent des césariennes de convenance (les Anglais les appellent « too posh to push », littéralement « trop snob pour pousser »).

Par ailleurs, je pense que la sage-femme qui s’occupe de vous à l’hôpital est plus motivée puisque c’est elle qui fera votre accouchement au lieu de passer la main au dernier moment. De plus elle aura l’esprit plus tranquille si elle sait que tout rapidement accessible si les choses tournent au boudin, et que du coup elle aura tendance à repousser autant que possible une intervention. Tout ceci peut à mon avis expliquer au moins en partie pourquoi il y a moins de césariennes dans le public, alors même que c’est là que vont les cas pathologiques. C’est d’ailleurs ce que constate cette étude réalisée par le ministère de la Santé : les établissements de niveau 1 ont tendance à pratiquer plus de césariennes « de sécurité » (comprendre : pas forcément nécessaires mais au cas où mieux vaut être paré) que ceux de niveau plus élevé. 

Cet article a bénéficié des lumières de la poule accoucheuse, que je vous avais présentée ici.

Faire un plan de naissance ?

samedi, février 16th, 2008

accouchement La médicalisation parfois injustifiée des naissances conduit un nombre croissant de femmes à vouloir reprendre le contrôle de cet événement exceptionnel. Un des moyens mis en oeuvre est la rédaction d’un plan de naissance. Il s’agit d’un document dans lequel la mère ou les deux parents expriment leurs souhaits quant au déroulement de l’accouchement, aux gestes qu’ils souhaitent voir pratiquer ou non, et à l’accueil de l’enfant. Un exemple peut être trouvé ici.

Personnellement, autant je trouve qu’il est absolument essentiel de réfléchir à la façon dont on souhaite que son bébé vienne au monde, autant je ne suis pas persuadée que ce soit la meilleure façon de le communiquer à l’équipe soignante. Le problème à mon sens est que les quelques exemples trouvés sur le net sont extrêmement directifs : « on fera ça, on ne fera pas ça ». Je suis bien consciente qu’il y ait un certain nombre de mères et de parents qui se soient sentis mal accueillis et infantilisés par le personnel des maternités, et je ne veux en aucun cas minimiser leur souffrance, mais j’ai peur que ce retour de balancier soit un peu extrême. Si vous arrivez à la maternité persuadés que médecins, sages-femmes et infirmières sont un mal nécessaire qu’il va falloir contenir par tous les moyens possibles et imaginables, et que de toute façon ils n’y connaissent rien et ne pensent qu’à vous rendre malheureux, ils risquent de vouloir vous donner raison ! Par ailleurs, l’accouchement est par définition complètement imprévisible, donc arriver avec un plan bien défini peut souvent conduire à des déceptions. N’oublions pas non plus que certaines pratiques dont on a peut-être abusé et qui déchaînent l’ire des partisans de la naissance naturelle (césarienne, épisiotomie, ocytocynes, forceps etc), sont inévitables dans certains cas. Si les femmes et enfants morts en période périnatale sont si rares dans notre société, c’est aussi grâce à elles.

Pour autant, faut-il aller accoucher « les yeux fermés » en se reposant totalement sur le corps médical ? C’est à chaque mère de se poser la question de ce qu’elle aimerait pour son accouchement, sur ses priorités (par exemple sur la péridurale). La préparation à l’accouchement, surtout si elle est assurée par la maternité choisie, est un bon moment pour échanger avec les sages-femmes et voir les possibilités proposées par l’établissement, ainsi que la politique générale du service. C’est aussi l’occasion de poser ses questions et de voir comment les souhaits de chacune peuvent être respectés ou non dans ce cadre. Il est aussi utile d’en discuter avec le père (ou la personne qui viendra avec la mère le jour J), afin de voir avec lui quelle pourra être sa place (inutile de vous battre pour qu’il coupe le cordon si la seule pensée lui donne des hauts-le-coeur), et aussi pour qu’il puisse vous aider à faire respecter vos choix. On tend à l’oublier, mais on est plus impressionnable allongée à moitié nue et tenaillée par les douleurs des contractions.

C’est la démarche que j’ai suivie personnellement, et le jour J j’ai rapidement proposé aux sages-femmes de garde qu’on discute de la façon dont je voyais les choses. Elles ont très bien accueilli mes demandes et j’ai vraiment senti qu’elles faisaient tout leur possible pour les satisfaire. Chaque geste pratiqué a fait l’objet d’une discussion préalable, et je trouve que cela fait toute la différence. Et j’étais dans un grand hôpital public parisien de niveau 3 (le plus haut niveau de médicalisation), pas vraiment le style accouchement sous-marin avec les dauphins au son des djembés. Mettre les choses par écrit n’est pas forcément rhédibitoire (surtout si vous avez peur d’oublier certains points dans la panique du moment), je pense que c’est plutôt la façon de présenter les choses qui fait la différence.

Mais n’oublions pas que toutes ne sont pas concernées par ces propos: on peut être clouée au lit pour menace d’accouchement prématuré et ne pas faire de préparation, accoucher tellement vite qu’on a à peine le temps de dire bonjour à la sage-femme, se faire proposer une césarienne pour une raison médicale si évidente que la discussion ne peut porter que sur d’autres sujets… Et vous ?

(BD : Stone soup de Jan Eliot)