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La lune en moi

Par  • Le 16 mars 2009 à 7:39 • Catégorie : Etre femme

lune L’internet des femmes ne parle plus que du dernier documentaire diffusé par Arte : La lune en moi. Rien que dans la basse-cour, deux lectrices ont attiré mon attention dessus, Isabelle95 et Mariette. Grâce à la magie d’internet, j’ai pu voir le film sur le site d’Arte mais malheureusement ça n’est plus possible.

Donc : un documentaire très bien, pour nous aider à comprendre les règles, mais aussi la perception qu’on en a et l’intérêt qu’elles pourraient avoir (ou pas). Quelques informations intéressantes à retenir :

  • Les règles qu’on a sous pilule (ou toute autre contraception hormonale comme patch, implant, anneau, ou encore un certain nombre de stérilets*, comme le Mirena) ne sont pas des vraies règles. Pour en savoir plus je vous recommande ce très bon article de Martin Winckler.
  • Un certain nombre de solutions (autres que « prendre des antalgiques ») est proposé au problème des règles douloureuses : faire de la danse orientale, avoir un orgasme (avec ou sans assistance…), pratiquer le tai chi, mais aussi faire la part de son histoire familiale et de son propre stress, s’impliquer dans un groupe de femmes, etc
  • Quant au fameux syndrome prémenstruel, une des intervenantes suggère de le voir comme une occasion de se recentrer et de prendre du temps pour soi, comme un mécanisme d’auto-protection.
  • Je passe sur les superstitions épouvantables attachées aux règles (un homme explique très sérieusement qu’une femme ayant ses règles qui touche un nouveau-né lui communique une terrible maladie qui va le conduire à la mort… sait-il que la mère du nouveau-né perd au moins autant de sang qu’une femme qui a ses règles ??) ; j’avoue que je trouve même les superstitions moins dramatiques (comme de traîner en luge les femmes ayant leurs règles pour fertiliser la terre) pas très sympathiques non plus (j’aime pas trop les superstitions tout court je crois). Ceci dit il me semble que ç’aurait été une bonne occasion d’en réfuter un certain nombre, explications à la clé, puisqu’elles sont encore si répandues. De façon générale, un certain nombre de choses (comme la coupe menstruelle) sont à peine abordées ou suggérées alors qu’on aimerait en savoir un peu plus.
  • Les règles ont souvent été utilisées comme excuse pour éloigner les femmes du monde du travail, puisqu’elles seraient rendues inaptes presque une semaine par mois. Il est intéressant de noter que pendant la deuxième guerre mondiale, lorsque les hommes étaient au front les Etats-Unis ont soudainement trouvé plein d’études montrant que les femmes étaient au moins aussi aptes que les hommes à aller à l’usine, études qui ont mystérieusement disparu une fois les hommes revenus au pays. Et finalement il semblerait que les hommes aient autant de sautes d’humeur que les femmes, la différence étant que les femmes elles savent quand les leurs vont se concentrer.

Le film insiste aussi pas mal sur le tabou autour des règles : ne pas en parler, ne jamais dire qu’on les a. Cela m’a fait penser à l’excellent livre de Sarah Blaffer Hrdy, Les instincts maternels (j’en ai parlé ici). En effet, elle explique que la femme, par rapport aux femelles d’autres mammifères (et notamment des singes), a une ovulation cachée. Pas de chaleurs, pas de fesses rouges ou autres signaux sympathiques. Ainsi l’homme ne peut pas savoir si le coït a des chances d’être fructueux ou pas. Si la femme fréquente plusieurs hommes, c’est elle qui détient l’information cruciale de la paternité : un pouvoir loin d’être négligeable, qui peut (selon l’organisation sociale) lui permettre de solliciter plusieurs pères potentiels pour l’aider avec sa progéniture. La plupart des coutumes visant à stigmatiser d’une façon ou d’une autre les femmes ayant leurs règles sont donc un moyen pour les hommes de les priver de ce pouvoir. Vous n’êtes pas sans savoir qu’à partir des règles on peut calculer la date d’ovulation, même si c’est loin d’être une science exacte, n’en déplaise à Monsieur Ogino. J’en profite pour rappeler à ceux qui l’ignoreraient (moi-même je ne le sais pas depuis très longtemps) qu’autant la période entre les règles et l’ovulation peut être variable d’une femme à l’autre (et d’un cycle à l’autre), autant la période entre l’ovulation et les règles elle est environ à deux semaines dans la plupart des cas. En effet, c’est l’ovulation qui provoque les règles et non l’inverse. Donc de ce côté-là, je dirais que bien sûr il faut briser le tabou et permettre notamment aux adolescentes d’aborder aussi sereinement que possible leurs premières règles, mais combattre ces coutumes archaïques pour qu’il revienne à chacune de décider si elle a envie d’en parler ou pas. Il me semble que cela relève principalement de l’intime.

Alors maintenant que les hormones artificielles nous donnent les moyens de nous débarrasser des règles, ou au moins de les contrôler largement, faut-il les voir comme une joie ou comme une malédiction ? Sont-elles un anachronisme évolutif ou au contraire ont-elles un rôle important ? La communauté scientifique n’est pas vraiment unanime, et surtout il semblerait qu’elle s’en foute un peu. Une chercheuse assez iconoclaste, Margie Profet, propose que les règles sont un mécanisme de lutte contre les infections de l’utérus et des trompes de Fallope (infections principalement propagées par les petits tétards de Monsieur). Le débat est assez bien résumé sur cette page, même si on sent assez bien quelle thèse est privilégiée par l’auteur. Personnellement, je suis surtout pour plus d’information, plus de recherche, plus d’alternatives (médicales et autres). Et plus de respect pour les femmes et leurs corps. La seule chose dont je suis à peu près certaine, c’est qu’il n’y a pas de solution unique qui conviendrait à toutes les femmes.

Quelques lectures supplémentaires si le sujet vous intéresse :

Quant au film, il sera rediffusé mercredi 18 mars 2009 à à 3h (du matin) et vendredi 27 mars 2009 à 1h25 (toujours du matin) sur Arte.

*qu’on appelle maintenant DIU comme dispositifs intra-utérins ou SIU (systèmes intra-utérins)

(Photo : Flickr)

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