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Entre leurs mains

dimanche, décembre 15th, 2013

 J’ai eu la chance d’être invitée à l’avant-première du film Entre leurs mains, un documentaire sur l’accouchement à domicile. J’y allais un peu nez au vent, n’ayant pas trop suivi le projet, et j’ai eu une très bonne surprise. Après quelques minutes, j’ai été happée et je n’ai plus vu le temps passer. D’habitude je n’aime pas trop les documentaires militants (même quand ils militent pour des causes que je soutiens), qui ont une fâcheuse tendance à en faire des tartines aux dépens de l’honnêteté intellectuelle la plus basique. Ce n’est pas le cas d’Entre leurs mains, qui fait un excellent travail, tout en sobriété et en finesse. J’ai aussi beaucoup apprécié l’équilibre délicat entre l’émotion et les arguments rationnels (ainsi que l’absence des chants mayas chers à mon amie 10 lunes). Très simplement, le film suit quatre sages-femmes qui ont fait ce choix d’accompagner des femmes et des couples dans leurs projets de naissance physiologique et respectée, à la maison ou en plateau technique. Il aborde aussi bien les raisons qui poussent les femmes dans ce choix, les questions que suscite cette approche de la naissance (tant du côté parents que du côté sage-femme), que les obstacles qui s’empilent contre elle.

Quelques mots d’abord sur l’accouchement à domicile (AAD) et l’inévitable question de la sécurité. On parle là d’une pratique extrêmement définie et cadrée, et pas comme on l’entend souvent d’un retour en arrière ou d’accoucher « comme les Africaines » (qui comme chacun sait forment un grand tout homogène). En réalité, il s’agit plutôt d’accoucher comme les Allemandes, les Suissesses, les Néerlandaises, les Anglaises… Les femmes qui font ce choix sont soigneusement sélectionnées en amont grâce au suivi prénatal : sont exclus les jumeaux (ou plus !), les bébés en siège, les prématurés et toutes les pathologies. Elles doivent également pouvoir être transférées facilement vers une maternité en cas de complication. La présence continue auprès de la femme de la sage-femme, avec les compétences et le matériel appropriés, permet une détection précoce des problèmes pouvant survenir en cours de travail. L’Association nationale des sages-femmes libérales récapitule tout cela dans sa charte de l’AAD.  Par ailleurs, la revue Cochrane sur le sujet, publiée en 2012, conclut qu’en l’état des connaissances… on ne peut pas conclure. Globalement il faut être vigilant sur les études sur le sujet qui mélangent souvent plusieurs types de naissances à domicile : non planifiées, avec une variété d’accompagnement (aux USA notamment il y a plusieurs « sortes » de sages-femmes, aux compétences différentes)…

Personnellement, ce que j’ai vu en filigrane tout le long du film et dans le débat qui a suivi, c’est le féminisme, même si le mot n’a jamais été prononcé. Des femmes qui se battent pour faire respecter leurs choix et leur corps, ça vous dit quelque chose ? Des femmes qui se battent pour offrir cette liberté, cette autonomie à d’autres femmes (les sages-femmes sont majoritairement des femmes même s’il y a aussi des hommes) ? Se battre est bien le mot, puisque tout est fait pour décourager ces pratiques. Au delà de l’opprobre qui pèse tant sur les femmes (forcément folles inconscientes) que sur les sages-femmes (des sorcières, voire des gourous sectaires), et qui use même les meilleures volontés, il y a la résistance active du reste du système de santé : les maternités qui refusent les inscriptions des femmes ayant un projet d’AAD (alors que c’est justement la condition de la sécurité), les femmes en transfert mal accueillies, les plateaux techniques qui restent fermés aux sages-femmes libérales (sauf de très rares exceptions)… et surtout l’assurance, obligatoire pour tout professionnel de santé, qui monte à 20 000 € par an pour pratiquer l’AAD, ce qui est totalement inenvisageable dans les conditions actuelles de leur rémunération (une sage-femme qui va se rendre disponible 24h/24 7j/7 pour accompagner une femme qui accouche, aussi longtemps que nécessaire, touchera 313,60 € de la Sécu, incluant le suivi des suites de couches). Ainsi ces sages-femmes travaillent à la limite de la légalité, risquant de fortes amendes, de la prison et la radiation de l’Ordre des sages-femmes (soit l’interdiction d’exercer leur passion et surtout leur gagne-pain).

Clarifions également un autre malentendu : personne dans le film (ou dans les défenseurs de l’accouchement physiologique que je connais d’ailleurs) ne milite pour interdire la péridurale ou pour imposer une nouvelle façon de faire aux femmes. Il ne s’agit surtout pas de faire de l’accouchement une nouvelle épreuve de bonnematernitude. L’objectif est d’une part que les femmes bénéficient d’informations leur permettant un choix éclairé, et d’autre part que ce choix ne soit pas purement virtuel. A mon sens, le problème relève de plusieurs difficultés :

  • les réticences de certains professionnels de santé à remettre en cause leurs pratiques, en dépit des preuves scientifiques de leur inutilité voire de leur nocivité (ainsi le monitoring continu entraîne plus d’interventions sans diminuer la mortalité infantile par rapport au monitoring intermittent, ainsi l’utilisation du Syntocinon augmente le risque d’hémorragie de la délivrance, etc), le tout mâtiné d’un certain paternalisme
  • un système de santé qui pense faire des économies sur le dos des femmes en remplaçant les sages-femmes par des machines-qui-font-PING (poke les Monty Python -à voir ABSOLUMENT)
  • l’inflation du risque médico-légal qui se retourne contre les patientes, les médecins et sages-femmes étant généralement poursuivis pour n’être pas intervenus plutôt que pour l’avoir fait inutilement

Le film en outre ne veut absolument pas opposer l’AAD à la naissance à l’hôpital, mais demande leur coexistence, ainsi qu’une meilleure prise en compte de la physiologie dans les maternités. Au delà des quelques inévitables sombres connards, il y a dans les hôpitaux une large majorité de gens qui font du mieux qu’ils peuvent avec les contraintes qu’ils subissent (de moyens, mais aussi de formation insuffisante sur l’accouchement physiologique -point bien abordé dans le film).

En tant que femme, en tant que féministe, je pense que ce film doit être aussi largement diffusé que possible. Il est intéressant de noter qu’il n’a pu voir le jour que grâce au soutien financier des particuliers, parmi lesquels une large majorité de femmes, si j’en crois le générique de fin. Il faut que les femmes et les filles (et aussi les hommes) sachent qu’une naissance peut être un évènement puissant et paisible, très loin des représentations hystériques qu’on en donne habituellement. Il faut mettre parmi les revendications féministes de premier plan : « une femme qui accouche, une sage-femme » (j’en avais déjà parlé il y a un moment, et c’est apparemment le cas au Royaume-Uni, d’après une des sages-femmes du film). Il n’est pas acceptable que 85% des femmes qui subissent une épisiotomie ne soient pas consultées (voire même pas informées). En France on est à 800 000 naissances par an : même en enlevant les naissances multiples et celles qui ont la « chance » d’accoucher deux fois dans l’année, ça fait quand même un paquet de femmes concernées.

Pour voir le film : il sera diffusé (en version courte) pendant les vacances sur Public Sénat (qui fait partie des financeurs, ayant identifié la dimension politique du sujet). Les dates sont disponibles ici (je comprendrai que ce ne soit pas votre priorité le 24 décembre à 22h30…). J’étais bien entourée pendant la projection, et mes camarades sages-femmes ont eu la souris plus vive que la mienne pour donner leur avis :

Pourquoi accoucher sans péridurale ?

lundi, juin 18th, 2012

 Malheureusement pour le reste de ma vie, j’adore Twitter. Je trouve ça génial pour découvrir plein de trucs, et pour discuter avec des gens d’horizons variés. Le problème, c’est qu’en 140 caractères c’est parfois un peu juste pour développer une argumentation. Ainsi, l’autre jour je me suis vite trouvée limitée pour expliquer à @Cathyciel ce qui pouvait pousser une femme apparemment saine d’esprit à souhaiter volontairement accoucher sans péridurale. Et puis après mon récit de la naissance de Pouss2 qui a convaincu environ 150% des lecteurs de l’inanité d’un tel projet, je me suis dit que je devais au Grand Equilibre de l’Internet Mondial de remettre un peu les choses à plat sur ce sujet.

En préalable, je veux dire que je ne suis absolument pas contre la péridurale en général, qui est une avancée médicale majeure ; j’ai moi-même beaucoup apprécié d’en bénéficier pour mon premier accouchement. Par ailleurs, je pense que personne n’a à justifier de son choix de la prendre ou de ne pas la prendre : personne n’a à justifier les choix qu’elle a pu faire (ou pas) pendant son accouchement. Le but de ce billet n’est pas non plus de faire un classement des bonnes et des mauvaises naissances ; je suis convaincue que c’est à chacune de trouver ce qui est une bonne naissance pour elle-même, en fonction de ses attentes, de ses peurs, de sa santé et de celle de son bébé, des possibilités qui lui sont accessibles, et que sais-je encore. Je vais donc simplement essayer de faire une petite liste des raisons qui peuvent pousser à ne pas prendre la péridurale, encore une fois non pour convaincre la terre entière d’y renoncer mais pour essayer de donner une vision plus équilibrée que « vous voulez avoir mal ou pas ? ». Cette liste est un peu à la Prévert, mais je ne pense pas qu’il soit utile de hiérarchiser les différents points qui me semblent par nature éminemment subjectifs. N’hésitez pas à témoigner en commentaire sur ce qui vous a poussée à vouloir éviter la péridurale.

  • Peur des aiguilles : la péridurale c’est deux piqûres (anesthésie locale puis pose du cathéter), dont une avec à peu près la plus grande aiguille de l’arsenal médical (si on vous propose de la voir réfléchissez-y à deux fois !). Et cela implique d’avoir une perfusion posée. Donc si on est phobique de la piqûre, on y réfléchit à deux fois.
  • Peur des complications directes de la péridurale : même si c’est le pain quotidien de l’anesthésiste en maternité, c’est un geste qui peut avoir de rares conséquences gravissimes (genre mort ou paralysie) et d’autres un peu plus fréquentes et moins graves (chutes de tension, nausées, fièvre…). Pour certaines femmes ces risques même très improbables sont inacceptables. Voir par exemple ce document de la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation pour plus de détails (même s’il date un peu).
  • Mauvaise expérience : pour certaines femmes dont ce n’est pas le premier enfant, une péridurale lors d’un premier accouchement a pu être mal vécue, que ce soit sur le moment (inefficace, tremblements, chute de tension, latéralisation, etc) ou après (brèche dans la dure mère…). Sans compter les aspects plus psychologiques (impression de ne plus être actrice, d’être déconnectée de son bébé, dépendance accrue au personnel médical ou aux machines -pour uriner notamment, etc) ou l’incrimination de la péridurale comme ayant déclenché des interventions mal acceptées (forceps, épisiotomie…), mais nous allons revenir sur ces deux points plus en détail. Tout ceci peut aussi être vécu par procuration, dans le sens où c’est une mauvaise expérience vécue par une (ou plusieurs) autre(s) femme(s), plus ou moins proche(s) de la parturiente, qui oriente le choix de celle-ci.
  • Crainte que la péridurale n’affecte le déroulement de l’accouchement : ce n’est pas une vue de l’esprit mais la conclusion de la revue Cochrane publiée par Anim-Somuah et al en 2011 sur l’analgésie péridurale pendant l’accouchement dont vous pouvez lire le résumé, en français et en anglais, grâce à un simple clic (et si vous êtes tenté par les 120 pages du texte, @EmmanuellePh a dégoté une copie ici). Pour ceux qui ne connaissent pas, la collaboration Cochrane est une organisation à but non lucratif dont la mission est de réaliser des analyses aussi exhaustives que possible de la littérature médicale pour évaluer les meilleures pratiques. A partir des données de 38 études qui ont été réanalysées pour l’occasion, cette méta-analyse conclut qu’en moyenne, la péridurale allonge la durée de la 2ème phase de l’accouchement (entre la fin de la dilatation du col et la sortie du bébé) et augmente le risque de l’administration d’ocytocine de synthèse (dont il a récemment été montré qu’à son tour elle augmente le risque d’hémorragie du post partum). Elle est aussi associée à un risque accru d’extraction instrumentale (comme les forceps) et de césarienne pour souffrance foetale (pour les césariennes en général il y a également une tendance mais non significative). De façon plus intuitive, certains pensent que la douleur pousse la femme à prendre la position qui sera la plus favorable à la progression du bébé (en étant la moins douloureuse).
  • Crainte que la péridurale n’affecte l’allaitement et/ou l’établissement du lien mère-bébé : cet aspect est plus délicat car loin de faire l’unanimité dans la littérature scientifique. On manque d’études comparant l’accouchement avec un minimum d’interventions et l’accouchement plus médicalisé (avec péridurale notamment) : ainsi la méta-analyse d’Anim-Somuah et al comporte surtout des études où on a comparé la péridurale à d’autres formes d’analgésie plutôt qu’à un accouchement peu médicalisé. Ainsi, on voit souvent citée une étude selon laquelle les brebis accouchant sous péridurale ne s’occuperaient pas de leur petit. Moyennant un peu de spéléologie googueulienne, j’en ai trouvé au moins le résumé, qui est nettement plus nuancé que cette conclusion sans appel (cela dépend du timing de la péridurale et de la parité de la brebis : première naissance ou pas, et ça n’est pas forcément irréversible). On sait que la péridurale peut affecter les processus hormonaux pendant l’accouchement, et notamment la sécrétion d’ocytocine (voir par exemple Rahm et al 2002), mais l’importance de ces processus dans l’établissement du lien mère-enfant chez l’humain reste controversée. De même, la réalité d’effets directs sur l’allaitement ne fait pas l’objet d’un consensus (voir par exemple Gizzo et al 2012 ou Dozier et al 2012).
  • Raisons religieuses ou spirituelles : nous avons tous en tête le fameux « tu enfanteras dans la douleur » biblique ; outre certains extrémismes religieux ou sectaires qui refusent par principe certains gestes médicaux, il peut aussi y avoir une vue du corps féminin et/ou du processus d’enfantement comme sacrés et ne devant pas faire l’objet d’interférence. Pour d’autres il peut y avoir une volonté de connexion à sa part animale, à ses instincts profonds.
  • Volonté de garder la maîtrise : évidemment la maîtrise d’un accouchement est un concept bien illusoire, mais certaines femmes ne veulent pas déléguer l’événement et pouvoir décider à leur guise de marcher, manger, boire, uriner ou bouger. La péridurale entraîne des restrictions plus ou moins fortes, d’une part car elle peut inhiber certaines fonctions (difficultés pour bouger ou uriner) et d’autre part car elle entraîne une surveillance plus rapprochée (monitoring, tension) qui entrave les possibilités de bouger. L’interdiction de boire et manger ne semble pas forcément justifiée au vu des dernières études (Singata et al 2012,  Sleutel & Golden 1999).
  • L’accouchement vu comme un accomplissement : pour certaines femmes, la sensation de puissance, de réussite à la suite d’un accouchement n’ayant pas nécessité d’intervention compense largement la douleur ressentie. Ce besoin de se dépasser, de transcender ses capacités physiques, est souvent comparé à un défi sportif, comme un marathon ou la conquête d’un sommet.
  • Douleur supportable : ce n’est pas moi qui témoignerai sur ce point (hélas ! ) mais il y a des femmes qui ne ressentent simplement pas le besoin de l’anesthésie pendant leur accouchement. Il est dommage que dans certains cas on leur suggère avec insistance de la prendre quand même, au cas où elles auraient mal plus tard…
A une femme enceinte qui se pose bien légitimement la question, je dirais qu’il faut envisager la possibilité de ne pas avoir la péridurale lors de l’accouchement et s’y préparer. Cela peut être volontairement, suite à une contre-indication (permanente -genre tatouage mal placé- ou temporaire -fièvre au moment de l’accouchement par exemple) ou à cause d’un problème d’organisation (anesthésiste pas disponible au bon moment, accouchement rapide…). En outre, il arrive que la péridurale marche mal ou pas du tout, cela peut généralement être résolu mais pas toujours dans les délais de l’accouchement. C’est d’ailleurs souvent une souffrance bien supérieure à celle d’un accouchement volontairement sans péridurale. Par ailleurs l’omniprésence de la péridurale dans certaines maternités (parfois plus de 90% des naissances) fait que ni les lieux ni le personnel ne sont prévus pour accompagner au mieux un accouchement sans péridurale : imposer les mêmes protocoles (perfusion, monitoring continu etc) à une femme qui n’a pas de péridurale accroît souvent sa souffrance.
Enfin, je ne peux pas finir ce billet sans évoquer ce que je perçois comme une dérive de notre système de santé, à savoir l’utilisation généralisée de la péridurale pour pallier le manque de personnel et en particulier de sages-femmes dans les maternités. Ainsi, la sage-femme de garde doit s’occuper de plusieurs parturientes en même temps et n’a généralement pas les moyens d’apporter le soutien et la surveillance que demande une femme qui n’a pas d’anesthésie. Cela entraîne un cercle vicieux avec les jeunes sages-femmes qui voient peu ou pas d’accouchement physiologique et n’apprennent pas cet art particulier. Or comme on l’a vu, en moyenne la péridurale apporte un certain nombre de complications. Une amélioration des résultats français en termes de périnatalité pourrait passer d’une part par l’amélioration des techniques de péridurale pour en diminuer les effets indésirables et d’autre part par envisager que tous les accouchements n’ont pas vocation à avoir lieu sous anesthésie. Encore une fois, cette simple demande s’impose : une femme, une sage-femme !  
Minute autopub Me, myself and I : j’avais parlé de péridurale il y a quelque temps (2008 !), vous pouvez y jeter un oeil à partir du premier billet ici. Et sur un tout autre sujet, si vous l’aviez raté, j’ai publié il y a quelque temps un article invité chez Ça fait genre ! sur le sexisme des dessins animés.

 Image : Le fermier : « Mais de quoi parles-tu ? Ponds tes oeufs ! »  La poule : « Non ! Je veux une péridurale »

La rééducation périnéale

jeudi, mai 10th, 2012

Ce billet a été écrit à vingt doigts avec la merveilleuse Dix lunes, la sage-femme qui te donne envie d’avoir autant de gosses si c’est elle qui s’occupe de toi. Il a été préparé suite à la demande de Mme Déjantée (qui réussit à donner envie d’avoir cinq enfants) qui souhaitait que ce sujet fasse l’objet d’un billet Guest sur les Vendredis intellos. Vous le retrouverez donc (outre ici en version intégrale) chez Dix lunes et sur les Vendredis intellos. Après une première partie générale pour tracer les grandes lignes sur le sujet, un échange de points de vue entre la femme (moi) et la sage-femme (Dix lunes -qui n’en est bien sûr pas moins femme).

D’abord, le périnée, c’est quoi ? A ne pas confondre avec le péroné (qui en fait s’appelle la fibula, faut suivre), nous signale Wikipedia, qui le définit fort poétiquement comme « l’ensemble des parties molles fermant le détroit inférieur du pelvis ». En gros, et pour ce qui nous intéresse aujourd’hui, ce « plancher » contient en particulier un ensemble de muscles qui a pour grandes fonctions d’une part le soutien des organes du petit bassin, soit utérus, vessie et rectum (sous peine de prolapsus, nom savant de la descente d’organes), et d’autre part le contrôle des sphincters (urètre, vagin/canal éjaculateur et anus). Messieurs, inutile de prendre cet air dégoûté, vous en avez un aussi.

Et alors, c’est quoi son problème ? La partie musculaire du périnée est mise à rude épreuve tant par les hormones de la grossesse que par l’accouchement, mais aussi par la ménopause. Certaines interventions (forceps, épisiotomie… mais aussi expression abdominale, d’ailleurs formellement déconseillée par la Haute autorité de santé) ou complications (déchirure, gros bébé -bien qu’en soi ce ne soit pas forcément une complication !) lors de l’accouchement peuvent accroître cette fragilisation des tissus. Concrètement, sans aller jusqu’à la descente d’organe, cela peut se manifester par des problèmes plus ou moins sévères (fuites urinaires, incontinence aux gaz, diminution des sensations sexuelles…).

Alors, on fait quoi ? C’est là qu’intervient la fameuse rééducation périnéale. En France du moins, car si la rééducation périnéale est facilement proposée (et donc remboursée)  à toute femme ayant accouché, l’existence même d’une telle thérapie reste embryonnaire dans d’autres pays occidentaux (voir par exemple ce témoignage édifiant d’une Américaine). Elle est fortement recommandée même si vous avez accouché par césarienne, et avant de reprendre le sport. La nécessite d’une rééducation périnéale doit toujours être évaluée lors de la consultation postnatale – six à huit semaines après l’accouchement – même si ce n’est que pour reprendre une activité sportive modérée (cf l’inoxydable trio marche-yoga-natation).

Petit aparté : mais si les forces de l’évolution ont bien fait leur boulot et façonné le corps de femmes pour donner la vie, ne suffirait-il pas de respecter la physiologie pour éviter d’avoir à rééduquer le périnée ?

  • Il est clair qu’un certain nombre des pratiques actuelles d’accompagnement des accouchements sont délétères pour le périnée : outre les interventions citées plus haut, la poussée en inspiration bloquée (dite de Valsalva) et/ou dirigée et la position imposée sont par exemple identifiées comme des facteurs de risque (voir par exemple Albers et al 2006 ou Albers et Borders 2007). Je ne dis bien sûr pas qu’il faut se passer totalement de ces pratiques, mais simplement qu’elles ont souvent un impact sur notre périnée : peut-être plutôt réfléchir au rapport risque-bénéfice avant de les mettre en oeuvre.
  • Par ailleurs notre mode de vie n’est pas très « périnée-friendly », nous vivons avachis sur le canapé dans une sédentarité quasi-totale entre-coupée par ci par là d’efforts violents et inadéquats (ah c’est caricatural ?), au lieu de vivre accroupis en marchant quotidiennement de longues distances tout en portant des poids importants de façon plus physiologique (quoi c’est aussi caricatural ?).
  • Enfin notre société valorise un corps hyper maîtrisé, y compris dans l’excrétion des fluides corporels et autres gaz. On ne transpire pas, on n’a pas ses règles (et si jamais on perd du sang bleu transparent, merci), on ne pète pas… Il ne semble pas impossible que ça sentait le fennec dans les grottes préhistoriques et qu’on n’était pas à une petite fuite urinaire près. Et puis l’espérance de vie étant bien moindre, les femmes mourraient sans doute avant d’arriver au prolapsus…

Qui s’en occupe ? La rééducation peut être prescrite par un médecin ou par une sage-femme (tant qu’elle fait suite à une grossesse pour le second cas) ; elle est principalement pratiquée par les kinés et les sages-femmes libérales (plus rarement proposée en maternité).

Quand s’y mettre ? On attend généralement la visite de contrôle des six semaines post-natales (avec le médecin ou la sage-femme) ; même si certaines maternités donnent l’ordonnance en suite de couches, il vaut mieux attendre d’avoir fait le point à cette occasion, sans compter qu’il faut laisser le temps aux tissus et organes de se remettre en place (et honnêtement qui a envie de travail endovaginal juste après l’accouchement ?). On peut soit profiter du congé maternité/parental (il est admis de venir avec son bébé et les professionnels sont souvent équipés pour cela), soit attendre la reprise du travail.

Comment ça marche ? Plusieurs techniques existent, et je ne suis pas certaine que leur efficacité relative ait été beaucoup étudiée (PubMed n’est pas très bavard sur le sujet, à part un article sur l’efficacité de l’électrostimulation sur les dyspareunies du post partum). Selon l’endroit où vous habitez (et la densité de professionnels de santé), vous n’aurez d’ailleurs peut-être pas le choix de la méthode.

  • L’électrostimulation par sonde : vous avez vu les pubs pour Sport élec au télé-achat ? C’est un peu le même principe : on stimule les muscles du périnée par des courants électriques envoyés par une sonde endovaginale. Paraît que non, c’est pas vraiment comme un vibro.
  • Le biofeedback avec sonde : une des techniques les plus pratiquées. Toujours avec la sonde endovaginale, mais qui là est passive. Vous contractez vos muscles et voyez le résultat sur un écran, au final c’est un peu comme un jeu vidéo mais assez répétitif.
  • Connaissance et maîtrise du périnée (CMP) : il s’agit d’une technique basée sur la visualisation dont le côté indirect et imagé peut être déroutant. En effet, on visualise certains mouvements à différents endroits du périnée sans pour autant tenter de bouger les muscles, et les images (herse, pont levis, vase, etc) ne sont sans doute pas adaptées à toutes. Mais elle présente l’avantage de travailler très spécifiquement et précisément les différents muscles.
  • L’eutonie : si on en croit l‘institut d’eutonie, « l’eutonie propose une recherche adaptée au monde occidental, pour aider l’homme de notre temps à atteindre une conscience approfondie de sa propre réalité corporelle et spirituelle dans une véritable unité. » Bon ça ne parlera pas forcément à tout le monde mais lisez ici le témoignage de Petit Scarabée qui a l’air d’avoir apprécié.
Il y a encore d’autres techniques plus ou moins directes : la pratique du yoga peut contribuer, avec les bandhas ; les boules de geisha sont régulièrement citées pour allier plaisir et rééducation. Les Anglo-saxons parlent beaucoup des exercices de Kegel, qui sont une version un peu rudimentaire du biofeedback (mais pas forcément avec la sonde). Quelle que soit la méthode choisie, il y a généralement une part importante de travail à la maison entre les séances si on veut voir des résultats significatifs.
La poule :
Personnellement, deux enfants, deux histoires. Le seul point commun : j’ai attendu d’avoir repris le travail pour m’y mettre, dans le premier cas parce qu’il n’y avait pas de place plus tôt, dans le second parce que je ne me voyais pas y aller avec Pouss2 ET Pouss1 (3 ans à l’époque et pas encore scolarisé). Je dois dire aussi que c’était dans les deux cas une rééducation « de confort », n’ayant pas eu de traumatisme périnéal majeur (pour Pouss1 une petite déchirure, pour Pouss2 rien du tout) ni de gros dysfonctionnement (juste quelques fuites urinaires pour parler simplement). J’imagine qu’on aborde ça un peu différemment lorsqu’on souffre de problèmes plus sévères.

J’ai donc d’abord testé le biofeedback avec sonde chez une sympathique kiné. Elle m’examinait d’abord pour faire le point et m’aider à trouver les muscles à contracter puis je faisais mon jeu vidéo avec la sonde (différentes intensités et durées de contraction, d’abord allongée puis assise et debout). A propos la sonde est personnelle et s’achète en pharmacie (remboursée sur ordonnance). La kiné recommandait de la garder dans sa poche avant de venir pour qu’elle soit à la température du corps, seul hic elle la passait sous l’eau froide avant de l’installer ce qui ruinait tout l’effet… Et je faisais les exercices entre deux séances (sur le quai du métro… regardez bien les femmes qui ont l’air un peu constipé en attendant le métro…), avec globalement un bon résultat.

Après mon deuxième accouchement, j’ai un temps caressé l’idée de me rééduquer toute seule, en faisant les exercices, en laissant le temps au temps. Mais finalement, après presque 2 ans, avec l’impression persistante que ma vessie avait parfois des velléités d’indépendance, j’ai pris le temps de retourner voir ma sage-femme, celle qui avait accompagné ma grossesse et mon accouchement, et ainsi de tester la méthode CMP. Je dois dire que la première fois que j’en ai entendu parler par une copine j’ai carrément halluciné (« votre urètre est comme un soliflore », mais oui bien sûûûr). Mais après tout, en y réfléchissant l’idée n’est pas si bête, et je l’avais même déjà expérimentée par la pratique du chant. En effet, le périnée, comme le chant, mobilisent des muscles qu’on ne voit pas ; il est impossible d’imiter le mouvement d’un autre, et de pouvoir comparer ce qu’on fait à une référence. La visualisation est donc un moyen assez efficace de contrôler ces organes qu’on utilise plutôt de façon inconsciente, la difficulté étant de trouver la bonne image pour chacun (et aussi simplement d’accepter de se prêter sincèrement à l’exercice). J’ai beaucoup apprécié de pouvoir rapidement acquérir une certaine autonomie et surtout la grande finesse de l’approche, qui va bien plus loin que le simple « serrez mes doigts » et permet de travailler indépendamment les différentes zones (urètre, anus, vulve, vagin etc). On peut ensuite privilégier les exercices dont on a le plus besoin en fonction de sa situation personnelle.

Dix lunes :

La professionnelle que je suis est habituée à l’air mi hagard mi goguenard de la dame qui découvre la CMP. Lorsque nous nous connaissons déjà, le  captal confiance acquis aide à passer cette première phase. Avec un peu de bonne volonté, la femme accepte la règle du jeu, visualiser, ne rien faire, et au départ, ne rien sentir… le plus souvent, il faudra huit à quinze jours d’exercices quotidiens avant de percevoir quelque chose. Mais une fois cette phase là arrivée, bingo, de nouveaux muscles se révèlent et cette conscience sera définitivement acquise, facilement ravivée par quelques exercices si le cerveau venait à se lasser. Et le bénéfice de cette finesse des sensations ne se limite pas à rétablir la continence urinaire…

La poule :

En bref la rééducation périnéale, et en particulier la seconde version, a été pour moi aussi une façon de me (ré)approprier mon corps. Le tabou encore persistant sur la masturbation (même si maintenant toute femme qui se respecte se doit d’avoir une collection de sex toys) interdit implicitement aux femmes l’accès à leur propre vagin. On nous vend même des tampons avec applicateur pour s’assurer qu’on n’y mette pas les doigts ! Par contre il nous est présenté comme normal d’écarter les cuisses chez le médecin et de le laisser faire ses affaires. Eh bien moi j’attends le médecin (ou la sage-femme !) qui proposera une petite caméra ou appareil photo pour me faire une visite guidée de mon anatomie, qui au lieu d’un laconique « tout va bien c’est normal » prendra le temps de me montrer mon col, de m’aider à l’examiner moi-même, qui m’aidera à comprendre comment j’ai été déchirée et comment exactement se place la cicatrice, etc. Idéalement comme je serais chez la même personne dans la durée on pourrait comparer des photos avant/après l’accouchement, pendant la grossesse, etc. On pourrait être aidée pour choisir une coupe menstruelle, un diaphragme (c’est déjà le cas même si peu de professionnels le proposent) ; on pourrait voir les fils du DIU si on choisit d’en porter un, ce qui aiderait aussi à se l’approprier et à mieux comprendre comment il se positionne… Techniquement je ne pense pas qu’il faille un matériel très sophistiqué, ce qui manque c’est sans doute le temps et probablement l’envie chez certains. Et vous, ça vous intéresserait ?

Dix lunes :

Pour être honnête, l’idée était d’écrire un article à deux mains… Et comme je suis de loin la plus paresseuse des deux, j’ai proposé à la poule pondeuse de commencer…  Quand elle m’a envoyé « sa » partie, je ne pouvais que constater : je n’avais rien à ajouter. C’était clair, argumenté, documenté, avec tous les liens qui vont bien… J’aurais surement pu trouver quelques anecdotes pour illustrer tout ça mais à quoi bon ?

Et puis ce dernier paragraphe m’a rendu l’inspiration. Les féministes avaient déjà usé de ce moyen pour se réapproprier leur corps, mieux le connaitre, le comprendre.

En France, dans les années 70, on apprenait aux femmes la mise en place d’un spéculum, on leur proposait de regarder leur vagin, leur col dans une glace. J’ai bénéficié de cet accompagnement mais ce souvenir était resté tapi dans un tiroir mémoriel de mon adolescence, je ne l’avais jamais proposé. Je l’ai fait à quelques occasions depuis cette prise de conscience. Quelques regards interrogateurs sinon franchement étonnés, quelques refus polis et quelques pourquoi pas.. mais une autre fois.

 Au final, est-ce aux professionnels de santé d’assurer cette fonction de réappropriation ? L’essentiel est peut-être  de nous montrer suffisamment disponible pour que la demande puisse si besoin émerger.

A l’inverse, après un accouchement, je suggère régulièrement aux femmes de regarder leur sexe dans une glace, avec ou sans mon aide. Souvent, elles préfèrent avec. Certaines ne l’ont jamais fait et craignent de ne pas bien comprendre ce qu’elles vont voir. D’autres l’ont déjà fait mais craignent de ne pas se reconnaitre. Une cicatrice douloureuse, des points qui tirent, une sensibilité particulière ; à chaque fois, la réalité apaise.. ce n’est finalement « que » ça. Et l’imaginaire plus ou moins terrifiant qui s’était construit cède devant une cicatrice un peu rouge, un fil, un hématome, images finalement banales et beaucoup plus rassurantes.

Mais le temps de l ‘examen et plus encore le temps de la rééducation sont beaucoup plus larges que la simple éducation musculaire. Le « hors sujet »  le plus souvent abordé, surtout dans les semaines postnatales est celui de la sexualité ; la libido plus ou moins éteinte, la confiance en son corps plus ou moins atteinte, l’attente de l’autre plus ou moins pressante… Comment se retrouver ou se redécouvrir.

Enfin bien sur, pour répondre aux interrogations de la poule pondeuse, nous pouvons accompagner les femmes dans une meilleure compréhension de leur anatomie, le repérage du col, des  fils d’un dispositif intra utérin. Nous pouvons les aider à choisir un diaphragme – de  la bonne adaptation de la taille dépend son efficacité. Nous pourrions montrer comment utiliser une coupe menstruelle…

A vous de savoir exprimer vos besoins. Aidez nous à vous aider !

 

Photo : Les Pyrénées, à ne pas confondre non plus.

Et bienvenue aux lectrices (y a-t-il des lecteurs ?) d’Enfant Magazine !

Encore un don : le cordon

vendredi, juillet 15th, 2011

Un des (nombreux) sujets d’arrachage de cheveux pour les futurs parents : faut-il donner ou pas le sang du cordon ombilical ? Déjà le dilemme est tout relatif : la procédure n’est pour le moment proposée que par une quarantaine de maternités, inégalement répartie dans l’Hexagone. Pour ma part, n’ayant pas été confrontée au problème pour les naissances des poussins puisque les maternités où j’ai accouché ne le proposaient pas, je n’avais pas trop creusé le sujet. L’idée me semblait plutôt belle : sauver des vies par un don altruiste et désintéressé et de coût négligeable, qui dirait non ? Mais en fouillant dans les archives du blog Midwife thinking (un incontournable découvert récemment grâce à la lettre périnatalité et dont certains articles sont traduits ici), je suis tombée sur ce billet (malheureusement pas traduit).

Que nous dit cette sage-femme ? Elle récuse le terme de « sang du cordon » qui lui semble trompeur : le bébé, le cordon et le placenta forment un tout cohérent en ce qui concerne la circulation sanguine, c’est donc du sang du bébé qu’il faudrait parler. Le prélèvement est en outre difficilement compatible avec l’attente de l’arrêt total de cette circulation bébé-placenta pour couper le cordon (même si on peut envisager certaines pratiques intermédiaires). Or dans un autre billet (celui-là disponible sur le blog français), elle nous explique tout l’intérêt pour l’enfant de maintenir aussi longtemps que possible cette connexion (et elle n’est pas la seule à défendre cela, on peut aussi citer le Dr David Huchton par exemple, un obstétricien qui en parle dans le très réputé British Medical Journal). En outre, le volume à prélever est loin d’être négligeable : Rachel Reed -la « sage-femme qui réfléchit »- nous dit qu’il est au minimum de 45 mL, tandis que le site français sur le don de sang de cordon en demande 70. Un rapide calcul nous indique qu’un nouveau-né de 3,5 kg a un volume sanguin d’environ 268 mL, le prélèvement représente donc au minimum 15 à 25% (1/4 !) du volume total (les chiffres utilisés pour le calcul sont compatibles avec une coupure « tardive » du cordon, donc représentent plutôt une estimation haute du volume sanguin total). Pour comparaison, le don du sang minimum (400 mL) représente environ 7% du volume total d’un homme de 80 kg. Et Rachel Reed nous informe que le prélèvement de sang maximum recommandé chez un nouveau-né est de 5% du volume total, soit environ 15 mL. L‘information donnée aux parents qui envisagent ce don quant à ses conséquences semble donc légèrement elliptique. Il est en tout cas abusif de prétendre que le sang qui n’est pas donné sera jeté : il pourrait également profiter au bébé à qui il appartient.

Quels sont les bénéfices d’un tel don ? Ce qu’on recherche ici ce sont les cellules-souches, qui permettent de soigner environ 75 maladies (et notamment des cancers comme certaines leucémies). On peut distinguer trois grands types de destinataires de ces greffes de cellules souches :

  • l’enfant lui-même : cela se fait via un stockage (onéreux) dans des banques privées qui sont interdites en France. En outre les cas où il est possible d’utiliser ses propres cellules souches sont extrêmement rares : on estime dans une fourchette de 1/400 à 1/200 000 la probabilité que cela arrive au cours de la vie d’une personne. Selon les avis, on va d’une assurance-vie pour l’enfant à une exploitation fort lucrative des parents prêts à tout pour bien faire. A noter que Rachel Reed pratique en Australie, où ces banques privées fleurissent et engendrent d’importants enjeux financiers : beaucoup des prélèvements pratiqués là-bas le sont dans cette optique (et les sages-femmes y sont souvent rémunérées au prélèvement par les entreprises).
  • un proche malade : c’est notamment ce qu’on appelle le bébé-médicament ; autorisé en France sous certaines conditions. Je n’en parlerai pas, je suis intimement convaincue que dans ce type de situation si difficile chacun fait du mieux qu’il peut et n’a absolument pas besoin qu’une pétasse de blogueuse vienne lui faire la morale en prime.
  • un anonyme : c’est ce qui est privilégié en France, comme pour les autres dons du même type (sang « normal », organes…). L’idée de pouvoir fournir à ces personnes (500 transplantations en 2009) de façon anonyme et gratuite le traitement dont elles ont besoin est bien sûr à défendre, et sur ce point je suis plutôt heureuse de l’organisation française qui limite les dérives mercantiles.

Comment obtenir alors ces précieuses cellules souches ? Outre le don de cordon, on peut procéder grâce à un don de moëlle osseuse. Mais ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi on ne s’intéresse pas plus à une source quasi-infinie de cellules souches facilement récupérables (surtout si comme moi vous utilisez une coupe menstruelle), sans aucun effet indésirable sur la donneuse : le sang menstruel. Certaines firmes américaines ne s’y sont d’ailleurs pas trompées en créant d’ores et déjà des banques privées de sang menstruel (alors même qu’aucune technique thérapeutique n’a encore été mise au point). Mais il existe plusieurs types de cellules-souches, et il n’est pas dit que celles du sang menstruel soient interchangeables avec celles du sang de cordon. Cryo-Cell, une firme de biotechnologies (à l’origine de la banque de sang menstruel C’elle), a d’ailleurs testé avec succès l’utilisation conjointe de cellules-souches menstruelles et ombilicales.

Tel qu’il est pratiqué en France actuellement, le don du sang de cordon est donc un acte altruiste et généreux, mais dont on peut craindre qu’il ne soit fait au détriment du bébé (même si l’immense majorité des nouveaux-nés français -y compris d’ex nouveaux-nés comme vous et moi- a subi et subit toujours un clampage précoce du cordon et ne semble pas s’en porter si mal, comme quoi c’est résistant ces petites bêtes…). Il est en tout cas inacceptable que cela continue à être présenté de façon si biaisée, en n’évoquant jamais le bénéfice potentiel pour l’enfant de garder le sang placentaire et d’attendre que le cordon ait fini de battre pour le couper. Il me semble donc crucial d’améliorer l’information qui l’entoure, et de développer (ou renforcer) les recherches autour d’autres sources de cellules-souches, comme la moëlle osseuse et le sang menstruel, ou encore le lait maternel (vous noterez ici que les femmes ont des super pouvoirs ; à quand des cellules-souches dans le sperme -en fait ce serait plutôt l’inverse ?). Il faut aussi travailler sur la pratique, pour prélever moins de sang, et de façon à laisser battre le cordon aussi longtemps que possible.

Pour ma part, n’étant pas enceinte le choix est théorique, mais je crois que je refuserais le don du sang de cordon tant qu’il n’est pas possible de le faire sans priver le bébé d’une quantité non négligeable de sang. Par contre je veux bien donner mon sang menstruel à qui le demandera, ma graisse (dont je fais des réserves importantes à cette seule fin bien sûr), du lait (enfin quand j’allaite), du sang « normal » (quand l’occasion se présente, et ça fait un bail) et mes organes (sous certaines limites). Il faudrait que je m’inscrive au registre des donneurs de moëlle ; quant au don d’ovocytes j’y ai réfléchi mais j’avoue qu’entre les contraintes que ça impose et le concept même (j’aurai un peu l’impression -très irrationnelle et personnelle- de donner un de mes enfants) je ne suis pas très chaude. Et vous ? Ce n’est bien sûr pas un concours, d’autant plus que n’importe qui ne peut pas donner n’importe quoi, mais je trouve toujours intéressant d’échanger sur quoi donner, ou pas, et pourquoi.

Photo : Comment parler de sang sans vous offrir une photo de ces charmants vampires ? (et pour ceux qui ne connaissent pas encore Vampire Diaries, c’est comme une boîte de Pringles : tu sais que ça n’a pas grand intérêt mais tu ne peux pas t’empêcher de la finir)

(Et avec mes excuses pour le titre de billet foireux)

Point technique : le blog a maintenant une page Facebook que vous pouvez « aimer ». Pour le moment je ne m’en occupe pas beaucoup (point positif : vous ne serez pas trop spammés), mais vous pouvez aussi en faire un espace pour discuter, partager des infos ou poser des questions aux autres poulettes quand vous ne trouvez pas de billet sur le sujet, par exemple. Vous pouvez aussi me suivre sur Twitter (où je suis plus active) et même me retrouver sur Google + (et au passage m’expliquer à quoi ça va me servir et comment, merci). Si vous voulez me parler à moi et rien qu’à moi, le plus sûr reste de m’envoyer un mail à lapoulepondeuse @ gmail.com

I have a dream

mercredi, décembre 8th, 2010

sagefemme E-zabel témoignait l’autre jour sur son blog de son expérience du baby blues et de la dépression du post-partum. Il est évidemment crucial d’informer les femmes de la possibilité de l’un comme de l’autre afin de les préparer au mieux à les affronter le cas échéant ; un tel billet est un formidable moyen de communiquer sur cela et je ne vais pas ici le décrire. Ce qui m’interroge, c’est la part de responsabilité de l’entourage de la jeune mère dans ces cas. En effet, autant il est important de savoir qu’il y a des processus hormonaux qui peuvent influencer l’humeur et le comportement, de façon parfois très forte, autant je trouve que les hormones ont parfois bon dos. Une jeune femme qui pleure à la maternité ? C’est les hormones, c’est le baby blues ! Êtes-vous sûr que ça n’a rien à voir avec le fait que depuis 6 heures du matin un(e) parfait(e) inconnu(e) entre dans sa chambre toutes les demi-heures environ pour des choses aussi urgentes que la prise de température ou une photographie de son bébé ? Alors que son bébé venait enfin de s’endormir du sommeil du juste vers 5h53 ? Ou encore cette vague impression d’avoir Hiroshima entre les jambes grâce au duo gagnant forceps/épisio ? Le fait qu’il faille rendre des comptes précis sur la quantité de lait ingérée (à la goutte près) et de selles produites (description quantitative et qualitative) sur les dernières 24 heures, qui conduit généralement les mères inexpérimentées à culpabiliser d’avoir oublié si bébé a tété 12 ou 17 minutes le sein gauche à 3h54 du matin et celles qui ont plus de bouteille à mentir ? Qu’on suggère insidieusement qu’elle affame son bébé si elle l’allaite et qu’elle l’empoisonne si elle le biberonne ? Qu’elle rentre chez elle pour trouver un bazar sans nom et ne peut compter que sur elle-même pour assurer un semblant d’ordre au foyer (heureusement ceci est de moins en moins fréquent, n’est-ce pas Messieurs ?) ? Vous devez commencer à voir où je veux en venir ?

Je ne suis pas professionnelle de santé, je ne suis pas psychologue, je ne suis pas dans une association, je n’ai même pas eu de baby blues, ce qui vous donne une idée de ma légitimité sur la question, mais je voudrais partager et discuter ici quelques idées avec vous, pour mieux entourer les femmes autour de la naissance et ainsi limiter et prévenir tant baby blues que dépression du post partum.

A mon avis, une des clés de la prévention c’est la sage-femme. Pas n’importe quelle sage-femme, ma sage-femme, ta sage-femme, leur sage-femme… En clair : une femme, une sage-femme. C’est ce que j’ai eu pour la grossesse, la naissance et les suites de couches de Pouss2 et c’est tellement logique. L’accompagnement global n’implique absolument pas d’accoucher chez soi sur une peau de mouton en brûlant de l’encens et en priant mère Gaïa d’épargner son bébé. On peut avoir une péridurale, une césarienne, passer une semaine à la maternité… tout est possible en fonction des besoins et envies de la femme et de son enfant ! Bien sûr le fait que ce soit cette sage-femme qui soit présente à l’accouchement, pendant toute sa durée, et exclusivement auprès de cette femme, peut poser des problèmes d’organisation (même si les sages-femmes en accompagnement global s’y engagent), qui pourraient être résolus en créant des petites équipes (deux à cinq sages-femmes par exemple dont il y a toujours une de garde ou d’astreinte), de telle façon à ce que la femme en travail et la sage-femme qui l’accompagne se connaissent. Pour moi, bien plus qu’une batterie d’examens, c’est là la vraie sécurité médicale autour de l’accouchement. Ce n’est pas une démédicalisation de la naissance que je souhaite, c’est une autre médicalisation. La sage-femme est compétente pour déceler toute pathologie et y répondre, que ce soit en pratiquant les premiers gestes (réanimation du bébé, délivrance artificielle, prescription de médicaments, etc) ou en passant le relai au médecin. Et ce dernier cas ne veut pas dire que la sage-femme ne peut pas garder sa place auprès des parents, afin d’assurer cette continuité si précieuse, qui lui permettra aussi de déceler les premiers signes d’une pathologie.

Je vais caricaturer*, mais à votre avis qui est plus à même de détecter une dépression du post-partum ? Le gynéco que vous voyez un quart d’heure dont la moitié les jambes en l’air ou la sage-femme qui vous reçoit trois quarts d’heure à parler de votre grossesse et de votre accouchement ? Et lors d’un accouchement, qui voit en premier que quelque chose ne va pas : la sage-femme qui court entre plusieurs femmes en travail en surveillant des monitorings continus (dont l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé reconnaît d’ailleurs qu’ils n’ont pas de meilleurs résultats qu’une écoute discontinue tout en entraînant plus d’interventions comme les césariennes) ? ou celle qui est auprès de la parturiente, qu’elle a appris à connaître au cours des derniers mois, et qui verra tout de suite une pâleur, un tremblement ou tout autre signe subtil potentiellement annonciateur d’un problème** et déclenchera immédiatement les tests médicaux ad hoc pour confirmer ou infirmer cette suspicion ? A qui la femme aura-t-elle plus de facilités à dire son ressenti, à confier une intuition que quelque chose ne va pas pendant l’accouchement, à avouer ses faiblesses, son découragement, ses difficultés après la naissance? Quelqu’un qu’elle a vu trois fois entre deux portes ou quelqu’un avec qui elle a noué une vraie relation de confiance ?

Il a été établi à de nombreuses reprises l’importance des processus psychologiques pendant la grossesse (certains hélas poussant le raisonnement un peu trop loin et incriminant la mère pour absolument tout et n’importe quel problème, ce qui en plus de ne pas être basé sur grand chose d’autre que leur pifomètre est hyper culpabilisant pour les femmes qui n’y peuvent pas grand chose). Alors pourquoi ne pas s’appuyer beaucoup plus largement sur les sages-femmes, qui ont la double compétence d’accompagnement humain ET médical ? Pourquoi ne pas leur permettre ainsi d’exercer pleinement leur profession, en respectant les besoins psychologiques de la mère tout en garantissant sa sécurité physique et celle de son bébé ?

En pratique, cela ne veut pas du tout dire que tout le monde doit accoucher de la même façon, mais simplement pouvoir trouver la sage-femme (ou la petite équipe) avec qui vivre sa grossesse, son accouchement et les suites, à la maternité, à la maison ou en maison de naissance, en fonction des souhaits des parents et des impératifs liés à d’éventuelles pathologies. Les sages-femmes hospitalières pourraient voir le mode d’organisation refondé pour travailler en ce sens, quant aux sages-femmes libérales une plus grande place pourrait leur être accordée, tant dans les maternités (avec l’ouverture plus généralisés des plateaux techniques, permettant aux femmes d’accoucher à la maternité mais en n’étant accompagnée que par la sage-femme libérale, comme je l’ai fait pour Pouss2) qu’à domicile et dans les (futures) maisons de naissance. A mon avis cela serait une belle piste pour s’assurer que chaque femme a les soins dont elle a réellement besoin : ni trop, ni trop peu ; un suivi sur mesure plutôt que des protocoles rigides et pas toujours efficaces.

Concrètement, si vous êtes enceinte ou si vous souhaitez une grossesse, je ne peux que vous encouragez à chercher une sage-femme, qui deviendra votre sage-femme. Dans l’état actuel du système français, c’est souvent plus simple de chercher une sage-femme libérale, qui aura généralement plus de temps à accorder en consultation (la mienne prévoyait 40-45 minutes par consultation pré-natale, ce qui se traduisait généralement par une heure !) et qui pourra venir vous voir à la maison après la naissance (et pourquoi pas à la maternité aussi, même si ce n’est pas vraiment dans nos mœurs ?). Malheureusement, elle ne pourra que rarement vous accompagner pendant la naissance, mais si cette possibilité vous intéresse cela vaut vraiment le coup de chercher. Elle peut en tout cas dès le début de la grossesse faire le point avec vous sur ce que vous souhaitez pour votre accouchement et vous aider à choisir une maternité dans votre coin en fonction de cela. Bien sûr, si vous n’accrochez pas, n’hésitez pas à changer, je crois vraiment que le facteur humain est capital dans cette relation. N’hésitez pas à faire cette démarche, même si vous êtes dans un cas particulier (jumeaux par exemple) ou pathologique (menace d’accouchement prématuré, suspicion de malformation, etc). Pour trouver une sage-femme, outre le bouche à oreille, vous pouvez consulter les pages jaunes, l’annuaire de l’ANSFL et celui du site Périnatalité (qui est d’ailleurs plein d’infos intéressantes). Au niveau financier, les consultations sage-femme sont remboursées par la sécurité sociale ; certaines pratiquent des dépassements d’honoraires (remboursables par les mutuelles en fonction de votre couverture) mais pas toutes.

Voici enfin quelques articles du blog autour de ce sujet :

Une femme, sa sage-femme : ce n’est peut-être qu’un rêve, mais je crois qu’il est à notre portée. Et vous ?

*Ces questions un peu provocatrices ne visent pas à remettre en question les personnes et leurs compétences mais plutôt l’organisation de notre système de soins

**Dans Au monde (dont vous trouverez une fiche de lecture ici), Chantal Birman raconte qu’elle a repéré une détresse fœtale qui n’était pas visible par les examens classiques par le rire inhabituel de la mère.

Photo : affiche trouvée sur le site de l’Association Corporative des Etudiants Sages-femmes

There will be blood

samedi, mars 6th, 2010

Eric-true-blood-7701652-864-1296 Attention : billet anti-glamour. On a déjà évoqué ici ou la question des saignements autour de la grossesse mais je me disais qu’un petit récapitulatif sur la question pourrait intéresser les poules de la basse-cour.

Pendant la grossesse, en théorie, on ne saigne pas du tout. On parle d’ailleurs d’aménorrhée (absence de règles), qui est un des principaux signes précoces de la grossesse. Cependant, comme toujours la théorie et la pratique sont deux choses séparées et on peut avoir des « règles anniversaires » en début de grossesse, sans que ce soit inquiétant. Il arrive également que la nidation s’accompagne de petits saignements. Ensuite, un col un peu sensible peut saigner un peu après un examen, voire spontanément en fin de grossesse (notamment lorsqu’il y a des contractions). Tant que cela reste ponctuel, peu abondant et que le sang est frais (bien rouge), sans autre signe d’alerte (pertes vaginales inhabituelles, température etc), ce n’est pas un motif d’inquiétude non plus (bien sûr si vous êtes quand même inquiète il ne faut pas hésiter à consulter). Le bouchon muqueux peut aussi être accompagné d’un peu de sang lorsqu’on le perd.

Au moment de l’accouchement, là encore les contractions peuvent provoquer quelques saignements, mais les choses sérieuses ne doivent normalement commencer qu’après la sortie du bébé. Une surveillance rapprochée s’impose alors afin d’éviter l’hémorragie de la délivrance, qui reste une des principales complications de l’accouchement pour la mère (en France première cause de mortalité maternelle). Une fois que le placenta et les membranes amniotiques sont sortis dans leur intégralité, le risque est fortement diminué. La plupart des maternités ont d’ailleurs un protocole de délivrance dirigée, avec injection d’ocytocine artificielle au passage des épaules du bébé et sortie du placenta par traction contrôlée du cordon, ces pratiques ayant montré qu’elles permettaient de réduire le risque d’hémorragie. A noter qu’une tétée précoce peut également provoquer des contractions (les fameuses tranchées qui n’ont pas grand chose à voir avec les poilus de Verdun) et aider la délivrance. On perd environ 250 à 300 ml de sang (à partir de 500 on parle d’hémorragie).

Le post-partum est marqué par des pertes de sang (les lochies) pendant plusieurs semaines. Elles sont généralement très abondantes dans les jours qui suivent l’accouchement puis diminuent rapidement. Vers 12-15 jours arrive le petit retour de couche, qui correspond à la cicatrisation de la zone d’insertion placentaire. Il passe généralement inaperçu puisqu’il est rare de s’arrêter de saigner avant, et les saignements sont peu abondants. Rappelons qu’à cette période les protections périodiques internes (comme la coupe ou les tampons) ne doivent pas être utilisés pour écarter les risques d’infection.

Le retour de couche marque le retour de la fécondité mais attention, comme c’est l’ovulation qui provoque les règles, lorsqu’il arrive c’est généralement qu’on a déjà ovulé. On peut donc tomber enceinte AVANT le retour de couche. Celui-ci arrive six à huit semaines après l’accouchement si on n’allaite pas, et n’importe quand si on allaite. Si on ne souhaite pas tomber enceinte, il faut donc prendre ses précautions à partir de trois semaines après l’accouchement environ. Contrairement à ce qu’on entend parfois, il est possible de se faire poser un stérilet sans avoir eu son retour de couche (le stérilet aux hormones n’est pas contre-indiqué pour l’allaitement), après la visite post-natale des six semaines. Si on allaite on peut recourir à la MAMA (méthode de l’allaitement maternel et de l’aménorrhée), mais attention les conditions sont restrictives :

  • bébé de moins de six mois
  • tétée exclusive au sein et à la demande (pas de biberon, pas de tétine)
  • pas plus de quatre heures entre les tétées
  • pas de retour de couche

(les mauvaises langues diront que le simple respect de ces conditions suffit à remplir la seule méthode de contraception fiable à 100% : l’abstinence)

Et bien sûr il reste la pilule (ou ses dérivés : patch, anneau, implant…) et les méthodes barrière en local (préservatif, diaphragme, spermicides…), sans compter les méthodes d’observation (comme la méthode sympto-thermique, même si j’ai du mal à trouver des infos sur son application pendant cette période particulière). Je réalise qu’on a un peu dérivé du sujet initial mais je trouve qu’on n’en fait jamais trop sur la contraception (cf ici).

Photo : Comment parler de sang sans rendre hommage à Eric, si injustement oublié ici. Et puis c’est la journée des droits de la femme, non ?

Le retour précoce à la maison

mardi, janvier 26th, 2010

Jouve_nativite_Arles_2005JPG Comme promis dans le billet précédent, et pour continuer avec les aventures palpitantes de l’Oeuf alias Pouss2, voici quelques infos sur le retour précoce (voire ultra-précoce ?) de la maternité. Je vous rassure, c’est beaucoup plus cool que l’épisode précédent. Pour ceux qui ont raté le début, Pouss2 est né au petit matin et nous avons quitté la clinique avant 16 heures. A dire vrai on serait bien partis plus tôt mais nous avions l’opportunité d’avoir la visite pédiatrique obligatoire des 7 jours dans la foulée donc on y a passé quelques heures de plus (cette visite peut être signée par une sage-femme mais elle comme nous préférions que Pouss2 soit quand même vu par un médecin). Et on en avait déjà marre : alors qu’on n’était même pas dans une vraie chambre mais planqués dans une salle de pré-travail, on a quand même été réveillés trois ou quatre fois par des visites pas super intéressantes (« oui bonjour c’est juste pour vous dire que finalement le pédiatre passera dans une heure »).

Concrètement, il faut remplir plusieurs conditions pour être libéré de la maternité rapidement. La première est bien sûr que l’accouchement se soit bien passé et que la mère et le bébé aillent bien. Le poids de naissance important de Pouss2 lui a valu une dextro peu après la naissance, qui s’est avérée excellente et a permis d’obtenir l’aval du pédiatre pour partir. Ensuite il faut trouver une sage-femme libérale qui assure le suivi à domicile. Pour nous, facile, c’est celle qui accompagne la grossesse depuis le début. Enfin, la mère doit être délivrée des tâches ménagères pour une durée au moins égale à celle qu’elle aurait passé à la maternité. Pour ce dernier point, c’est en général le père qui s’y colle mais selon les configurations familiales cela peut être quelqu’un d’autre. Chez nous, le Coq a carrément pris trois semaines de congé car nous devons déménager dans la foulée. Donc entre deux lessives il fait les cartons…

Pour le suivi médical, il est modulé en fonction des besoins. Notre sage-femme est passée deux fois, le lendemain du retour puis deux jours plus tard. Elle s’assure de la bonne santé physique et morale de la mère et du bébé, tout comme à la maternité. Pour la mère : évolution de l’utérus, problèmes éventuels avec l’allaitement, débriefing sur l’accouchement… Pour le bébé : examen et auscultation, pesée (ou pas, selon la situation), test de Guthrie, vérification de la fermeture du canal artériel… En cas d’urgence ou de problème inopiné, on peut bien sûr la joindre à tout moment (comme pour l’accouchement). Notre sage-femme étant au sein d’un groupe avec d’autres sages-femmes libérales, nous avons aussi la possibilité d’en appeler une autre si par hasard elle n’était pas disponible. Cette organisation est particulière mais il n’est pas rare que les sages-femmes libérales soient associées à deux ou trois. Enfin en cas de gros pépin on peut toujours filer aux urgences (habitant Paris ce n’est jamais bien loin) ou appeler le SAMU bien sûr.

Côté administratif, c’est le Coq qui est allé déclarer Pouss2 à la mairie le lendemain ; l’avantage c’est qu’au moins c’est lui qui apparaît sur l’extrait de naissance et pas le nom d’un obscur employé de l’hôpital que ni nous ni Pouss2 n’avons jamais vu. On peut aussi noter que la formule est plutôt économique pour la Sécu qui jusqu’ici a deux visites de sage-femme à rembourser plutôt que deux ou trois jours d’hospitalisation.

En ce qui nous concerne (et je dis « nous » car sur ce point le Coq est aussi moteur que moi), le choix est sans aucun regret : on est vraiment mieux à la maison. Moi je peux me caler au mieux sur les rythmes du sommeil de Pouss2 et personne ne vient interrompre ma grasse matinée pour me demander à quelle heure il a tété cette nuit (je sais plus, je n’ouvre qu’un œil pour lui mettre le sein en face de la bouche) ou me tirer sur le téton pour être sûr qu’il y a vraiment du lait dedans. Je mange ce dont j’ai envie à l’heure où ça me convient. Je ne suis pas confinée au lit dans une petite chambre un peu étouffante (certes il faut se reposer mais de là à être 24h/24 alitée… pas indispensable quand l’accouchement s’est bien passé). J’ai toutes les affaires dont j’ai besoin à portée de main. Le Coq aurait du choisir entre passer du temps avec Pouss2 et moi et s’occuper de Pouss1, sans compter les temps de trajet (40 minutes de métro dans chaque sens) ; quant à Pouss1 il aurait peu vu sa mère pendant quelques jours (voire même pas du tout avec l’interdiction des visites due à la grippe A ?). Sans compter qu’on n’a plus de nounou donc ç’aurait été une galère de plus pour s’organiser pendant les visites du Coq. Je pense que ça tamponne un peu le choc de l’arrivée du petit frère puisque pour le moment ça veut dire rester avec papa ET maman à la maison. Et je trouve ça aussi plus agréable pour les visites que la petite chambre où on ne sait pas où s’asseoir (vu que le père a déjà pris le magnifique fauteuil en skaï authentique).

On voit aussi que c’est un deuxième, on est plus relax pour s’en occuper. En ce qui me concerne j’ai compris après Pouss1 que le bébé « de base » veut tout le temps téter et jamais dormir dans son couffin, donc je m’émerveille à chaque sieste que Pouss2 fait dans son transat. L’allaitement également est plus simple, je gère et je vis beaucoup mieux les petites difficultés puisque ce sont plus ou moins les mêmes que pour Pouss1. C’est vrai que pour Pouss1 je ne sais pas si j’aurais pu rentrer si vite, pour le premier on a souvent moins confiance en soi et en ses capacités à s’occuper d’un tout petit. Mais maintenant non seulement le Coq et moi sommes sereins sur ce point mais je sais également qu’autant ça ne me pose aucun problème de « lâcher » mon bébé pour que son père s’en occupe (« Chériiiiii, je crois qu’il a fait cacaaaaaa »), autant le laisser à une auxiliaire de puériculture que je ne connais pas, j’ai beaucoup de mal. Donc sur ce point-là aussi je me repose mieux (par contre le Coq…).

En bref je ne regrette absolument pas d’avoir choisi l’accompagnement global, notamment pour ce volet. Pour celles qui souhaitent une solution moins « extrême », vous pouvez négocier de rentrer après 24 ou 48 heures et demander une hospitalisation à domicile (HAD) avec suivi par une sage-femme libérale (de votre choix ou proposée par la maternité). Il faut savoir que les visites de cette sage-femme sont remboursées à 100% par la sécu (je n’arrive pas à retrouver combien et dans quel délai après la naissance mais la sage-femme pourra vous le dire) et à mon avis on aurait tort de s’en priver. C’est d’autant plus précieux si on allaite car ces sages-femmes sont généralement bien au point sur le sujet ; globalement cela permet d’avoir des conseils et des idées sur mesure pour votre famille dans votre maison. J’avais pris cette option pour Pouss1 et vraiment je ne l’ai pas regretté.

A plus long terme, je ferai la visite post-natale des six semaines avec notre sage-femme (plutôt que chez ma gynéco par exemple) : je pense qu’il est utile de pouvoir refaire le point sur l’accouchement « à froid » avec la personne qui l’a accompagné, de pouvoir prendre un peu de recul et de poser les questions sur tout ce qu’on n’a pas bien compris/digéré sur le moment. On n’a pas toujours la présence d’esprit pour cela dans les jours qui suivent la naissance et c’est dommage de rester avec des choses en travers de la gorge, surtout si les choses ne se sont pas déroulées comme on le souhaitait. Si vous n’avez pas retenu le nom de la personne (sage-femme ou obstétricien) qui était de garde pour votre accouchement, il est marqué dans le carnet de santé à la page sur la naissance.

Image : c’est un peu hors saison mais je suis sûre qu’ils auraient aussi voulu rentrer chez eux fissa…

La naissance de l’Oeuf

vendredi, janvier 22nd, 2010

eclosion Puisque ça semble intéresser la basse-cour, voici plus de détails sur la naissance (la ponte ? l’éclosion ?) de l’Oeuf.

Commençons par le détail des faits, en essayant de rester succincte. Dimanche en fin d’après-midi, j’ai rendez-vous avec la sage-femme pour une énième consultation de dépassement de terme. Elle me propose un décollement des membranes que j’accepte. Je rentre tranquillement à la maison où les contractions s’installent dans la soirée. Vers minuit, ma mère est arrivée pour garder le Poussin et la sage-femme prévenue, nous partons pour la maternité. La salle de pré-travail est très agréable, elle ressemble plutôt à une grande chambre d’hôtel avec un lit double, un canapé et une grande baignoire. Nous restons là plusieurs heures, au rythme du travail qui s’intensifie. La sage-femme écoute régulièrement le cœur du bébé et me propose différentes positions ou options pour mieux supporter la douleur (bain, ballon…), mais elle nous laisse tous les deux la plupart du temps. La douleur monte crescendo et j’ai de plus en plus de mal à la supporter. Le Coq alterne entre se faire broyer les mains et me masser vigoureusement les reins (j’avais des marques le lendemain…).

Après un dernier bain, je décide de passer en salle de naissance (on ne peut pas accoucher dans la salle de pré-travail car elle n’est pas au même étage que le bloc opératoire…) car j’ai peur de ne plus pouvoir bouger après. Arrivés là, la douleur devient carrément intenable. J’ai l’impression d’être dans un épisode de 24 heures face à Jack Bauer sauf que je n’ai pas la moindre idée de quoi lui dire pour qu’il arrête. Je ne trouve rien qui me soulage, je voudrais juste que ça s’arrête, même cinq minutes. La sage-femme m’explique que le bébé n’arrive pas bien à s’engager car la poche des eaux est très importante et l’empêche de progresser. En prime il se présente dos contre mon dos (en OS pour les intimes*), ce qui est moins favorable. Il peut y en avoir encore pour deux heures, et je ne vois déjà pas comment je vais pouvoir supporter la prochaine contraction (même en hurlant et en insultant tout le monde). J’essaie le gaz hilarant mais le masque m’étouffe, je n’arrive pas à le garder. La sage-femme propose soit de percer la poche des eaux soit d’appeler l’anesthésiste. Je prends la première option même si la seconde est plus que très tentante (mais je m’imagine que le temps total pour avoir l’anesthésie risque d’être proche du temps qu’il reste pour que le bébé sorte). La rupture de la poche est censée rendre les contractions plus douloureuses, mais dans mon cas cela les rend un poil moins intolérables. Je trouve une sorte de second souffle en me mettant à quatre pattes sur la table d’accouchement et en poussant un peu pendant les contractions. Je n’irais pas jusqu’à dire que ça va mieux, disons plutôt qu’au lieu d’envisager de sortir le bébé en m’ouvrant le ventre avec les dents je me dis que je pourrais peut-être tenir quelques minutes de plus. Le bébé en question progresse, j’essaie de l’accompagner ou au moins de ne pas me bloquer mais chaque nouvelle sensation semble encore plus douloureuse que la précédente. Il est à nouveau bloqué par un reste de col, que la sage-femme doit tenir pendant qu’une contraction lui permet d’avancer, tandis que je lui hurle d’arrêter (je vous laisse imaginer à quel point ce type d’opération peut être agréable). Finalement il arrive enfin au dernier passage, horrible sensation de brûlure qui me paraît interminable mais au moins la fin est là. La sage-femme me propose de toucher sa tête, je lui crie de le sortir, je veux juste que ce soit fini et vite. Et là, enfin, enfin, enfin, tout s’arrête. Il est 6h07.

Je m’allonge sur la table pendant qu’elle débobine le cordon (apparemment y en a qui faisaient des scoubidous pour passer le temps ces derniers jours) puis me donne le bébé. Sans doute le contre-coup de l’épreuve, je me mets à grelotter violemment, je suis transie de froid. La sage-femme craint que cela n’annonce un problème mais finalement un bon édredon suffit à me réchauffer pour faire la connaissance de l’Oeuf. Lui est très calme, il ne pleure pas et nous regarde. Le cordon a cessé de battre, la sage-femme le coupe (ni le Coq ni moi n’en avons envie). Le placenta est déjà décollé, je n’ai qu’à pousser quelques fois pour le faire sortir ; voilà au moins une source potentielle de problèmes facilement évacuée. L’Oeuf demande rapidement le sein et le tète goulûment. Tous les soins sont fait dans mes bras, à part la pesée bien sûr qui est faite sur la table d’à côté. La suite est beaucoup plus ennuyeuse et agréable : nous restons encore dans la salle, le temps de prendre le petit déjeuner, avant de remonter dans notre « chambre » de pré-travail, où nous attendons le pédiatre en dormant tous les trois sur le grand lit. Enfin vers 16 heures, toutes les formalités réglées (et déjà marre de la clinique), nous repartons tous les trois à la maison.

Voilà grosso modo pour les faits, le plus délicat étant maintenant d’essayer de prendre un peu de recul sur cette expérience et de tenter une sorte de bilan. Il s’agit bien sûr de ma petite expérience personnelle qui n’a pas valeur de généralité ; chacune vit les choses différemment. Evidemment, je ne peux pas m’empêcher de comparer avec la naissance du Poussin, bien différente puisque sous péridurale. Franchement, je ne m’attendais pas à souffrir autant. J’étais beaucoup plus sereine et joyeuse lorsque j’ai donné l’ultime poussée qui a fait sortir le Poussin ; je ne peux honnêtement pas dire que la naissance de l’Oeuf était le plus beau jour de ma vie. Et je n’ose pas imaginer ce que cela peut être de vivre une naissance sans péridurale avec un protocole rigide à supporter (monitoring continu, position imposée etc) ; en ce qui me concerne je pense que c’est purement et simplement de la torture. J’ai lu un certain nombre de récits de naissances physiologiques où les femmes racontent avoir enfin senti toute la puissance de leur féminité, et vécu une expérience quasi-mystique. Personnellement la puissance de ma féminité je la sens mieux avec une tenue séduisante qu’à quatre pattes les fesses à l’air à hurler que je n’en peux plus et à insulter tout le monde. Ce ne sont pas non plus des circonstances dans lesquelles je me sens fière et triomphante ; j’ai plus l’impression de m’en être pris plein la figure que de pouvoir me vanter d’avoir passé une épreuve difficile.

Ceci dit autant j’étais curieuse de cet aspect, autant ce n’était pas ma motivation première pour accoucher dans ces circonstances. Pour moi, il s’agissait de donner toutes ses chances à l’Oeuf pour avoir une naissance aussi physiologique que possible. Dans ce sens, c’est plutôt un succès. Ce n’était pas une naissance facile : gros bébé se présentant « mal », poche des eaux gênant la progression… L’absence de péridurale m’a « forcée » à me mettre à quatre pattes ce qui apparemment lui a permis de s’engager et de progresser efficacement, et même de faire le grand tour pour arriver dans la « bonne » configuration (présentation OP). Il n’est pas impossible qu’en d’autres circonstances il ait été nécessaire de recourir à une méthode instrumentale (forceps ou autres) pour l’aider à sortir. Je ne sais pas dans quelle mesure cela a joué, mais il est arrivé avec une tête parfaitement ronde et lisse, et un calme olympien (pas comme sa mère). Ceci dit son frère n’était pas dramatiquement différent sur ces points.

En ce qui me concerne, sur le plan physique, j’ai un gros bonus : mon Oeuf de 4,4 kg et 36 cm de périmètre crânien a laissé mon périnée intact, sans une égratignure. Très appréciable. D’après la sage-femme, la délivrance a été accompagnée d’une perte de sang minime, ce qui est également positif. Je récupère plutôt vite et bien, mais c’était aussi le cas pour la naissance du Poussin.

Finalement, si troisième il devait y avoir, je ne sais pas honnêtement ce que je ferais. Le Coq (qui trouve le récit un peu édulcoré : rajoutez ça et là une bonne dose de hurlements et autres menaces de vasectomie pour compléter le tableau) m’a déjà dit que ce serait avec péridurale ou sans lui, pour vous donner une idée du bon moment qu’il a passé (enfin il reste ouvert à la discussion). De mon côté j’ai déjà du mal à envisager de revivre ça, et encore moins sans lui. En toute honnêteté je ne sais pas si les bénéfices retirés valaient un tel prix pour moi. Mais on a du temps pour y réfléchir…

Quant à la suite des aventures avec le retour précoce à la maison, je vous en parlerai dans un prochain billet. En attendant il est temps de rebaptiser les poussins après l’éclosion de l’Oeuf : le Poussin devient Pouss1 et l’Oeuf Pouss2.

*Pour tout savoir sur les différentes présentations, voir le site de Césarine.

(Image : This is Broken)

Quand partir à la maternité

mardi, décembre 22nd, 2009

JustinChambers_DrKarev Autant le dire tout de suite, cet article ne concernent pas vraiment celles qui ont le projet d’accoucher chez elles. Mais comme elles ne représentent qu’environ 1% des accouchements en France, on peut en déduire qu’il reste donc un nombre non négligeable de femmes enceintes (et de futurs pères) qui se posent cette question.

Il y a en gros deux raisons d’aller à la maternité (hors des rendez-vous) :

  • pour accoucher
  • parce qu’on suspecte un problème pour l’enfant et/ou pour la mère

Pour le deuxième cas, les principaux signes d’alerte sont :

  • fièvre (supérieure à 38.5°C)
  • pertes de sang : il faut savoir cependant que le col de l’utérus étant très irrigué et plus fragile pendant la grossesse il n’est pas inquiétant d’avoir des pertes légères de sang frais après un examen, un rapport ou encore une bonne série de contractions.
  • pas de mouvement du bébé pendant 24 heures
  • contractions fréquentes et prolongées et/ou perte de liquide amniotique avant 37 semaines d’aménorrhée (bon pas de panique si on est à 36 SA et 4 jours…) : un début de travail prématuré doit conduire fissa à la maternité, où on pourra essayer de l’arrêter ou au moins de le retarder, le temps d’injecter des corticoïdes afin d’accélérer la maturation des poumons du bébé.

Il me semble aussi que les femmes enceintes, au fur et à mesure que le bébé grandit, ainsi qu’au fil des grossesses, développent une connaissance intuitive de leur bébé ; à mon avis il ne faut pas hésiter à consulter en urgence si on a vraiment le sentiment que quelque chose ne va pas.

Parlons maintenant du cas le plus général et le plus joyeux (c’est Noël après tout) : un bébé qui va bien, qui est à terme et qui a décidé de faire plus ample connaissance avec ses parents. On ne parlera pas ici des grossesses pathologiques pour lesquelles les recommandations sont à voir au cas par cas avec l’équipe médicale.

Rappelons déjà que les deux signes qui montrent que le travail se lance sont des contractions régulières et/ou la rupture de la poche des eaux. On dit de façon classique qu’il faut partir à la maternité dès qu’on perd du liquide amniotique (rupture franche ou fissure de la poche) ou quand on a des contractions toutes les 5 minutes depuis 2 heures pour un premier bébé (1 heure pour les suivants). Cependant il me semble qu’en fonction d’un certain nombre de paramètres, une femme aura intérêt à partir plus vite ou au contraire plus tard. La distance de la maternité, la garde éventuelle des aînés, le souhait d’une naissance physiologique ou d’avoir une péridurale aussi vite que possible, le rang de naissance (les accouchements sont censés être de plus en plus rapides, même si cela peut se rallonger après quelques enfants -le nombre exact étant sujet à débat et hautement dépendant de la femme) sont autant de facteurs qui doivent vous conduire à tempérer ces indications, à la hausse ou à la baisse.

Concernant la perte des eaux, on demande de venir rapidement à la maternité à cause du risque infectieux (le fœtus n’étant plus protégé par la membrane hermétique) ; ceci est cependant tempéré par les partisans de la naissance physiologique qui suggèrent qu’il y a plus de pathogènes à l’hôpital que chez soi et craignent les infections nosocomiales. Quelle que soit votre décision dans ce cas, surveillez la couleur et la consistance du liquide : s’il se teinte ou perd son aspect transparent et fluide partez rapidement. Ceci dit la rupture prématurée des membranes à terme (en français : quand on perd les eaux avant d’avoir des contractions) ne concerne qu’environ 10% des accouchements (même si dans les films cette proportion monte à environ 75%). Par contre, si vous perdez les eaux alors que les contractions ont déjà bien commencé il ne faut plus traîner car la naissance risque d’arriver assez vite. Et une fois la poche des eaux rompue il est fortement déconseillé d’aller à la maternité à pied (risque notamment de procidence du cordon). Si vous n’avez pas de voiture, sachez que la Sécu vous remboursera un trajet en ambulance ; les pompiers et le SAMU sont « gratuits » mais ils vont à la maternité la plus proche, qui n’est pas forcément celle où vous êtes inscrite.

Un écueil à repérer : le faux travail (ou pré-travail selon la façon dont on voit les choses), qui consiste en des contractions dites inefficaces car elles n’agissent pas sur le col, même si elles sont aussi douloureuses que des contractions de travail. Le test généralement recommandé consiste à prendre un bain chaud et/ou quelques Spasfon, en comprimés solubles ou en suppositoires (voir la posologie avec votre praticien habituel) : si ça s’arrête vous pouvez rester au chaud. Attention aussi à la perte du bouchon muqueux qui n’est pas en soi un signe d’accouchement imminent (ce sont des pertes visqueuses d’une délicate couleur marronnasse, un vrai poème). Cependant quand il fait chaud il peut être quasi liquide et ainsi se confondre avec du liquide amniotique. En cas de doute, la maternité doit normalement vous avoir donné le téléphone des salles de naissance où vous pouvez joindre une sage-femme de garde 24 heures sur 24 (sinon n’hésitez pas à le demander à la dernière consultation).

Enfin si malgré tout vous accouchez de façon impromptue chez vous ou en route, sachez que ces accouchements ultra-rapides sont généralement sans problème. Contrairement à ce qu’on voit dans les films, il n’y a généralement pas d’urgence à couper le cordon, prenez le temps de reprendre vos esprits. Si vous êtes chez vous et que tout se passe bien (bébé a l’air à peu près en forme, vous ne pissez pas le sang…), j’aurais tendance à vous suggérer d’appeler une sage-femme libérale pour venir évaluer la situation plutôt que les pompiers qui n’y connaissent souvent pas grand chose ; même s’ils sont grands beaux et musclés ce n’est généralement pas le moment où on veut en voir débarquer cinq dans son salon. Et pour information, le lieu officiel de la naissance (pour l’Etat civil) n’est pas l’endroit où le bébé est sorti mais celui où a eu lieu la délivrance (expulsion du placenta et des membranes).

Je vous ai préparé avec tout le sérieux et la rigueur scientifique qui me caractérisent un petit questionnaire pour vous aider.

A quelle distance êtes-vous de la maternité et quelles sont les conditions de trafic ?

a. J’habite à 3 minutes à pied.

b. Je suis à 20 minutes de voiture quand ça roule mais aux heures de pointe ça peut prendre 1h30.

c. Il y en a pour deux heures de route de montagne, certains cols seront peut-être fermés à cause de la neige, et la voiture démarre une fois sur deux.

d. La réponse d.

Quelle est votre situation familiale ?

a. C’est mon premier enfant et le papa a arrêté de travailler depuis 1 mois juste pour s’occuper de moi.

b. C’est mon deuxième enfant, il faut que je fasse venir quelqu’un pour le garder et le père travaille à 1 heure de chez nous.

c. C’est mon cinquième enfant, il faut que je dépose les aînés chez ma mère (qui ne conduit pas) à une heure de chez moi après être allée tous les chercher dans quatre écoles/crèches différentes et le père en a pour 3 heures à nous rejoindre.

d. La réponse d.

Quel est votre position sur la péridurale ?

a. Si quelqu’un s’approche avec une aiguille, je mords.

b. Je voudrais essayer sans ou au moins l’avoir le plus tard possible.

c. Peut-on l’avoir avant le début des contractions ?

d. La réponse d.

Comment s’est déroulée votre grossesse ?

a. C’est quoi une contraction ? ça veut dire quoi « col long, fermé, postérieur et tonique » ?

b. Cela fait un mois que j’ai régulièrement des contractions et on m’a dit que mon col était ramolli et un peu ouvert (un ou deux doigts).

c. Cela fait trois mois que je suis allongée/que je fais le poirier et que je prends des médicaments pour menace d’accouchement prématuré, il paraît qu’on voit déjà les cheveux.

d. La réponse d.

Comment voyez-vous votre maternité ?

a. Je veux y passer le moins de temps possible, l’odeur d’hôpital me donne la nausée et tous ces gens en blouse font sûrement partie du CMCM (Complot Mondial Contre Moi).

b. Je trouve le personnel plutôt sympa et j’adore la déco des salles de pré-travail.

c. C’est là que je me sens en sécurité : d’ailleurs si je pouvais j’habiterais dans un hôpital, c’est tellement plus prudent.

d. La réponse d.

Avez-vous déjà accouché ? Si oui combien de temps ont duré vos premiers accouchements ?

a. 72 heures sans compter les 15 jours de « faux » travail.

b. Entre 6 et 10 heures.

c. J’ai accouché au restaurant/sur le trottoir/à la Poste.

d. La réponse d.

Vous avez répondu à toutes les questions ? Passons donc aux résultats…

Si vous avez une majorité de a, vous pouvez probablement attendre d’avoir envie de pousser pour vous mettre en route.

Si vous avez une majorité de b, bonne chance pour savoir quand partir, vous avez à peu près autant de probabilité d’arriver beaucoup trop tôt que d’accoucher en route.

Si vous avez une majorité de c, allez à la maternité à 37 SA pour vous faire déclencher.

Si vous avez une majorité de d, vous devez arrêter de regarder cette vidéo en boucle.

Photo : C’est peut-être lui qui vous attend à la maternité (Joyeux Noël Clemys !).

Tokophobia

lundi, octobre 26th, 2009

munch_thescream Quelle femme n’a pas peur d’accoucher ? Même celles qui sont intimement convaincues que c’est un acte naturel pour lequel leur corps est fait ont leurs appréhensions pour la naissance. Il est vrai que les raisons d’avoir peur ne manquent pas : peur de mourir et/ou de perdre son bébé bien sûr, mais aussi peur de l’hôpital, peur d’avoir mal, peur de perdre sa dignité, peur d’avoir des séquelles, peur de certains gestes médicaux, et bien d’autres encore. Et ce bien que la naissance n’ait jamais été aussi sûre, tant pour la mère que pour l’enfant. Même si cette peur est plus ou moins présente chez tout le monde, elle peut prendre des proportions très importantes chez certaines (jusqu’à prendre plusieurs contraceptions simultanées voire renoncer à avoir un enfant) : on parle alors de tokophobie (si vous n’êtes pas rebutée par l’anglais vous pourrez lire de nombreux témoignages ici).

Sans aller jusqu’à ces extrêmes, il me semble que plusieurs facteurs peuvent entretenir cette peur :

  • Quelle représentation de la naissance dans notre société ? L’image principale qu’on en a, dans les médias notamment, est celle d’un passage difficile, sous haute surveillance médicale, qui ne demande qu’à partir en sucette. Dans les films on voit souvent la femme au moment crucial, échevelée, rouge et suante, entourée par un tas de blouses blanches qui lui crient « Poussez ! pousseeeeeeeeez ! » (apparemment les scénaristes n’ont pas lu Leboyer), le plan suivant représentant généralement la mère parfaitement coiffée et maquillée avec un « nouveau-né » de six mois dans les bras. Ou alors si vous êtes fan de séries médicales (comme la Poule…) il y aura entre les deux un passage plein de sang et de stress où le beau médecin sauvera in extremis Maman et bébé d’une mort fulgurante dans d’atroces souffrances sous le regard enamouré de la jeune infirmière/interne. Perturbant, et globalement pas très tentant.
  • L’entourage a également un rôle important : quelle femme n’a jamais entendu des récits d’accouchements terrifiants, avec douleurs insoutenables, mort évitée de justesse, déchirures du vagin jusqu’à l’anus et j’en passe. C’est peut-être une sorte de bizutage, mais en particulier quand on est enceinte on est abreuvée d’histoires plus gores et terrifiantes les unes que les autres (soit de première main, soit l’amie d’une amie dont la cousine a une tante qui…). Certes, il n’est pas très constructif d’enfermer les femmes enceintes au pays des Bisounours sous prétexte qu’il ne faut pas les stresser, mais on peut peut-être trouver un juste milieu non ? Evidemment les récits de l’entourage très proche (notamment les femmes de la famille) sont les plus percutants pour la future mère, qui se sent logiquement plus concernée (il y a une part de génétique dans le déroulement de la grossesse et de l’accouchement, même s’il y a bien sûr de nombreux autres facteurs à prendre en compte). Mais il peut aussi y avoir eu un film ou une image mal à propos qui gardent une empreinte durable.
  • Enfin bien sûr il y a le vécu d’une mère lorsque ce n’est pas sa première grossesse et qu’un accouchement antérieur s’est mal déroulé et/ou a été mal vécu (il y a des naissances qui sont sans problème d’un point de vue médical -le fameux « la mère et le bébé vont bien »- mais qui laissent un goût amer à la femme, voire au bébé) ; on peut aisément comprendre qu’on n’y retourne pas volontiers. Si la naissance a nécessité une intervention médicale importante, cela peut entamer la confiance de la femme en ses capacités pour donner naissance et ajouter à son angoisse.

La peur d’accoucher est donc probablement une des choses les mieux partagées par les femmes (et ne parlons pas des hommes…). Alors comment atténuer et gérer ces peurs, qu’on les ressente soi-même ou qu’on y soit confronté chez une autre ?

Tout d’abord, il me semble que comme la plupart des peurs et phobies, celle-ci a une part d’irrationnel qu’on ne doit pas juger ou moquer. La première chose à faire est au contraire de laisser la personne vider son sac et exprimer ses peurs : voir sa souffrance entendue et reconnue est un premier pas vers le soulagement. Le simple fait de formuler certaines peurs à voix haute en présence d’une personne bienveillante peut déjà permettre de les éliminer. Au delà, se documenter, tant sur l’accouchement en général que sur la façon dont les choses peuvent se passer à la maternité choisie (si on est enceinte) peut également faire tomber certaines craintes. N’oublions pas que les choses évoluent (même si parfois trop lentement), et qu’un certain nombre de pratiques redoutées par les femmes ont été abandonnées : si votre mère ou votre grand-mère vous explique qu’elle a du subir un lavement et être intégralement rasée, sachez qu’il y a peu de chances que ça vous arrive. Même s’il y a encore une grande disparité entre hôpitaux et praticiens, l’épisiotomie systématique semble elle aussi être en déclin. Visiter une salle de naissance, éventuellement voir certains instruments, cela peut aider. Par exemple lorsqu’on me parlait de la ventouse je visualisais le gros truc en caoutchouc pour déboucher l’évier, en fait le modèle obstétrical est nettement moins impressionnant. Bien sûr une phobie plus profonde est irrationnelle et ne pourra être levée par des arguments objectifs (tous les phobiques de l’avion se sont vus répéter 2 372 fois que c’est le moyen de transport le plus sûr bla bla bla, avec autant d’effet que de cracher dans un violon) : dans ce cas il faut envisager une psychothérapie si on souhaite traiter sa phobie.

Une échappatoire à cette peur de l’accouchement peut être pour certaines la césarienne. Il me semble qu’il faut éviter cela au maximum, et rappeler que pour une grossesse et un accouchement non pathologiques, la césarienne est plus risquée que l’accouchement par voie basse, tant pour la mère que pour l’enfant. Bien sûr il ne s’agit pas de diaboliser la césarienne, qui a sauvé et sauve tous les jours des femmes et des enfants, mais simplement de l’utiliser à bon escient. Or pour beaucoup de personnes la césarienne paraît plus sûre que l’accouchement par voie basse, et c’est cette idée reçue qu’il faut à mon avis battre en brèche (si le sujet vous intéresse voir aussi cet article très bien fait de Césarine sur la césarienne de convenance). Ceci dit, il ne faut pas non plus être dogmatique, et respecter la détresse et l’angoisse des femmes qui ne peuvent surmonter cette peur (ou pas dans les délais de l’accouchement). De toute façon, si la tokophobie est trop importante, elle peut suffire à bloquer le processus de l’accouchement et conduire à une césarienne en urgence.

Personnellement je dois dire que j’ai longtemps trouvé l’accouchement terrifiant, et qu’au début de la grossesse du Poussin je n’en menais pas large (Ste Péridurale priez pour moi). Je trouve d’ailleurs que c’est un des tests pour savoir si on est prêt à avoir un bébé : être capable d’écouter un récit d’accouchement sanguinolant/de nuits épouvantables depuis 6 mois/de gastro explosive et d’avoir toujours envie d’un petit bout. Finalement, entre diverses lectures, les cours de préparation à l’accouchement, la visite de la maternité, des témoignages positifs d’amies ayant accouché dans ladite maternité, et probablement aussi l’influence des hormones et du SNU (syndrome du neurone unique, une complication fréquente de la grossesse…) combinés (avec un soupçon de méthode Coué ?), je suis arrivée à peu près rassérénée pour l’accouchement. Pour cette deuxième naissance qui se profile, je dois dire que le fait d’avoir déjà accouché par voie basse sans instruments me donne une certaine confiance en mon corps, d’autant plus que la deuxième naissance est censée être plus facile que la première. Le fait d’avoir aussi un projet bien ficelé, avec l‘accompagnement global et une bonne préparation, y contribue également. Et n’oublions pas la merveilleuse combinaison hormones-SNU. On verra dans trois mois… Ce petit topo « ma vie mon œuvre » n’est pas pour m’ériger en modèle à suivre (à moins que je ne lance une secte ? l’argent est un souci qui te retient… la Poule te débarrasse de tous tes soucis…) mais pour que celles qui seraient dans ma situation initiale sachent que ce n’est pas inéluctable.

Pour finir, je vous laisse sur cet extrait de Cette lumière d’où vient l’enfant de Frédérick Leboyer (je rappelle qu’il est obstétricien, né en 1918, et donc qu’il a du commencer la médecine dans les années 40, à une époque où la mortalité périnatale était encore loin d’être au niveau actuel).

– Quant à l’accouchement, ce ne sont pas les risques qui vous troublent. C’est la peur.

– La peur des risques ?

– Ah ! non, c’est là qu’est votre erreur. C’est là la confusion. Vous avez peur. Mais certes pas d’hémorragies, d’infections, de possibles quoique rares complications dont, au reste, vous ne savez rien.

– Je ne suis pas médecin.

– C’est votre chance. Une fois encore, pensez aux ennuis et ils arrivent.

– Mais alors, de quoi ai-je peur ?

– De tout et de rien. Vous avez peur. Un point c’est tout. Et vous vous mettez à projeter cette peur partout. Suivez-moi bien. Vous allez au cinéma et l’o vous montre un film d’épouvante. Si le film est bien fait, à mesure que les images défilent, la peur monte en vous. […]

– Cela m’est arrivé la semaine dernière, oh ! quel film ! Pendant trois nuits je n’ai pu dormir. […] Et je n’osais plus aller, le soir, dans la resserre.

– Qu’y a-t-il, dans la resserre, qui vous fasse trembler ?

– Des araignées.

– Qui, sortant du noir, vont se jeter sur vous et vous dévorer ?

– Oui, je sais, c’est stupide. Mais qu’y faire ?

– Non, ce n’est pas stupide puisque c’est. Donc, voici la peur imaginaire : vous savez bien que ces petites bêtes sont inoffensives. […] Elles n’ont pas plus d’existence que les images sur l’écran. Lesquelles, tout images qu’elles soient, vous ôtent le sommeil et ruinent votre estomac.

– Je vois.

– Or, il existe une autre peur qu’on pourrait appeler réelle : le feu peut prendre dans le cinéma. La pellicule est très inflammable. Un incendie peut détruire le bâtiment. Et votre vie. De cela, avez-vous souci ?

– Je n’y songe même pas.

– Quand vous allez au cinéma, vous n’allez pas, j’imagine, vous asseoir tout près de la sortie de secours au cas où…

– Je me mets au beau milieu de la salle.

– Face à l’écran. Pour bien voir. Au mépris de toute prudence ! Car si le feu prenait…

– Je m’en moque bien.

– Et vous avez raison. Donc, il existe deux sortes de peur, l’une réelle, l’autre imaginaire. L’une rationnelle, raisonnable, l’autre folle. Et vous voyez que, des deux, c’est la folle qui a le plus d’emprise sur votre vie.

– Quelle folie !

– Oui. Mais c’est ainsi. Or, il en va très exactement de même pour l’accouchement. Ces hémorragies, ces infections qui sont aussi réelles et rares que l’incendie au cinéma, vous vous en souciez comme d’une guigne.  Vous ne les connaissez même pas.

– Et de quoi donc ai-je peur ?

– D’aller dans la resserre. Vous avez peur des araignées. Cette peur, toute imaginaire qu’elle soit, est, pour vous, bien réelle. […] Pour combattre les effets de cette peur, que fait-on ? On construit des hôpitaux. Sans cesse plus grands, plus équipés, plus compliqués et plus ruineux. Lesquels, vous me l’accorderez, auront bien du mal à vous défendre des araignées.

(Image : faut-il vraiment présenter Munch ?)