Avant j’avais des principes, maintenant j’ai des enfants


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Etre parent aujourd’hui

Par  • Le 22 avril 2009 à 7:57 • Catégorie : J'avoue, Réfléchir

brainy (en France ou dans un pays occidental)

Être parent aujourd’hui, c’est n’avoir jamais été aussi près du « Un enfant si je veux, quand je veux. » C’est avoir le taux de mortalité infantile et maternelle le plus bas connu par l’humanité : perdre un enfant est devenu exceptionnel. C’est disposer d’un niveau de connaissance encyclopédique sur l’enfant, son développement, sa psychologie… C’est (en théorie) pouvoir le confier à du personnel qualifié à un coût acceptable.

Mais…

Être parent aujourd’hui, c’est souvent l’occasion d’une première rencontre de près avec un bébé. Qui avait déjà changé une couche, donné un bain ? Qui avait déjà vécu (en tant qu’adulte ou adolescent) sous le même toit qu’un nouveau-né ? Nous n’avons plus de neveux, cousins, frères, voisins, etc sur lesquels nous faire la main. Notre principale source de connaissance du bébé provient des médias, où des femmes au physique parfait accouchent en 5 minutes d’un bébé de 6 mois tout propre sans cordon ombilical pendant que des médecins leur hurlent « Pousseeeeeeeeeez ! ». Pour beaucoup d’entre nous, le bébé est un parfait inconnu dont la moindre déviation du Laurence Pernoud nous plonge dans une perplexité qui vire rapidement à la panique.

C’est manquer de repères, de soutien : notre société étant centrée sur la famille nucléaire, notre famille plus large n’est pas toujours proche géographiquement et nous ne connaissons pas nos voisins. Les parents au foyer sont plus facilement isolés, restant 24 h sur 24 seuls ou presque avec des tout petits, alors que c’est très difficile. Nous sommes en plein changement de paradigme par rapport à la vision de l’enfant inculquée à nos parents et grands-parents, ce qui rend leur aide parfois impossible et souvent difficile. Comment concilier les informations contradictoires et démêler les conseils utiles des interférences nuisibles ?

Nous sommes ensevelis sous les informations alarmistes, échaudés par les derniers scandales sanitaires (amiante et sang contaminé pour ne pas les citer). Comment trouver un matelas bio ? Des biberons sans BPA ? Le gras trans ? L’huile de palme ? Les cosmétiques ? Les produits laitiers ? Quels vaccins ?

Et surtout nous avons la pression. Les dernières avancées de la psychologie, même s’il n’est pas ici question de réfuter leur pertinence et leur intérêt, sous-entendent que les parents (et surtout la mère) sont responsables (mais pas coupables ?) de tous les maux de leurs enfants. Aussi odieux que puissent être les comportements des enfants, ils trouvent tous leur origine dans un problème de l’adulte. Et tant que vous n’aurez pas affronté et réglé votre traumatisme originel, vous subirez la double peine : supporter un enfant au comportement problématique et votre problème à vous, avec en bonus la culpabilité de ne pas en avoir trouvé la clé.

Votre enfant se réveille la nuit ? Votre faute. Votre enfant fait des cauchemars ? Votre faute. Votre enfant a tapé sa copine de crèche ? Votre faute. Votre enfant se roule par terre dans le magasin ? Votre faute. Votre enfant n’a pas dit bonjour à Mamie ? Votre faute. Et ça vaut aussi pour sa santé physique : c’est vous qui lui avez donné de la courgette avant la carotte, pourquoi croyez-vous qu’il soit allergique aux acariens maintenant ? Vous l’avez laissé manger des Haribos ? Ne venez pas vous plaindre qu’il soit hyperactif, avec tous ces colorants et ce sucre. Il est trop gros ? Votre faute. Trop maigre ? Votre faute.

Même les experts auto-proclamés qui passent habituellement leur temps à se chamailler à l’antenne ou dans les magazines pour vendre leur prose sont unanimes : que ce soit parce que vous avez été trop ferme ou pas assez, c’est vous qui avez rendu cet enfant infernal (notez que ce sont également eux qui ont fixé des normes de comportement pour votre enfant qui semblent prévues plutôt pour la reine d’Angleterre que pour un enfant de 3 ans). Vous n’avez pas allaité ? C’est mal. Vous allaitez encore ? C’est mal aussi. Vous reprenez le travail ? Mère indigne. Vous restez à la maison ? Mère castratrice. Et maintenant vous culpabilisez ? Mais arrêtez il va en avoir de l’eczéma le pauvre petit.

Comme le rappelle si bien Hillary Clinton : Il faut tout un village pour élever un enfant. Alors chers experts, chers donneurs de leçon, chers moralisateurs et autres culpabilisateurs : au boulot ! Pas la peine de venir changer des couches ou jouer les Super Nanny, merci bien (quoi que si vous voulez faire un peu de ménage faut pas se gêner), mais bougez-vous pour que la société nous donne les moyens de vos belles ambitions. C’est bien beau de prôner l’importance du lien parent-enfant et de l’autre côté rendre les enfants indésirables dans de nombreux endroits. C’est bien beau de clamer partout qu’il faut allaiter si en même temps on saborde consciencieusement les efforts des mères pour le faire (sur ce sujet un article intéressant ici). C’est bien beau de dire aux parents de rétablir leur autorité sans utiliser les méthodes d’antan et sans leur donner de nouvelles pistes. Et je suis sûre que vous trouverez plein d’autres exemples. Alors oui, un enfant a généralement deux parents, qui sont prêts à prendre leurs responsabilités, mais il a aussi une famille, des amis, des voisins, des profs, des élus, une communauté religieuse, un médecin, bref il fait partie d’une société. Cette société n’a pas à remplacer les parents (sauf en cas de problème), ni à les culpabiliser à tort et à travers, mais tout simplement à les soutenir. Et on peut déjà s’y mettre nous-mêmes…

(Image : http://www.smurf.com/smurf.php/www/who/fr/brainy)

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